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Urteil Kantonsgericht (VD)

Zusammenfassung des Urteils HC/2021/62: Kantonsgericht

Die Cour d'appel civile des Kantons hat in einem Urteil vom 25. Februar 2021 entschieden, dass die Beklagte C.________ dem Kläger U.________ Beträge in Höhe von 1'337'500 CHF, 722'500 EUR und 55'000 USD zuzüglich Zinsen schuldet. Die Gerichtskosten von 160'281 CHF wurden der Beklagten auferlegt. Die Beklagte muss dem Kläger ausserdem 70'573 CHF für die Gerichtskosten und 5'000 CHF für die Schlichtungskosten erstatten. Die Beklagte wurde verpflichtet, dem Kläger 60'000 CHF zu zahlen. Das Gericht entschied, dass die Beklagte ihre vertraglichen Verpflichtungen nicht mehr in Frage stellen kann und wies ihre Einwände gegen die Ansprüche des Klägers zurück.

Urteilsdetails des Kantongerichts HC/2021/62

Kanton:VD
Fallnummer:HC/2021/62
Instanz:Kantonsgericht
Abteilung:
Kantonsgericht Entscheid HC/2021/62 vom 25.02.2021 (VD)
Datum:25.02.2021
Rechtskraft:
Leitsatz/Stichwort:
Schlagwörter : Appel; ’appel; ’il; ’appelant; ’appelante; ’intimé; écision; éside; ération; était; ègle; ésident; Président; ’administration; Conseil; édé; ’au; Commission; èglement; éral; érêt; éthique
Rechtsnorm:Art. 100 BGG;Art. 106 ZPO;Art. 152 ZPO;Art. 157 ZPO;Art. 2 ZGB;Art. 232 ZPO;Art. 239 ZPO;Art. 310 ZPO;Art. 311 ZPO;Art. 316 ZPO;Art. 53 ZPO;Art. 57 ZPO;Art. 60 ZGB;Art. 61 ZGB;Art. 63 ZGB;Art. 70 ZGB;Art. 74 BGG;Art. 75 ZGB;
Referenz BGE:-
Kommentar:
Scherrer, Heini, , Art. 75, 2010

Entscheid des Kantongerichts HC/2021/62

TRIBUNAL CANTONAL

PT11.031905-200868

86



cour d’appel CIVILE

_______________

Arrêt du 25 février 2021

__________

Composition : Mme GIROUD WALTHER, présidente

Mme Courbat et M. Stoudmann, juges

Greffier : M. Steinmann

*****

Art. 19 al. 2 et 20 al. 1 CO ; art. 60, 63 al. 2 et 75 CC

Statuant sur l’appel interjeté par C.____, à Lausanne, défenderesse, contre le jugement rendu le 26 février 2020 par la Chambre patrimoniale cantonale dans la cause divisant l’appelante d’avec U.____, à Mexico (Mexique), demandeur, la Cour d’appel civile du Tribunal cantonal considère :


En fait :

A. Par jugement du 26 février 2020, dont la motivation a été envoyée aux parties le 15 mai 2020, la Chambre patrimoniale cantonale a dit que la défenderesse C.____ (ci-après : C.____) était reconnue débitrice du demandeur U.____ et lui devait immédiat paiement des montants de 1'337'500 fr., 722'500 EUR et 55'000 USD, avec intérêts à 5% l’an dès le 20 janvier 2011 (I à III), a dit que les frais judiciaires, arrêtés à 160'281 fr. 71 étaient mis à la charge de la défenderesse (IV), a dit que la défenderesse rembourserait au demandeur un montant de 70'573 fr. 71 au titre de son avance des frais judiciaires (V), ainsi qu’un montant de 5'000 fr. à titre de frais de la procédure de conciliation (VI), a dit que la défenderesse devait paiement au demandeur d’un montant de 60'000 fr., débours compris, au titre de dépens (VII) et a rejeté toutes autres ou plus amples conclusions (VIII).

En droit, les premiers juges ont observé qu’U.____ faisait valoir des prétentions en paiement d’un solde de commissions découlant de contrats qu’il avait conclus pour le compte de C.____ en 2008 et 2009, soit postérieurement à sa démission en qualité de Président de ladite fédération. Ils ont considéré qu’U.____ n’était donc plus membre de C.____ lorsque les organes de cette dernière avaient pris la décision de mettre fin, avec effet rétroactif, au paiement en sa faveur de toute commission. Partant, ladite décision ne lui était pas opposable, de sorte qu’il n’avait pas l’obligation de la contester dans un certain délai par devant les instances fédératives internes et encore moins par devant les autorités étatiques.

Les magistrats ont retenu que conformément au principe général de la non-rétroactivité des lois, applicable par extension aux règlements d’une association, le droit d’U.____ de percevoir des commissions pour les contrats qu’il avait conclus pour le compte de C.____ jusqu’en 2009 ne pouvait être remis en cause par une modification du règlement financier de celle-ci postérieure à la naissance de son droit. Ils ont ainsi considéré que la confiance qu’U.____ avait placée dans la règlementation financière de C.____, dans sa teneur lorsqu’il en était encore membre, devait être protégée et qu’il n’y avait aucun intérêt public prépondérant justifiant qu’il en aille autrement. Ils ont en outre estimé que conformément au principe « pacta sunt servanda », C.____ ne pouvait pas décider unilatéralement de mettre fin, avec effet rétroactif, au versement de commissions à U.____ pour des contrats que ce dernier avait déjà conclus en sa faveur. Les premiers juges étaient d’avis qu’en procédant de la sorte, C.____ avait violé ses obligations contractuelles et statutaires, sans qu’il existe aucune circonstance exceptionnelle, imprévisible et postérieure pour justifier une telle décision.

Les magistrats ont ensuite retenu qu’U.____ avait fourni de réelles prestations de courtage pour le compte de C.____, sans lesquelles la conclusion de nombreux contrats de sponsoring et de diffusion de droits télévisés ne serait pas intervenue. Ils ont considéré que ces prestations n’étaient pas contraires aux buts poursuivis par C.____ et qu’U.____ n’avait pas agi de manière contraire aux intérêts de cette dernière. De l’avis des premiers juges, s’il était incontestable qu’U.____ avait tiré de son activité de courtage un enrichissement personnel, il était tout aussi incontestable que les contrats conclus grâce à cette activité avaient profité à C.____, laquelle ne pouvait remettre en cause une pratique qu’elle-même avait mise en place et que ses organes avaient régulièrement approuvée. U.____ n’avait en outre pas violé son devoir de diligence et de fidélité envers C.____, au point de compromettre son droit à percevoir des commissions, sous prétexte qu’il avait dissimulé aux organes de ladite fédération les décisions rendues à son encontre par le Comité International Olympique
(ci-après : CIO). Partant, les prétentions d’U.____ en paiement de soldes de commissions n’étaient pas illicites. Il n’existait au demeurant aucun motif extraordinaire et imprévisible permettant de réduire le montant desdites commissions.

En définitive, les premiers juges ont considéré que C.____ ne pouvait plus remettre en cause ses engagements contractuels et que ses objections aux prétentions soulevées par U.____ devaient être rejetées. Ce dernier avait dès lors droit à l’intégralité des montants dont il réclamait le paiement dans ses conclusions.

B. Par acte du 17 juin 2020, C.____ a interjeté appel contre le jugement susmentionné, en concluant, sous suite de frais et dépens, à sa réforme en ce sens que les conclusions prises par U.____ au pied de sa demande du 22 août 2011 soient déclarées irrecevables (II), subsidiairement qu’elles soient rejetées (III). Plus subsidiairement, elle a conclu à l’annulation du jugement entrepris et au renvoi de la cause à l’autorité de première instance pour nouvelle décision au sens des considérants de l’arrêt à intervenir (IV). A l’appui de son appel, C.____ a sollicité qu’il soit procédé à l’administration de la preuve faisant l’objet de ses réquisitions en complément d’expertise présentées le 15 février 2017 (réquisition XVIII), l’expert K.____ étant désigné à cet effet, subsidiairement que la cause soit renvoyée à l’autorité de première instance pour qu’elle procède à une telle mesure d’instruction.

Par réponse du 22 octobre 2020, U.____ a conclu, sous suite de frais et dépens, au rejet de l’appel.

Par courrier du 5 novembre 2020, C.____ a sollicité la fixation d’un délai pour se déterminer sur la réponse déposée par U.____. Ce dernier s’y est opposé par correspondance du 6 novembre 2020. Le 9 novembre 2020, C.____ a réitéré sa requête « tendant à la fixation d’un délai pour répliquer ». Complémentairement, elle a requis qu’un deuxième échange d’écritures soit ordonné.

Par courrier du 13 novembre 2020, le Juge délégué de la Cour de céans a indiqué que le droit de répliquer n’imposait pas à l’autorité judiciaire l’obligation de fixer un délai à la partie pour déposer d’éventuelles observations mais seulement de lui laisser un laps de temps suffisant pour qu’elle ait la possibilité de déposer des observations si elle l’estimait nécessaire. Cela étant, il a informé les parties qu’il n’entendait pas ordonner de deuxième échange d’écritures, la cause paraissant en état d’être jugée.

C. La Cour d'appel civile retient les faits pertinents suivants, sur la base du jugement complété par les pièces du dossier :

1. a) U.____, d’origine mexicaine et domicilié au Mexique, est né le […] avril 1934. Docteur en droit et avocat de formation, il a été le Président de C.____ de 1984 à 2008, soit pendant 24 ans. A son départ, ses pairs ont reconnu sa contribution à l’essor du [...] dans le monde ainsi qu’au développement économique de C.____. Sous sa présidence, celle-ci a en effet connu une croissance économique flamboyante, la plaçant au rang des fédérations sportives les plus importantes du monde. Ses pairs ont également salué son investissement personnel, bien que la réputation de C.____ ait été ternie, durant les dernières années de son mandat, par l’émergence de plusieurs scandales liés à des « affaires de commissions » qui ont concerné U.____. A son départ de C.____, U.____ a été nommé Président d’honneur à vie de cette dernière. Il a également été membre du CIO jusqu’à sa démission en [...] 2004.

b) aa) C.____, fondée le [...] 1947 à Paris, est une association de droit suisse, dont le siège est à Lausanne depuis 1984. Regroupant plus de 220 fédérations nationales affiliées, elle est une organisation internationale non gouvernementale à but non lucratif. Elle est reconnue par l’Etat de Vaud comme une personnalité internationale juridique au service de l’intérêt public ainsi que par le CIO pour administrer le [...] et le [...] au niveau mondial.

bb) C.____ est régie par des statuts intitulés « Constitution de C.____ », ainsi que par les textes juridiques qui en découlent. Les statuts actuels ont été adoptés en 2002, puis modifiés en 2004 et en 2006 notamment. Le but de C.____ est d’encourager le développement et la croissance du [...] sous toutes ses formes dans le monde entier et de promouvoir la création de fédérations nationales. Elle veille à promouvoir, coordonner, propager, réglementer, organiser, superviser, contrôler, diriger et régir le sport du [...] à travers le monde.

cc) C.____ a comme autorité suprême le Congrès, qui se tient au moins tous les deux ans. Composé de l’ensemble des fédérations nationales affiliées, qui représentent les institutions de base de C.____, le Congrès a pour compétence unique et exclusive de modifier les statuts, d’adopter le budget, d’en définir ses modalités d’exécution, d’effectuer les contrôles financiers et d’élire le Président ainsi que les membres du Conseil d’administration.

dd) Les autres institutions dirigeantes de C.____ sont le Conseil d’administration, le Comité exécutif et la Présidence. Composé d’une trentaine de membres, le Conseil d’administration a notamment pour compétence la responsabilité de l’administration générale et de la gestion de C.____. Il traite les affaires urgentes et exceptionnelles dans l’esprit des statuts et dans l’intérêt général de C.____ et nomme les membres du Comité exécutif, composé de treize membres, dont le Président. Les membres du Comité exécutif, qui sont en même temps membres du Conseil d’administration, ont tous la fonction de Vice-Président exécutif. Le Comité exécutif est conjointement responsable avec le Président de l’exécution des décisions du Congrès et du Conseil d’administration.

ee) Quant au Président, il représente C.____, assume la responsabilité de son administration courante et son fonctionnement. D’après l’art. 2.6.2 des statuts de C.____, dans leur version en vigueur entre 2004 et 2010, les compétences et les responsabilités du Président sont les suivantes :

« 2.6.2.1 Le Président est responsable, conjointement avec le Comité Exécutif, de l’exécution des décisions du Congrès et du Conseil d’Administration.

2.6.2.2 Lorsque le Comité Exécutif et/ou le Conseil d’Administration ne sont pas en séance, le Président a la compétence pour prendre toute mesure et/ou décision, y compris des sanctions disciplinaires dans l’intérêt général de C.____. Ces actions ou décisions doivent être motivées et notifiées au Conseil d’Administration dans un délai d’un (1) mois et ratifiées lors de sa prochaine réunion.

2.6.2.3 Le Président a les pleins pouvoirs pour représenter C.____. Le Président préside les sessions du Congrès, les réunions du Conseil d’Administration et du Comité Exécutif et a la prérogative de présider toutes les autres réunions des institutions dirigeantes de C.____.

2.6.2.4 Lorsqu’il préside une réunion, le Président a une voix prépondérante en cas de vote.

2.6.2.5 Le Président est responsable de l’administration courante et de la gestion de C.____. Il est la seule personne autorisée à signer tous les contrats et autres documents engageant légalement C.____. Le Président peut délivrer une procuration au nom de C.____.

2.6.2.6 Sous réserve d’un accord préalable du Conseil d’Administration et dans la limite des paramètres nationaux ou internationaux fixés pour les organisations à but non lucratif, le Président peut entreprendre des négociations au nom de C.____ en matière de propriété de C.____.

2.6.2.7 Le Président propose au Conseil d’Administration les membres à nommer pour les Conseils et les Commissions, choisis parmi les candidatures présentées par les FNs, mais sans s’y limiter et incluant des experts externes quand cela est jugé nécessaire ».

2. a) aa) Le CIO est une organisation internationale non gouvernementale, à but non lucratif. Il est constitué sous la forme d’une association de droit suisse, dont le siège est à Lausanne, capitale olympique. Les membres du CIO sont des personnes physiques dont le nombre ne peut excéder cent quinze. Chaque membre du CIO a l’obligation de se conformer à la Charte olympique, au Code d’éthique et aux autres règles du CIO.

bb) La Commission exécutive du CIO assume la responsabilité générale de l’administration du CIO et la gestion de ses affaires. Elle a notamment pour fonction de contrôler le respect de la Charte olympique et d’approuver les règles de gouvernance relatives à son organisation. En 1999, la Commission exécutive du CIO a créé la Commission d’éthique du CIO, chargée de définir et de mettre à jour un cadre de principes éthiques, fondés sur les valeurs et les principes défendus dans la Charte olympique.

cc) La Commission d’éthique du CIO a pour mandat de fournir des conclusions et des recommandations à la Commission exécutive du CIO sur les cas que lui soumet notamment le Président du CIO et de donner des avis à la demande des membres du CIO ou du Mouvement olympique. Dite Commission a eu pour tâche de réaliser un Code d’éthique, édicté peu après le « scandale de Salt Lake City », au cours duquel il a été découvert que certains membres du CIO s’étaient fait payer des pots-de-vin en échange de la désignation de la ville de Salt Lake City comme ville hôte des Jeux Olympiques d’hiver en 2002.

Dans ce contexte, le Code d’éthique du CIO prescrit notamment que « les ressources olympiques des parties olympiques ne p[euvent] être utilisées qu’à des fins olympiques » (art. C1) et règle, de manière détaillée, la façon dont il y a lieu de rendre compte des « recettes et dépenses » des parties olympiques et de l’utilisation des ressources (art. C2). Ce principe a été repris dans deux décisions dont il sera question ci-après (cf. infra ch. 9a et 11), à savoir dans la décision de la Commission d’éthique n° [...] du 14 mai 2004, ainsi que dans celle de la Commission exécutive du CIO du 7 août 2004, dans laquelle il a été rappelé ceci :

« … la 110ème session du CIO des 11 et 12 décembre 1999 a approuvé les recommandations 44 à 48 de la Commission CIO-2000 relatives à la transparence financière au sein du mouvement olympique, afin notamment de s’assurer que les fonds du CIO sont utilisés à bon escient et vérifiés et que les Comités nationaux olympiques et les fédérations internationales remettent au CIO un rapport comptable des dépenses pour tous les fonds versés par le CIO. »

La Commission exécutive du CIO y a ajouté la précision suivante :

« dès les premiers cas soumis à la commission d’éthique du CIO après sa création, […] le Code d’éthique s’applique même lorsque les agissements des parties olympiques ont lieu en dehors des Jeux Olympiques et de leur organisation ou du CIO. »

b) Les Fédérations Internationales (ci-après : FI) sont des organisations internationales non gouvernementales, reconnues par le CIO pour administrer un ou plusieurs sports au plan mondial, elles-mêmes constituées d’organisations pour administrer ces sports au niveau national. Le rôle des FI est de s’assurer de l’intégrité de la pratique de leurs sports respectifs à un niveau international. Si les FI conservent leur indépendance et autonomie dans l’administration de leurs sports, elles doivent néanmoins avoir des statuts, des pratiques et des activités conformes à la Charte olympique et au Code d’éthique du CIO, qui en font partie intégrante. Dans la décision n° [...] rendue le 14 mai 2004 par la Commission d’éthique du CIO, celle-ci a rappelé la place des FI dans le Mouvement olympique en ces termes :

« Les FI appartiennent au Mouvement olympique ; or, aux termes de la Charte olympique, il faut respecter les principes éthiques fondamentaux, pour faire partie du Mouvement olympique ; l’obligation pour les FI de respecter les principes éthiques fondamentaux n’entame en rien leur indépendance et leur autonomie dans l’administration de leurs sports respectifs ; leurs statuts, leurs pratiques et leurs activités doivent être conformes à la Charte olympique. »

3. Au cours de la présidence d’U.____, les moyens financiers de C.____ sont devenus de plus en plus importants. Sur une période de 24 ans, les actifs liquides de celle-ci sont en effet passés d’environ 2'261'000 fr., valeur au 31 décembre 1983, à 170'812'126 fr. 97, valeur au 31 décembre 2007, respectivement à 165'690'629 fr. 55, valeur au 31 décembre 2008.

Dans un article publié en 2004, [...], Professeur à l’Institut de hautes études en administration publique (IDHEAP) expliquait la situation économiquement favorable de C.____ en ces termes :

« Beaucoup de fédérations internationales olympiques n’ont pas d’autres ressources que les versements du CIO et n’ont pas non plus de programmes de développement pour leur sport. Elles dépensent donc la totalité de l’argent qui leur revient du CIO pour couvrir les frais administratifs, salaires et autres rémunérations. Au contraire, C.____ a des revenus propres bien supérieurs aux versements quadriennaux du CIO y compris durant l’année olympique 2000. »

Il est admis qu’U.____ a joué un rôle majeur dans la croissance économique de C.____. Durant sa présidence, il a en effet négocié et conclu – de manière non exclusive (cf. infra ch. 6 b) – de nombreux contrats (sponsoring, marketing, organisation sportive, vente de droits télévisuels, etc.) pour le compte de C.____, sur lesquels il a perçu des commissions, prévues par la réglementation de cette dernière. L’expert-comptable V.____, de [...], mis en œuvre dans le cadre de la procédure de première instance, a calculé que, sur la période du 1er janvier 1984 au 31 décembre 2008, le produit d’exploitation de C.____ s’était élevé à 835'858'197 fr. 64 avant déduction des commissions d’acquisitions perçues par U.____ à hauteur de 10’963'435 fr., soit à un montant total net de 824'824'762 fr. 64 [recte : 824'894'762 fr. 64]. Entendu en qualité de partie à ce sujet, U.____ a exposé qu’il avait favorisé la croissance économique de C.____, en développant le marketing lié au [...], notamment les droits télévisuels, en créant des compétitions nouvelles qui avaient attiré les investissements d’entreprises, et en raccourcissant la durée des matchs à deux heures environ. Il sied de relever que la croissance économique de C.____ a directement bénéficié au développement du [...], puisqu’entre 2004 et 2007, 65 à 79% de ses fonds ont été affectés à la promotion de ce sport et redistribués pour la pratique de celui-ci (organisation de compétitions internationales et programmes).

4. En 2002, le Conseil d’administration de C.____ a adopté de nouveaux Règlements généraux, en particulier un Règlement financier. Celui-ci précisait quelles étaient les ressources de C.____ (art. 1.1), les droits d’affiliation (art. 1.2), l’échelle des cotisations annuelles (1.3), les conditions de transfert (1.4), le barème des tarifs de transfert (1.5) et les procédures financières (1.6). L’art. 2.6.2 de ce Règlement, dans sa version de 2004, relatif aux « pourcentages autorisés sur les contrats de sponsoring (TV et Marketing) négociés sans l’intervention directe d’une agence de marketing » prévoyait ce qui suit :

« 2.6.2.1 Un pourcentage fixe de dix pourcent (10 %) est autorisé lorsqu’un contrat est entièrement négocié sans l’intervention d’une agence de marketing.

2.6.2.2 Les consultants et les conseillers assistant à la préparation d’un contrat ou à sa finalisation ne recevront aucun montant supplémentaire de C.____. Leur rémunération doit être considérée comme déjà incluse dans les dix pourcent.

2.6.2.3 Aucune commission n’est due lorsqu’une agence de marketing est mandatée ou recommandée.

2.6.2.4 Le personnel rémunéré de C.____ ne recevra aucune commission pour leur intervention dans des négociations contractuelles. Toutefois, sur décision personnelle, le Président de C.____ peut accorder au personnel une prime de service spéciale unique pour sa contribution aux négociations de sponsoring dans l’année.

2.6.2.5 Les indépendants, membres individuels, officiels de C.____ et/ou Fédérations Nationales qui souhaitent s’impliquer dans des négociations avec un sponsor potentiel au nom de C.____, doivent obtenir une autorisation sous forme d’un accord écrit et qu’ils devront avoir reçu de C.____ avant le début de toute participation aux négociations.

2.6.2.6 Les officiels de C.____, membres individuels et/ou Fédérations Nationales autorisés par le Président de C.____ à proposer des partenariats d’entreprise au nom de C.____ sont en droit de recevoir une commission. Les taux de pourcentage sont les suivants :

a) Motivation d’un sponsor et facilitation du premier contact, sans pour autant avoir participé aux négociations sérieuses entreprises par la suite par un représentant de C.____ : en cas de conclusion réussie, la personne ayant permis de nouer les premiers contacts sera en droit de percevoir une rémunération unique à titre de commission jusqu’à 1 %.

b) Si, outre le premier contact, la personne participe par la suite aux négociations sérieuses, et si un accord de partenariat est conclu avec C.____, la commission versée représentera une rémunération unique de 5 % du montant total engagé.

c) Si aussi bien les points a) et b) précités sont remplis, et si la personne a négocié entièrement elle-même l’accord de partenariat entre C.____ et le sponsor, la commission due représentera une rémunération unique de 10 % du montant total engagé.

d) Le versement de commissions ne peut être cumulé. Aucun frais de voyages ou autres dépenses ne seront remboursés. »

Il sied de préciser que le principe du versement d’une commission fixe de 10%, accordée en cas de conclusion d’un contrat entièrement négocié en dehors d’une agence de marketing, constituait une pratique existante au sein de C.____ depuis 1995 au moins, ancrée notamment dans son Règlement administratif et financier du 1er janvier 1995.

5. a) Le Règlement financier de C.____ a été révisé une première fois en 2004, puis une seconde fois en 2006, à Tokyo. Son art. 2.6 a ainsi été modifié par l’art. 1.6.5 relatif aux « paiements autorisés aux membres élus de C.____ », lequel confirmait le principe du versement d’une commission en ces termes :

« Les paiements autorisés sur les contrats de sponsoring (TV et Marketing) négociés par un membre élu de C.____ (y compris le Président) sans l’intervention directe d’une agence de marketing sont soumis aux conditions suivantes :

1.6.5.1 Une prime de négociation jusqu’à dix pour cent (10 %), en accord avec l’Article 1.6.5.4, est autorisé (sic) lorsqu’un membre élu de C.____, quel qu’il soit, négocie un contrat de sponsoring ou TV sans l’intervention d’une agence de marketing.

1.6.5.2 Les consultants assistant à la préparation d’un contrat ou à sa finalisation ne recevront aucun montant supplémentaire de la part de C.____. Leur rémunération doit être considérée comme déjà incluse dans le dix pour cent mentionné ci-dessus. Aucune commission n’est due lorsqu’une agence de marketing est mandatée ou recommandée.

1.6.5.3 Les freelance, les membres individuels, les officiels de C.____ et/ou les FNs souhaitant s’impliquer dans des négociations avec un sponsor potentiel au nom de C.____, doivent en obtenir l’autorisation sous la forme d’un consentement écrit, qui doit être reçu de C.____ avant le début de toute implication.

Le Président de C.____ devrait informer le Comité Exécutif et le Conseil d’Administration de la progression de toute négociation qu’il aurait initiée avec un sponsor potentiel mais il peut ne pas le nommer.

1.6.5.4 Les officiels de C.____, membres individuels et/ou FN autorisés par le Président de C.____ à s’impliquer dans des négociations avec une entreprise au nom de C.____ sont en droit de recevoir une commission selon les conditions suivantes :

a) Motivation d’un sponsor et fournir le premier contact, sans pour autant avoir participé aux négociations sérieuses, entreprises par la suite par un représentant de C.____ : en cas de conclusion réussie, la personne ayant permis de nouer les premiers contacts sera en droit de percevoir une rémunération unique à titre de commission jusqu’à un pour cent (1 %).

b) Si, outre le premier contact, la personne poursuit avec des négociations sérieuses, et si un accord de partenariat est conclu avec C.____, la commission versée représentera une rémunération unique de cinq pour cent (5 %) du montant total engagé.

c) Si les points a) et b) précités sont remplis et que sur la base d’un texte complet préparé par le membre de C.____, un accord a été mené à bien par C.____ et le sponsor, la commission due représentera une rémunération unique de dix pour cent (10 %) du montant total engagé.

d) Le versement de commissions en rapport avec les paragraphes a), b) et c) ne peut être cumulé. Les frais de voyage ou aucune autres dépense (sic) ne seront remboursés »

b) S’agissant de la conclusion des contrats et mandats, le Règlement financier, dans sa version de 2006, prévoyait en outre ce qui suit :

« 1.6.1.1 Les contrats en général et les mandats engageant C.____ à payer un montant quel qu’il soit ne peuvent être signés que par le Président de C.____. Les mandats concernant les membres des Institutions de C.____ requièrent l’approbation préalable du Conseil d’Administration.

1.6.1.2 Tous les contrats de sponsoring et mandats confiés pour un montant qu’il soit (sic) à une personne ou à un membre élu de C.____ doivent être signés par le Président de C.____ et rapportés au Comité Exécutif pour information. »

c) Conformément à l’art. 1.6.6.1 de ce même Règlement financier (2006), le Président de C.____ recevait une rémunération annuelle fixe, déterminée par le Comité exécutif de C.____, pour l’exercice de ses compétences et de ses responsabilités et la couverture de ses dépenses liées à ses activités. D’après le tableau de rémunération des membres du Conseil exécutif de C.____ daté du 14 mai 2007, U.____ percevait un montant annuel de 400'000 fr., ce qu’ont confirmé le témoin F.____, trésorier de C.____ de 2006 à 2012, et l’expert-comptable V.____. Pour les années 2006 à 2009, ce dernier a en effet relevé qu’U.____ s’était fait « rembourser » par C.____ les montants suivants :

· en 2006, 399'000 fr. à titre de « management expenses » ainsi que 144'000 fr. à titre de loyer ;

· en 2007, 400'000 fr. à titre de « management expenses » ainsi que 180'000 fr. à titre de loyer ;

· en 2008, 300'000 fr. à titre de « management expenses » (vraisemblablement en proportion de la durée de son mandat) ainsi que 180'000 fr. à titre de loyer ;

· en 2009, 135'000 fr. à titre de loyer.

Il sied de mentionner que les montants annuellement remboursés à U.____ à titre de loyers concernaient son bureau au Mexique, ainsi que F.____ l’a précisé.

S’agissant de la rémunération annuelle d’U.____, l’expert K.____ (expert relatif aux contrats sportifs, mandaté en première instance) l’a estimée à 600'000 fr. en tout (loyer annuel susmentionné compris). Il a indiqué qu’une telle rémunération ne lui paraissait pas disproportionnée, ni inhabituelle pour le président d’une fédération sportive internationale aussi importante que C.____. Il a en revanche affirmé qu’il n’était pas conforme qu’un président exerçant une activité bénévole perçoive une rémunération supplémentaire liée aux résultats (soit des commissions), ce d’autant plus que cette dernière n’avait fait l’objet d’aucun contrôle préalable de la part d’autres organes de C.____.

d) S’agissant des responsabilités financières de C.____, les Règlements généraux de cette dernière prévoyaient ce qui suit :

« 1.3.7.1 Le Président de la Commission des Finances préside la Commission des Finances, vérifie le budget et le programme d’investissement avant leur soumission à l’approbation de la Commission des Finances et du Président.

1.3.7.2 Le Directeur Général est, avec le Président, conjointement responsable des comptes de C.____.

1.3.7.3 Le Directeur Général élabore un rapport sur les recettes et les dépenses et sur l’état des comptes en vue de les soumettre à l’approbation de la Commission des Finances et du Président.

1.3.7.4 Le Directeur Général vérifie les paiements effectués par le Secrétariat et en fait rapport au Président. »

e) Dans son Code de conduite, lequel a été révisé en 2004 et en 2006, C.____ a défini la notion de conflit d’intérêts de la façon suivante :

« Une situation où une personne :

a) Peut tirer un gain ou avantage personnel, direct ou indirect, d’un tiers, dû à ses propres décisions prises dans l’accomplissement de ses fonctions officielles.

b) N’est peut-être pas capable d’agir correctement dans l’accomplissement de ses fonctions officielles à cause de son intérêt, participation ou implication personnels/professionnels avec une autre partie ou affaire, desquelles une autre organisation ou la même personne peut tirer un bénéfice, gain ou avantage personnels (subvention, clause d’approbation ou élection à une position).

c) N’est peut-être pas libre d’exprimer son opinion ou décider par elle-même du fait de son intérêt, participation ou implication personnels/professionnels avec une autre personne physique ou juridique, qui peut être raisonnablement considérée comme influençant sa propre volonté, son jugement ou sa décision. » (art. 2.1.4)

L’art. 2.2 de ce Code de conduite prévoyait par ailleurs ce qui suit :

« Les conflits d’intérêts sont prohibés. Un individu accomplissant une fonction au nom de membres, fournisseurs ou partenaires de C.____ est tenu de déclarer tout conflit possible découlant de sa fonction ou de son implication personnelle avec un autre membre, fournisseur ou partenaire de C.____. »

Quant à l’art. 2.4 du Code de conduite, il énumérait les mesures préventives à prendre pour éviter tout conflit d’intérêts en ces termes :

« 2.4.1 Face à un possible conflit d’intérêts, la personne concernée doit dans tous les cas s’abstenir de donner son avis, prendre une décision ou accepter toute forme de bénéfice, quel qu’il soit.

2.4.2 En cas de doute ou si un conflit d’intérêts apparent survient, la personne concernée doit immédiatement consulter la Commission juridique ou son représentant, qui sont responsables du conseil aux personnes faisant face à un apparent conflit d’intérêts. Cette consultation restera confidentielle.

2.4.3 La Commission juridique propose à la personne concernée par cette situation une solution parmi les options suivantes :

a) enregistrement de la déclaration sans mesure particulière ;

b) retrait de la personne impliquée d’une partie ou de toute l’action ou du processus de décision à l’origine du conflit ;

c) renonciation à la gestion des intérêts externes qui causent le conflit.

En plus de ces trois options, des mesures complémentaires peuvent également être proposées. »

Enfin, l’art. 2.5 du Code de conduite rendait attentif aux conséquences des « conflits d’intérêts non déclarés » en ces termes :

« 2.5.1 Au cas où une personne néglige de dévoiler une source de conflit d’intérêts, le Président de C.____ pourra soumettre le cas à la Commission juridique.

2.5.2 Après enquête, la Commission propose une décision au Comité Exécutif. »

6. a) Comme déjà relevé, U.____ a, lui-même, durant sa présidence, négocié et conclu de nombreux contrats pour le compte de C.____, pour lesquels il a reçu des commissions. Sur la base des documents qui lui ont été fournis, l’expert-comptable V.____ a constaté qu’U.____ avait, pour les années 2006 à 2009, perçu les commissions suivantes :

· en 2006, 600'000 fr. et 2'800'000 USD ;

· en 2007, 600'000 fr. et 3'000'000 USD ;

· en 2008, 486'788 fr. 08 et 1’117'500 USD ;

· en 2009, 1'382'500 EUR.

Il n’est pas contesté qu’U.____ a perçu d’autres commissions avant 2006, mais leur détail n’a pu être restitué année après année.

Il est néanmoins établi qu’U.____ a eu une maîtrise quasi-totale du processus de conclusion des contrats, de leur négociation à leur signature. En effet, bien que le Règlement financier (2004 et 2006) de C.____ autorisait chacun de ses membres à négocier et à conclure des contrats pour son compte, celui-ci devait préalablement obtenir l’accord écrit d’U.____ avant toute prise de contact avec un sponsor potentiel, avec pour conséquence qu’il se retrouvait toujours évincé du processus de signature par U.____. Entendu en qualité de partie en première instance, O.____, ancien membre du Comité financier et actuel membre de la Commission des finances de C.____, a ainsi indiqué qu’U.____ signait seul tous les contrats et qu’il n’avait pour sa part pas le droit de signer, pas plus que le Secrétaire Général. Il a expliqué que s’il apportait lui-même un sponsor ou si un autre membre du Conseil d’administration le faisait, il l’indiquait à U.____, puis entamait les négociations, lesquelles étaient poursuivies par U.____. Il a déclaré qu’il n’avait alors plus d’informations s’agissant de ces négociations, précisant qu’U.____ « signait ensuite les contrats et percevait les commissions ». O.____ a ajouté que c’était du moins ce qu’il avait compris du mécanisme et qu’il ne s’agissait que d’exemples, dans la mesure où cela ne lui était pas arrivé à titre personnel.

Il est également établi qu’à chaque signature de contrats, U.____ i) calculait lui-même la commission due, ii) établissait, à l’ordre de sa propre personne, les factures de commissions, iii) ne soumettait les commissions au contrôle effectif d’aucun autre organe de C.____ que lui-même, à l’exception de son trésorier, comme en atteste la présence de la signature de ce dernier, et iv) se garantissait leur règlement rapide par C.____, en accord avec le cabinet d’audit comptable et financier mandaté, soit la fiduciaire [...].

b) aa) D’après l’expert K.____, le système de rémunération pratiqué par C.____ – consistant à verser à son président une commission fixe de 10% du montant du contrat de base conclu – était déjà pour l’époque inhabituel, la commercialisation des droits médiatiques et publicitaires d’une fédération sportive étant généralement confiée à une agence extérieure, lorsque la fédération sportive concernée ne disposait pas elle-même de son propre département marketing. L’expert a ainsi relevé qu’il paraissait contraire à tous les usages et aux principes de la Corporate Governance qu’un membre de la direction d’une fédération sportive puisse décider seul, soit sans le contrôle effectif d’un tiers (trésorier, conseil d’administration, comité directeur), de l’attribution de commissions, et s’assurer de leur virement.

S’agissant de l’assiette considérée pour le calcul des droits à la commission d’U.____, l’expert K.____ a indiqué qu’il était usuel que les commissions d’agence se calculent sur la base du chiffres d’affaires (soit le montant brut) provenant d’un contrat d’exploitation, et non sur la base de l’excédent ou du bénéfice que la fédération tire du contrat (soit le montant net), car les agences n’ont généralement aucune influence sur l’activité opérationnelle des fédérations sportives et sur les bénéfices nets que celles-ci réalisent. Il a toutefois indiqué qu’il en allait autrement lorsque les agences, – dont la rémunération était versée sous forme de versements partiels ou de commissions –, étaient en mesure d’influencer l’activité opérationnelle de la fédération sportive. Dans ce cas, qui en l’occurrence aurait selon l’expert été celui d’U.____, il était normal de « mesurer et d’intéresser la personne concernée au succès qu’elle a[vait] pu influer ». L’expert a ainsi estimé qu’en tant que Président de C.____, U.____ avait eu la possibilité de piloter l’activité opérationnelle de celle-ci, de sorte qu’il aurait été plus juste de prendre comme base de calcul l’excédent, respectivement les recettes provenant du contrat d’exploitation, plutôt que le montant brut du contrat en question. A dires d’expert, une telle solution aurait été d’autant plus justifiée qu’U.____ avait revendiqué avoir été l’intermédiaire entre chaque partenaire contractuel et C.____, de sorte qu’il aurait aussi dû participer à la prise en charge d’un éventuel risque de perte.

L’expert K.____ a encore relevé qu’il n’avait rencontré dans sa pratique aucune situation similaire dans laquelle un intermédiaire avait exigé le versement de la totalité de sa commission au moment de la conclusion du contrat, en se basant sur la somme totale de celui-ci, indépendamment de l’échéance des versements partiels contractuellement prévus. S’agissant de la commercialisation de droits sportifs, il était pour le moins inhabituel que les pourcentages qu’un intermédiaire percevait à titre de rémunération soient calculés sur la base de l’accord conclu et non en fonction du montant perçu pour les licences, en particulier pour les contrats de longue durée qui faisaient souvent l’objet de modifications au cours de leur application. Pour conclure, l’expert a estimé que l’on ne pouvait pas supposer que le paiement de commissions d’intermédiation à U.____ avait permis à C.____ de réaliser des économies substantielles, la réponse à cette question dépendant largement de l’importance des commissions qui auraient été versées à une agence de marketing extérieure s’il avait été fait appel à une telle agence.

bb) A la question de savoir si une commission fixe de 10% était dans la norme, l’expert K.____ a répondu qu’il s’agissait d’un maximum. Il a par ailleurs exposé que le taux de commissionnement était fondamentalement indépendant de la difficulté de l’activité d’intermédiation, mais qu’il pouvait en aller différemment en cas d’activité non exclusive, comme celle ayant été exercée par U.____. L’expert a complété sa réponse en indiquant que le taux de commissionnement dépendait tout d’abord de la durée du contrat. En principe, plus la durée du contrat était longue (durée de plus de trois ou quatre ans), moins le taux de la commission était élevé, et plus les droits destinés à être commercialisés avaient de la valeur, moins importante était la commission. S’agissant de la reconduction d’un contrat en cours, l’expert a précisé qu’il était souvent convenu d’un taux de commission inférieur, équivalant en principe à 50% de la commission initiale, le sponsor ayant déjà été trouvé et la commission ne devant être versée qu’une seule fois à taux plein. En l’espèce, au vu de la valeur relativement élevée des droits de commercialisation et de la longue durée des contrats conclus, il a estimé qu’une commission de l’ordre de 5%, mais très certainement pas de plus de 10%, aurait été adaptée. L’expert a également précisé qu’une commission incluait usuellement tous les frais de l’agence (rémunération des salariés, frais de déplacement, de négociation et de préparation des contrats et frais des conseillers), de sorte que le cocontractant ne remboursait, en règle générale, pas à l’agence ses frais effectifs en sus de sa commission. Ainsi, les montants que C.____ avait directement acquittés sur ordre d’U.____ auprès de compagnies aériennes et d’hôtels, pour couvrir ses frais de déplacement et d’hébergement, auraient dû être déduits de son forfait d’intervention annuel (cf. supra ch. 5 c), de même que ses dépenses auraient, de manière générale, dû être justifiées par la production de pièces idoines, exception faite de ses frais journaliers, couverts par ses indemnités de sessions.

cc) Pour sa part, S.____, ancien Président de la Fédération australienne de [...] de 1998 à 2013, a tout d’abord relevé, lors de son audition comme témoin en première instance, que le principe du pourcentage de 10% payé à titre de commission à U.____, avait été accepté par C.____ et que « tout le monde en avait pleinement connaissance ». Il a indiqué que lors du Congrès mondial de 2004 à Porto, la pratique – qui avait cours depuis 1990 – consistant à verser à U.____ une commission de 10% sur les contrats qu’il avait négociés et conclus pour le compte de C.____, avait été confirmée et dès lors « officialisée ». Il a ajouté que lui-même s’y était opposé sans succès, en faisant valoir qu’on ne pouvait pas s’octroyer à soi-même des commissions et qu’il s’agissait-là d’un conflit d’intérêts.

Quant au témoin T.____, – lequel a travaillé en tant qu’agent pour la représentation marketing des droits médiatiques de C.____ de 2001 à 2008 –, il a déclaré que les commissions perçues par une agence extérieure dans le domaine du [...] pouvaient représenter entre 20% et 40% du résultat obtenu, précisant que C.____ avait versé à son agence ([...]) des commissions d’au minimum 25% à 30%. Le témoignage de T.____ a par ailleurs permis d’établir qu’U.____ n’avait pas été le seul à négocier des contrats pour le compte de C.____. Ce témoin a en effet déclaré que les contrats conclus pour le compte de cette dernière l’avaient été soit par son agence, soit par U.____, mais que, dans tous les cas, celui-ci ne s’était occupé que de quelques mandats en comparaison avec son agence.

dd) D’après les contrats de marketing et de télévision ou d’agence conclus par C.____ avec l’agence américaine [...] (« [...] ») entre 2009 et 2014 notamment – contrats produits en cours de procédure à la demande d’U.____ –, les taux de commissionnement prévus en faveur de l’agence précitée ont oscillé entre 20% et 30%, en fonction des montants des contrats de base.

7. a) Le 20 décembre 2002, X.____, ancien Président de la Fédération argentine de [...] et membre du Conseil d’administration de C.____, a déposé en Suisse, à Lausanne, une plainte pénale pour gestion déloyale, faux renseignements sur des entreprises commerciales et faux dans les titres à l’encontre d’U.____. X.____ y reprochait à ce dernier d’avoir falsifié les comptes de C.____ relatifs à l’exercice financier de l’année 2000, en particulier d’avoir soustrait de ceux-ci une annexe faisant partie du rapport de l’organe de contrôle externe, sur laquelle figuraient les commissions qu’il avait perçues cette année-là.

b) Le 10 mars 2003, X.____ a également saisi la Commission d’éthique du CIO d’une plainte dirigée à l’encontre de C.____ et d’U.____, visant les commissions que ce dernier avait reçues en 2000. X.____ y indiquait qu’il soupçonnait U.____ de recevoir de C.____ des commissions payées au moyen des fonds reçus du CIO. Entendue à ce sujet comme témoin en première instance, A.____, Secrétaire Générale de la Commission d’éthique du CIO, a précisé qu’à l’époque où le scandale des commissions avait éclaté, le CIO s’était demandé si les fonds qu’il avait versés à C.____ et qu’il continuait de lui verser avaient servi à payer des commissions à U.____, C.____ ne tenant pas de comptabilité séparée.

8. Lors du Congrès mondial de C.____ qui s’est tenu à Porto les 12 et 13 mai 2004, F.____ s’est adressé aux délégués des fédérations nationales en ces termes :

C.____ tient à remercier, plus que jamais, le Président Dr. U.____ pour la rigueur, la totale transparence et le professionnalisme de sa gestion. En effet, grâce à un management très en avance sur son temps, C.____ a fortement diminué l’impact de ces intermédiaires du sport business si présents dans l’entourage des grandes associations sportives, au point de pouvoir consacrer aujourd’hui à nos athlètes et au développement de nos disciplines dans le monde entier, plus de richesses que la plupart des fédérations amies et néanmoins concurrentes. »

9. a) Le 14 mai 2004, la Commission d’éthique du CIO a, suite à la plainte déposée le 10 mars 2003 par X.____, pris une décision n° [...] portant recommandations, dont il ressortait notamment ce qui suit :

« SAISINE :

(…)

Après avoir reçu les observations transmises par M. B.____, directeur général de C.____, les 8 et 15 janvier 2004 et les 18 et 20 février 2004, la commission d’éthique, réunie à Lausanne le 8 mars 2004, a rédigé un avis qu’elle a soumis aux observations personnelles de Dr U.____, « avant d’adopter ses conclusions et recommandations à la commission exécutive du CIO ».

La commission d’éthique a reçu les observations écrites du Dr U.____ les 6, 16 et 21 avril 2004 avec des pièces annexes. Par délégation du rapporteur, le représentant spécial a entendu le Dr U.____ le 20 avril 2004 et a recueilli ses observations orales ; Dr U.____ était assisté de son conseil. Il a été dressé procès-verbal de cet entretien.

(…)

PRINCIPES

La commission d’éthique rappelle d’abord que :

le caractère éthique ou non du comportement d’une partie olympique est indépendant de son aspect pénal. En effet, les mêmes faits peuvent être ou ne pas être pénalement punissables selon la loi de différents pays, mais demeurer éthiquement condamnables. La relaxe d’un prévenu, pour des faits qui ne sont pas pénalement qualifiables, ne retire pas nécessairement à ces faits le caractère d’un manquement aux obligations éthiques.

(…)

AVIS

En raison des principes ci-dessus rappelés, la commission d’éthique estime au vu des pièces et des observations produites par le Dr U.____, membre du CIO et président de C.____ que :

1-° sur le principe d’une commission de 10% prélevée sur le montant de contrats sur les droits TV ou Marketing et perçue par un membre du CIO :

le fait que le prélèvement de 10% du montant des contrats sur les droits TV et marketing soit autorisé par un règlement interne de C.____ est sans influence sur le caractère éthique ou non d’une telle pratique ;

le paiement d’un pourcentage sur le montant d’un contrat, du fait de l’ignorance et des variations du montant de l’assiette sur lequel [sic] le pourcentage est prélevé, ne peut garantir aucune transparence du montant perçu ; cela est donc totalement différent d’un montant contractuellement négocié au sein d’une organisation pour un travail dont la durée et la responsabilité sont définies ; par ailleurs, les montants des contrats sur les droits de télévision ou marketing se révèlent être si importants que l’application du taux de 10% sur de tels montants représente des sommes qui ne peuvent pas être considérées comme proportionnées au temps et à l’effort fournis pour la négociation du seul montant des droits, les frais étant pris en charge par ailleurs ; en outre, en raison du but social des FI, une procédure totalement transparente est indispensable pour le versement de tels montants ;

en l’espèce, selon les textes internes à la fédération, le président détient seul le droit d’autoriser la négociation et de signer les contrats en cause ; l’opacité de la gestion comptable, démontrée par la présentation des comptes de l’année 2000 qui ne laisse pas apparaître le versement de commissions au président pour un montant de
CHF 8’200'000.-, est l’illustration de l’absence de transparence ;

en conséquence et en raison de son absence de transparence, la commission d’éthique estime que cette pratique est contraire aux principes éthiques fondamentaux de l’Olympisme tels qu’exposés ci-dessus.

(…)

RECOMMANDATIONS

Au vu des considérations ci-dessus exposées, la commission d’éthique, après avoir pris connaissance des observations du Dr U.____ et de C.____ et après en avoir délibéré (…) recommande à la commission exécutive du CIO :

1) de rappeler la nécessité de respecter les principes éthiques fondamentaux de l’Olympisme, évoqués ci-dessus, au sein du Mouvement olympique ;

2) de prendre les mesures appropriées pour s’assurer que les fonds alloués par le CIO à toutes les organisations au sein du Mouvement olympique ne soient utilisés que pour le sport ;

3) de rappeler à C.____ son obligation de respecter les Principes fondamentaux de la Charte olympique, notamment en ce qui concerne l’usage des ressources olympiques ;

4) de prononcer un ferme avertissement à l’encontre de Dr U.____, membre du CIO. »

b) Dans cette décision, la Commission d’éthique du CIO a également rappelé la portée du principe selon lequel « l’argent du sport doit aller au sport » en ces termes :

« [il] est fondé sur les valeurs qui inspirent depuis l’origine l’idéal et la conduite du Mouvement olympique. En conséquence, il n’est pas nouveau et ne peut être ignoré par les membres de la famille olympique. (…) Il apparaît ainsi que les pratiques des FI, reconnues par le CIO comme faisant partie du Mouvement olympique, ne peuvent être contraires à cet idéal olympique. (…) [Ce principe] ne s’oppose pas à la prise en charge par les organisations sportives des frais d’administration et de fonctionnement de l’organisation elle-même, tels le paiement des loyers, des salaires des employés et de ceux qui se consacrent à l’administration du sport, des remboursements des frais de transport, de séjour et autres dépenses justifiées imposées par l’exercice des fonctions, comme des justes compensations pour les débours légitimes ou les manques à gagner, cela conformément aux pratiques particulières de chaque organisation sportive. »

La Charte olympique précise à cet égard que « tous les bénéfices provenant des célébrations des Jeux Olympiques doivent être employés au développement du mouvement olympique et du sport. »

c) Les parties divergent quant à la signification du principe selon lequel « l’argent du sport doit aller au sport » et ses limites.

D’après C.____, ce principe appartiendrait au « noyau dur » des normes essentielles, imposées par la finalité non lucrative du sport, lesquelles visent à assurer l’intégrité des personnes et des organisations appartenant au Mouvement olympique, le désintéressement de leurs dirigeants et la prévention des conflits d’intérêts. C.____ est ainsi d’avis que ses statuts, règlements, pratiques et activités devraient également respecter et mettre en œuvre le principe précité en matière de rémunération, y compris s’agissant de la rémunération de son président.

Pour U.____, le principe susmentionné n’aurait pas pour objet de limiter, ni de réglementer la façon dont une fédération sportive doit se financer, mais aurait pour seule conséquence que les fonds versés par le CIO à C.____ ne doivent pas être utilisés à d’autres fins qu’à des fins sportives, sous réserve de ses frais administratifs. U.____ estime en l’occurrence avoir respecté ce principe, en ce sens qu’il allègue n’avoir jamais touché à des fins personnelles quelque montant que ce soit qui aurait été versé par le CIO à C.____.

En l’occurrence, l’expert L.____, directeur exécutif de l’Académie Internationale des Sciences et Techniques du Sport (AISTS) à [...] (expert en marketing et management sportifs, mandaté en première instance), a confirmé l’allégation de C.____, selon laquelle le principe « l’argent du sport doit aller au sport » pouvait être considéré comme faisant partie du « noyau dur » des normes essentielles régissant le Mouvement olympique. Selon lui, le paiement à U.____ de commissions relatives à la négociation et à la conclusion de contrats portant sur des droits télévisés (diffusion de matchs de [...]) ne s’opposait toutefois pas au principe précité. L’expert a renoncé à se prononcer sur le caractère potentiellement redondant des commissions versées à U.____ eu égard à sa rémunération fixe annuelle et sur leur caractère proportionné.

10. Le 17 mai 2004, U.____ a annoncé sa démission du CIO, avec effet, semble-t-il, à la fin du même mois. L’annonce de la démission d’U.____ est ainsi intervenue quelques mois avant la tenue des Jeux Olympiques d’Athènes en août 2004. Contrairement à ce que C.____ soutient, le statut de membre d’U.____ au sein du CIO devait, de toute façon, expirer à la fin de l’année 2004, conformément à l’art. 33 de la Charte olympique qui dispose que « tout membre du CIO perd sa qualité de membre à la fin de l’année civile au cours de laquelle il atteint l’âge de 70 ans, sous réserve du TAR article 7.2.7.1 », le prénommé ayant eu 70 ans le […] avril 2004.

11. Lors de sa séance du 7 août 2004, la Commission exécutive du CIO a débattu la question de savoir si des sanctions pouvaient être appliquées à l’égard d’une personne (soit U.____) qui avait démissionné ou quitté le CIO à la suite d’une infraction au Code d’éthique, mais qui continuait de faire partie du Mouvement olympique à un autre titre. Si la Commission exécutive du CIO n’a prononcé aucun avertissement à l’encontre d’U.____, elle a en revanche approuvé les trois premières recommandations ressortant de la décision de la Commission d’éthique du 14 mai 2004.

12. U.____ a vraisemblablement eu rapidement connaissance des décisions prises par la Commission d’éthique puis par la Commission exécutive du CIO à son encontre. A ce sujet, l’ancien Président de C.____, D.____, entendu en qualité de témoin en première instance, a déclaré qu’il pensait qu’au moment où U.____ avait donné sa démission du CIO, soit le 17 mai 2004, celui-ci avait connaissance de la décision prise trois jours plus tôt par la Commission d’éthique du CIO et notamment de sa recommandation de prononcer un ferme avertissement à son encontre.

Tel ne semble pas avoir été le cas des membres du Conseil d’administration de C.____ et de ses autres organes, auxquels U.____ aurait caché le plus longtemps possible l’existence des procédures (pénale et « disciplinaire ») dirigées à son encontre. D’après D.____, seul le Directeur Général de C.____, B.____, avait connaissance de l’enquête menée par la Commission d’éthique du CIO et de la décision prise par la Commission exécutive du CIO, décisions qu’il aurait tenues secrètes. Pour sa part, G.____, membre du Conseil d’administration et de la Commission des finances de C.____ depuis respectivement 2002 et 1998, qui a été entendu en qualité de partie en première instance, a déclaré qu’il n’avait été informé du fait qu’U.____ avait fait l’objet d’une enquête par devant la Commission d’éthique du CIO qu’en 2009, à l’occasion d’une réunion de la Commission des finances de C.____ qui s’était tenue les 25 et 26 février 2009, réunion à laquelle il sera fait référence ci-après (cf. infra ch. 21). Il a précisé que si les organes de C.____ avaient été informés plus tôt de l’existence de cette enquête, ils n’auraient jamais accepté la poursuite des pratiques en matière de commissions. Le témoin W.____, membre du Conseil d’administration de C.____ de 2002 à 2006 et membre de sa Commission juridique depuis 1994, a quant à lui déclaré qu’il n’avait pas non plus eu connaissance des décisions du CIO, en particulier de celle de la Commission d’éthique, lorsqu’il avait voté la décharge d’U.____ entre 2003 et 2006 (cf. infra ch. 16). Il a exposé qu’en tant que membre de la Commission juridique, il n’avait commencé à prendre conscience des problèmes liés au CIO qu’à partir de 2009. Auparavant, en tant que membre à la fois de la Commission juridique et du Conseil d’administration de C.____, il n’avait pas été mis au courant des procédures concernant U.____. Enfin, le témoin N.____, membre du Conseil d’administration de C.____ depuis 2000, a déclaré, lors de son audition en première instance, qu’il entendait parler pour la première fois de l’existence d’une procédure ouverte par devant la Commission d’éthique du CIO à l’encontre d’U.____, ce dernier n’en ayant jamais parlé aux membres du Conseil d’administration.

13. a) Le 13 décembre 2004, le Juge d’instruction du canton de Vaud a rendu une ordonnance de non-lieu à l’égard d’U.____, ordonnance contre laquelle X.____ a interjeté recours.

b) Par arrêt du 9 février 2005, le Tribunal d’accusation du canton de Vaud a confirmé l’ordonnance de non-lieu précitée s’agissant du chef d’accusation de gestion déloyale et a renvoyé l’affaire en jugement s’agissant des deux autres chefs d’accusation, à savoir les infractions de faux renseignements sur des entreprises commerciales et de faux dans les titres.

14. Lors de sa séance des mois d’avril et de mai 2005, le Conseil d’administration de C.____ a donné décharge à U.____ pour sa gestion des exercices financiers 2000 et 2001 et lui a délivré une « motion de confiance ».

15. a) Le 8 mars 2006, U.____ a comparu par devant le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne (ci-après : le Tribunal de police) en qualité d’accusé de faux renseignements sur des entreprises commerciales et de faux dans les titres. Les faits qui lui étaient reprochés portaient, en substance, sur l’encaissement de commissions d’un montant total de 8'320'000 fr. pour la seule année 2000.

b) Par jugement du 15 mars 2006, U.____ a été libéré des deux chefs d’accusation précités. Il a toutefois été condamné à payer une partie des frais de la cause, dans la mesure où le Tribunal de police a retenu qu’il avait « objectivement commis un faux dans les titres en introduisant dans le rapport financier 2000/2001 destiné au Congrès de C.____ de septembre 2002 un rapport d’organe de contrôle externe sur l’exercice 2000 sans l’annexe faisant partie intégrante dudit rapport » et précisé qu’il avait « violé une norme de comportement écrite ou non écrite résultant de l’ordre juridique suisse pris dans son ensemble » et « violé, au moins par négligence, la règle qui veut que l’on produise un document dans son intégralité ».

Pour le surplus, le Tribunal de police a constaté ce qui suit :

« l’instruction aux débats, qui a inévitablement débordé sur cette question d’encaissements de commissions, a révélé que depuis 1990, diverses décisions et résolutions ont été prises par les instances de C.____, en particulier par le Conseil d’administration et par les congrès bisannuels, prévoyant le versement d’une commission fixe de négociation de 10% quand le contrat est négocié entièrement en dehors d’une agence de marketing. Il ressort aussi de l’instruction que lorsque les fédérations internationales œuvrant dans le domaine du sport passent par l’intermédiaire d’agents pour négocier des droits de diffusion et de commercialisation, les pourcentages accordés à ces agents peuvent s’élever jusqu’à 30%. Cet élément a déjà été pris en considération par le Tribunal d’accusation pour confirmer partiellement le non-lieu. »

16. Durant la présidence d’U.____, le versement de commissions à ce dernier, institutionnalisé par le Règlement financier de C.____, n’a jamais été sérieusement remis en question par celle-ci. Une année avant qu’U.____ ne démissionne de ses fonctions de président, le Conseil d’administration de C.____ lui a en effet donné décharge, lors de sa séance du 19 mai 2007, « pour sa gestion et son éventuelle responsabilité financière en relation avec les exercices 2000 à 2006, en particulier en ce qui concerne les contrats qu’[il] avait pu négocier au bénéfice de C.____ et en relation avec les commissions qu’il avait reçues et qui lui restaient dues ». Si U.____ n’a pas caché que cette décharge avait été établie en réponse à sa « demande urgente » du 15 mai 2007, force est d’admettre que les membres du Conseil d’administration l’ont ainsi autorisé à percevoir l’ensemble de ses commissions pour les contrats négociés sur la période de 2000 à 2006. S’agissant des futurs contrats, le Conseil d’administration a néanmoins décidé, lors de cette même séance, à l’unanimité, que la commission serait versée à U.____ à la fin de chaque année, à raison de 5% à la signature du contrat, et, à raison de 5% après réception par C.____ de tous les paiements partiels y relatifs.

17. Lors du Congrès mondial de C.____ qui s’est tenu les 16 et 17 juin 2008 à Dubaï, U.____ a annoncé son départ de la présidence avec effet à la fin des Jeux Olympiques de Pékin, soit au 24 août 2008. A la suite de sa démission, U.____ a été élu, à l’unanimité du Congrès, Président honoraire à vie de C.____. A cette occasion, il a informé les membres du Comité exécutif de C.____ de la liste des contrats en cours de négociation. Proche du départ, il leur a demandé si une autre personne que lui souhaitait poursuivre les négociations entreprises avec les partenaires commerciaux concernés. Les membres dudit Comité lui ont répondu qu’il pouvait poursuivre et finaliser lui-même les négociations déjà entamées.

18. a) Dans ses écritures, C.____ décrit U.____ comme une personne à la fois charismatique et autoritaire, parvenue à imposer ses vues à ses membres et organes grâce à son intelligence et son habileté, ainsi qu’à mettre en place une organisation devenue au fil du temps de moins en moins transparente et démocratique, l’intéressé s’étant réservé un pouvoir toujours plus étendu en sa qualité de président.

b) Cette description a notamment été confirmée par le témoin S.____. Celui-ci a en effet déclaré qu’U.____ avait réussi à intimider son équipe pour asseoir son autorité grâce à son charisme et son habileté. Selon ce témoin, l’épouse d’U.____ avait joué un rôle important à cet égard, en ce sens qu’en tant que secrétaire de C.____ elle s’assurait que tout le monde obéisse aux ordres et, pour ce faire, passait de délégué en délégué lors des Congrès pour s’assurer que personne n’émette la moindre objection, celle-ci l’ayant personnellement menacé à une occasion de lui enlever le micro s’il continuait à poser des questions. Le témoin S.____ a ainsi confirmé qu’U.____ était parvenu à exercer une véritable emprise sur les organes de C.____, en désignant notamment des personnes qu’il pensait pouvoir maîtriser, en nommant les membres des commissions et en s’occupant des moindres détails, la plupart du temps sur les conseils de son épouse. Il a indiqué que certains dirigeants lui avaient confié ne pas avoir eu le courage de voter contre U.____ pour ne pas perdre le statut de « tête de séries » que ce dernier avait comme prérogative d’attribuer. Sur ce point, il a relevé que si les membres du Conseil d’administration et du Conseil exécutif de C.____ avaient réellement voulu s’opposer à U.____, ils auraient pu le faire par un vote à 4 contre 1 décidant de ne pas lui payer ses commissions et de recommander au Congrès d’adopter une résolution dans ce sens, mais qu’ils leur avaient « manqué du courage » pour ce faire. S.____ a indiqué que ceux qui dirigeaient aujourd’hui C.____ étaient ceux qui n’avaient pas osé s’ériger contre U.____ et qu’il s’agissait des mêmes personnes qui l’avaient applaudi lors de sa démission et « lui avaient tressé des lauriers dithyrambiques ». Aux dires de ce témoin, U.____ avait ainsi réussi à créer un système que d’autres personnes avaient souhaité pérenniser pour conserver leurs avantages. S.____ a encore indiqué que, lors du Congrès mondial de C.____ qui s’était tenu en mai 2004 à Porto, il avait déclaré qu’il trouvait que « ce n’était pas une bonne idée » lorsqu’il avait été recommandé de voter le maintien du principe du versement des commissions à U.____. Malgré cela, cent cinquante personnes avaient voté en faveur de cette recommandation, dix personnes seulement s’étant abstenues, dont lui-même. S.____ a enfin expliqué que les personnes qui avaient préparé ce vote avaient été assez malignes pour faire dépendre le vote sur le principe du versement des commissions de celui concernant le rapport financier, de sorte qu’en s’opposant au versement de commissions en faveur d’U.____, on remettait en cause le rapport financier.

19. a) C.____ allègue avoir subi une atteinte à son image et à sa réputation suite à ces « affaires de commissions » et au scandale médiatique qui en a découlé, ainsi qu’à la plainte pénale déposée par X.____. C.____ expose s’être retrouvée prise à parti dans des règlements de comptes internes entre U.____ et X.____ dans un premier temps, puis entre U.____ et son directeur général, B.____, dans un second temps.

b) Interrogé en qualité de partie, F.____ a déclaré à ce sujet que « l’affaire X.____» avait été source de grandes tensions entre le CIO et C.____, X.____ ayant reproché à U.____ son absence de transparence et, en particulier, le fait que le détail des commissions qu’il percevait ne figurait pas dans les comptes de C.____. Selon F.____, ces informations, relayées par les médias du monde entier, avaient porté une atteinte grave aux intérêts de C.____, à son image, à sa crédibilité, à sa réputation et à ses relations au sein du Mouvement olympique et dans le monde du sport en général. Il a ajouté qu’elles constituaient aujourd’hui un précédent cité dans la littérature et la presse spécialisée, illustrant les limites du principe selon lequel « l’argent du sport doit aller au sport ».

c) D’autres personnes ayant occupé une fonction au sein de C.____, auditionnées comme témoins en première instance, ont confirmé l’atteinte portée à la réputation de C.____ en raison de l’importance des commissions touchées par U.____.

D.____ a affirmé que l’image de C.____ avait été gravement atteinte par la problématique des commissions perçues par U.____. Selon lui, aucune fédération sportive dans le monde n’avait payé de telles commissions à son président, une telle pratique constituant une infraction à la Charte olympique, à laquelle C.____ était soumise en tant que FI. D.____ a ajouté que pour le CIO, il était incompréhensible que le Président de C.____ ait pu recevoir des commissions en sus d’une rémunération annuelle fixe. Il a déclaré qu’à compter de l’année 2001, la presse au Mexique et en Argentine avait commencé à publier des articles, dans lesquels il était rapporté qu’U.____ avait touché des commissions provenant des fonds du CIO. U.____ lui avait alors expliqué qu’il s’agissait d’un conflit personnel avec un certain « [...] » [réd. il s’agit de [...], alors membre de la Commission exécutive du CIO]. En novembre 2005, à Doha, H.____, alors Président du CIO, lui avait en outre confié que C.____ avait été ridiculisée et qu’il fallait y remédier. D.____ a encore déclaré que C.____ avait mauvaise réputation à cette période et qu’il était difficile de trouver des sponsors. Il a ajouté que, en 2005 toujours, lors d’une session à Singapour, certains membres du CIO avaient voté contre le maintien du [...] comme sport olympique, de sorte que la place du [...] parmi les disciplines olympiques était alors menacée.

Pour sa part, S.____ a déclaré qu’une fois rendues publiques par la presse, ces « affaires de commissions » avaient affecté la réputation de C.____, tout d’abord auprès du CIO, mais également auprès des différents commentateurs du monde sportif, des medias et d’autres organisations mondiales. Ce témoin a ainsi rapporté que, durant les Jeux olympiques d’Athènes en 2004, lorsqu’il s’était présenté comme un représentant du [...], on l’avait regardé et considéré comme le dernier des corrompus. Cette anecdote illustrait selon lui le dommage subi par le [...] et C.____ dans le monde du sport. S.____ a par la suite expliqué les raisons pour lesquelles le scandale avec le CIO avait, à son avis, pris une dimension considérable. A ce sujet, il a exposé qu’après chaque olympiade, il était d’usage que le CIO reverse à différentes fédérations une partie de ses bénéfices, proportionnellement à l’importance qu’avait eu le sport considéré lors des jeux. Le [...] et le [...] comptant à l’époque parmi les sports les plus attractifs, le CIO avait reversé à C.____ des sommes d’argent très importantes, de l’ordre de plusieurs millions de dollars, sur lesquels U.____ s’était à nouveau octroyé une commission de 10%. Pour étouffer le scandale, U.____ avait mis en place une commission d’enquête interne pour démontrer qu’il n’avait pas pris cet argent qui lui avait été versé par erreur. Un montage avait dû être réalisé pour le sortir de ce mauvais pas. Le CIO n’avait toutefois pas accepté cette enquête interne et avait mené la sienne par l’intermédiaire de sa Commission d’éthique. S.____ avait parlé à l’un des membres de cette Commission, Q.____, un juriste très respecté, ancien membre de la Haute Cour d’Australie et ancien Gouverneur général ayant siégé au sein de nombreux organes juridiques dans le monde. Ce dernier ne lui avait communiqué aucun détail sur les résultats de l’enquête, mais après que ceux-ci avaient été transmis au CIO, U.____ avait démissionné du CIO. En raison de sa démission rapide, le rapport d’enquête ne pouvait plus être publié, seuls les rapports concernant les membres encore en fonction pouvant l’être. Il y avait toutefois eu des fuites et beaucoup de gens avaient pris connaissance de son contenu. En définitive, la démission d’U.____ du CIO avait eu pour effet que le [...] n’avait plus été représenté au CIO pendant douze ans et que C.____ avait connu une période de disgrâce et d’isolement au sein du Mouvement olympique.

Quant à W.____, il a déclaré éprouver un sentiment de honte à l’égard de ce qui s’était passé. Il a indiqué qu’à titre personnel, il avait toujours eu des doutes sur l’opportunité du versement de commissions à U.____ et leur caractère adéquat. Il a expliqué qu’il n’avait pas été réélu au Conseil d’administration de C.____ en raison du fait qu’il avait été à la fois membre du Conseil d’administration et de la Commission juridique et que, par définition, être membre de cette commission signifiait être une personne difficile, posant notamment des questions en matière de conflits d’intérêts. Il s’est dit convaincu qu’une partie de l’« instrumentalisation » dont les membres du Conseil d’administration avaient fait l’objet de la part d’U.____ venait du fait que les problèmes liés aux dissensions entre le CIO et C.____ n’avaient pas été portés à la connaissance de la Commission juridique et que la question des conflits d’intérêts n’avait jamais été débattue en son sein. Le témoin W.____ a encore ajouté qu’il considérait qu’U.____ était un avocat très doué, bien plus doué que ceux de la Commission juridique.

20. a) Après le départ d’U.____ de la présidence de C.____, celle-ci a entrepris des vérifications relatives aux commissions qu’elle avait déjà versées au prénommé, ainsi qu’à celles que ce dernier lui réclamait en justice. D’après ses calculs, pour la période de 2000 à 2008, C.____ aurait versé à U.____ des commissions pour un montant d’environ 25'000'000 francs. Cette allégation n’a toutefois pas été confirmée par l’expert-comptable V.____, ce dernier n’ayant pu répertorier que les commissions versées à U.____ de 2006 à 2009 (cf. supra ch. 6 a).

b) Quant aux experts-comptables auditionnés en première instance comme témoins, leurs déclarations n’ont pas apporté plus de lumière à ce propos, celles-ci ayant au contraire démontré à quel point ils étaient mal informés et tenus à l’écart du processus d’approbation et de vérification du calcul des commissions.

P.____, comptable de C.____ entre 2003 et 2005, a exposé que cette dernière tenait à cette époque un tableau de bord interne pour le suivi des contrats relatifs aux droits de télévision et à la publicité et que, sur cette base, un pourcentage était calculé sur certains contrats et une commission versée à U.____. Ce témoin a indiqué qu’il ne s’était toutefois pas occupé du calcul desdites commissions, ni de leurs paiements, cette tâche ayant été confiée à R.____, employé auprès de la fiduciaire [...]. Il a précisé que M.____, ancien trésorier de C.____, auquel F.____ avait succédé, avait travaillé en étroite collaboration avec U.____ sur ce genre de question, ajoutant que ce dernier avait souhaité que le traitement des salaires et des commissions soit externalisé auprès de la fiduciaire [...] pour des raisons de confidentialité.

Pour sa part, R.____ a déclaré qu’U.____ était le seul à lui avoir donné des instructions en relation avec le paiement de commissions, dont il devait préparer les ordres. Il a précisé qu’U.____ lui avait toujours dit que lesdites commissions étaient prévues par les statuts mais qu’il n’avait jamais demandé à voir ceux-ci.

Z.____, réviseur responsable de C.____ de 2005 jusqu’en juin 2009, a quant à lui déclaré qu’il avait vérifié, dans le cadre des révisions de la fédération précitée, le processus d’approbation des « provisions » d’U.____ et que, d’après lui, celles-ci étaient toujours discutées lors d’une discussion finale avec la Commission des finances. Il a indiqué qu’il ne se souvenait plus en détail du processus, mais qu’il lui semblait qu’il appartenait au Conseil d’administration de vérifier et d’autoriser les prélèvements en vue du paiement des commissions. Il a en outre déclaré qu’il ne savait pas qui calculait ces « provisions » mais que, d’après lui, celles-ci étaient approuvées par la Commission des finances. Il a ajouté que s’il avait constaté, dans le cadre du contrôle, qu’U.____ décidait, calculait et ordonnait seul les montants à payer à titre de commissions, sans document justificatif et sans les porter à la connaissance de la Commission des finances, il aurait réagi, car cela n’aurait pas été conforme sous l’angle de la révision.

21. A l’issue d’une réunion qui s’est tenue les 25 et 26 février 2009 – à laquelle a participé A.____ –, la Commission des finances a recommandé au Conseil d’administration de C.____ de i) supprimer de son Règlement financier (2006) l’article 1.6.5 autorisant le versement de commissions pouvant aller jusqu’à 10% aux personnes employées par C.____ (dont son président) et de ii) suspendre le paiement de toute commission à U.____ jusqu’à réception d’un avis de droit.

22. Lors du Conseil d’administration de C.____ qui s’est réuni du 1er au 3 avril 2009, les deux recommandations susmentionnées ont fait l’objet d’un examen approfondi. En préambule de cette séance axée sur la transparence, D.____ a exposé au moins trois raisons s’opposant à la perception par le Président de C.____ de commissions en lien avec des contrats signés par son intermédiaire, à savoir que : i) C.____ est une organisation à but non lucratif, de sorte que l’argent de C.____ doit aller à un fonds public ; ii) conformément à son Règlement financier (2006), le Président de C.____ reçoit chaque année une allocation dont le montant est fixé par le Comité exécutif, de sorte qu’il est déjà rémunéré pour son travail et ne peut toucher aucune indemnité supplémentaire ; iii) tout conflit d’intérêts doit être évité.

A l’unanimité de ses membres, le Conseil d’administration a pris la décision de supprimer, sous réserve d’un avis juridique contraire, la disposition du Règlement financier de C.____ autorisant jusqu’alors le versement de commissions pouvant aller jusqu’à 10% des montants des contrats négociés à des personnes employées par cette dernière. Le Conseil d’administration a également décidé, par 26 voix sur 27, de suspendre le versement de toute nouvelle commission à U.____, le Président D.____ s’étant abstenu. Il sied de préciser que, pour la première fois, les votes ont eu lieu à bulletin secret, aux fins de garantir la liberté de vote de chacun des membres du Conseil d’administration. D’après D.____, U.____ a, quant à lui, pu exercer son droit d’être entendu, ayant été invité par C.____ à se déterminer par écrit, ce qu’il aurait fait en adressant une lettre à presque tous les membres du Conseil d’administration, d’après les déclarations de F.____. A l’issue de cette réunion, il a été rapporté que les relations entre C.____ et la famille olympique s’étaient améliorées et, en particulier, que H.____, Président du CIO, avait estimé que C.____ faisait désormais à nouveau partie de la famille olympique.

23. Dans son rapport financier, établi pour la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009, C.____ a reconnu qu’elle devait à U.____ un montant total de 6'298'946 fr. (valeur au 1er janvier 2009) à titre de commissions pour les contrats qu’il avait conclus en 2008 pour son compte. Sur ce montant, elle lui a versé, en février 2009, la somme de 2'129'603 fr., afférant à la conclusion du contrat [...]. Le paiement du solde a été suspendu, sur décision du Conseil d’administration, dans l’attente de la réception d’un avis de droit.

24. Lors de la séance du Conseil d’administration qui s’est tenue du 14 au 16 avril 2010, l’organe de révision de C.____ a informé les membres dudit conseil du fait qu’un montant de 4'200'000 fr. avait été versé à U.____ en 2009 pour les contrats qu’il avait signés pour le compte de C.____ en 2008, et que tout nouveau versement de commissions était désormais suspendu. L’organe de révision a précisé qu’un montant de 6'200'000 fr., relatif aux commissions prévues pour l’année 2010, avait été inscrit au passif des comptes de C.____, un tel montant étant exigible par U.____ pendant cinq ans, selon le droit suisse. Lors de cette séance, D.____ a déclaré que le versement de commissions à U.____ avait été justifié par le Règlement financier de C.____, mais qu’étant donné qu’U.____ avait touché une rémunération annuelle substantielle, il n’aurait pas dû percevoir des commissions en sus.

25. a) Par lettre non datée, annexée à un courriel du 26 août 2010 adressé au Président D.____, U.____ a proposé de soumettre le litige qui l’opposait à C.____, relatif à la suspension du paiement de ses commissions, à la compétence du Tribunal International du [...] (TIV), plus précisément à sa Chambre d’arbitrage. D.____ a décliné cette proposition, en attirant l’attention d’U.____ sur le fait qu’il aurait dû s’opposer, dans un certain délai qu’il avait en l’occurrence laissé s’écouler, à la décision prise en avril 2009 par le Conseil d’administration de C.____ de supprimer la disposition de son Règlement financier relative au versement de commissions à ses membres et de suspendre le versement de toute nouvelle commission en sa faveur.

b) Par courriel du 27 août 2010, U.____ a répondu à D.____ que, s’agissant d’une procédure arbitrale, les statuts du TIV ne prévoyaient pas le respect d’un quelconque délai pour porter un litige par devant cette juridiction, mais qu’il suffisait d’avoir l’accord écrit de C.____.

26. Les statuts du TIV, dans leur version en vigueur entre 2006 et 2010, prévoyaient, en l’occurrence, les dispositions topiques suivantes :

« 1.1 JURIDICTION

1.1.1 Conformément à l’Art. 2.7 de la Constitution de C.____, le Tribunal International du [...] exercera sa juridiction selon les présents Statuts, dans le but de :

a) résoudre entre des personnes physiques ou juridiques, des Fédérations Nationales et des Confédérations appartenant à C.____, tout litige survenu dans la pratique du [...] en tant que sport, ou lié de façon générale à cette activité, comme le prévoit l’Art. 2.7 de la Constitution de C.____.

b) examiner tout appel d’une décision de l’une des institutions de C.____, comme prévu à l’Art. 2.7 de la Constitution de C.____.

(…)

1.2. AUTORITE DU T.I.V.

1.2.1 Le T.I.V est compétent pour trancher tout litige relatif aux sujets inclus à l’Art. 2.7 de la Constitution de C.____. Il se compose de deux chambres :

a) Chambre d’Arbitrage ;

b) Chambre d’Appel.

1.2.2 La Chambre d’Arbitrage est compétente, conformément à l’Art. 3.1.1 des présents Statuts, pour rendre des décisions arbitrales sur tout litige survenu entre deux ou plusieurs parties.

1.2.3 La Chambre d’Appel est compétente pour réviser toute décision prise par les institutions de C.____ conformément à l’Art. 2.7.2 de la Constitution de C.____, à l’exception des décisions concernant le dopage.

(…)

4.3 FORME ET TERMES DE L’APPEL

4.3.2 L’appel doit être soumis au plus tard dans les trente (30) jours suivant la réception de la notification de la décision contestée. »

L’art. 3.1.1 des statuts du TIV prévoyait par ailleurs que « [p]our accéder à la Chambre d’Arbitrage du TIV, les parties doivent avoir passé un accord écrit sous l’une des formes suivantes : a) comme clause insérée dans un document ou un accord signé par toutes les parties ; b) dans un accord d’arbitrage pour tout litige survenant entre les parties ; c) dans un accord écrit confiant le litige intervenu à la Chambre d’Arbitrage du TIV. »

Enfin, l’art. 2.7.2 de la Constitution de C.____ était libellé comme suit :

« [l]e TIV est compétent pour réviser les décisions prises par les institutions dirigeantes de C.____, quand ces décisions sont considérées contraires aux dispositions et aux termes de la présente Constitution, au Code de Conduite et aux Règlements régissant les activités et les compétitions de [...] ou qui sont contraires aux décisions du Congrès ou du Conseil d’Administration. Toutefois, les appels concernant le dopage doivent être soumis aux Tribunal arbitral du sport. »

27. a) Lors d’une séance du Conseil d’administration de C.____ du
7 septembre 2010, la question des commissions perçues par U.____ a une nouvelle fois été abordée. Les membres du Conseil d’administration ont alors été informés qu’à sa prochaine réunion, le Congrès mondial serait invité (i) à ratifier la décision prise en avril 2009 par le Conseil d’administration de supprimer du Règlement financier de C.____ la disposition autorisant les membres élus de C.____ (y compris le Président) à recevoir des commissions sur des contrats, (ii) à ratifier la décision prise à cette même occasion de cesser le paiement de toute commission à tout membre élu de C.____ (y compris le Président) avec effet rétroactif, et (iii) à déléguer au Conseil d’administration le pouvoir juridique de prendre toute décision dans l’intérêt général de C.____ relatives aux questions restées en suspens.

b) Réuni à Rome les 10 et 11 septembre 2010, le Congrès mondial de C.____ a entièrement validé les trois propositions susmentionnées.

28. En réponse au courriel d’U.____ du 27 août 2010, D.____ a rappelé à celui-ci la nécessité de faire appel de la décision prise le 7 septembre 2010 par le Conseil d’administration de C.____, conformément à la procédure.

29. Par courrier recommandé de son conseil du 20 janvier 2011, U.____ a formellement mis en demeure C.____ de lui verser le montant de
4'069'343 fr. à titre de commissions dues pour les contrats conclus pour le compte de celle-ci jusqu’en 2008.

30. Les prétentions d’U.____ en paiement de plusieurs soldes de commissions, soulevées dans la présente procédure, peuvent être chronologiquement résumées comme suit :

1) Contrat [...] 07 : U.____ réclame le paiement en sa faveur d’un solde de commissions de 112'500 EUR (cf. conclusion III de sa demande). Il fonde cette prétention sur une facture datée du 11 mars 2008, relative à un contrat portant sur des droits de diffusion TV et de marketing conclu avec la société polonaise [...]. D’un montant de 365'600 EUR, cette facture, émise par U.____, a été approuvée par le trésorier de C.____, F.____, ainsi que l’atteste la présence de sa signature. En date du 30 mai 2008, C.____ a versé à U.____ un montant de 282'800 EUR afférant à ce contrat.

2) Contrat [...] 07 : U.____ réclame le paiement en sa faveur d’un solde de commissions de 55'000 USD (cf. conclusion II de sa demande). Il fonde cette prétention sur une facture qu’il a émise le 11 mars 2008, se référant à la vente de droits de télévision à la société [...] pour les Championnats du monde de [...] 2010. D’un montant de 220'000 USD, cette facture a été approuvée par F.____. C.____ s’en est partiellement acquittée en versant à U.____ un montant de 165'000 USD en date du 27 mai 2008.

3) Contrat [...] : U.____ réclame le paiement en sa faveur d’un solde de commissions de 277'500 EUR (cf. conclusion III de sa demande). Il fonde cette prétention sur une facture datée du 15 août 2008, se référant à un contrat de partenariat conclu avec la société [...], laquelle a fourni à C.____ des sols synthétiques pour l’ensemble de ses compétitions de 2009 à 2012. D’un montant de 337'500 EUR, cette facture a été approuvée par F.____ et D.____. L’expert V.____ a constaté que le contrat [...], d’un montant initial de 3'375'000 EUR, avait été réduit à 2'160'000 EUR, montant dont la société [...] s’était entièrement acquitté auprès de C.____ en plusieurs versements effectués du 9 septembre 2008 au 3 août 2012. C.____ n’a versé aucune commission à U.____ en relation avec ce contrat.

4) Contrat [...] 08 : U.____ réclame le paiement en sa faveur d’un solde de commissions de 1'337'500 fr. (cf. conclusion I de sa demande). Il fonde cette prétention sur une facture datée du 15 août 2008, se référant à la négociation des droits de diffusion de télévision mondiaux pour les tournois de qualification mondiale aux Jeux Olympiques de Londres (2012) avec la Fédération japonaise de [...]. D’un montant de 1’675'000 fr., la facture précitée a été approuvée par F.____ et D.____. C.____ n’a versé aucune commission à U.____ en relation avec ce contrat. Dans son complément d’expertise, l’expert-comptable V.____ a relevé que, sur le montant initial du contrat conclu avec la société [...] (soit la somme de 16'750'000 fr.), C.____ avait encaissé un montant de 14'250'000 fr. entre le 21 novembre 2009 et le 23 juin 2012, le solde de 2'500'000 fr. couvrant les frais d’organisation ayant été directement payé par la société précitée à la Fédération japonaise de [...].

5) Contrat [...] 08 : U.____ réclame le paiement en sa faveur d’un solde de commissions de 332'500 EUR (cf. conclusion III de sa demande). Il fonde cette prétention sur une facture datée du 15 août 2008, relative à un contrat de diffusion et de marketing conclu avec la société polonaise [...]. D’un montant de 2'590'000 EUR, la facture précitée, émise par U.____, a été approuvée par F.____ et D.____. S’agissant de ce contrat, l’expert-comptable a constaté que C.____ avait encaissé, sur la période du 3 janvier 2009 au 2 décembre 2014, un montant total de 25'900'000 EUR, sur lequel elle a reversé à U.____ un montant de 1'382'500 EUR en date du 12 février 2009.

Pour résumer, U.____ réclame le paiement en sa faveur des trois montants suivants :

· 1'337'500 fr. (cf. conclusion I de sa demande) ;

· 55'000 USD (cf. conclusion II de sa demande) ;

· 722'500 EUR (112'500 EUR + 277'500 EUR + 332'500 EUR) (cf. conclusion III de sa demande).

31. a) Par requête de conciliation du 24 mars 2011, U.____ a ouvert action à l’encontre de C.____ par devant la Chambre patrimoniale cantonale.

La conciliation entre les parties ayant échoué à l’audience du 23 mai 2011, U.____ s’est vu délivrer une autorisation de procéder.

b) Par demande du 22 août 2011, U.____ a conclu, sous suite de frais et dépens, à ce que C.____ soit astreinte à lui payer les montants de
1'337'500 fr. avec intérêts à 5% l’an dès le 20 janvier 2011 (I), 55'000 USD avec intérêts à 5% l’an dès le 20 janvier 2011 (II) et 722'500 EUR avec intérêts à 5% l’an dès le 20 janvier 2011 (III).

c) Par courrier du 17 novembre 2011, C.____ a requis d’être autorisée à limiter sa réponse à la question de la compétence de la Chambre patrimoniale cantonale pour connaître du présent litige.

Par prononcé du 19 décembre 2011, la Juge déléguée de la Chambre patrimoniale cantonale (ci-après : la Juge déléguée) a en substance rejeté cette requête.

d) Le 3 janvier 2012, C.____ a déposé sa réponse, au pied de laquelle elle a conclu, avec dépens, au rejet des conclusions de la demande d’U.____.

e) U.____ a déposé une réplique le 25 mai 2012, tandis que C.____ a déposé une duplique le 18 septembre 2012.

Le 17 décembre 2012, U.____ a encore déposé des déterminations sur les derniers allégués contenus dans la duplique de C.____.

f) Plusieurs audiences d’instruction ont été tenues par devant la Juge déléguée, lors desquelles six personnes - dont U.____ – ont été entendues en qualité de parties et quinze personnes ont été entendues en qualité de témoins. Leurs déclarations ont été reprises dans la mesure nécessaire à l’établissement des faits retenus ci-dessus.

g) En cours de première instance, une expertise a été mise en œuvre et confiée aux experts K.____, L.____ et V.____. Ces derniers ont rendu un rapport d’expertise commun le 26 août 2016.

Tant C.____ qu’U.____ ont requis qu’un complément d’expertise soit ordonné. Par courrier du 15 février 2017, C.____ a ainsi formulé plusieurs réquisitions en complément d’expertise, dont une réquisition « XVIII » qui tendait en substance à ce que les experts soient invités, dans le cadre d’une audition à appointer ou d’un rapport explicatif, à « répondre à la question spécifique objet de l’expertise, qui est d’évaluer, de déterminer et de dire si et dans quelle mesure les commissions réclamées par [U.____] dans le cadre de la présente procédure sont ou non compatibles avec les limites découlant du principe selon lequel « l’argent du sport doit aller au sport » ».

Le 17 novembre 2017, la Juge déléguée a ordonné un complément d’expertise en lien avec certaines des réquisitions formulées par les parties. Elle en a informé ces dernières par courrier du même jour, en leur précisant que pour ce qui était du « solde » de leurs réquisitions, elle considérait que celles-ci relevaient de l’appréciation et qu’il appartiendrait à la Chambre patrimoniale cantonale, pour le surplus, d’apprécier le rapport déposé par les experts et d’écarter les considérations qui outrepasseraient le mandat confié. Le complément d’expertise ordonné ne portait pas sur la réquisition XVIII susmentionnée, formulée par C.____.

Le 24 juillet 2018, K.____, L.____ et V.____ ont déposé leur rapport d’expertise complémentaire.

Les éléments essentiels ressortant de ce rapport et de celui du 26 août 2016 ont été repris dans la mesure nécessaire à l’établissement des faits retenus ci-dessus.

h) Les parties ont chacune déposé des plaidoiries écrites le 31 octobre 2019, ainsi que des plaidoiries écrites responsives le 10 décembre 2019.

Par courrier du 16 décembre 2019, le conseil de C.____ a sollicité la « la fixation d’un bref et unique délai de dix jours, au 13 janvier 2020, compte tenu des féries judiciaires », afin de pouvoir se déterminer sur le mémoire responsif d’U.____, lequel lui avait été transmis le 13 décembre 2019.

Par correspondance du 19 décembre 2019, la Juge déléguée a rejeté cette requête, au motif que « chaque partie a[vait] disposé de deux tours d’expression (plaidoiries et plaidoiries responsives) », que « l’art. 232 CPC précisait clairement que chaque partie a[vait] le droit de plaider deux fois uniquement » et que le droit de réplique ne pouvait être invoqué pour bénéficier de tours de parole (en l’occurrence par écrit) que la loi excluait.

i) La Chambre patrimoniale cantonale a délibéré à huis clos sur la présente cause le 4 février 2020.

En droit :

1.

1.1 Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable contre les décisions finales de première instance pour autant que la valeur litigieuse, au dernier état des conclusions devant l'autorité inférieure, soit de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 1 let. a et al. 2 CPC). L'appel, écrit et motivé, doit être introduit dans les trente jours à compter de la notification de la décision motivée (art. 311 al. 1 CPC).

1.2 En l'espèce, formé en temps utile par une partie qui a un intérêt digne de protection (art. 59 al. 2 let. a CPC) et portant sur des conclusions supérieures à 10'000 fr., l'appel est recevable.

2. L’appel peut être formé pour violation du droit ou pour constatation inexacte des faits (art. 310 CPC). L’autorité d’appel peut revoir l’ensemble du droit applicable, y compris les questions d’opportunité ou d’appréciation laissées par la loi à la décision du juge, et doit le cas échéant appliquer le droit d’office conformément au principe général de l’art. 57 CPC. Elle peut revoir librement la constatation des faits sur la base des preuves administrées en première instance (JdT 2011 III 43 consid. 2 et les références).

Le libre pouvoir d’examen ne signifie pas que le juge d’appel soit tenu, comme une autorité de première instance, d’examiner toutes les questions de fait ou de droit qui peuvent se poser, lorsque les parties ne les font plus valoir devant lui. Sous réserve de vices manifestes, il peut se limiter aux arguments développés contre le jugement de première instance dans la motivation écrite (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4).

3.

3.1 A l’appui de son appel, l’appelante invoque en premier lieu une violation de son droit d’être entendue, plus spécifiquement de son droit de réplique, de son droit à la preuve, ainsi que de son droit à l’obtention d’une décision motivée.

3.2

3.2.1 L’appelante fait d’abord valoir que la Juge déléguée de la Chambre patrimoniale cantonale aurait violé son droit inconditionnel à la réplique, en rejetant sa requête du 16 décembre 2019 tendant à ce qu’un délai au 13 janvier 2020 lui soit imparti pour se déterminer sur le mémoire de plaidoiries écrites responsives déposé par l’intimé le 10 décembre 2019.

3.2.2 Compris comme l'un des aspects de la notion générale de procès équitable au sens des art. 29 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 ; RS 101), le droit d'être entendu garantit notamment au justiciable le droit de s’expliquer avant qu’une décision ne soit prise à son détriment, d’avoir accès au dossier, de prendre connaissance de toute argumentation présentée au tribunal et de se déterminer à son propos, dans la mesure où elle l'estime nécessaire, que celle-ci contienne ou non de nouveaux éléments de fait ou de droit, et qu'elle soit ou non concrètement susceptible d'influer sur le jugement à rendre. Il appartient aux parties, et non au juge, de décider si une prise de position ou une pièce nouvellement versée au dossier contient des éléments déterminants qui appellent des observations de leur part (ATF 142 III 48 consid. 3.2). Ce droit à la réplique vaut pour toutes les procédures judiciaires. Toute prise de position ou pièce nouvelle versée au dossier doit dès lors être communiquée aux parties pour leur permettre de décider si elles veulent ou non faire usage de leur faculté de se déterminer (ATF 146 III 97 consid. 3.4.1 ; ATF 142 III 48 consid. 4.1.1 ; ATF 139 I 189 consid. 3.2).

Le droit de répliquer n'impose pas à l'autorité judiciaire l'obligation de fixer un délai à la partie pour déposer d'éventuelles observations. Elle doit seulement lui laisser un laps de temps suffisant, entre la remise des documents et le prononcé de sa décision, pour qu'elle ait la possibilité de déposer des observations si elle l'estime nécessaire (ATF 146 III 97 consid. 3.4.1 ; ATF 142 III 48 consid. 4.1.1 ;
ATF 138 I 484 consid. 2.4). Les règles qui précèdent s’appliquent également lorsque les parties ont renoncé aux plaidoiries orales et déposent des plaidoiries écrites. Dans un tel cas de figure, l’art. 232 al. 2 CPC n’oblige en effet pas le tribunal à leur fixer un délai pour déposer de secondes plaidoiries finales écrites. En revanche, comme pour toute prise de position ou pièce nouvelle versée au dossier, le tribunal doit impérativement communiquer aux parties la plaidoirie de la partie adverse et leur laisser un laps de temps suffisant pour qu’elles puissent exercer leur droit inconditionnel de réplique découlant des art. 29 al. 2 Cst. et 6 CEDH (Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ; RS 0.101) (ATF 146 III 97 consid. 3.5.1).

Le Tribunal fédéral considère qu'un délai inférieur à dix jours ne suffit pas à garantir l'exercice du droit de répliquer, tandis qu'un délai supérieur à vingt jours permet, en l'absence de réaction, d'inférer qu'il a été renoncé au droit de répliquer. En d'autres termes, une autorité ne peut considérer, après un délai de moins de dix jours depuis la communication d'une détermination à une partie, que celle-ci a renoncé à répliquer et rendre sa décision (TF 1B_502/2017 du 7 février 2018 consid. 2.1 ; TF 5A_614/2015 du 16 octobre 2015 consid. 3.1).

3.2.3 En l’espèce, les parties ont déposé chacune, dans les délais leur ayant été impartis pour ce faire, d’abord des plaidoiries écrites le 31 octobre 2019, puis des plaidoiries écrites responsives le 10 décembre 2019. Cela étant, l’appelante se plaint de ne pas s’être vu accorder la possibilité de se déterminer sur la plaidoirie écrite responsive de l’intimé, au motif que la Juge déléguée a rejeté sa requête tendant à ce qu’un délai lui soit imparti à cette fin. La fixation d’un tel délai n’était toutefois pas nécessaire pour que le droit de réplique de l’appelante soit respecté. Il suffisait à cet effet qu’une copie du mémoire responsif de l’intimé lui soit transmise et qu’un délai raisonnable lui soit ensuite laissé pour qu’elle puisse exercer le cas échéant son droit de réplique spontané avant qu’une décision soit rendue. Or, tel a été le cas puisque le mémoire responsif de l’intimé a été communiqué à l’appelante le 13 décembre 2019 et que la Chambre patrimoniale cantonale a délibéré sur la présente cause le
4 février 2020, soit près de deux mois plus tard. L’appelante a ainsi eu tout loisir de faire valoir spontanément ses observations sur la dernière écriture de l’intimé dans le délai d’environ 10 jours que la jurisprudence considère comme étant raisonnable à cette fin. Elle ne l’a pas fait, de sorte qu’elle ne peut valablement soutenir que son droit de réplique aurait été violé.

Partant, le grief doit être rejeté.

3.3

3.3.1 L’appelante invoque également une violation de son droit à la preuve, au motif que la Juge déléguée a refusé de donner suite à sa réquisition en complément d’expertise « XVIII », qui tendait en substance à ce que les experts soient invités à répondre spécifiquement à la question de savoir si et dans quelle mesure les commissions réclamées par l’intimé dans le cadre de la présente procédure étaient ou non compatibles avec les limites découlant du principe selon lequel « l’argent du sport doit aller au sport ». L’appelante reproche en substance à la Juge déléguée d’avoir considéré qu’il s’agissait là d’une question d’appréciation juridique et estime que l’expertise doit être complétée sur ce point essentiel, faute de quoi elle serait privée d’une preuve adéquate, portant sur un fait pertinent et offerte en temps utile. Elle requiert que cette mesure d’instruction soit administrée dans le cadre de la procédure d’appel, subsidiairement qu’elle le soit par l’autorité de première instance, la cause lui étant renvoyée à cette fin.

3.3.2

3.3.2.1 Sous l’angle de la procédure, le droit d’être entendu des parties (rappelé formellement à l’art. 53 al. 1 CPC) inclut celui de faire administrer des preuves à l'appui de leurs demandes ou défenses en justice (art. 29 al. 2 Cst. ; Schweizer, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2e éd., 2019, n. 1 ad
art. 152 CPC).

Le droit à la preuve, découlant de l'art. 152 al. 1 CPC, n'existe que s'il s'agit d'établir un fait pertinent, qui n'est pas déjà prouvé, par une mesure probatoire adéquate, laquelle a été régulièrement offerte en temps utile selon les règles de la procédure (ATF 138 V 125 consid. 2.1 ; ATF 135 I 187 consid. 2.2 ; TF 8C_558/2016 du 4 mai 2017 consid. 5.2 ; TF 4A_381/2016 du 29 septembre 2016 consid. 3.1.2). Par moyens de preuve « adéquats », il faut comprendre ceux qui sont aptes à forger la conviction du tribunal sur la réalité d'un fait pertinent, autrement dit dont la démonstration peut avoir une incidence sur l'issue du litige (Schweizer, op. cit. n. 8 ad art. 152 CPC). Selon l'art. 157 CPC, le tribunal établit sa conviction par une libre appréciation des preuves administrées.

Le droit à la preuve ne s'oppose pas à ce que l'autorité mette un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de forger sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient pas l'amener à modifier son opinion (ATF 141 I 60 consid. 3.3 ; ATF 140 I 285 consid. 6.3 ; ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; ATF 136 I 229 consid 5.3 ; ATF 134 I 140 consid. 5.3) ou lorsque le moyen de preuve n'est d'emblée pas susceptible de prouver l'allégation (TF 5A_645/2016 du 18 mai 2017 consid. 3.2.1).

3.3.2.2 L’instance d’appel peut administrer les preuves (art. 316 al. 3 CPC), notamment lorsqu’elle estime opportun de renouveler l’administration d’une preuve ou d’administrer une preuve alors que l’instance inférieure s’y était refusée, de procéder à l’administration d’une preuve nouvelle ou d’instruire à raison de conclusions ou de faits nouveaux (Jeandin, Commentaire romand, Code de procédure civile, op. cit., n. 5 ad art. 316 CPC). L’art. 316 al. 3 CPC ne confère pas à l’appelant un droit à la réouverture de la procédure probatoire et à l’administration des preuves. L’instance d’appel peut rejeter la requête de réouverture de la procédure probatoire et d’administration d’un moyen de preuve déterminé si l’appelant n’a pas suffisamment motivé sa critique de la constatation de fait retenue par la décision attaquée. Elle peut également refuser une mesure probatoire en procédant à une appréciation anticipée des preuves, lorsqu’elle estime que le moyen de preuve requis ne pourrait pas fournir la preuve attendue ou ne pourrait en aucun cas prévaloir sur les autres moyens de preuve déjà administrés par le tribunal de première instance, à savoir lorsqu’il ne serait pas de nature à modifier le résultat des preuves qu’elle tient pour acquis (ATF 138 III 374 ; ATF 131 III 222 consid. 4.3 ;
ATF 129 III 18 consid. 2.6).

3.3.3 En l’espèce, l’expert L.____ a été invité à se prononcer sur l’allégué 103 de la réponse de l’appelante, qui disposait que « les commissions réclamées par [l’intimé] sont contraires aux limites découlant du principe selon lequel « l’argent du sport doit aller au sport » ». En réponse à cet allégué, l’expert a indiqué qu’il envisageait que le paiement de commissions relatives à des négociations de droits télévisés de diffusion du [...] ne s’opposait pas à ce principe. Il a toutefois ajouté qu’il « ne saurait se prononcer sur le caractère redondant des commissions perçues en sus du salaire, ni sur la proportionnalité des commissions réclamées ».

Cela étant, force est de constater que l’expert s’est déterminé sur l’ensemble de l’allégué qui lui était soumis. Il n’a pas omis de se prononcer sur le caractère redondant ou disproportionné des commissions perçues par l’intimé, puisqu’il a expressément indiqué qu’il n’était pas en mesure de confirmer ni d’infirmer ce point. Pour ce motif déjà, le complément d’expertise requis par l’appelante apparaît inutile. Pour le surplus, les éléments au dossier – tels que les déclarations faites par le témoin T.____ quant au taux des commissions facturées à l’appelante par son agence ou les taux de commissionnement ressortant des contrats conclus entre l’appelante et l’agence [...] entre 2009 et 2014 – sont suffisants pour permettre de se forger une conviction quant au caractère potentiellement redondant ou disproportionné des commissions litigieuses. Partant, les premiers juges étaient fondés, par une appréciation anticipée des preuves, à refuser d’administrer la mesure probatoire en cause.

En définitive, le grief tiré d’une violation du droit à la preuve de l’appelante doit être rejeté. Pour les mêmes motifs, il n’y a pas lieu de mettre en œuvre le complément d’expertise requis par l’appelante dans le cadre de la procédure d’appel, d’autant plus que le prétendu caractère disproportionné des commissions perçues par l’intimé n’apparaît pas décisif pour le sort du litige selon les considérations qui seront exposées ci-après (cf. infra consid. 4). La requête en ce sens doit donc également être rejetée.

3.4

3.4.1 L’appelante soutient que les premiers juges auraient omis de prendre en considération et d’examiner plusieurs de ses arguments et/ou de motiver suffisamment leur décision sur ceux-ci, notamment s’agissant des moyens déduits de l’illicéité et de la contrariété aux mœurs qui affecteraient selon elle le fondement et la quotité des commissions litigieuses.

A cet égard, elle relève en substance que les premiers juges auraient raisonné uniquement sur la base de l’hypothèse – contestée – selon laquelle les commissions litigieuses étaient fondées sur une succession de contrats de courtage, à l’exclusion du Règlement financier, lequel aurait eu pour seul but de définir le salaire de l’intimé en tant que courtier. Selon l’appelante, les magistrats n’auraient ainsi pas tenu compte du fondement statutaire des commissions litigieuses, de même que du statut de l’intimé en tant qu’organe dirigeant d’une association non gouvernementale à but non lucratif reconnue d’utilité publique par l’Etat de Vaud et reconnue par le CIO pour administrer le [...] et le [...] au niveau mondial, dont il résulterait un régime juridique particulier et des limites en matière de rémunération qui différeraient de celles applicables à un simple courtier. Elle reproche en outre aux premiers juges d’avoir considéré – à tort – que l’intimé avait démissionné de la présidence avant la conclusion des contrats pour lesquels il réclamait une rémunération et d’en avoir déduit que son droit à percevoir des commissions était de nature contractuelle.

3.4.2 La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu garanti par l'art. 29
al. 2 Cst., ainsi que de l'art. 53 CPC, l'obligation pour les autorités de motiver leurs décisions. Le droit d'être entendu, en tant que droit rattaché à la personnalité permettant de participer à la procédure, exige que l'autorité entende effectivement les arguments de la personne touchée dans sa situation juridique par la décision, qu'elle examine ses arguments avec soin et sérieux, et qu'elle en tienne compte dans la prise de décision. De là découle l'obligation fondamentale des autorités de motiver leurs décisions. Le citoyen doit savoir pourquoi l'autorité a rendu une décision à l'encontre de ses arguments. La motivation d'une décision doit dès lors se présenter de telle manière que l'intéressé puisse le cas échéant la contester de manière adéquate. Cela n'est possible que lorsque tant le citoyen que l'autorité de recours peuvent se faire une idée de la portée d'une décision. Dans ce sens, il faut que les considérations qui ont guidé l'autorité et sur lesquelles elle a fondé sa décision soient à tout le moins brièvement exposées (ATF 129 I 235 consid. 3.2, JdT 2004 I 588). Toutefois, l'autorité n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais elle peut au contraire se limiter à ceux qui, sans arbitraire, lui paraissent pertinents (ATF 143 III 65 consid. 5.2 et les références citées ; ATF 142 III 433 consid. 4.3.2 ; ATF 138 I 232 consid. 5.1). Une motivation implicite, résultant des différents considérants de la décision, suffit à respecter le droit d'être entendu (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1). L'essentiel est que la décision indique clairement les faits qui sont établis et les déductions juridiques qui sont tirées de l'état de fait déterminant (ATF 142 II 154 consid. 4.2 ; TF 5A_570/2017 du 27 août 2018 consid. 4.2). Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l'autorité, le droit à une décision motivée est respecté même si la motivation présentée est erronée (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1 ; TF 5A_741/2016 du 6 décembre 2016 consid. 3.3.1 ; Colombini, Code de procédure civile, Condensé de la jurisprudence fédérale et vaudoise, éd. bis et ter, 2018, n. 3.2.2 ad art. 239 CPC).

3.4.3 En l’espèce, les premiers juges ont relevé, au ch. V du jugement entrepris, que C.____ soutenait que le fondement juridique des commissions litigieuses était illicite, car notamment contraire à son but idéal, au principe selon lequel « l’argent du sport doit aller au sport » et au devoir de fidélité d’U.____ envers elle. Après avoir décrit les principes relatifs à la notion de but idéal des fédérations sportives, ainsi que les règles applicables au devoir de fidélité du sociétaire envers l’association, ils ont considéré – motifs à l’appui – que l’activité de courtage qui avait été exercée par l’intimé n’était pas contraire aux buts poursuivis par l’appelante, ni au principe selon lequel « l’argent du sport doit aller au sport ». Ils ont en outre exposé les raisons pour lesquelles il n’y avait pas lieu de retenir que l’intimé aurait violé son devoir de diligence et de fidélité envers l’appelante, au point que son droit de percevoir des commissions devrait être remis en cause.

Il apparaît ainsi que les premiers juges ont examiné, dans les grandes lignes, la question de l’illicéité, et implicitement de la contrariété aux mœurs qui, aux dires de l’appelante, affecterait le fondement et la quotité des commissions litigieuses, eu égard au but idéal de l’association et au statut de l’intimé au sein de celle-ci. Le fait que les magistrats n’aient pas suivi les points de vue exprimés par l’appelante sur ces questions n’implique pas une violation du devoir de motivation. Il en va de même du fait que l’appelante considère leur raisonnement ou constatations comme étant erronés, notamment s’agissant du fondement contractuel des commissions litigieuses. Force est bien plutôt de constater que le jugement rendu respecte les exigences en matière de motivation, l’appelante ayant d’ailleurs été parfaitement en mesure d’en comprendre les motifs et de contester ceux-ci dans le cadre du présent appel.

En définitive, le grief doit être rejeté.

4.

4.1

4.1.1 L’appelante soutient que les commissions litigieuses ne seraient pas dues, car leur fondement serait illicite et contraire aux mœurs (art. 19 al. 2 et 20 al. 1 CO ; art. 63 al. 2 CC) ainsi qu’à l’ordre public, qu’il soit déduit de ses statuts et de son règlement financier et/ou de prétendus contrats de courtage.

Selon elle, son statut d’association non gouvernementale à but non lucratif reconnue d’utilité publique par l’Etat de Vaud impliquerait que la rémunération de ses organes dirigeants devrait respecter les règles impératives et principes issus du droit fiscal, selon lesquels le dessein de lucre et l’enrichissement personnel desdits organes seraient prohibés. En d’autres termes, l’appelante soutient que compte tenu de sa qualité d’organisation poursuivant un but d’intérêt public – dont dépend son exonération fiscale –, l’activité ordinairement déployée par les membres de ses organes dirigeants permettrait uniquement le remboursement de leurs frais effectifs, notamment des frais de déplacement et de représentation ainsi qu’une indemnisation. Il en irait de même en vertu du principe selon lequel « l’argent du sport doit aller au sport », de sorte qu’à défaut de se conformer à ces règles et limites en matière de rémunération de ses organes dirigeants, l’appelante serait exposée à perdre sa reconnaissance par l’Etat de Vaud comme organisation à but non lucratif d’utilité publique et l’exonération fiscale qui lui est attachée, de même que sa reconnaissance par le CIO en tant qu’unique organisation habilitée à administrer le [...] et le [...] au niveau mondial. L’appelante fait ainsi valoir que les décisions prises par ses organes, consistant à suspendre le versement des commissions litigieuses à l’intimé, avaient pour objectif de mettre son règlement financier et ses pratiques en conformité avec les exigences précitées.

L’appelante soutient en outre que contrairement à ce qu’ont retenu les premiers juges, ce ne serait pas, comme telle, l’activité de l’intimé consistant dans la négociation et la conclusion de contrats avec des partenaires commerciaux qui aurait été contraire à son but, mais le mode de rémunération appliqué, consistant non pas seulement dans une rémunération fixe et un remboursement de frais, mais aussi dans une rémunération variable dépendant du résultat et consistant en les commissions litigieuses. Elle considère qu’en retenant que l’intimé avait tiré de son activité de courtage un enrichissement personnel, les premiers juges auraient fait eux-mêmes la démonstration que le système de rémunération pratiqué était « contraire aux principes exposés et, par conséquent, à l’ordre public et aux bonnes mœurs ».

En définitive, l’appelante soutient qu’il conviendrait de constater d’office la nullité du fondement juridique invoqué par l’intimé à l’appui de ses conclusions, quelle qu’en soit la nature, motif pris de l’illicéité et de la contrariété aux mœurs.

4.1.2

4.1.2.1 A teneur de l'art. 19 al. 2 CO, la loi n'exclut les conventions des parties que lorsqu'elle édicte une règle de droit strict, ou lorsqu'une dérogation à son texte serait contraire aux moeurs, à l’ordre public ou aux droits attachés à la personnalité. L’art. 20 al. 1 CO dispose en outre que le contrat est nul, en particulier si son contenu est illicite ou contraire aux moeurs.

Un contrat est illicite au sens de l’art. 20 al. 1 CO lorsque son objet, sa conclusion avec le contenu convenu ou son but médiat enfreint l'ordre juridique suisse ( ATF 134 III 438 consid. 2.2), qu'il s'agisse de dispositions de droit privé – impératives ou semi-impératives – ou de droit public, fédéral ou cantonal ( ATF 134 III 52 consid. 1.1 ; Guillod/Steffen, Commentaire romand, Code des obligations I,
2e éd., 2012, n. 62 ad art. 19 et 20 CO). Pour qu'il y ait nullité de l'accord, il faut que cette conséquence soit expressément prévue par la loi concernée ou qu'elle découle du sens ou du but de la norme transgressée ( ATF 134 III 52 438 consid. 2.2 et les arrêts cités).

Les bonnes mœurs au sens des art. 19 al. 2 et 20 al. 1 CO correspondent aux principes éthiques susceptibles de réunir un consensus, selon l’opinion moyenne des personnes « justes et raisonnables » à un moment donné (Guillod/Steffen, op. cit., n. 69 ad art. 19 et 20 CO). Un contrat est contraire aux bonnes mœurs dans l’une de ses clauses ou dans son ensemble si, sans violer une disposition légale impérative, il est condamné par la morale dominante, c’est-à-dire par le sentiment général des convenances ou par les principes et jugement de valeur qu’implique l’ordre juridique considéré dans son ensemble (ATF 132 III 455
consid. 4.1, JdT 2007 I 251 ; TF 4A_37/2008 du 12 juin 2008 consid. 3.1 ; Tercier/Pichonnaz, Le droit des obligations, 5e éd., 2012, n. 739 p. 167).

Quant à la notion d’ordre public, elle n’a pas toujours une signification très claire dans le cadre des art. 19 et 20 CO. Certains auteurs rattachent simplement l’ordre public à l’illicéité, estimant que cette notion équivaut aux normes de droit public. D’autres auteurs lui accordent une valeur indépendante, estimant que l’ordre public englobe tous les principes immanents à l’ordre juridique (Guillod/Steffen, op. cit., n. 66 ad art. 19 et 20 CO).

4.1.2.2 En vertu de l’art. 63 CC – et du principe de l’autonomie de l’association ancré à l’art. 23 Cst. –, le droit des associations repose sur les principes fondamentaux de la primauté des statuts et de la subsidiarité de la loi. En d’autres termes, la loi laisse une large place aux règles décidées par l’association. Ce sont les statuts complétés, le cas échéant, par des règlements et la coutume corporative, qui régissent l’essentiel de la vie sociale et déterminent le contenu de la relation entre l’association et ses membres (Baddeley, L’association sportive face au droit, les limites de son autonomie, thèse Genève, 1994, pp. 107 et 108 ; Zen-Ruffinen, Droit du sport, 2002, n. 161 pp. 60 ss).

Malgré la grande liberté laissée aux associations dans la détermination du contenu social, celles-ci n’évoluent cependant pas dans un espace soustrait au droit étatique. Les normes sociales sont soumises aux limites générales découlant des art. 19 et 20 CO ; elles ne peuvent transgresser la loi (art. 63 al. 2 CC), violer les droits de la personnalité (art. 27 et 28 CC) ou les bonnes mœurs. L’association doit exercer son pouvoir en matière d’édiction et d’application de normes dans le respect de certains principes généraux du droit, dont notamment le principe de l’égalité de traitement des membres, les exigences découlant du droit d’être entendu des membres concernés par une décision sociale, l’exercice des droits de l’association conformément au but social et à l’intérieur des limites qui en résultent, le principe de la légalité, ainsi que le principe de la proportionnalité des mesures, en particulier dans le domaine sanctionnel (Baddeley, op. cit., p. 108 ; Steiner, La soumission des athlètes aux sanctions sportives, Etude d’une problématique négligée par le monde juridico-sportif, thèse Lausanne 2010, pp. 45-49 ; Zen Ruffinen, loc. cit.).

4.1.2.3 L’art. 60 al. 1 CC prescrit notamment que l’association ne doit pas avoir un but économique.

L’existence de l’association dépend du respect de cette condition. En effet, les corporations à but économique doivent obligatoirement prendre une des formes de société prévues par le CO (Zen Ruffinen, op. cit., n. 186 pp. 67-68). La doctrine s’est demandée, au cours de ces dernières années, si le but social des grandes fédérations sportives, nationales ou internationales, pouvait encore être qualifié d’idéal ou de non économique, au sens de l’art. 60 al. 1 CC, permettant ainsi aux fédérations de revêtir la forme de l’association. A l’heure actuelle, il est généralement admis que même ces fédérations, internationales ou nationales, ont encore un but idéal. Mais le niveau d’activité économique qu’elles ont atteint est tel qu’elles devraient à tout le moins se faire inscrire au Registre du commerce, comme le prévoit l’art. 61 al. 2 CC, dans l’intérêt de leurs créanciers et de leurs travailleurs. En effet, d’un côté, une partie des buts de ces fédérations inclut des moyens économiques comme la vente des droits de retransmissions, de sponsoring, de merchandising ou des billets pour les compétitions qu’elles organisent. Mais, d’un autre côté, il ne faut pas oublier que les fédérations internationales apportent un soutien considérable aux associations nationales, de même que les fédérations nationales soutiennent les fédérations régionales et locales (Zen-Ruffinen, op. cit.,
nn. 371 et 372).

Doctrine et jurisprudence s’accordent, en principe, à dire qu’afin de déterminer la nature réelle du but social, il y a lieu de prendre en considération non seulement le but tel qu’il est indiqué dans les statuts, mais aussi le but effectivement poursuivi par les membres. Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, le critère déterminant la nature d’un groupement est bien le but réel que les membres de la corporation se proposent d’atteindre et non les moyens employés. Il y a lieu de dégager la finalité des activités sociales (ATF 115 II 405 ; Baddeley, op. cit., p. 33). La plupart des auteurs qualifient les activités commerciales des associations de moyen et, partant, considèrent comme donnée l’idéalité du but social dans tous les cas où les membres ne profitent pas économiquement de ces activités par des distributions de bénéfices ou d’autres droits patrimoniaux. Le volume des activités commerciales et l’importance des moyens générés par ces activités ne portent pas à conséquence. Par ailleurs, accorder à tout intéressé, membres et non-membres confondus, des avantages économiques n’entame pas non plus l’idéalité primaire du but d’une association, même si les moyens pour ce faire proviennent de l’exploitation commerciale (Baddeley, op. cit., p. 36 et les références citées).

4.1.3 En l’espèce, les normes et principes de droit fiscal auxquels l’appelante se réfère – tel que l’art. 56 let. g LIFD (Loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 ; RS 642.11), la Circulaire n° 12 de l’Administration fédérale des contributions (AFC) du 8 juillet 1994 relative à l’exonération de l’impôt pour les personnes morales poursuivant des buts d’utilité publique, ainsi que les directives émises par la Conférence suisse des impôts (CSI) le 18 janvier 2008 intitulées « Exonération fiscales des personnes morales qui poursuivent des buts de service public, d’utilité publique ou des buts culturels. Déductibilité des libéralités » – sont sans pertinence pour apprécier la question du bien-fondé des commissions litigieuses. Ces règles régissent en effet les conditions auxquelles les personnes morales poursuivant des buts d’utilité publique peuvent être exonérées d’impôts. Or, il n’appartient pas à la Cour de céans de se prononcer sur le bien-fondé de l’exonération fiscale dont bénéficie l’appelante, eu égard aux commissions qui ont été versées à l’intimé.

Cela étant, c’est à raison que les premiers juges ont retenu que l’activité de courtage exercée par l’intimé n’était pas contraire aux buts poursuivis par l’appelante. A cet égard, il sied de relever que celle-ci a directement bénéficié des fonds provenant des contrats négociés pour son compte par l’intimé, comme le démontre sa croissance économique constante durant la présidence de ce dernier. L’activité de courtage pratiquée par l’intimé a également servi au développement du [...], l’instruction ayant permis d’établir qu’entre 65% et 79% des recettes de l’appelante – lesquelles proviendraient selon cette dernière à 90% des contrats de marketing et de télédiffusion – avaient été redistribuées pour la pratique de ce sport, du moins entre 2004 et 2007. Enfin, comme l’ont relevé les premiers juges, la nécessité de recourir à une activité commerciale pour atteindre les objectifs de l’appelante ne peut être niée, d’autant plus que celle-ci semble avoir de tout temps exercé une telle activité. Dans ces conditions, l’activité de courtage exercée par l’intimé était effectivement conforme au but de l’appelante tel qu’il est défini par les statuts de celle-ci, à savoir notamment d’encourager le développement et la croissance du [...] sous toutes ses formes dans le monde entier et de promouvoir la création de fédérations nationales à cet effet. Elle était également compatible avec l’exigence relative au but idéal que doit poursuivre l’association.

On ne saurait au demeurant retenir, comme le soutient l’appelante, que le mode de rémunération de l’intimé – consistant en une rémunération fixe, combinée à une rémunération variable sous la forme de commissions de courtage – aurait été contraire à son but statutaire, respectivement à l’exigence posée par l’art. 60 al. 1 CC en vertu de laquelle l’association ne peut avoir un but économique. En effet, le fait que l’intimé ait bénéficié d’avantages économiques – en l’occurrence de commissions de courtage, en sus de son salaire fixe et de la prise en charge de ses frais – n’implique pas une violation du but idéal de l’appelante, dans un contexte où celle-ci a perçu les 90% des montants afférants aux contrats négociés pour son compte et a affecté majoritairement ces montants à la promotion du [...]. Dans ces conditions, le fait que l’intimé ait tiré de son activité de courtage un enrichissement personnel ne suffit pas à admettre que le but statutaire de l’appelante, respectivement son obligation légale de poursuivre un but idéal, auraient été violés.

C’est également en vain que l’appelante soutient que le fondement des commissions réclamées par l’intimé serait nul, au motif qu’il serait contraire au principe en vertu duquel « l’argent du sport doit aller au sport ». A ce sujet, l’expert L.____ a en effet estimé que le paiement de commissions relatives à des négociations de droits télévisés de diffusion du [...] ne s’opposait pas au principe précité. Le fait qu’il ait estimé ne pas être en mesure de se prononcer sur l’éventuel caractère redondant et disproportionné des commissions litigieuses laisse au demeurant penser qu’il n’a pas considéré qu’il devait en aller différemment dans le cas présent. Les éléments au dossier ne permettent en tout cas pas de s’écarter du constat général posé par l’expert à cet égard. A nouveau, il sied de relever que l’activité de courtage déployée par l’intimé a certes bénéficié à celui-ci mais qu’elle a dans une très large mesure profité à l’appelante, laquelle a perçu les 90% des montants relatifs aux contrats négociés par ce biais. La décision rendue par la Commission d’éthique du CIO ne change pas l’appréciation qui précède. En effet, si les considérants de cette décision font certes référence aux principes selon lequel « l’argent du sport doit aller au sport », il n’en ressort pas expressément que la perception par l’intimé de commissions de courtage aurait été contraire à ce principe. Il apparaît d’ailleurs que cette décision a été rendue davantage en lien avec la question d’un éventuel usage indu des fonds versés par le CIO à l’appelante, comme en attestent les recommandations y figurant, lesquelles ne font pas référence à la problématique liée à la perception de commissions de courtage.

En définitive, l’appelante ne démontre pas que le fondement des commissions litigieuses – lequel repose sur son Règlement financier dans sa teneur en vigueur au moment de la conclusion des contrats y relatifs – serait illicite. Pour les mêmes motifs qu’exposés précédemment, le fondement desdites commissions ne peut davantage être considéré comme étant contraire aux mœurs ou à l’ordre public. A cet égard, on relèvera, comme cela sera exposé plus en détails ci-après (cf. infra
consid. 4.2), que l’intimé n’a pas agi dans l’intérêt des tiers contractants ou au mépris des intérêts de l’appelante et que la perception des commissions en cause était, d’une part, autorisée par la règlementation de l’appelante et, d’autre part, connue des organes de celle-ci. Dans ces conditions, on ne saurait retenir une quelconque violation des mœurs ou de l’ordre public. Partant, le grief doit être rejeté.

4.2

4.2.1 L’appelante reproche aux premiers juges de ne pas avoir retenu que l’intimé aurait violé son devoir de diligence et de fidélité envers elle. A cet égard, elle soutient que ceux-ci n’auraient examiné la question de la violation de ces devoirs qu’au regard des obligations découlant du contrat de courtage et que leur appréciation omettrait par conséquent de tenir compte des règles applicables en matière de droit de l’association, des principes de bonne gouvernance et de sa propre règlementation interne concernant la conduite de ses membres en matière d’éthique et de gestion de conflit d’intérêts.

L’appelante en déduit que l’intimé aurait violé ses devoirs de diligence et de fidélité envers elle de manière grave, répétée voire systématique et continue sur une longue période, au motif qu’il aurait dissimulé à ses organes les décisions rendues par le CIO à son endroit. Elle relève que l’intimé aurait dû lui transmettre toutes informations et documents à ce sujet avant toute décision pouvant concerner directement ou indirectement les commissions qu’il percevait, notamment avant la décision de modifier le Règlement financier prise en 2006, et qu’il aurait également dû de s’abstenir de prendre part au vote y relatif, dès lors qu’il était directement et personnellement concerné par ce vote. L’appelante est ainsi d’avis que par son comportement, l’intimé aurait gravement violé les statuts et le Code de conduite en matière de conflit d’intérêts, ainsi que ses devoirs de diligence et de fidélité envers elle, de tels agissements étant à son sens d’autant plus graves que les procédures devant les instances du CIO concernaient précisément les propres pratiques de l’intimé en matière de commissions et leur conformité avec le principe selon lequel « l’argent du sport doit aller au sport ».

L’appelante soutient également qu’en raison de la « très grave dissimulation » d’informations de la part de l’intimé, elle aurait été empêchée « de tirer immédiatement les conséquences appelées par les décisions et recommandations des instances du CIO et de modifier ses règlements et pratiques en matière de commissions ».

En définitive, elle considère que la violation grave du devoir de fidélité résultant des dissimulations de l’intimé serait de nature à remettre en question le droit de celui-ci à percevoir les commissions litigieuses pour les motifs précédemment exposés, tirés de l’illicéité et de la contrariété aux mœurs du fondement desdits commissions.

4.2.2 Outre les obligations résultant directement du but social et celles qui trouvent leur source dans les statuts et règlements, la jurisprudence et la doctrine admettent que tout membre d’une association doit, en vertu des règles de la bonne foi, s’abstenir d’actes nuisibles aux intérêts de son association. Ce devoir, appelé devoir de fidélité, s’impose également en l’absence de dispositions réglementaires spécifiques. Il découle de la relation étroite entre l’association et ses membres et de l’importance, pour la vie de la société, de l’élément personnel (Baddeley, op. cit.,
p. 159).

Le devoir de fidélité, en tant que devoir général non écrit, ou tel qu’il découle des clauses statutaires, constitue en principe un devoir d’abstention (Baddeley, op. cit., p. 160 ; Zen-Ruffinen, op. cit., n. 300 p. 103). Ainsi, le membre doit s’abstenir de tout comportement contraire aux intérêts de l’association ou de ses autres membres, aussi bien dans ses rapports internes qu’externes. La mesure de ce devoir se juge d’après les circonstances particulières du cas (Zen-Ruffinen, loc. cit.). Une partie de la doctrine admet que le devoir de fidélité du membre peut également comporter des obligations positives (Baddeley, op. cit., p. 160 et les références citées), tel qu’un devoir général d’information découlant des règles de la bonne foi de l’art. 2 al. 1 CC (Riemer, Berner Kommentar, 1990, p. 680).

4.2.3

4.2.3.1 En l’espèce, l’instruction a permis d’établir qu’à tout le moins depuis le 1er janvier 1995, le Règlement financier de l’appelante prévoyait le principe du versement de commissions en faveur des dirigeants de l’appelante, en cas de conclusion par leur intermédiaire de contrats générant des fonds en faveur de cette dernière. Lors des révisions dudit règlement intervenues en 2004 et 2006, ce principe a été maintenu, en des termes toutefois légèrement modifiés (prime de négociation jusqu’à 10% en lieu et place d’une prime de négociation fixe de 10% et précision selon laquelle les bénéficiaires autorisés à percevoir des commissions incluaient le Président de C.____). En définitive, ce n’est qu’au début du mois d’avril 2009 que les membres du Conseil d’administration de l’appelante ont pris la décision, à l’unanimité, de supprimer du Règlement financier la disposition autorisant le versement de telles commissions. Ainsi, comme l’ont relevé les premiers juges, l’appelante n’a jamais remis en question, avant la démission de l’intimé, sa pratique consacrée depuis les années nonante en matière de commissions.

Il ressort au demeurant des témoignages recueillis en première instance que les membres du Conseil d’administration et du Conseil exécutif de l’appelante avaient connaissance des commissions de courtage que l’intimé percevait sur les contrats qu’il négociait en faveur de cette dernière, et ce bien avant que la décision de mettre fin à cette pratique soit prise en avril 2009. A cet égard, le témoin S.____ a notamment indiqué que le principe du pourcentage de 10% payé à titre de commission à l’intimé avait été accepté par l’appelante, précisant que « tout le monde en avait pleinement connaissance ». Il a en outre déclaré que si les membres du Conseil d’administration et du Conseil exécutif de l’appelante avaient réellement voulu supprimer le droit de l’intimé de percevoir des commissions, ils auraient pu le faire par un vote à quatre contre un, recommandant au Congrès d’adopter une résolution dans ce sens, mais qu’il leur avait « manqué de courage » pour ce faire. Il a encore ajouté que lors du Congrès mondial de l’appelante qui s’était tenu en mai 2004, cent-cinquante personnes avaient voté en faveur de la recommandation de maintenir le droit de l’intimé à la perception de commissions de courtage et que dix personnes seulement s’étaient abstenues, dont lui-même. Le fait que les membres des organes dirigeants de l’appelante avaient connaissance, de longue date, du paiement de commissions en faveur de l’intimé ressort également des déclarations du témoin W.____, lequel a indiqué avoir toujours eu des doutes sur l’opportunité desdits versements et leur caractère adéquat. Il convient en outre de relever qu’au moment où il a annoncé sa démission de la présidence de l’appelante au mois de juin 2018, l’intimé a informé les membres du Comité exécutif de cette dernière de la liste des contrats qui étaient alors en cours de négociation, en leur demandant si une autre personne que lui souhaitait poursuivre lesdites négociations, ce à quoi il lui a été répondu qu’il pouvait les poursuivre et les finaliser lui-même. En conséquence, même à cet instant, et bien qu’ayant reçu des informations à ce propos, les membres des organes dirigeants de l’appelante n’ont pas jugé utile de mettre fin au droit de l’intimé de percevoir les commissions litigieuses. Enfin, il sied de relever que trois des cinq factures émises par l’intimé en lien avec lesdites prétentions – soit les factures émises en août 2008 – ont été approuvées, non seulement par F.____, mais également par le successeur de l’intimé à la présidence de l’appelante, D.____. L’appelante ne peut dès lors valablement prétendre qu’elle ignorait tout de la quotité des commissions litigieuses avant que la décision soit prise d’en supprimer le versement à l’intimé au début du mois d’avril 2009.

Il sied également de constater que l’activité de courtage exercée par l’intimé – sur laquelle les commissions en cause sont fondées – a fortement bénéficié à l’appelante, celle-ci ayant perçu 90% des fonds provenant des contrats négociés par ce biais, fonds qu’elle a en grande partie redistribués pour le développement du [...] conformément à son but statutaire. Il est d’ailleurs établi que les moyens financiers de l’appelante ont augmenté de manière significative durant la présidence de l’intimé. Or, dans la mesure où l’appelante admet que 90% de ses ressources proviennent des contrats de marketing et de télédiffusion, il ne peut guère être nié que sa croissance économique résulte, au moins en partie, de l’activité de courtage déployée par l’intimé. Dans ces conditions, on ne saurait retenir que cette activité était contraire aux intérêts de l’appelante ou de ses membres. Dans la mesure où, selon le Règlement financier, la commission due à l’intimé était fixée au prorata des fonds versés à l’appelante selon le contrat conclu, il apparaît bien plutôt que les intérêts des parties étaient alignés, la commission de courtage étant d’autant plus élevée que le montant dû à l’appelante selon le contrat était important. Les dispositions en matière de conflits d’intérêts ressortant du Code d’éthique de l’appelante et les principes de bonne gouvernance invoqués en appel ne changent rien aux considérations qui précèdent. En effet, dans la mesure où l’appelante avait pleinement connaissance de l’activité de courtage litigieuse et du droit au paiement de commissions qui en découlait – lesquelles étaient dûment autorisées par son Règlement financier –, elle ne peut pas valablement soutenir que l’intimé aurait violé son devoir de fidélité envers elle au motif qu’il aurait enfreint les règles en matière de conflits d’intérêts ressortant de son Code d’éthique et les principes relatifs à la bonne gouvernance de personnes morales, d’autant plus qu’elle a directement tiré profit de ladite activité.

Pour ces différents motifs, il n’apparaît pas que l’intimé ait violé son devoir de fidélité envers l’appelante en exerçant l’activité de courtage litigieuse, respectivement en percevant des commissions en lien avec cette activité.

4.2.3.2 Une violation du devoir de fidélité de l’intimé ne peut davantage être déduite du fait que celui-ci a omis d’informer l’appelante des décisions rendues à son endroit par les instances du CIO en 2004.

Tout d’abord, comme l’ont relevé les premiers juges, il est douteux que le fait d’avoir tu ces décisions puisse être constitutif d’une violation du devoir de fidélité de l’intimé, alors que ce dernier n’a en définitive fait l’objet d’aucune sanction dans le cadre de l’enquête y relative, la Commission exécutive du CIO ayant renoncé à le sanctionner dans sa décision du 7 août 2004. Ce constat s’impose d’autant plus que l’existence même d’obligations positives issues du devoir de fidélité du membre envers l’association – tel un devoir d’information – est controversée.

Par ailleurs, il ressort des éléments au dossier que si les organes de l’appelante ont apparemment eu formellement connaissance des décisions rendues par le CIO à l’encontre de l’intimé en février 2009 seulement, ils savaient en revanche depuis longtemps, ou du moins ne pouvaient légitimement ignorer, que ce dernier faisait l’objet d’une procédure devant les instances du CIO. A cet égard, le témoin D.____ a notamment indiqué qu’à compter de l’année 2001, la presse avait commencé à publier des articles, dans lesquels il était rapporté que l’intimé avait touché des commissions provenant des fonds du CIO. Ce témoin a en outre déclaré qu’en novembre 2005, le Président du CIO lui avait confié que C.____ avait été ridiculisée et qu’il fallait y remédier, ajoutant encore qu’en 2005 toujours, certains membres du CIO avaient voté contre le maintien du [...] comme sport olympique. Quant au témoin S.____, il a en substance confirmé que les « affaires de commissions » impliquant l’intimé avaient fait l’objet de publication dans la presse, ajoutant que cela avait affecté la réputation de C.____, tout d’abord auprès du CIO, mais également auprès des différents commentateurs du monde sportif, des medias et d’autres organisations mondiales. Il a également indiqué que, durant les Jeux olympiques d’Athènes en 2004, lorsqu’il s’était présenté comme un représentant du [...], on l’avait « regardé et considéré comme le dernier des corrompus ». Il a encore exposé s’être entretenu au sujet de l’enquête menée contre l’intimé avec l’un des membres de la Commission d’éthique du CIO. Sur ce dernier point, il a déclaré qu’à la suite de la démission de l’intimé en tant que membre du CIO, le rapport d’enquête ne pouvait plus être publié – seuls les rapports concernant les membres encore en fonction pouvant l’être – mais qu’ « il y avait toutefois eu des fuites » et que « beaucoup de gens avaient pris connaissance de son contenu ». Il ressort des déclarations qui précèdent qu’au plus tard en 2005, les membres des organes dirigeants de l’appelante avaient au moins en partie connaissance de la procédure ouverte contre l’intimé devant les instances du CIO ou ne pouvaient en tout cas raisonnablement l’ignorer. Or, ils n’ont pas pour autant jugé utile de modifier la pratique de l’appelante en matière de paiement de commissions de courtage à ses dirigeants avant le mois d’avril 2009. A l’instar de ce qu’ont relevé les premiers juges, on peut dès lors douter que si l’appelante avait eu connaissance des décisions rendues par les instances du CIO en 2004, elle aurait immédiatement réagi et pris la décision de supprimer de son Règlement financier la disposition autorisant la perception de telles commissions. Il convient bien plutôt de constater que malgré les informations dont elle disposait au sujet du litige entre le CIO et l’intimé, l’appelante a continué à verser à ce dernier des commissions de courtage en toute connaissance de cause, sur une base réglementaire valable, et qu’elle n’établit pas qu’il en aurait été différemment si l’intimé lui avait fait part des décisions précitées.

4.2.3.3 En définitive, le grief tiré d’une prétendue violation du devoir de fidélité de l’intimé doit être rejeté.

Par surabondance, on relèvera que l’appelante n’établit ni le principe ni la quotité d’un dommage qui lui aurait été causé par le comportement qu’elle reproche à l’intimé. Aussi, même si on devait admettre l’existence d’une violation par ce dernier de son devoir de fidélité – ce qui n’est pas le cas –, celle-ci n’aurait pas pour effet de supprimer son droit au paiement des commissions litigieuses, faute pour l’appelante d’établir que le fondement desdites commissions ne serait pas valable (cf. supra consid. 4.1), respectivement de pouvoir opposer des prétentions en dommages et intérêts en compensation des prétentions de l’intimé.

4.3

4.3.1 L’appelante invoque le dol au sens de l’art. 28 CO, arguant qu’elle aurait valablement déclaré à l’intimé sa résolution de ne pas maintenir les contrats de courtage en cause, à travers la décision prise par son Conseil d’administration au début du mois d’avril 2009.

4.3.2 Selon l’art. 28 al. 1 CO, la partie induite à contracter par le dol de l’autre n’est pas obligée, même si son erreur n’est pas essentielle. Cette disposition nécessite d’une part que le cocontractant ait été trompé intentionnellement et, d’autre part, que la tromperie ait abouti : le dol doit ainsi être la cause de la conclusion du contrat, le cocontractant devant avoir influencé sa victime (ATF 136 III 528
consid. 3.4.2, JdT 2014 II 439). Ce n’est pas le cas si l’on doit admettre que la victime aurait conclu le contrat même sans la tromperie ; c’est à la victime qu’il appartient de prouver le caractère causal du dol (ATF 129 III 320 consid. 6.3,
JdT 2003 I 331).

En vertu de l’art. 31 CO, le contrat entaché d’erreur ou de dol, ou conclu sous l’empire d’une crainte fondée, est tenu pour ratifier lorsque la partie qu’il n’oblige point a laissé s’écouler une année sans déclarer à l’autre sa résolution de ne pas le maintenir, ou sans répéter ce qu’elle a payé (al. 1). Le délai court dès que l’erreur ou le dol a été découvert, ou dès que la crainte s’est dissipée (al. 2).

4.3.3 En l’espèce, on ne saurait considérer que l’appelante a été induite à contracter par le dol de l’intimé au sens de l’art. 28 al. 1 CO, pour les motifs qui ont été exposés précédemment, auxquels il peut être renvoyés (cf. supra consid. 4.2). En substance, on se contentera de rappeler ici que l’appelante avait pleinement connaissance de l’activité de courtage déployée par l’intimé et, au moins en partie, de la quotité des commissions qui lui étaient dues dans ce cadre. Elle avait également connaissance, au plus tard depuis 2005, du fait qu’une procédure avait été ouverte contre l’intimé devant les instances du CIO et n’a pas pour autant jugé utile de modifier son Règlement financier concernant la question du versement de commissions de courtage à ses dirigeants avant le mois d’avril 2009. L’appelante ne peut dès lors se prévaloir ni du fait qu’elle aurait été trompée parce que l’intimé ne lui a pas communiqué les décisions rendues par le CIO à son encontre, ni du fait qu’elle aurait invoqué le prétendu vice du consentement – à travers la décision prise par son Conseil d’administration au début du mois d’avril 2009 – dans le délai d’un an dès sa connaissance prévu par l’art. 31 CO.

Le grief doit dès lors être rejeté.

4.4

4.4.1 L’appelante reproche aux premiers juges d’avoir retenu que l’intimé aurait bénéficié de décharges valables pour sa gestion financière relative aux exercices 2000 à 2006 et qu’il aurait ainsi été autorisé à percevoir l’ensemble de ses commissions concernant les contrats négociés durant cette période. Elle considère en substance que cette appréciation serait contraire au droit et aux principes applicables en matière de décharge, puisque celle-ci ne peut porter que sur les « faits révélés ». Or, elle relève que lorsque son conseil d’administration a autorisé l’intimé, au mois de mai 2007, à percevoir les commissions afférentes aux exercices 2000 à 2006, il ne disposait à l’évidence pas de l’ensemble des informations nécessaires pour voter valablement la décharge sur ce point, dès lors que l’intimé lui avait dissimulé les décisions prises par les instances du CIO à son encontre en 2004. Elle considère au demeurant que cette décharge ne serait pas valable, dans la mesure où, malgré l’affirmation de son caractère général, elle aurait visé en réalité à couvrir des actes spécifiques et antérieurs au dernier exercice comptable, en violation de ses statuts et des principes généralement applicables en la matière.

4.4.2 En l’espèce, dans la mesure où les commissions dont l’intimé réclame le paiement dans la présente procédure sont fondées sur des contrats négociés postérieurement aux exercices 2000 à 2006, on peine à comprendre ce que l’appelante entend déduire de son grief. Quoi qu’il en soit, le fait qu’il ait été relevé, dans les considérants en droit du jugement entrepris, que le Conseil d’administration de l’appelante avait décidé, le 19 mai 2007, d’autoriser le versement à l’intimé de commissions pour les contrats que celui-ci avait négociés et conclus pour son compte durant la période de 2000 à 2006 ne prête pas le flanc à la critique. En effet, contrairement à ce que semble penser l’appelante, on ne saurait en déduire que les premiers juges se seraient prononcé sur la validité de la décharge donnée à cette occasion ; il ne leur incombait au demeurant pas d’examiner cette question, dès lors que celle-ci est sans incidence sur le sort du présent litige.

En définitive, le grief doit être rejeté.

4.5

4.5.1 L’appelante fait grief aux premiers juges d’avoir retenu que conformément au principe général de la non-rétroactivité des lois, applicable par extension aux règlements d’une association, le droit de l’intimé de percevoir des commissions pour les contrats qu’il avait conclus pour son compte jusqu’en 2009 ne pouvait être remis en cause par une modification de son Règlement financier, postérieure à la naissance de ce droit.

4.5.2 L’art. 1 du Titre final du CC pose le principe de la non-rétroactivité des lois : les effets juridiques de faits antérieurs à l'entrée en vigueur du nouveau droit continuent à être régis par les dispositions du droit sous l'empire duquel ces faits se sont produits (al. 1) – principe que l'al. 2 répète en ce qui concerne les effets juridiques des actes accomplis avant l'entrée en vigueur du nouveau droit –, tandis que les faits postérieurs à l'entrée en vigueur du nouveau droit sont régis par celui-ci (al. 3). Le rattachement d'un rapport d'obligation au droit en vigueur au moment de sa constitution, tel que le prévoit l'art. 1 al. 1 Tit. fin. CC, vise à protéger la confiance subjective des parties, qui ont soumis leurs relations à un droit matériel qui leur était connu. Il tend aussi à empêcher que des droits valablement acquis par un acte juridique soient enlevés à leur titulaire par le seul effet de la loi ( ATF 126 III 421 consid. 3c/cc in limine).

En dérogation au principe général de non-rétroactivité posé par l'art. 1 Tit. fin. CC (ATF 126 III 421 consid. 3c/cc ; ATF 100 II 105 consid. 1c in limine ; Vischer, Basler Kommentar, Zivilgesetzbuch II, 6e éd., 2019, n. 3 in fine ad art. 2 Tit. fin. CC), l'art. 2 Tit. fin. CC prévoit que les règles établies dans l'intérêt de l'ordre public et des moeurs sont applicables, dès leur entrée en vigueur, à tous les faits pour lesquels la loi n'a pas prévu d'exception (al. 1) ; en conséquence – ou pour exprimer la même chose sous une forme négative (Vischer, op. cit., n. 2 ad art. 2 Tit. fin. CC) –, les dispositions de l'ancien droit qui, d'après le droit nouveau, sont contraires à l'ordre public ou aux moeurs ne peuvent plus recevoir d'application (al. 2) (ATF 133 III 105 consid. 2.1.2).

Pour admettre qu'une disposition légale a un caractère d'ordre public au sens de l'art. 2 Tit. fin. CC, il ne suffit pas qu'elle soit impérative. Au contraire, l'ordre public et les mœurs ne justifient l'application rétroactive d'une norme que lorsque celle-ci appartient aux principes fondamentaux de l'ordre juridique actuel, en d'autres termes lorsqu'elle incarne des conceptions socio-politiques ou éthiques fondamentales (ATF 133 III 105 consid. 2.1.3 et les références citées). La jurisprudence a reconnu que tel était le cas notamment de l'interdiction de créer des liens durables à l'excès par des actes juridiques obligatoires (art. 2 et 27 CC) ou du principe selon lequel une charge foncière doit pouvoir être rachetée trente ans après son établissement (art. 788 al. 1 ch. 2 CC ; ATF 100 II 105 consid. 2 et les arrêts cités).

Pour décider s'il y a lieu d'appliquer le nouveau droit sur la base de
l'art. 2 Tit. fin. CC, le juge doit donc examiner si, dans le cas d'espèce considéré, les effets juridiques découlant de l'ancien droit – lequel serait en soi applicable en vertu du principe général de non-rétroactivité – seraient contraires à l'ordre public et aux mœurs selon les conceptions du nouveau droit, autrement dit si l'application de l'ancien droit est devenue inconciliable avec l'ordre public et les moeurs. (ATF 133 III 105 consid. 2.1.3). Le juge doit aussi comparer les intérêts en jeu et examiner si le droit nouveau répond à un intérêt public prépondérant par rapport aux intérêts privés opposés, notamment celui à être protégé dans la confiance mise en l'application du droit antérieur, de telle sorte qu'il doive l'emporter sur ce dernier (ATF 133 III 105 consid. 2.1.3).

4.5.3 En l’espèce, les premiers juges ont considéré que conformément au principe général de la non-rétroactivité des lois, applicable ici par analogie, l’appelante ne pouvait supprimer le droit de l’intimé à percevoir des commissions de courtage en modifiant son Règlement financier postérieurement à la naissance de ce droit. Ils ont ainsi considéré que la confiance que l’intimé avait placée dans la règlementation financière de l’appelante en vigueur au moment où il était encore membre de celle-ci devait être protégée et qu’il n’y avait aucun intérêt public prépondérant – que ce soit l’ordre public ou les mœurs – susceptible de justifier une application rétroactive du nouveau Règlement financier de l’appelante à l’égard de l’intimé.

A l’encontre de ce raisonnement, l’appelante se borne à soutenir qu’elle aurait été fondée à supprimer rétroactivement les effets des dispositions de son ancien Règlement financier donnant droit à la perception de commissions de courtage en faveur de l’intimé, au motif que ces dispositions auraient été illicites, contraires aux mœurs, et par voie de conséquence nulles. En toute hypothèse, elle fait valoir qu’il y aurait lieu d’appliquer rétroactivement les nouvelles dispositions de son Règlement financier aux prétentions soulevées par l’intimé, en raison de l’exception au principe de non-rétroactivité posée par l’art. 2 Tit. Fin. CC. Il a toutefois déjà été exposé précédemment que les dispositions du Règlement financier de l’appelante avant leur modification d’avril 2009 – soit celles sur la base desquelles le droit aux commissions litigieuses est fondé – n’étaient ni illicites ni contraires aux mœurs. Il suffit de renvoyer à ce qui a été dit précédemment à ce sujet (cf. infra consid. 4.1), ce qui scelle le sort du grief. A l’instar de ce qu’ont relevé les premiers juges, on ajoutera que, dans la mesure où il est question ici de la modification d’un règlement d’une association de droit privé et donc d’intérêts privés qui s’opposent, il est manifeste qu’aucun intérêt public prépondérant ne justifie une application rétroactive du nouveau Règlement financier de l’appelante à l’égard de l’intimé.

En définitive, le grief doit être rejeté.

4.6

4.6.1 L’appelante reproche aux premiers juges d’avoir retenu que la décision prise par le « Congrès mondial » les 10 et 11 septembre 2010, confirmant la suppression du droit au paiement des commissions litigieuses, n’était pas opposable à l’intimé, au motif que celui-ci n’était alors plus membre de C.____ en raison de sa démission de la présidence intervenue précédemment.

A cet égard, elle soutient que dans la mesure où l’intimé a été élu Président honoraire à vie de C.____ au mois de juin 2008, sans avoir préalablement déclaré démissionner de sa qualité de membre, il serait resté soumis à sa juridiction même après avoir quitté la présidence. Elle relève que dans le cas contraire, l’intimé ne se serait pas vu proposer de poursuivre les négociations en cours au moment de sa démission de la présidence. Selon l’appelante, en tant que Président honoraire à vie, l’intimé serait ainsi resté soumis à un devoir de fidélité envers elle, impliquant qu’il aurait été tenu de se conformer à ses statuts, règlements et décisions ; il serait en outre resté membre de l’appelante en acceptant l’offre qui lui avait été faite de devenir Président honoraire à vie, bien que cette fonction ne soit pas décrite dans les statuts.

L’appelante soutient en outre que l’intimé aurait lui-même reconnu être soumis à sa juridiction, en proposant que le présent litige soit tranché par la Chambre d’arbitrage du TIV, soit par sa propre instance arbitrale.

Elle fait enfin valoir que les prétentions litigieuses trouveraient leur origine dans un rapport juridique antérieur à la démission de l’intimé de la présidence – celles-ci étant fondées sur des factures émises en mars 2008, respectivement en août 2008 –, de sorte que l’intimé serait soumis à sa juridiction pour faire valoir lesdites prétentions.

4.6.2 En principe, les statuts et règlements d’une association ne déploient d’effets qu’à l’égard de leurs membres et ne peuvent pas être générateurs de droits et d’obligations pour toute personne qui n’y aurait pas adhéré, à moins que l’association concernée l’y soumette par voie contractuelle (Zen-Ruffinen, op. cit.,
n. 164 ; Baddeley, op. cit., p. 104

L’art. 75 CC réserve en outre expressément la qualité pour agir en contestation des décisions de l’association aux membres de celle-ci. Il en résulte que les non-membres (anciens membres, créanciers, tiers intéressés, etc.) n’ont pas la qualité pour agir selon cette disposition ; de même, la direction et les autres organes de l’association ne peuvent pas intenter l’action de l’art. 75 CC. Le demandeur doit être membre au moment où le jugement est rendu (Foëx, Commentaire romand, CC I, 2010, n. 4 ad art. 75 CC).

Le droit de devenir (et de rester) membre d'une association est considéré comme un droit très personnel. La base de l'adhésion est constituée par la loi et les statuts (Heini/Scherrer, Basler Kommentar, Zivilgesetzbuch I, 6e éd., 2018, n. 1 ad art. 70 CC). Selon l’art. 70 al. 1 CC, l’association peut en tout temps recevoir de nouveaux membres. Cette règle est de droit dispositif : les statuts de l’association peuvent prévoir par exemple un nombre maximum de membres ou qu’il ne sera plus reçu de nouveaux membres après la survenance de telle date ou de tel évènement. Cela étant, l’art. 70 al. 1 CC ne précise pas comment l’on devient membre d’une association. Il est généralement admis que l’acquisition de cette qualité peut s’effectuer de deux manières : en participant à la constitution de l’association pour par l’adhésion ultérieure. L’adhésion ultérieure résulte d’un acte juridique bilatéral : l’adhérant manifeste sa volonté de devenir membre, ce qui implique qu’il déclare accepter – ne serait-ce que tacitement – les statuts ; l’association manifeste de son côté sa volonté d’admettre le candidat en qualité de membre. Cet échange de manifestations de volonté constitue un contrat, auquel les art. 1 ss CO sont applicables. L’adhésion à une association est volontaire : l’art. 23 al. 3 Cst. prévoit que « nul ne peut être contraint d’adhérer à une association ou d’y appartenir. Les statuts peuvent prévoir que tout intéressé (ou toute personne présentant les qualités statutairement requises) aura le droit de devenir membre (Foëx, op. cit. nn. 2-9 ad art. 70 CC).

4.6.3 En l’espèce, les premiers juges ont relevé que les statuts de l’appelante ne mentionnaient nulle part que tout ancien président – fût-il nommé Président honoraire à vie, – conserverait sa qualité de membre de celle-ci, ce qui n’est pas contesté en appel. A défaut de base statutaire en ce sens, on ne saurait dès lors retenir que l’élection de l’intimé en tant que Président honoraire à vie de l’appelante – qualité qui n’est pas définie dans les statuts – aurait eu pour effet que celui-ci serait resté de facto membre de cette dernière, malgré sa démission de la présidence intervenue simultanément. Il n’y a pas davantage lieu de suivre l’appelante lorsqu’elle affirme que l’intimé aurait conservé sa qualité de membre, respectivement serait resté soumis à sa juridiction après le 24 août 2008 (date de sa démission effective de la présidence) sur une base contractuelle, au motif qu’il aurait « accepté l’offre qui lui avait été faite de devenir Président honoraire à vie » dès cette date. En effet, il n’est aucunement établi que la nomination de l’intimé en tant que « Président honoraire à vie » de l’appelante aurait été subordonnée à de telles conditions. A l’instar de ce qu’ont considéré les premiers juges, et faute pour l’appelante d’établir que le contraire ressortirait de ses statuts ou d’un contrat, il convient donc de retenir que cette nomination n’a conféré qu’un titre purement honorifique à l’intimé, sans rattachement de droits et d’obligations, et que celui-ci a perdu sa qualité de membre de l’appelante au moment de sa démission en tant que Président de celle-ci.

Il n’y a pas non plus lieu de considérer que l’intimé se serait reconnu lui-même comme membre de l’appelante, respectivement comme étant soumis à sa juridiction, au seul motif qu’il a proposé, par courrier du 26 août 2010, de faire trancher le présent litige par la Chambre d’arbitrage du TIV. En effet, comme déjà indiqué, la qualité de membre de l’intimé et sa soumission à la juridiction des instances internes de l’appelante après sa démission de la présidence ne pourraient être admises que sur une base statutaire, voire réglementaire, ou en vertu d’un contrat, dont l’existence n’a toutefois pas été établie ; elles ne sauraient en tout cas résulter d’une proposition faite par courrier, d’autant plus que l’appelante a décliné cette proposition.

Enfin, le fait que l’intimé ferait prétendument valoir des prétentions qui seraient fondées sur un rapport juridique antérieur au moment où il a démissionné de la présidence de l’appelante n’a pas pour conséquence que la décision prise lors du Congrès mondial des 10 et 11 septembre 2010 lui serait opposable, ni qu’il serait soumis à la juridiction de l’appelante s’agissant desdites prétentions. Au contraire, dans la mesure où, à l’instar de ce qu’ont constaté les premiers juges, l’intimé n’était plus membre de l’appelante au moment où ladite décision a été prise, celle-ci ne lui était pas opposable ; il n’avait dès lors ni l’obligation ni le droit de la contester devant les instances internes de l’appelante, indépendamment du fait que les prétentions litigieuses aient éventuellement pris naissance alors qu’il était encore membre de celle-ci.

En définitive, le grief doit être rejeté.

4.7

4.7.1 Dans un dernier grief, l’appelante soutient que le présent litige serait de la compétence de la Chambre d’appel du TIV, de sorte que la demande déposée par l’intimé devant la Chambre patrimoniale devrait être déclarée irrecevable.

A cet égard, elle expose en substance que dès lors que l’intimé était soumis à sa juridiction et que la décision prise lors du Congrès mondial des 10 et 11 septembre 2010 lui était opposable, il aurait dû préalablement attaquer ladite décision devant la Chambre d’appel du TIV, conformément à l’art. 75 CC et à sa propre réglementation interne, s’il entendait contester la suppression de son droit à percevoir les commissions litigieuses. Selon l’appelante, l’intimé – en sa qualité de membre honoraire et en relation avec des contrats négociés et conclus lors de sa présidence – aurait ainsi dû contester la décision précitée conformément à la procédure interne prévue par les statuts du TIV, avant de pouvoir porter le litige devant le juge civil. Faute d’avoir procédé en ce sens dans le délai de trente jours prévu par l’art. 4.3 des statuts du TIV, l’intimé ne pourrait plus contester la décision litigieuse, la péremption de l’action prévue par l’art. 75 CC devant être constatée d’office.

4.7.2 Selon l’art. 75 CC, tout sociétaire est autorisé de par la loi à attaquer en justice, dans le mois à compter du jour où il en a eu connaissance, les décisions auxquelles il n’a pas adhéré et qui violent des dispositions légales ou statutaires.

Une décision ne peut faire l’objet de l’action de l’art. 75 CC que si elle est définitive, ce qui suppose notamment l’épuisement des voies de recours internes ; le membre qui omet de contester la décision dans le délai de péremption prévu par les statuts pour le recours interne ne peut en principe pas intenter l’action de l’art. 75 CC (Foëx, op. cit., n. 16 ad art. 75 CC).

Comme indiqué précédemment, l’art. 75 CC ne prévoit toutefois en principe la qualité pour agir en contestation des décisions de l’association qu’en faveur des membres de celle-ci, à l’exclusion des non-membres, tels que les anciens membres, créanciers ou tiers intéressés. Pour pouvoir agir selon cette disposition, le demandeur doit être membre au moment où le jugement est rendu (Foëx, op. cit. n. 4 ad art. 75 CC).

4.7.3 En l’espèce, pour les raisons exposées précédemment (cf. supra consid. 4.6.3), auxquelles il peut être ici intégralement renvoyé, la décision prise par le Congrès mondial de l’appelante les 10 et 11 septembre 2010 n’était pas opposable à l’intimé, lequel n’était au demeurant plus soumis à la juridiction des instances internes de l’appelante à ces dates. Partant, l’intimé n’avait aucune obligation de contester ladite décision devant la Chambre d’appel du TIV. Pour les mêmes motifs, il ne lui incombait pas d’attaquer cette décision devant la juridiction civile dans le délai de trente jours prévu par l’art. 75 CC, cette disposition ne trouvant pas application dans le cas présent.

En définitive, le grief doit être rejeté.

5. Au vu des considérations qui précèdent, l'appel doit être rejeté et le jugement entrepris confirmé.

Dès lors que l’appelante succombe, les frais judiciaires de deuxième instance, arrêtés à 23’212 fr. (art. 62 al. 1 et 2 TFJC [tarif des frais judiciaires civils du 28 septembre 2010 ; BLV 270.11.5]), doivent être mis à sa charge (art. 106
al. 1 CPC).

L’appelante versera à l’intimé la somme de 8’000 fr. à titre de dépens de deuxième instance (art. 106 al. 1 CPC, art. 3 al. 2 et 7 al. 1 TDC [tarif des dépens en matière civile du 23 novembre 2010 ; BLV 270.11.6]).

Par ces motifs,

la Cour d’appel civile

prononce :

I. L’appel est rejeté.

II. Le jugement est confirmé.

III. Les frais judiciaires de deuxième instance, arrêtés à 23'212 fr. (vingt-trois mille deux cent douze francs), sont mis à la charge de l’appelante C.____.

IV. L’appelante C.____ versera à l’intimé U.____ la somme de 8’000 fr. (huit mille francs) à titre de dépens de deuxième instance.

V. L’arrêt est exécutoire.

La présidente : Le greffier :

Du

Le présent arrêt, dont la rédaction a été approuvée à huis clos, est notifié à :

Me Charles Joye (pour C.____),

Me Pierre-Dominique Schupp (pour U.____),

et communiqué, par l'envoi de photocopies, à :

Mme la Juge présidant la Chambre patrimoniale cantonale.

La Cour d’appel civile considère que la valeur litigieuse est supérieure à 30'000 francs.

Le présent arrêt peut faire l'objet d'un recours en matière civile devant le Tribunal fédéral au sens des art. 72 ss LTF (loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral – RS 173.110), le cas échéant d'un recours constitutionnel subsidiaire au sens des art. 113 ss LTF. Dans les affaires pécuniaires, le recours en matière civile n'est recevable que si la valeur litigieuse s'élève au moins à 15'000 fr. en matière de droit du travail et de droit du bail à loyer, à 30'000 fr. dans les autres cas, à moins que la contestation ne soulève une question juridique de principe (art. 74 LTF). Ces recours doivent être déposés devant le Tribunal fédéral dans les trente jours qui suivent la présente notification (art. 100 al. 1 LTF).

Le greffier :

Bitte beachten Sie, dass keinen Anspruch auf Aktualität/Richtigkeit/Formatierung und/oder Vollständigkeit besteht und somit jegliche Gewährleistung entfällt. Die Original-Entscheide können Sie unter dem jeweiligen Gericht bestellen oder entnehmen.

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