Zusammenfassung des Urteils Jug/2009/46: Kantonsgericht
Die Eheleute B.P. und A.P. haben sich 1970 geheiratet. Nach ihrer Scheidung im Jahr 1998 wurde die Aufteilung ihres Vermögens, insbesondere eines landwirtschaftlichen Betriebs, diskutiert. Es wurde festgestellt, dass die Ehefrau einen Anspruch auf Gewinnbeteiligung aus dem Verkauf des Betriebs hat, da dieser nach der Scheidung zu einem höheren Preis verkauft wurde. Nach einer eingehenden Analyse der finanziellen Situation wurde entschieden, dass die Ehefrau einen Betrag von 225'686 CHF zuzüglich Zinsen erhalten sollte. Der Richter legte auch fest, dass die Kosten des Verfahrens teilweise vom Ehemann zu tragen sind. Der Richter, Herr Bosshard, hat das Urteil am 15. September 2009 verkündet. Das Urteil kann innerhalb von zehn Tagen angefochten werden.
Kanton: | VD |
Fallnummer: | Jug/2009/46 |
Instanz: | Kantonsgericht |
Abteilung: | Zivilkammer |
Datum: | 15.09.2009 |
Rechtskraft: | - |
Leitsatz/Stichwort: | - |
Schlagwörter : | éfendeur; égime; Immeuble; époux; Expert; Exploitation; énéfice; ération; Expertise; écembre; Deschenaux/Steinauer/Baddeley; Attribution; énation; érieur; éduction; Union; écompense; écaire; Aliénation; Entreprise; éterminant; épens; Cette; égal; ésent |
Rechtsnorm: | Art. 100 BGG;Art. 11 LD;Art. 181 ZGB;Art. 206 ZGB;Art. 207s ZGB;Art. 209 ZGB;Art. 212 ZGB;Art. 213 ZGB;Art. 215 ZGB;Art. 216 ZGB;Art. 28 LD;Art. 29 LD;Art. 31 LD;Art. 620 ZGB;Art. 7 LD;Art. 92 ZPO; |
Referenz BGE: | - |
Kommentar: | - |
TRIBUNAL CANTONAL | CO06.035905 130/2009/PMR |
COUR CIVILE
___
Audience de jugement du 26 août 2009
___
Présidence de M. Bosshard, président
Juges : MM. Muller et Hack
Greffier : M. Peissard
*****
Cause pendante entre :
B.P.__ | (Me J. Ballenegger) |
et
A.P.__ | (Me J.-C. Diserens) |
- Du même jour -
Délibérant immédiatement à huis clos, la Cour civile considère :
En fait:
1. La demanderesse B.P.__ et le défendeur A.P.__ se sont mariés le 5 juin 1970 à [...].
2. Au mois de novembre 1977, le défendeur a reçu la parcelle n° 941 de la Commune de [...], sise à [...], en donation de son père à titre d'avancement d'hoirie. Cet immeuble était destiné à une exploitation viticole et a fait partie du domaine exploité par la demanderesse et le défendeur.
Il n'est pas établi que la demanderesse ait eu pendant l'union conjugale une activité lucrative propre importante, ni qu'elle ait disposé au moment du mariage d'une fortune personnelle. Le rapport principal du notaire Christian Terrier, désigné comme expert dans le procès en divorce des parties, n'indique pas qu'elle ait participé au financement de la construction de l'habitation et des locaux d'exploitation agricole sis sur la parcelle n° 941 de [...].
3. a) Les parties ont entamé une procédure de divorce au mois de mars 1990. Le jugement de divorce, rendu le 6 mai 1998, retient notamment ce qui suit à propos de la vie commune des parties et des principes devant régir la liquidation du régime matrimonial :
"(…)
Durant la vie commune, les deux époux s'occupaient de la vente du vin, mais A.P.__ avait assez peu de compétence et d'intérêt pour cette activité, de sorte qu'il s'en est assez souvent remis pour cela à sa femme. Il est par ailleurs arrivé au défendeur (réd. : A.P.__) de laisser la demanderesse (réd. : B.P.__) et un employé travailler à la vigne après qu'il leur ait montré ce qu'il fallait faire, parce qu'il avait mal au dos. L'activité qu'B.P.__ a déployée dans le cadre de l'exploitation a ainsi dépassé ce que l'on peut attendre usuellement d'une épouse de vigneron dans une situation comparable, c'est-à-dire ayant des enfants et un ménage à tenir.
(…)
(…) En cours de procédure, Me Christian Terrier a été désigné en qualité d'expert, aux fins de liquider le régime matrimonial des époux, ainsi que de déterminer les revenus du défendeur.
(…) Le notaire a déposé un premier rapport daté du 27 octobre 1992.
(…)
Me Terrier précise qu'il conviendrait de calculer séparément le bénéfice des époux, en vertu des art. 207ss CC. Toutefois, comme chaque conjoint a droit à une moitié du bénéfice de l'autre, soit finalement à la moitié du bénéfice global, le notaire ne procède à aucune distinction entre les acquêts de l'un et de l'autre, et considère que ceux-ci ne forme qu'une seule et unique masse.
(…)"
Ce jugement considère ce qui suit s'agissant de la parcelle n° 941 à [...] :
"(…)
En 1977-1978, une habitation avec locaux d'exploitation viticole y a été construite pour un coût total que les parties situent entre Fr. 650'000.et Fr. 700'000.-, y compris un couvert ajouté en 1981. Au 6 mars 1990, cette parcelle était grevée d'une dette de Fr. 561'000.-. Après avoir relevé que le Crédit Foncier a attribué, dans un rapport d'expertise du 5 juin 1989, une valeur de Fr. 1'200'000.- à ladite parcelle, le notaire (réd. : Me Terrier, intervenu en qualité d'expert) écrit ceci :
« Le terrain proprement dit ayant été reçu à titre gratuit par A.P.__, il faisait partie de ses biens propres.
Normalement, l'immeuble dans son ensemble devrait toujours être considéré comme un propre du mari, les acquêts ayant droit à une récompense variable pour leur contribution à la construction de l'habitation (art. 209 CC). Vu les problèmes que soulèverait le calcul de cette récompense variable (pour calculer la participation à la plus-value, il faudrait notamment connaître la valeur du terrain à l'époque de la construction), nous avons proposé de considérer le terrain et la construction comme deux biens distincts. Les parties n'ont formulé aucune objection à ce sujet.
Si, dans ce cas, le terrain fait toujours partie des propres du mari, la construction doit être attribuée aux acquêts, car elle n'a pas été acquise à titre gratuit.
L'expertise du Crédit Foncier Vaudois admet une valeur de Fr. 338'000.pour le terrain. (…)
Quant à la valeur de la construction (y compris les aménagements extérieurs), elle est fixée à Fr. 862'000.- (…). Compte tenu d'un prix de revient de quelque Fr. 700'000.-, il y a une charge latente d'impôt sur le gain immobilier de quelque Fr. 30'000.-, à laquelle s'ajouterait celle de la commission de courtage. On pourrait ainsi retenir une valeur nette de Fr. 800'000.-.
Enfin, la dette hypothécaire de Fr. 561'000.revient également aux acquêts.»"
b) Le rapport principal d'expertise du 27 octobre 1992 du notaire Christian Terrier, toujours à propos de la parcelle n° 941 de [...], indiquait en outre notamment ce qui suit :
"(…)
La construction [réd. : de l'habitation et des locaux d'exploitation viticole] a été financée par un emprunt hypothécaire en 1er rang sur l'immeuble, de Fr. 450'000.auprès du Crédit Suisse, ainsi que par un autre emprunt hypothécaire, auprès de l'Union de Banques Suisses, de Fr. 100'000.-, en 1er rang sur la parcelle 924 de [...] (…). Le solde du prix de revient était apparemment constitué de fonds propres et de fonds prélevés sur compte courant de l'exploitation de A.P.__.
(…)"
Ce rapport retient également que la parcelle n° 941 de [...] valait 1'200'000 fr. et que la valeur nette du bâtiment était de 800'000 francs. Selon une expertise du Crédit Foncier Vaudois citée en page 4 de ce rapport, la valeur vénale du terrain était de 338'000 francs.
c) Selon une lettre adressée le 25 juin 1993 par le notaire Christian Terrier aux avocats [...] et [...], "une très large part des économies réalisées par les parties ont été investies dans ces biens immobiliers". Ce courrier poursuit en ces termes :
"(…)
Enfin, il y a lieu de prendre en considération l'indemnité que B.P.__ fait valoir pour le travail qu'elle a accompli dans le cadre de l'exploitation viticole de son mari pendant une vingtaine d'années, indemnité qu'elle chiffre à Fr. 300'000.-.
Cette question était examinée dans le cadre du chiffre 4.12 de mon rapport d'expertise. Je parvenais à la conclusion que l'indemnité réclamée par B.P.__ était comprise dans sa part légale au bénéfice de l'union conjugale. Celui-ci paraissait en effet suffisamment important pour exclure d'autres prétentions de l'épouse.
Il ne fait aucun doute que ce bénéfice se trouverait annulé complètement, ou à tout le moins réduit dans une large mesure, au cas où les biens immobiliers de [...] devraient être estimés à la valeur de rendement. Les prétentions de B.P.__ ne pourraient plus être ignorées.
Dans l'hypothèse où, sur la base de l'art. 213 CC, on prendrait en considération le prix de revient des immeubles de [...], le bénéfice se trouverait diminué d'une centaine de milliers de francs et la créance de B.P.__ (Fr. 186'000.selon le chiffre 5 de mon rapport) serait inférieure à Fr. 150'000.-, soit moins de la moitié du montant réclamé par l'épouse.
* * *
L'aide apportée par B.P.__ à son mari me paraissait être de nature à justifier que l'on retienne les immeubles de [...] pour leur valeur vénale, raison pour laquelle je n'avais pas jugé opportun d'évoquer la question de la valeur de rendement.
Compte tenu du fait que A.P.__ ne serait probablement pas en mesure, en tout cas dans la conjoncture actuelle, de réunir immédiatement la somme qui serait due à son épouse, c'est, à mon sens, sur le plan des modalités de paiement qu'il y aurait lieu de faire porter la discussion.
Il va sans dire qu'il s'agit là d'une appréciation personnelle et que la question devrait, si nécessaire, être tranchée par le Tribunal.
(…)"
Un rapport d'expertise Prométerre du 9 juillet 1996, communiqué à l'expert, arrête la valeur vénale de la parcelle n° 941 de [...] à 793'950 francs.
d) Sur la question de l'évaluation de l'immeuble litigieux, le jugement de divorce a suivi le complément d'expertise du notaire du 14 janvier 1997, qu'il retient comme il suit :
"(…)
Le notaire a (…) examiné si et dans quelle mesure les immeubles de [...] sont des éléments constitutifs d'une entreprise agricole. A cet égard, le rapport mentionne ceci :
« On peut admettre d'emblée que l'exploitation viticole de A.P.__ constitue, comme telle une "entreprise agricole" au sens de l'art. 212 CC ou une "exploitation agricole" selon l'art. 620 CC, ces deux notions se confondant (…).
Le principal problème est celui de savoir si la parcelle 941 (…) forme une partie intégrante de l'exploitation viticole.
(…)
(…) Au regard de ce qui précède, on devrait pouvoir affirmer que la parcelle 941, qui ne comprend pas d'autres locaux que ceux affectés à l'exploitation viticole et - normalement - à l'habitation de l'exploitant, fait partie d'une entreprise agricole au sens de l'art. 212 CC et que, partant, cet immeuble doit être estimé à la valeur de rendement.
(…) »
Le notaire relève ensuite que dans son rapport du 9 juillet 1996, Prométerre a constaté que le domaine viti-vinicole exploité par A.P.__ constituait bien une entreprise agricole au sens de l'art. 7 LDFR, et que tous les biens immobiliers de A.P.__ comportaient un caractère agricole, y compris la parcelle 941 de [...], ceci malgré le fait que cette parcelle est aujourd'hui louée à des tiers. Prométerre a arrêté la valeur de rendement de la parcelle 941 à Fr. 536'932.- (…).
Me Terrier expose les incidences sur la liquidation du régime matrimonial comme suit :
« (…)
Comme indiqué ci-dessus, la valeur de rendement de la parcelle 941 n'atteint que Fr. 536'932.-. Ce montant est censé inclure la valeur du terrain, qui se rattache aux biens propres de A.P.__. Pour mémoire, le terrain était évalué à Fr. 338'000.- dans l'expertise du Crédit Foncier Vaudois, sur une valeur brute de totale de Fr. 1'200'000.-, ce qui représentait un peu plus d'un quart. En retenant la même proportion, on pourrait ventiler la valeur de rendement à raison de Fr. 136'932.pour les biens propres et de Fr. 400'000.pour les acquêts. Par rapport aux données de 1992, on constate donc une moins-value de Fr. 400'000.pour les acquêts (Fr. 800'000.- - Fr. 400'000.-).
(…) »
(…)
En définitive, le Tribunal se rallie entièrement aux conclusions du complément d'expertise, selon lesquelles le compte des acquêts se solde par un déficit de Fr. 64'000.-, qui incombe entièrement au défendeur."
e) Dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial opérée par le juge du divorce, la parcelle n° 941 de [...] a été attribuée au défendeur, de même que les autres parcelles du domaine viticole. La valeur nette de l'habitation et des locaux d'exploitation viticole (y compris les aménagements extérieurs) a été estimée à 800'000 fr. et la valeur de rendement de l'immeuble à 536'932 francs.
Le calcul final de la première expertise reproduit dans les faits retenus par les juges du divorce constate que la parcelle n° 941 de [...] était grevée d'une dette hypothécaire de 561'000 fr., tandis qu'une attestation de la Banque Cantonale Vaudoise (ci-après : BCV) indique que la charge hypothécaire grevant cet immeuble auprès de cette banque était de 650'000 fr. le 31 décembre 1997.
Le déficit des acquêts du défendeur ne tenait pas compte d'investissements effectués par le défendeur en Argentine. Aucune des parties n'a allégué, dans le cadre de la présente procédure, quelle était la nature ou le détail de ces investissements.
f) Enfin, le tribunal a statué comme il suit sur l'indemnité pour participation de la demanderesse à l'exploitation de son mari :
"(…)
S'agissant du mode de calcul de l'indemnité, le Tribunal se réfère aux considérations du notaire. Il estime que le travail accompli par la demanderesse, qui s'est ajouté aux tâches ménagères et à l'éducation des enfants, a été suffisamment intense pour justifier le versement de l'indemnité maximale de Fr. 60'000.-.
(…)"
4. Le 30 novembre 1993, soit durant la procédure de divorce, le notaire [...] a rédigé un projet d'acte de donation de la parcelle n° 941 de [...], en faveur de [...] et [...]. Cette donation était stipulée non rapportable dans la succession du défendeur et indiquait, à son chiffre 8, que les donataires reprendraient, à l'entière décharge et libération du donateur, la dette du défendeur de 650'000 fr. garantie par le gage immobilier 127'180 grevant le bien-fonds précité et une dette due par A.P.__ à l'Union de Banques Suisses (ci-après : UBS SA) à concurrence de 450'000 fr., l'addition de ces deux montants, par 1'100'000 fr., étant déclarée déterminante au sens de la loi concernant le droit de mutation sur les transferts immobiliers. Au mois de décembre 1993, le demandeur a tenté d'amener la défenderesse à renoncer à son droit de préemption sur la parcelle n° 941 litigieuse. L'opération envisagée dans l'acte ci-dessus n'a en définitive pas eu lieu.
Le but de cette donation était que les époux [...] acquièrent la parcelle n° 941. Toutefois, il fallait une autorisation de la Commission foncière, qui n'aurait pas pu être donnée avant la fin de l'année 1993, et dès le 1er janvier 1994 entrait en vigueur le nouveau droit foncier rural interdisant le partage matériel des exploitations agricoles. Les parties ont donc envisagé un projet de donation avec reprise de la dette de 1'100'000 fr., ce qui revenait en fait à une vente et non à une donation, avec l'accord du Conservateur du Registre foncier de [...], à qui le notaire donataire avait soumis le projet. C'est donc pour éviter les difficultés liées à l'application des dispositions en matière de droit foncier rural qu'il avait été prévu de recourir à l'institution de la donation plutôt qu'à celle de la vente. Il était prévu que le défendeur puisse continuer son exploitation viticole pendant 10 ans, dont 5 gratuitement; le fait de payer les dettes hypothécaires du défendeur et de lui permettre la poursuite de son exploitation aurait libéré le défendeur de la plupart de ses problèmes financiers.
Le donataire [...] était l'associé du notaire [...] et n'a, de même que son épouse, aucun rapport de famille avec le défendeur.
5. Par contrat de vente à terme notarié Ryvier Charmey du 14 décembre 2001, le défendeur a vendu la parcelle n° 941 de [...] aux époux [...] pour le prix de 1'350'000 francs. La réquisition de transfert a été établie le 28 mars 2002 et l'inscription effectuée au Registre foncier le 2 avril 2002. L'avis d'aliénation de cet immeuble a paru dans la Feuille des avis officiels du 7 mai 2002.
Le notaire Ryvier Charmey a retenu 5 % du prix de vente en garantie du paiement de l'impôt sur les gains immobiliers et a transféré au défendeur le solde, par 1'282'500 fr., le 2 avril 2002.
Le même jour, le compte sur lequel ce montant avait été viré a été débité du montant de 652'148 fr. 60 en remboursement du crédit hypothécaire de la BCV relatif à la parcelle 941 de [...]. Les 3 et 17 avril 2002, le défendeur a fait virer par le débit du même compte les sommes respectives de 524'272 fr. 35 et 3'320 fr. 65 à UBS SA en remboursement d'une hypothèque contractée auprès de cet établissement.
6. Par courrier du 17 novembre 2006, le conseil de la demanderesse s'est adressé au défendeur au sujet du droit au gain de sa cliente.
7. Par demande du 7 décembre 2006, la demanderesse B.P.__ a ouvert action contre le défendeur en prenant la conclusion suivante :
"A.P.__ est débiteur de B.P.__ et lui doit immédiat et prompt paiement de la somme de fr. 470'000.-plus intérêts à 5% l'an dès le 1er avril 2002."
Par réponse du 16 avril 2007, le défendeur A.P.__ a conclu au rejet des conclusions de la demande.
Par dictée au procès-verbal de l'audience préliminaire du 11 juin 2008, la demanderesse a réduit ses conclusions à 300'000 fr., plus intérêt à 5 % l'an dès le 1er avril 2002.
En droit:
I. La demanderesse prétend à un droit au gain à la suite de la vente au prix du marché, par le défendeur, d'une entreprise agricole qui avait été prise en compte à sa valeur de rendement lors de la liquidation du régime matrimonial dans le cadre du divorce des parties.
a) L'art. 181 CC (Code civil suisse; RS 210) prévoit que les époux qui n'ont pas adopté un autre régime matrimonial sont soumis au régime ordinaire de la participation aux acquêts. Cette disposition est entrée en vigueur le 1er janvier 1988 (RO 1986 I 122 ss et 153). Précédemment, le régime légal ordinaire était celui de l'union des biens (Deschenaux/Steinauer/Baddeley, Les effets du mariage, 2e éd., n. 896, p. 422). L'art. 9d Tit. fin. CC règle la transition entre les deux régimes en ce sens que la liquidation se fait entre les époux pour toute la durée de l'ancien et du nouveau régime ordinaire selon les règles du nouveau régime ordinaire, soit la participation aux acquêts, sous la réserve que chaque époux pouvait, avant l'entrée en vigueur de la modification, signifier par écrit à son conjoint que leur régime serait liquidé conformément à l'ancienne loi.
Les parties se sont mariées avant l'entrée en vigueur du nouveau régime. Elles n'ont pas allégué avoir contractuellement dérogé au régime ordinaire, ni s'être signifié en temps utile que la liquidation devrait avoir lieu selon le régime ordinaire de l'union des biens précédant le 1er janvier 1988. La liquidation de leur régime matrimonial lors du divorce était donc soumise à la participation aux acquêts. Ce point n'est d'ailleurs pas contesté.
b) Les art. 212 et 213 CC, systématiquement rattachés à la liquidation du régime de la participation aux acquêts (Deschenaux/Steinauer/Baddeley, op. cit., n. 1411, pp. 649-650), prévoient des règles particulières d'estimation des entreprises agricoles, à titre d'exception au principe de la valeur vénale prévu à l'art. 211 CC, lorsqu'il y a lieu de liquider le régime matrimonial de personnes exploitant personnellement leur domaine (Jacques Micheli et alii, Le nouveau droit du divorce, n. 523). Ainsi, selon l'art. 212 al. 1 CC, lorsque l'époux propriétaire d'une entreprise agricole continue de l'exploiter personnellement ou lorsque le conjoint survivant ou un descendant est en droit d'exiger qu'elle lui soit attribuée entièrement, la part à la plus-value et la créance de participation se calculent sur la base de la valeur de rendement. Aux termes de l'art. 212 al. 3 CC, les dispositions du droit successoral sur l’estimation et sur la part des cohéritiers au gain sont applicables par analogie.
Ce renvoi signifie que, dans les cas où une entreprise a été estimée lors de la liquidation du régime à la valeur de rendement ou à une valeur supérieure à celle-ci, mais inférieure à la valeur vénale, l'ex-conjoint ou ses héritiers ont droit, lorsque l'entreprise est ultérieurement vendue à un prix plus élevé, à une part au gain que réalise le reprenant. Les règles figurant aux art. 28 ss LDFR (loi fédérale du 4 octobre 1991 sur le droit foncier rural – RS 211.412.11) s'appliquent par analogie (TF 5C.203/2004 du 22 avril 2005 c. 3.5.2; Deschenaux/Steinauer/Baddeley, op. cit., n. 1436, p. 664).
Le droit au gain, tant en matière successorale qu'en matière matrimoniale, n'existe que si l'aliénation a lieu dans les 25 ans qui suivent "l'acquisition" par l'attributaire originaire de l'immeuble ou de l'entreprise agricole (art. 28 al. 3 LDFR; Deschenaux/Steinauer/Baddeley, op. cit., n. 1439, p. 665). Ce délai de 25 ans commence à courir dès la reprise de l'immeuble par l'attributaire dans une succession, ce qui équivaut à l'attribution dans la liquidation du régime matrimonial (Henny, in Bandli et alii, Le droit foncier rural, Commentaire de la loi fédérale sur le droit foncier rural du 4 octobre 1991, n. 10 ad art. 28 LDFR; Deschenaux/Steinauer/Baddeley, op. cit., n. 1439, p. 665 et les références citées à la note infrapaginale n. 42). L'art. 29 LDFR indique que, par aliénation, il faut entendre l'affectation à un usage non agricole, le classement dans une zone à bâtir, l'expropriation, la vente ou tout acte juridique ayant le caractère économique d'une vente. En cas de vente, la date déterminante est celle de la conclusion du contrat par lequel l'aliénateur s'oblige à transférer la propriété, à savoir le moment de la signature de l'acte authentique, et non pas le jour la réquisition de transfert au Registre foncier ou de l'inscription du nouveau propriétaire au cadastre (Henny, op. cit., n. 24 ad art. 29 LDFR).
En l'espèce, le jugement de divorce du 6 mai 1998 a retenu que le défendeur exploitait une entreprise agricole et lui a attribué l'immeuble n° 941 de [...], en prenant en considération ce bien à sa valeur de rendement dans la liquidation du régime matrimonial. L'immeuble n° 941 de [...] a ensuite été vendu aux époux [...] pour un prix supérieur par contrat de vente à terme instrumenté le 14 décembre 2001, soit dans le délai légal de 25 ans après l'attribution de ce bien au défendeur par jugement de divorce du 6 mai 1998. Les conditions du droit au gain posées par les art. 212 al. 1 et 3 CC et 28 ss LDFR sont ainsi remplies.
La part au gain de caractère matrimonial ne consiste cependant pas, comme en droit successoral, en une fraction déterminable d'avance du gain net réalisé par l'aliénateur. Pour arrêter cette part, il faut calculer dans chaque cas quelle a été l'influence de l'attribution à la valeur de rendement sur la créance de l'ayant droit lors de la liquidation du régime (Deschenaux/Steinauer/Baddeley, op. cit., n. 1445, p. 667).
Cela suppose donc deux étapes, la première consistant à déterminer le gain déterminant selon les règles de la LDFR (ch. II. ci-dessous; cf. également Deschenaux/Steinauer/Baddeley, op. cit., n. 1422, p. 665) et la seconde consacrée au décompte de la part de l'ex-conjoint sur ce gain, en tenant compte du calcul déjà opéré lors de la dissolution du régime matrimonial.
II. a) Le gain au sens du droit foncier rural équivaut à la différence entre le prix d'aliénation et la valeur d'imputation. Cela signifie donc, dans la majorité des cas, qu'il se rapporte à la différence entre la valeur de rendement et le prix de vente (art. 31 al. 1 LDFR); la loi apporte cependant certaines précisions et permet des déductions (Henny, Le droit des cohéritiers au gain des articles 28 et ss de la loi sur le droit foncier rural, in Revue Suisse du Notariat et du Registre foncier [ZBGR/RNRF] 1995, pp. 137 ss, spéc. p. 141; Henny, in Bandli et alii, op. cit., nn. 5 et 9 ad art. 31 LDFR).
L'art. 31 al. 4 LDFR prévoit une déduction destinée à éviter que l'attributaire originaire de l'immeuble doive supporter seul les conséquences de la dépréciation de la monnaie. Il ne serait en effet pas équitable que l'ayant droit au gain profite d'une part plus élevée, en raison de l'inflation, lorsque le prix de vente de l'immeuble au moment de l'aliénation est supérieur au prix de vente potentiel au moment de l'attribution (Henny, in Bandli et alii, op. cit., n. 24 ad art. 31 LDFR). Cette réduction pour durée de propriété est d'un taux de deux pour cent par année écoulée entre l'attribution (soit la liquidation du régime matrimonial) et l'aliénation au sens de l'art. 29 LDFR; la déduction s'exerce sur le gain et a lieu pro rata temporis pour les fractions d'année (Deschenaux/Steinauer/Baddeley, op. cit., n. 1443a p. 666 et la note infrapaginale n. 45; Henny, in Bandli et alii, op. cit., n. 25 ad art. 31 LDFR et n. 23 ad art. 29 LDFR).
Le gain déterminant correspond à la différence entre valeur d'aliénation et valeur d'attribution, imputée des déductions autorisées par la loi (Rumo-Jungo, Handkommentar zum Schweizer Privatrecht, n. 14 ad art. 212-213 CC).
Aux termes de l'art. 30 let. a LDFR, le droit au gain est exigible, en cas de vente ou d’expropriation, à l’exigibilité de la contreprestation que le vendeur ou l’exproprié peut réclamer.
b) En l'espèce, il s'est écoulé 3 ans et 218 jours entre l'attribution de l'immeuble, le 6 mai 1998, et l'aliénation de celui-ci, le 14 décembre 2001, en comptant, selon la pratique bancaire, les mois à 30 jours et l'année à 360 jours (soit 24 jours en mai, 14 en décembre et 6 mois à 30 jours).
L'immeuble litigieux à été vendu pour le prix de 1'350'000 fr., dont le défendeur a concrètement touché 1'282'500 fr. le 2 avril 2002, après consignation de l'impôt effectuée par le notaire. C'est ce dernier montant qui doit être retenu comme valeur d'aliénation, la loi ayant pour finalité de replacer les cohéritier dans la situation où ils auraient été sans l'attribution préférentielle (Henny, in RNRF 1995, op. cit., p. 138), donc également sous déduction de l'impôt. La valeur de rendement retenue dans le jugement de divorce étant de 536'932 fr., la différence entre ces deux montants est de 745'568 fr. (1'282'500 - 536'932).
La loi impose d'imputer sur ce montant un pourcentage de 2 % par année pour compenser l'inflation. Comme indiqué ci-dessus, 3 ans et 218 jours se sont écoulés durant la période déterminante, ce qui doit conduire à une déduction de 6 % plus 1.211 % pro rata temporis sur la fraction correspondante de 2001 (218 / 360 x 2), soit 7.211 %. Cette imputation, de 53'762 fr. 90 (745'568 x 7.211 / 100), conduit à admettre un gain déterminant de 691'805 fr. 10 au sens de la LDFR (745'568 - 53'762.90).
III. a) Pour arrêter la part au gain introduite en matière de régimes matrimoniaux par l'art. 212 al. 3 CC, il faut dans chaque espèce remonter à la liquidation du régime prononcée antérieurement et y modifier les parties de cette liquidation qui ont été affectées par l'estimation à la valeur de rendement, en estimant ce bien à cette dernière valeur augmentée du gain déterminant réalisé par l'attributaire (Deschenaux/Steinauer/Baddeley, op. cit., n. 1445, p. 667). Dans cette opération, le reste des valeurs contenues dans le jugement de divorce est simplement repris et ne subit aucune révision dans la procédure de réévaluation de la répartition du gain de l'époux divorcé (TF 5C.203/2004 du 22 avril 2005 c. 3.5.2). La différence entre ce nouveau calcul hypothétique de la liquidation et le calcul effectivement exécuté antérieurement déterminera le montant de la part au gain à attribuer selon l'art. 212 al. 3 CC; la même opération est à effectuer, mutatis mutandis, en matière de récompense entre acquêts et biens propres (Rumo-Jungo, op. cit., n. 14 i.f. ad art. 212-213 CC).
Si l'entreprise est entrée dans le patrimoine d'un époux à sa valeur de rendement, par exemple par succession selon l'art. 11 LDFR, l'époux propriétaire de l'entreprise est déjà débiteur, envers ses cohéritiers, du gain ou d'une part au gain en raison de la manière dont il a acquis l'entreprise. Le gain déterminant en matière matrimoniale est donc, dans cette hypothèse, uniquement ce qui reste à l'aliénateur après déduction du prix d'acquisition et des parts au gain qu'il doit verser à des tiers. Au contraire, si l'entreprise avait été acquise à sa valeur vénale, le conjoint acquéreur n'est pas débiteur, du chef de cette acquisition, d'une quelconque part au gain en faveur d'un tiers. Lors de la liquidation du régime matrimonial, l'entreprise est (pour autant que le propriétaire continue à l'exploiter) prise en compte dans les acquêts à la valeur de rendement. Si elle est vendue par la suite, le conjoint a droit à sa part du gain. Le gain réalisé par le propriétaire doit alors être compté dans sa totalité pour déterminer la part au gain de caractère matrimonial de l'ayant droit, sous réserve des déductions autorisées par la LDFR et aux conditions posées par cette loi (Deschenaux/Steinauer/Baddeley, op. cit., nn. 1443 et 1444, pp. 665-666).
b) En l'espèce, l'immeuble n° 941 de [...] est entré dans le patrimoine du défendeur par succession, soit en donation de son père à titre d'avancement d'hoirie. On devrait dès lors considérer qu'il est entré dans le patrimoine du défendeur à sa valeur de rendement. Mais cela aurait seulement pour effet la prise en considération des autres bénéficiaires du droit au gain, par exemple des cohéritiers. En l'espèce, il n'est pas allégué que le défendeur serait redevable, du fait de l'aliénation de l'immeuble litigieux en 2001, d'un droit au gain envers une autre personne que son ex-conjoint, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'opérer une déduction à ce titre.
Le juge du divorce, suivant en cela les rapports du notaire désigné comme expert, a volontairement procédé à un certain nombre de simplifications dans la liquidation du régime. En effet, à rigueur de loi, il aurait dû procéder à une liquidation en quatre temps, préconisée par la doctrine : dans une première phase, il convient d'estimer les dettes variables entre époux au sens de l'art. 206 CC, aussi bien dans le cas où l'entreprise agricole est un propre que dans celui où elle figure dans les acquêts, puis, dans la deuxième phase, de calculer les récompenses variables entre acquêts et propres des deux masses des époux au sens de l'art. 209 CC, avant d'estimer le montant final, dans une troisième phase, des entreprises agricoles figurant dans les acquêts des époux. Dans ces trois première étapes, la valeur de rendement de l'exploitation joue un rôle essentiel, tandis qu'elle n'a pas d'impact sur la quatrième phase de la liquidation, qui inclut le partage du bénéfice et le règlement des créances entre époux (Deschenaux/Steinauer/Baddeley, op. cit., n. 1442, p. 655).
En ce qui concerne l'immeuble n°941 de [...], les simplifications précitées ont touché essentiellement deux points. Premièrement, les parties ont admis que le terrain, reçu à titre gratuit, constituait un bien propre du défendeur (allégués 3 et 37). En vertu du principe de l'accession (art. 667 et 671 CC), les constructions élevées par la suite sur cette parcelle auraient dû suivre ce statut, l'immeuble devant être considéré entièrement comme un propre du défendeur, et donner lieu à une éventuelle récompense variable (art. 209 CC). Le jugement de divorce admet néanmoins la dissociation entre le terrain attribué aux propres du défendeur et la valeur des constructions sur ce terrain, attribuée aux acquêts. Il n'y a ainsi pas eu de calcul d'une récompense variable entre les deux masses. Dès lors, le terrain ayant été évalué, dans l'expertise du Crédit Foncier Vaudois (reprise par l'expert), à environ un quart (338'000 fr.) de la valeur brute totale de l'ensemble constitué du terrain et du bâtiment (1'200'000 fr.), le juge du divorce a réparti la valeur de rendement, établie par l'expertise de Prométerre à 536'932 fr., à raison de 136'932 fr. pour les biens propres du défendeur et de 400'000 fr. pour les acquêts. En deuxième lieu, les acquêts des deux conjoints ont été groupés, alors qu'il aurait fallu les séparer pour calculer l'éventuel bénéfice de l'union conjugale.
Ces simplifications, admises par les parties à l'époque, ne doivent toutefois pas empêcher le calcul du droit au gain, les valeurs retenues par le juge du divorce n'ayant pas été corrigées, à l'exception de celle du bien litigieux.
Le défendeur reproche au jugement de divorce de n'avoir pas actualisé les éléments pris en compte dans la liquidation, en ce sens que les montants admis, en particulier celui de la dette hypothécaire grevant l'immeuble litigieux, étaient ceux du début de la procédure, alors que le jugement a été rendu près de huit ans plus tard; il faudrait, selon lui, corriger le calcul du divorce dans la présente cause. Il appartenait toutefois au défendeur de faire valoir à l'époque les valeurs actualisées, à tout le moins auprès de l'expert, qui a rendu son complément d'expertise le 14 janvier 1997. Il n'appartient en aucune manière à la cour de céans de revoir l'ensemble du jugement de divorce, qui a autorité de chose jugée. Au surplus, les allégations des parties dans la présente cause ne permettent pas de reconstituer le calcul exact du juge du divorce; on ne sait ainsi pas quel montant a été retenu en définitive au titre de la dette grevant la parcelle litigieuse. Les mêmes considérations valent pour les investissements réalisés en Argentine, prétendument sous-évalués par le juge du divorce selon le défendeur, dont au demeurant aucune des parties n'a allégué le détail ou la nature.
c) La première étape du calcul consiste à réévaluer l'immeuble litigieux au moment de la liquidation. Pour déterminer la valeur qui aurait été la sienne, il faut ajouter le gain déterminant calculé plus haut (ch. II b), par 691'805 fr. 10, à la valeur de rendement effectivement admise à la liquidation, par 536'932 fr., le résultat de cette addition donnant un montant de 1'228'737 fr. 10 (691'805.10 + 536'932).
On doit ensuite attribuer cette nouvelle valeur aux masses matrimoniales dans lesquelles l'immeuble a été compté et établir le bénéfice de l'union conjugale.
On sait que la demanderesse n'a eu aucun revenu propre important durant l'union conjugale, si bien qu'elle n'a pas participé, avec ses acquêts, au financement du bâtiment édifié sur cette parcelle. La demanderesse n'y a pas non plus investi des biens propres; elle ne disposait d'ailleurs d'aucune fortune personnelle au moment du mariage. Le notaire a ainsi considéré, dans son rapport principal, que ces travaux avaient été financés par des emprunts hypothécaires, des fonds propres du demandeur et des montants prélevés sur le compte courant de l'exploitation.
En revanche, l'attribution de la parcelle litigieuse aux acquêts ou aux biens propres du défendeur a suivi un schéma précis qui doit être repris par la cour de céans. Comme on l'a vu plus haut, les juges du divorce ont simplifié les calculs relatifs à la liquidation du régime matrimonial, en prenant en considération une seule masse d'acquêts et en considérant que les constructions sur la parcelle litigieuse faisaient partie de celle-ci. Le défendeur soutient en substance que, puisque l'immeuble aurait dû être attribué à ses biens propres, la demanderesses ne disposerait d'aucune droit au gain. Cet argument ne saurait être suivi. En effet, si l'on avait procédé ainsi, il aurait fallu également attribuer aux acquêts du mari une récompense sur ses biens propres, conformément à l'art. 209 al. 3 CC, et cette récompense aurait été partagée entre les parties. Il est clair que l'attribution des constructions aux acquêts du couple tenait lieu, dans le jugement de divorce, de récompense des acquêts du mari.
Il ne se justifierait pas, par ailleurs, de reconstituer les quatre masses au moment du divorce. En effet, ce faisant, on reverrait l'ensemble de ce jugement, ce qui ne serait pas admissible. Comme on l'a vu, celui-ci a autorité de chose jugée. Aucune des parties ne s'est opposée à l'époque aux simplifications opérées par les juges du divorce. Enfin, et de manière générale, la cour de céans n'a pas, comme mentionné ci-dessus, à revoir l'ensemble de la liquidation du régime matrimonial dans le cadre d'une procédure visant à déterminer le droit au gain selon les art. 28 ss. LDFR.
Comme on l'a évoqué plus haut, les juges du divorce ont divisé la valeur de rendement de 536'932 fr. en deux montants, le premier de 136'932 fr. attribué aux biens propres pour la parcelle nue et le second, de 400'000 fr., attribué aux acquêts pour la construction. Cette dernière somme représente 74.497 % de la valeur de rendement totale précitée (100 / [536'932 / 400'000 = 1.34233]). On doit donc attribuer la nouvelle valeur de l'immeuble aux acquêts selon la même proportion, soit à raison de 74.497 % de 1'228'737 fr. 10, ce qui donne un montant de 915'372 fr. 30 (1'228'737.10 x 74.497 / 100).
La liquidation faisait apparaître un déficit de 64'000 fr., laissé à la charge du seul défendeur. Puisque seule la valeur de la parcelle n° 941 de [...] a changé, qu'elle a augmenté et que les acquêts formaient une seule masse pour les deux époux, on doit partir du déficit précité et y ajouter comme actif la nouvelle valeur de l'immeuble attribuée aux acquêts, par 915'372 fr. 30, soit 851'372 fr. 30 (915'372.30 - 64'000). Il faut encore en déduire l'ancienne valeur de la construction, par 400'000 fr., sans quoi celle-ci serait comptée deux fois. Il en résulte un nouveau bénéfice de l'union conjugale de 451'372 fr. 30 (915'372.30 - 64'000 - 400'000). On ne voit pas pour quelle raison il faudrait encore en déduire, comme le soutient le défendeur, le reste des dettes qu'il a éteintes au moyen du prix reçu pour la vente, dont on ne sait au demeurant pas si elles ont été contractées pendant ou après l'union conjugale.
Aux termes de l'art. 215 CC, chaque époux ou sa succession a droit à la moitié du bénéfice des acquêts de l'autre, les créances étant compensées. Les acquêts ayant formé en l'occurrence une seule masse, chaque époux aurait eu droit à la moitié du bénéfice en résultant. Par conséquent, et dès lors qu'aucun contrat de mariage modifiant cette clef de répartition n'est allégué (art. 216 CC), la demanderesse aurait touché, selon le calcul de la liquidation intégrant le droit au gain, 225'686 fr. 15 (451'372.30 / 2).
C'est cette dernière somme, arrondie à 225'686 fr., qui devrait être allouée en l'espèce à la demanderesse, au titre du droit au gain de l'art. 212 al. 3 CC. Le délai de recours n'ayant pas encore commencé à courir, le montant de 227'034 fr. figurant sous chiffre I du dispositif communiqué aux parties le 15 septembre 2009 sera rectifié, dès lors qu'il résulte manifestement d'une simple erreur de calcul (art. 302 CPC).
d) Par courrier du 17 novembre 2006, le conseil de la demanderesse a "tenté de contacter" le défendeur au sujet du droit au gain de sa cliente. Cette lettre ne constitue pas une mise en demeure de payer et il n'est pas allégué qu'elle le soit. Par conséquent, elle ne saurait faire courir d'intérêts moratoires.
Ceux-ci ne sauraient pas plus courir dès l’exigibilité du droit au gain, comme le soutient en substance la demanderesse, puisque la demeure du débiteur suppose que le créancier lui ait manifesté sa volonté d’obtenir l’exécution et qu’il l’ait rendu sérieusement attentif à son obligation de prester (Spahr, L’intérêt moratoire, conséquence de la demeure, in Revue valaisanne de jurisprudence [RVJ] 1990, pp. 351 ss, spéc. p. 355).
Les intérêts moratoires, au taux de 5 % l'an (art. 104 CO), courent donc depuis le 23 décembre 2006, soit le lendemain de la notification de la demande, retirée le 22 décembre 2006 par le défendeur.
IV. En vertu de l'art. 92 CPC, les dépens sont alloués à la partie qui a obtenu l'adjudication de ses conclusions (al. 1). Quand aucune des parties n'obtient entièrement gain de cause, le juge peut réduire les dépens ou les compenser (al. 2). Ces dépens comprennent principalement les frais de justice payés par la partie, les honoraires et les débours de son avocat (art. 91 litt. a et c CPC). Les frais de justice englobent l'émolument de justice, ainsi que les frais de mesures probatoires. Les honoraires d'avocat sont fixés selon le tarif des honoraires d'avocat dus à titre de dépens du 17 juin 1986 (TAv - RSV 177.11.3). Les débours consistent dans le paiement d'une somme d'argent précise pour une opération déterminée (timbres, taxes, estampilles).
A l'issue d'un litige, le juge doit rechercher lequel des plaideurs gagne le procès sur le principe et lui allouer une certaine somme en remboursement de ses frais, à la charge du plaideur perdant, et non répartir les dépens proportionnellement aux montants alloués (Poudret/Haldy/Tappy, op. cit., n. 3 ad art. 92 CPC).
. En l'espèce, la demanderesse l'emporte sur la question du principe du droit au gain et partiellement sur le montant réclamé. Il se justifie dès lors de lui accorder des dépens réduits d'un cinquième, à la charge du défendeur, qu'il convient d'arrêter à 15'772 fr., savoir :
a) | 10'000 | fr. | à titre de participation aux quatre cinquièmes honoraires de son conseil; | |
b) | 500 | fr. | pour les débours de celuici; | |
c) | 5'272 | fr. | en remboursement des quatre cinquièmes de son coupon de justice. |
Sur ce point, le chiffre III du dispositif, adressé pour notification aux conseils des parties le 15 septembre 2009, n’est pas correct, puisque les dépens alloués à la demanderesse ont été arrêtés à 13'476 francs. Cette erreur provient du fait que l'on a tenu compte, dans le calcul des dépens, des quatre cinquièmes des frais de justice du défendeur à la place de ceux de la demanderesse. Une telle rectification du dispositif ne modifie pas matériellement le jugement de la cour. Le délai de recours n'ayant pas commencé à courir et les jugements de la Cour civile n'étant pas visés par l'art. 117a LOJV (loi d'organisation judiciaire du 12 décembre 1979, RSV 173.01), cette rectification intervient dans le délai prévu par l'art. 302 CPC.
Par ces motifs,
la Cour civile,
statuant à huis clos,
prononce :
I. Le défendeur A.P.__ doit payer à la demanderesse B.P.__ la somme de 225'686 fr. (deux cent vingt-cinq mille six cent huitante-six francs) avec intérêts à 5 % l'an dès le 23 décembre 2006.
II. Les frais de justice sont arrêtés à 6'590 fr. (six mille cinq cent nonante francs) pour la demanderesse et à 3'720 fr. (trois mille sept cent vingt francs) pour le défendeur.
III. Le défendeur versera à la demanderesse le montant de 15'772 francs (quinze mille sept cent septante-deux francs) à titre de dépens.
IV. Toutes autres et plus amples conclusions sont rejetées.
Le président : Le greffier :
P. - Y. Bosshard O. Peissard
Du
Le jugement qui précède, dont le dispositif a été communiqué aux parties le 15 septembre 2009, lu et approuvé à huis clos, est notifié, par l'envoi de photocopies, aux conseils de la demanderesse et du défendeur.
Les parties peuvent recourir au Tribunal cantonal dans les dix jours dès la notification du présent jugement en déposant au greffe de la Cour civile un acte de recours en deux exemplaires désignant le jugement attaqué et contenant leurs conclusions en nullité, ou leurs conclusions en réforme dans les cas prévus par la loi.
Le présent jugement peut faire l'objet d'un recours en matière civile devant le Tribunal fédéral au sens des art. 72 ss LTF et 90 ss LTF (loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral - RS 173.110), cas échéant d'un recours constitutionnel subsidiaire au sens des art. 113 ss LTF. Ces recours doivent être déposés devant le Tribunal fédéral dans les trente jours qui suivent la présente notification (art. 100
al. 1 LTF). L'art. 100 al. 6 LTF est réservé.
Le greffier :
O. Peissard
Bitte beachten Sie, dass keinen Anspruch auf Aktualität/Richtigkeit/Formatierung und/oder Vollständigkeit besteht und somit jegliche Gewährleistung entfällt. Die Original-Entscheide können Sie unter dem jeweiligen Gericht bestellen oder entnehmen.
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