Zusammenfassung des Urteils HC/2014/645: Kantonsgericht
Die Cour d'appel CIVILE hat am 30. Juni 2014 über einen Rechtsstreit entschieden, bei dem F.________ D und N.________ D gegen Y.________, P.________ und T.________ appellierten. Der Richter war M. Colombini. Die Gerichtskosten betrugen 4'752 CHF für die Kläger und 2'225 CHF für die Beklagten. Die Kläger hatten eine Interessenklage eingereicht, um Schäden an Bäumen und Hecken zu verhindern, die sich auf ihren Grundstücken befanden. Der Richter wies die Klage ab, da die Kläger kein rechtliches Interesse an den geforderten Massnahmen hatten. Die Beklagten wurden in Bezug auf die Haftung für Schäden an Bäumen und Hecken durch Bauarbeiten unterschiedlich beurteilt. F.________ D und N.________ D appellierten gegen das Urteil und forderten eine Änderung der Entscheidung in ihrem Sinne. Es handelte sich um eine Zivilsache.
Kanton: | VD |
Fallnummer: | HC/2014/645 |
Instanz: | Kantonsgericht |
Abteilung: | Cour d'appel civile |
Datum: | 30.06.2014 |
Rechtskraft: | - |
Leitsatz/Stichwort: | - |
Schlagwörter : | été; Sàrl; établi; Expert; étaire; Appel; Selon; éplacement; égé; éfendeurs; ètre; éton; étonnier; état; éter; étaires; étaient; ètres; ésident; Entreprise; âtiment; écessaire; énagement; ègle; épens; étant |
Rechtsnorm: | Art. 100 BGG;Art. 308 ZPO;Art. 310 ZPO;Art. 311 ZPO;Art. 316 ZPO;Art. 317 ZPO;Art. 404 ZPO;Art. 405 ZPO;Art. 57 ZPO;Art. 693 ZGB;Art. 74 BGG;Art. 98 SchKG; |
Referenz BGE: | - |
Kommentar: | - |
TRIBUNAL CANTONAL | PP10.000180-140480 359 |
cour d’appel CIVILE
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Arrêt du 30 juin 2014
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Présidence de M. Colombini, président
Juges : MM. Giroud et Piotet, juge suppléant
Greffière : Mme Egger Rochat
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Art. 693 CC ; 742 al. 3 anc. CC ; 41 ss CO ; 308 al. 1 let. a et al. 2 CPC
Statuant à huis clos sur l’appel interjeté par F.__ D et N.__ D, à [...], demandeurs contre le jugement rendu le 23 juillet 2013 par le Président du Tribunal civil de l’arrondissement de La Côte dans la cause divisant les appelants d’avec Y.__, à [...],P.__, à [...] et T.__, à [...], défendeurs, la Cour d’appel civile du Tribunal cantonal voit :
En fait :
A. Par jugement du 23 juillet 2013, le Président du Tribunal civil de l’arrondissement de La Côte a rejeté les conclusions prises par les demandeurs, F.__ D et N.__ D, contre les défendeurs, Y.__, P.__ et T.__, dans leur demande du 30 avril 2010 et leurs déterminations du 30 novembre 2010 (I), rejeté les conclusions reconventionnelles prises par les défendeurs contre les demandeurs dans leur réponse du 3 septembre 2010 (II), fixé les frais et émoluments du Tribunal à 4'752 fr. 60 pour les demandeurs, solidairement entre eux et à 2'225 fr. pour les défendeurs, solidairement entre eux (III), dit que les dépens sont compensés (IV) et rejeté toutes autres ou plus amples conclusions (V).
En droit, le premier juge a considéré que les demandeurs n’avaient pas d’intérêt juridique à obtenir à l’encontre des défendeurs l’interdiction de porter atteinte aux arbres et à la haie situés « à la limite des parcelles nos [...] et [...] de la commune d’ [...]» qu’ils avaient requise de manière générale dans leur conclusion I. Une action en abstention doit en effet tendre à l’interdiction d’un comportement défini de façon précise. Quant à leur conclusion II tendant à l’interdiction de goudronner ou de modifier de quelque autre manière le « chemin piétonnier » longeant les parcelles nos [...] et [...] de la commune d’ [...], les demandeurs n’avaient également plus d’interêt à agir. Par convention conclue à l’audience de mesures provisionnelles du 25 janvier 2010, ils avaient en effet autorisé les défendeurs à poursuivre l’aménagement de ce chemin en le revêtant d’une couche de gravier selon diverses modalités, de sorte que les aménagements extérieurs étaient terminés. Ils ne subissaient dès lors plus de trouble sur leur parcelle n° [...] ni ne risquaient d’en percevoir à l’avenir.
Face à deux plans de géomètres contradictoires – qui n’indiquaient pas la haie litigieuse – et à une expertise constatant que le tilleul litigieux se trouvait sur la limite des parcelles nos [...] et [...], le premier juge a considéré que les demandeurs étaient fondés à exercer tous les droits du propriétaire, que ce soit en qualité de propriétaires uniques des plantations ou en leur qualité de copropriétaires. Ils devaient être admis à exercer l’action en cessation de trouble de l’art. 679 CC, mais aussi à agir en réparation du préjudice causé par celui qui aurait porté atteinte à l’objet de la propriété. Les demandeurs avaient ainsi la légitimation active dans le cadre de l’action en responsabilité délictuelle instituée par l’art. 41 CO.
Pour ce qui concerne la légitimation passive des défendeurs, le premier juge l’a réfutée dans le cadre de l’action en responsabilité délictuelle pour l’éventuel dommage causé à la haie et au tilleul par les travaux de fouille nécessaires au déplacement de la canalisation « Z4 » sur la parcelle n° [...]. Il a considéré que l’entreprise M.__ Sàrl avait agi en qualité d’auxiliaire de la société R.___ SA, celle-ci ayant commandé les travaux précités. En revanche, le premier juge a admis la légitimation passive des défendeurs en ce qui concernait l’action en responsabilité pour l’éventuel dommage causé au tilleul, au noyer et à la haie par les travaux d’aménagement du chemin piétonnier. Il n’était en effet pas contesté que l’entreprise [...] Sàrl ait agi comme leur auxiliaire. Cependant, le premier juge a retenu qu’aucun lien de causalité n’était établi entre le préjudice invoqué par les demandeurs sur leurs plantations – soit le tilleul, le noyer et la haie – et les agissements des auxiliaires des défendeurs.
B. Par acte du 10 mars 2014, F.__ D et N.__ D ont conclu, sous suite de frais et dépens, principalement à la réforme du chiffre I du jugement précité en ce sens que les conclusions prises contre les défendeurs Y.__, P.__ et T.__ dans leur demande du 30 avril 2010 et leurs déterminations sur réponse du 30 novembre 2010 sont admises, à la réforme du chiffre III du jugement précité en ce sens que les frais de justice de première instance sont entièrement mis à la charge des défendeurs, solidairement entre eux et à la réforme du chiffre IV du jugement précité en ce sens que les dépens de première instance sont mis à la charge des défendeurs, solidairement entre eux. Subsidiairement, les appelants ont conclu à l’annulation du jugement précité et au renvoi de la cause à l’autorité inférieure pour nouvelle instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants.
Les appelants ont requis des mesures d’instruction, si la Cour de céans les estimait nécessaires pour admettre l’appel, notamment l’organisation des débats, une nouvelle audition des témoins [...] et [...], l’audition de [...], Senior Counsel du Legal Service et Regulatory Affaires de [...] SA, de [...], associé-gérant président de [...] Sàrl, désormais en liquidation et la production par cette dernière de tout document ayant un lien avec les travaux effectués sur les parcelles n° [...] et n° [...], établi tant à la demande des intimés que de [...] SA.
Par réponse du 16 mai 2014, Y.__, P.__ et T.__ ont conclu, avec suite de frais et dépens, au rejet des conclusions prises par les appelants.
C. La Cour d'appel civile retient les faits suivants, sur la base du jugement querellé, complété par les pièces du dossier, les griefs soulevés par les appelants faisant l’objet d’un examen motivé dans les considérants de droit du présent arrêt :
1) F.__ D et N.__ D sont propriétaires de la parcelle n° [...] de la commune d’ [...], acquise le [...] 1989.
Y.__, P.__ et T.__ étaient propriétaires de la parcelle n° [...] d’une surface de 7'472 m2 de la commune d’ [...]. Après avoir divisé le bien-fonds, ils ont vendu la parcelle n° [...] subsistante de 1'200 m2 le [...] 2009 et sont restés propriétaires de la nouvelle parcelle n° [...] d’une surface de 6'272 m2. Cette parcelle demeure la seule contigüe avec la parcelle n° [...].
Une haie d’arbres, un tilleul, un noyer et des houx se trouvent le long de la limite des parcelles nos [...] et [...].
Selon un plan établi le 30 janvier 1987 et corrigé le 8 octobre 1987 par le Bureau d’études [...], ingénieur EPFL et géomètre officiel, le tilleul est situé sur la parcelle n° [...].
Le bureau [...] SA, ingénieurs EPFL et géomètres officiels, a établi, le 2 novembre 2009, un plan intitulé « Croquis de rétablissement de limites du 30 octobre 2009 » concernant notamment les parcelles nos [...] et [...] de la commune d’ [...]. Ce même bureau a établi, le 25 novembre 2009, un « Plan de situation local avec niveaux » de la Commune d’ [...] intitulé « Levé du tilleul sur limites des parcelles [...] et [...] du 24 novembre 2009 ». Selon ce plan, le tilleul se situe à raison de 2/3 sur la parcelle n° [...] et d’1/3 sur la parcelle n° [...].
2) Le 29 février 2008, Y.__, P.__ et T.__ ont obtenu la délivrance d’un permis de construire trois bâtiments d’habitation et un garage souterrain sur l’ancienne parcelle n° [...] (à ce jour parcelle n° [...]).
Par lettre du même jour, la Municipalité d’ [...] informait F.__ D et N.__ D qu’elle levait leur opposition au projet susmentionné, en précisant notamment :
« ►Arbres : l'implantation du bâtiment est nettement plus éloignée de votre limite que le minimum exigé par le règlement communal. De ce fait, la protection de vos arbres ne devrait pas poser de problème.
►Haies : cette haie implantée en limite de propriété n'est pas conforme aux dispositions du code rural et foncier, il ne nous est donc pas possible d'émettre des exigences à cet égard.
►Grillage : nous exigeons la clôture du chantier dans le cadre du permis de construire. Concernant les aménagements de séparation des propriétés ce point relève du droit privé mais nous avons demandé de clôturer la future place de jeux le long de la limite de la parcelle no [...]. »
E.__ Sàrl (ci-après : E.__ Sàrl), dont P.__ est l’unique associé gérant avec signature individuelle, a été chargée de la construction desdits bâtiments et du garage.
3) Selon le « Project-Journal » tenu par R.___ SA au sujet du déplacement de sa canalisation intitulée « Z4 » sur la parcelle n° [...] d' [...], comprenant comme n° de référence NVM « [...] », des contacts et rendez-vous ont eu lieu les 27 mars 2008 et 3 juin 2008 avec un architecte et l'entreprise M.__ Sàrl. En date du 3 juin 2008 est indiqué : « RDV sur place avec architecte + entreprise M.__ Sàrl, pose d’un syn 100 (…) cc 60/80 pour contournement futur bâtiments, gc 100% à charge de R.___ SA délai de suite. Fouille dès le 09.06.08 + mise service 23.06.08 (coupure) transmettre plan par email à M.__ Sàrl et architecte », étant précisé que l’abréviation «gc » signifie « génie civil ». Sur ce « Project-journal », [...] est indiqué comme directeur de chantier pour R.___ SA et E.__ Sàrl comme tiers architecte.
Le 4 juin 2008, R.___ SA a établi un plan de situation désigné « [...] » sur lequel figure les indications de la fouille destinée à permettre le raccordement au réseau de l'ancienne parcelle n° [...]. Ce plan indique un tracé jaune, intitulé « Z4 », qui correspond à la canalisation traversant en diagonale l’ancienne parcelle n° [...] et passant sur les zones destinées à la construction des trois immeubles. Ce plan indique que cette canalisation doit être démolie. Il souligne, en vert, le nouveau tracé le long de la limite de propriété à l’intérieur de la parcelle n° [...]. En caractères d'imprimerie est indiqué, au sujet du tracé vert : "Déviation canalisations suite nvlles constructions", ainsi que les mentions chiffrées « syn100 » et « syn55 » ; sont également indiquées les mentions « 6.00 » et « 63.50 » au sujet du tracé jaune. Une indication manuscrite mentionne : "Canalisations à resituer dès fin de chantier par rapport aux nouveaux bâtiments * actuellement collé à 1 m de la limite de propriété". Ce plan précise : « Les tracés non cotés des conduites de raccordement aux bâtiments sont indiqués de façon approximative. Il faut déterminer la profondeur sur la base des sondages. »
Ce plan mentionne deux cercle bleus qui sont des indications de fouille sur le chemin privé situé entre la parcelle n° [...] et la parcelle n° [...]. Selon les explications fournies par le Senior Counsel de R.___ SA, ces indications correspondent à deux ouvertures partielles que M.__ Sàrl devait exécuter pour R.___ SA.
Le 18 juin 2008, R.___ SA a signé un formulaire intitulé « Commande de travaux », indiquant comme partenaire contractuel M.__ Sàrl et ayant pour objet le déplacement de la canalisation « Z4 » sur la parcelle n° [...]. Cette commande contient le N° du NVM « [...] », le N° de commande SAP « [...] » et le N° d’ordre « [...] » ; elle indique comme date de livraison le 26 juin 2008. Sur ce formulaire est mentionné [...] pour la « Direction des travaux [...]» et E.__ Sàrl est indiqué comme bureau d’architecte.
4) a) Le 18 juin 2008, une fouille a été creusée le long de la haie sur la parcelle n° [...].
Par lettre recommandée du même jour, F.__ D et N.__ D ont écrit à E.__ Sàrl que des fouilles avaient eu lieu à une distance de moins de 1,50 m de la base des grands arbres avec une profondeur de 1,40 m sur 1,00 m de large et que la pelle mécanique avait arraché et déchiqueté les racines de leur tilleul et de leur noyer, en exigeant la mise en place de diverses mesures à bref délai.
b) Le 23 juin 2008, [...] d’ [...] Sàrl a adressé un constat à F.__ D avec une note d'honoraires de 550 francs. Ce constat présentait un descriptif des dégâts et de leurs conséquences, un calcul pour l’évaluation des dommages causés aux arbres selon les normes de l’USSP et un dommage financier total de 10'314 fr. 76 selon les tabelles USSP. Selon ce rapport, la disparition d’environ 30 à 35% du système racinaire au nord – nord-ouest (en période de végétation particulièrement) était très néfaste pour la physiologie de l’arbre. Les travaux de fouilles avaient été effectués inconsidérément sans aucune précaution particulière, la destruction étant donc importante et allant porter préjudice au développement de l’arbre. Une taille d’allègement était nécessaire pour diminuer les charges de l’arbre. Selon les Directives de l’USSP, éd. 2006, pour l’évaluation financière de dommages causés aux arbres, 40% de blessures aux racines correspond à un dommage de 100% pour une durée de vie restant nulle.
c) Par courrier du 23 juin 2008, R.___ SA a demandé à N.__ D une autorisation de fouille sur le chemin privé, situé sur la parcelle n° [...] et la parcelle n° [...]. Son contenu était le suivant :
« En effet, nous devons déplacer des câbles traversant la parcelle [...].
Pour permettre ce déplacement, nous devons faire des ouvertures sur votre propriété, et c’est pour cela que nous sollicitons votre autorisation.
[…]
Voici le programme prévu :
- Jeudi 26.06.2008 de 8h00 à 16h00.
- […]
[…] »
Par lettre du 7 juillet 2008, R.___ SA a écrit à E.__ Sàrl, par P.__, ce qui suit :
« Suite aux travaux de détournements de nos câbles téléphoniques effectués (…) sur la parcelle en construction no [...] à [...], il s'est avéré que, lors de la préparation de ces derniers, un incident s'est produit aux niveaux des fouilles effectuées par l'entreprise M.__ Sàrl.
Comme déjà averti lors de la séance de chantier du 3 juin dernier par notre chef de chantier M. [...], il vous était conseillé de ne pas trop se rapprocher des arbres se situant sur la parcelle voisine no [...], au risque d'endommager leurs racines. Un second avertissement a été donné au machiniste de l'entreprise M.__ Sàrl par notre chef de chantier lors du début des travaux en semaine 25. Malgré cela, l'incident s'est quand même produit.
Nous vous rendons attentif au fait que les plans qui vous ont été transmis par nos soins sont uniquement indicatifs, par ailleurs ils ne comportent aucune cote, il en va donc de la direction des travaux de décider du passage exact des conduites.
Par conséquent, et ceci malgré l'avenir incertain de cet arbre, nous déclinons toutes responsabilités en cas de perte de ce dernier. »
d) Par lettre du 17 juillet 2008, T.__ s’est adressé à F.__ D et N.__ D. Il leur a déclaré qu’ils étaient également bénéficiaires de la conduite téléphonique déplacée par R.___ SA, que les arbres concernés n’étaient pas à la distance réglementaire selon le code rural, qu’il en était de même pour la haie qui n’était pas entretenue et dont l’élagage et la taille avaient été effectués par les propriétaires de la parcelle n° [...], que ces derniers refusaient de participer au paiement de la facture de [...], d’ [...] Sàrl et que leur arbre ne risquait rien.
e) Le 18 décembre 2008, R.___ SA a payé le montant de 17'341 fr. 40 (Zuordnung « [...] »), qui faisait l’objet de la facture que lui avait adressée l’entreprise M.__ Sàrl le 18 novembre 2008. Cette facture contient le N° NVM « [...] », le N° de commande SAP « [...] » et le N° d’ordre « [...] » ; elle concerne expressément le déplacement de la canalisation intitulée « Z4 » sur la parcelle n° [...] en raison des trois immeubles d’habitations et les travaux de fouille effectués à ce titre.
f) Le 4 mai 2009, [...] SA a adressé à F.__ D une facture de 2'370 fr. pour une intervention du 24 avril 2009 avec la mention "tilleul endommagé par un chantier de construction" suivie de la liste des travaux exécutés.
g) Par courriel du 8 mai 2009, E.__ Sàrl a adressé à R.___ SA et à divers autres intervenants son "projet de fouille pour les introductions des services respectifs" pour les travaux d'eau, de gaz et d'électricité relatifs au chantier d’ [...] en priant de lui remettre la liste du matériel à commander.
h) Mandaté par E.__ Sàrl, [...], d’ [...] SA, a établi le 31 août 2009 un rapport d'analyse arboricole. Il a commenté que le tilleul était au début de sa maturité et que sa vigueur et sa vitalité étaient très satisfaisantes, que la creuse de la fouille semblait avoir provoqué une réduction des racines. Il a conclu qu'une fois son équilibre dynamique biologique rétabli, l'arbre reprendrait ses rythmes de croissance ontongéniques puis deviendrait un arbre imposant.
Le 2 septembre 2009, [...] SA a établi une facture d'un montant total de 2'684 fr. 60 à l'intention d’E.__ Sàrl pour son analyse arboricole.
5) Le 6 novembre 2009, [...], d’ [...] Sàrl, a établi un constat à l'intention de F.__ D, après une visite sur place, qui a été facturé 390 fr. le 23 avril 2010 et dont le contenu est le suivant :
« 1) De nouvelles racines ont été blessées courant octobre lors de la création d'un cheminement piétonnier. Celui-ci passe sur la zone racinaire.
2) Le décapage a été fait sans discernement et sans aucune précaution par l'entreprise paysagère s'occupant des aménagements extérieurs.
3) Une branche a été arrachée récemment. Celle-ci est encore suspendue dans la couronne.
4) L'entreprise paysagère n'a pas respecté les normes de protection qui régissent les travaux à proximité des arbres. »
Par courrier adressé le 22 décembre 2009 au conseil de F.__ D et de N.__ D, la Municipalité d’ [...] a exposé que la problématique de la pose d'une clôture en limite des parcelles nos [...] et [...] relevait du droit privé et qu'elle mettait tout en œuvre pour faire respecter les conditions du permis de construire.
Dans une lettre du 4 janvier 2010, [...] Sàrl a confirmé à Y.__, P.__ et T.__ que les revêtements bitumineux des chemins et parkings avaient été réalisés et terminés du 8 au 10 décembre 2009, seul restant à achever un chemin en gravier perméable vers le bâtiment C.
Selon un courrier de la Municipalité d’ [...] adressé le 6 janvier 2010 au conseil de F.__ D et de N.__ D, il n'était pas question de faire cesser les travaux sur la parcelle n° [...], les aménagements en cours étant conformes aux plans mis à l'enquête publique.
Le 22 février 2010, la Municipalité d' [...] a délivré le permis d'habiter pour les bâtiments d'habitation et le garage des défendeurs. Depuis lors, certains lots de propriété ont été aliénés à des tiers.
6) a) Par ordonnance de mesures préprovisionnelles rendue le 28 décembre 2009, le Président du Tribunal civil de l'arrondissement de La Côte a interdit à Y.__, P.__ et T.__, ainsi qu'à leurs auxiliaires, sous la menace de la peine d'amende prévue par l'art. 292 CP en cas d'insoumission à une décision de l'autorité, de porter atteinte aux arbres et à la haie situés à la limite des parcelles nos [...] (anciennement n° [...]) et [...] de la commune d' [...] (I), de pénétrer sur la parcelle n° [...] (II) et d'emprunter le chemin grevé d'une servitude de passage dont N.__ D et F.__ D sont bénéficiaires et menant du chemin des [...] à la parcelle n° [...] de la commune d' [...] (III), enfin de poursuivre la construction (notamment le goudronnage) du chemin piétonnier longeant la parcelle n° [...] de la commune d' [...] et propriété de ces derniers (IV).
A l'audience du 25 janvier 2010, le Président a ratifié la convention passée entre les parties reprenant les chiffres I, II et III de l'ordonnance de mesures préprovisionnelles précitée (I) et modifiant le chiffre IV de ladite ordonnance en ce sens que les défendeurs pouvaient poursuivre l'aménagement du "chemin piétonnier" (cette locution ne liant pas d'autres autorités qui seraient amenées à se prononcer sur un litige entre les parties) en revêtant ce dernier d'une couche de gravier roulé du Jura de 3 cm au maximum d'épaisseur, à l'exclusion d'un rayon de 3 mètres à compter du centre du tilleul se situant en limite de propriété (II), il a imparti un délai au 30 avril 2010 à F.__ D et N.__ D pour valider leurs conclusions provisionnelles (III), les dépens suivant le sort de la cause au fond (IV).
b) Par demande du 30 avril 2010, F.__ D et N.__ D ont conclu, avec suite de frais et dépens, qu'interdiction soit faite à Y.__, P.__ et T.__ et à leurs auxiliaires de porter atteinte aux arbres et à la haie situés à la limite des parcelles nos [...] et [...] de la commune d' [...] et de goudronner ou de modifier de quelque autre manière le "chemin piétonnier" longeant les parcelles nos [...] et [...] de la commune d' [...], sous la menace de l'amende prévue par l'art. 292 CP en cas d'insoumission (I et II) et que les défendeurs, solidairement entre eux, doivent leur payer la somme de 29'973 fr. 70, avec intérêt à 5% l'an dès le 18 juin 2008, montant à préciser après le dépôt d'une expertise judiciaire (III).
Dans leur réponse du 3 septembre 2010, Y.__, P.__ et T.__ ont conclu, avec suite de frais et dépens, au rejet des conclusions de la demande et, reconventionnellement, à ce que F.__ D et N.__ D, solidairement entre eux, doivent leur payer la somme de 26'700 fr., avec intérêt à 5% l'an dès le 16 mai 2010.
Les demandeurs se sont déterminés le 30 novembre 2010, en confirmant les conclusions I et II de leur demande, en augmentant leur conclusion III à 30'000 fr. et en concluant au rejet des conclusions reconventionnelles.
Le 15 août 2011, le Senior Counsel de R.___ SA a produit les pièces requises 56 et 151 et fourni des explications à leur sujet.
7) a) Le Président du Tribunal d’arrondissement a mis en œuvre l’expert Gildas, chez Arbres & CO, à Miège, qui a déposé son rapport le 7 juillet 2011, en se fondant sur les preuves offertes par les parties et l’analyse visuelle des végétaux (arbres et haie).
Tout d'abord, l'expert a reconstitué l'historique des travaux comme il suit :
« 18 juin 2008 : Réalisation d'une fouille à moins de 2.00 mètres de la haie d'une profondeur de 1.40 m et d'une largeur de 1.00 m sans appliquer les règles de l'art pour les travaux à proximité des arbres.
20 juin 2008 : Reprise nette des racines arrachées par M. [...] d' [...] Sàrl.
24 avril 2009 :Taille d'allègement sur le tilleul. Réduction légère du houppier et pose d'un hauban entre les 2 troncs pour la consolidation de la couronne.
Octobre 2009 : Décapage du sol pour la réalisation d'un cheminement piétonnier. De nouvelles racines sont arrachées, plus proches des troncs et de plus petit diamètre.
La haie est encore diminuée jusqu'à la limite de propriété déterminée par les bornes. Le noyer est abattu. »
Après une analyse visuelle du tilleul, l'expert a remarqué que l'environnement proche du tilleul avait été modifié récemment, du gravier installé à son pied sur 90 cm de largeur pour créer un cheminement piéton, une pelouse étant aménagée pour le restant de la largeur; le sol restait perméable et l'arbre pouvait toujours recevoir les eaux de pluie. De près, l'expert a observé que les racines superficielles et la base du collet avaient été frottées et arrachées par les dents du godet d'une mini-pelle et que le tassement du sol par les machines de chantier diminuaient fortement les capacités d'alimentation en eau, étant rappelé que les racines les plus fines destinées à cette fin étaient localisées dans les 20 à 30 cm les plus proches de la surface. L'expert a constaté que le tilleul était en bon état général, avec des racines malmenées qui pouvaient provoquer rapidement un revirement de la situation; il a souligné que des symptômes pouvaient se manifester rapidement sur un arbre à la suite d'une destruction importante de racines, mais pouvaient aussi survenir plusieurs années après une compaction, une surélévation ou un enlèvement de la couverture superficielle du sol. Dès lors, il a préconisé de surveiller le tilleul, avec une inspection tous les trois ans en période de végétation pour prévenir toute dégradation et avec une taille d'entretien et une légère réduction de la couronne souhaitable tous les cinq ans. L’expert a constaté que les dégâts causés secondairement en automne 2009 ont aggravé les conditions de vie du tilleul. Il a rappelé que, selon les normes USSP 2006, 40% de blessure aux racines équivalait à un dommage total (100%) et une espérance de vie réduite à zéro. Toutefois, en dépit de la théorie, après deux années de végétation, le tilleul était en bon état de santé visuel si bien qu'il serait regrettable de l'abattre sur la foi des tabelles et non pas de son état réel.
A dire d'expert, la haie, qui est composée de plusieurs essences, mesure 35 mètres de long sur 3 mètres de large, avec une hauteur moyenne de 2.5 à 3 mètres. Suite aux différentes interventions, la haie a subi l'arrachage de racines et la suppression de branches et de troncs sur la moitié de la largeur initiale, soit un peu plus de 1.5 mètres ; le diamètre des coupes varie entre 3 et 19 cm; deux ans après les derniers travaux, la haie comporte des branches sèches, de nombreuses feuilles jaunissantes démontrant un dessèchement progressif des plantes. La perte d'une partie du système aérien et racinaire montre qu'il y a bien eu un dommage sur l'ensemble de la haie ; toutefois, la capacité de cette plante à réagir et à refaire du feuillage en fonction de son système racinaire est importante, si bien que la haie va se regarnir progressivement pour devenir plus compacte. L'expert a préconisé une taille de suppression des parties mortes ou faibles ainsi qu'une réduction de la hauteur afin de permettre à la haie de se rééquilibrer par rapport à la perte de la moitié de son volume foliaire et racinaire. Il a déclaré qu'il ne rentrerait pas en matière sur le calcul du montant d'un dommage.
L'expert a constaté que les travaux près de la haie n'avaient pas respecté les règles de l'art pour la conservation optimale des végétaux malgré les avertissements des demandeurs et que la fouille de juin 2008 était beaucoup trop proche du centre du tilleul ; elle demeurait une porte d'entrée pour les agents pathogènes qui pouvait engendrer des dégâts à n'importe quel moment. Pour le reste de la haie, la perte de racines avait été accompagnée d'une taille de réduction du volume des branches; les lauriers-palmes avaient le pouvoir de reconstituer leur feuillage en fonction des racines et leur garantir un caractère compact ; une taille de nettoyage des parties sèches ou faibles ainsi qu'une diminution des longues branches améliorera l'esthétisme de la haie.
Selon l'expert, la mise en place du chemin piétonnier en octobre 2009 avait détruit les racines superficielles du tilleul et de la haie orientées au Nord-Ouest et ne respectait pas les règles de protection des végétaux à proximité des chantiers. L'imperméabilisation du chemin piétonnier ajouterait une contrainte supplémentaire au bon développement des végétaux, mais l'ensemble végétal avait de grandes chances de survivre à ce nouvel aménagement, que l'expert déconseillait d'entreprendre.
L'expert a relevé que le noyer était "en fort mauvais état voire quasiment mort sur pied" et qu'il ne lui paraissait pas judicieux d'en tenir compte dans une estimation financière du dommage.
L'expert a considéré que seul le tilleul figurait sur la décision du Conseil d'Etat du 7 novembre 1973 relative au classement communal des arbres de la commune d' [...], mais que cette liste était obsolète et semblait présenter des manquements ; selon l'art. 98 LPMNS, les arbres et l'ensemble de la haie étaient protégés lors du début des travaux. Les défendeurs, propriétaires de la parcelle n° [...], n'étaient pas exemptés de respecter les règles de protection de la végétation proche des chantiers "ajoutés à l'abattage du noyer et à l'élagage d'une haie vive sans autorisation".
Après avoir renoncé à un nouveau relevé relatif à la limite entre les parcelles en cause, l'expert s'est fondé sur le plan établi par le bureau de géomètres officiels [...] SA pour affirmer que les plantations ne respectaient pas la distance à la limite prévue par le Code rural et foncier ; il lui semblait que le tilleul se trouvait sur la limite des deux parcelles.
b) Il ressort d'un complément d'expertise déposé le 9 juillet 2012 par Gildas Houdou que l'abattage et la replantation d'un tilleul de force 70/80 représentent un coût total de 22'982 fr. 70, alors que le prix de la taille et du nettoyage de la haie est de 845 fr. 64.
L'expert a analysé la facture de [...] Sàrl en retenant seulement les postes relatifs à l'abattage des buissons, au ramassage et à l'évacuation, en excluant les postes relatifs aux travaux d'entretien courant et aux interventions préparatoires à la mise en place du chemin piétonnier pour parvenir à un montant de 3'611 fr., en relevant que celui-ci était trop élevé et en estimant les prix justifiés à une somme totale de 2'369 francs.
L'expert a joint à son complément d'expertise un formulaire B pour le calcul de dommage pour une plantation de remplacement en cas de dommage total remplie par lui le 29 juillet 2012 qui fait apparaître un montant de base des dommages-intérêts de 22'982 fr. 70, TVA comprise.
c) Gildas Houdou a signé un nouveau complément d'expertise établi le 26 novembre 2012 qui chiffre à 550 fr. le coût du diagnostic physiologique et mécanique de l'arbre tous les trois ans (prochain rapport en 2015), à 1'480 fr. les travaux d'entretien de la couronne tous les cinq ans (prochaine taille en 2014) et à 240 fr. le remplacement du hauban entre les deux troncs de l'arbre tous les huit ans (prochain remplacement en 2017).
8) À l'audience de jugement du 6 mai 2013, le Président a procédé à une inspection locale et entendu sept témoins.
Le témoin [...], superviseur, pour le compte de R.___ SA, des travaux effectués en juin 2008, a déclaré que le plan établi le 4 juin 2008 par R.___ SA n’était pas le plan de principe remis à M.__ Sàrl, mais un plan qu’il avait lui-même établi par la suite, une fois les travaux exécutés, en y indiquant les cotes. Il ne se souvenait pas si ce plan avait été transmis à l’architecte. Il a confirmé que le tracé définitif de la conduite était défini par la direction des travaux, tracé qui peut être trois mètres plus haut ou trois mètres plus bas par rapport au plan de principe qui est transmis à la base. Il a indiqué qu’il n’avait pas vu d’autres conduites que celles de R.___ SA dans la fouille.
Selon le témoin [...], projeteur access chez R.___ SA, le tracé de la déviation de la conduite signalé en vert sur le plan précité a été établi par leur service. Ce tracé a été dressé selon leur pratique, en limite de propriété, avec la précision que c’est au propriétaire de choisir l’endroit où il veut faire passer la conduite. Si leur suggestion de tracé longe la limite de propriété, c’est pour éviter de gêner les éventuelles constructions futures. Il lui a semblé que l’entrepreneur, qui avait fait les travaux, avait dû se voir communiquer par leur service le plan établi le 4 juin 2008, soit par courrier soit par [...], cela sans toutefois les annotations manuscrites figurant sur ledit document et qui ont dû être ajoutées postérieurement par [...]. Selon ses souvenirs, ce plan a également été remis à la direction des travaux par courriel.
En droit :
1. a) Le dispositif du jugement attaqué a été communiqué aux parties le 23 juillet 2013, de sorte que les voies de droit sont régies par le CPC (Code de procédure civile suisse du 19 décembre 2008, RS 272), entré en vigueur le 1er janvier 2011 (art. 405 al. 1 CPC; ATF 137 III 130, JT 2011 II 228; Tappy, in CPC commenté, Bâle 2011, nn. 5 ss ad art. 405 CPC). En revanche, dès lors que la demande a été déposée avant le 1er janvier 2011, c'est l'ancien droit de procédure qui régit la procédure de première instance (art. 404 al. 1 CPC), notamment le CPC-VD (Code de procédure civile vaudoise du 14 décembre 1966, aujourd'hui abrogé).
b) L'appel est ouvert contre les décisions finales de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC), dans les causes patrimoniales pour autant que la valeur litigieuse dépasse 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).
En l’espèce, les appelants concluent à l’admission des conclusions prises dans leur demande du 30 avril 2010 et augmentées à 30'000 fr. dans leurs déterminations du 30 novembre 2010.
Dès lors, formé en temps utile (art. 311 al. 1 CPC) par une partie qui y a intérêt (art. 59 al. 2 let. a CPC) et dans une cause dont la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr., l'appel est recevable.
2. a) L'appel peut être formé pour violation du droit ou pour constatation inexacte des faits (art. 310 CPC). L'autorité d'appel peut revoir l'ensemble du droit applicable, y compris les questions d'opportunité ou d'appréciation laissées par la loi à la décision du juge, et doit le cas échéant appliquer le droit d'office conformément au principe général de l'art. 57 CPC (Tappy, Les voies de droit du nouveau Code de procédure civile, JT 2010 III 134). Elle peut revoir librement la constatation des faits sur la base des preuves administrées en première instance (Tappy, op. cit., JT 2010 III 135).
b) L'instance d'appel peut administrer les preuves (art. 316 al. 3 CPC), notamment lorsqu'elle estime opportun de renouveler l'administration d'une preuve ou d'administrer une preuve alors que l'instance inférieure s'y était refusée, de procéder à l'administration d'une preuve nouvelle ou d'instruire à raison de conclusions ou de faits nouveaux (Jeandin, CPC commenté, n. 5 ad art. 316 CPC). L'art. 316 al. 3 CPC ne confère pas à l'appelant un droit à la réouverture de la procédure probatoire et à l'administration des preuves. L'instance d'appel peut rejeter la requête de réouverture de la procédure probatoire et d'administration d'un moyen de preuve déterminé si l'appelant n'a pas suffisamment motivé sa critique de la constatation de fait retenue par la décision attaquée. Elle peut également refuser une mesure probatoire en procédant à une appréciation anticipée des preuves, lorsqu'elle estime que le moyen de preuve requis ne pourrait pas fournir la preuve attendue ou ne pourrait en aucun cas prévaloir sur les autres moyens de preuve déjà administrés par le tribunal de première instance, à savoir lorsqu'il ne serait pas de nature à modifier le résultat des preuves qu'elle tient pour acquis (ATF 138 III 374; ATF 131 III 222 c. 4.3; ATF 129 III 18 c. 2.6). Si l’instance d’appel doit procéder à l’administration d’une preuve nouvelle ou instruire à raison de faits nouveaux, son pouvoir sera limité par les restrictions de l’art. 317 CPC (Jeandin, op. cit., n. 9 ad art. 316 CPC) qui prévoit que les faits et moyens de preuve nouveaux ne sont pris en compte que s'ils sont invoqués ou produits sans retard et ne pouvaient être invoqués ou produits devant la première instance, bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise, ces deux conditions étant cumulatives (Tappy, op. cit., JT 2010 III pp. 136-137).
c) En l’espèce, les appelants sollicitent plusieures mesures d’instructions. D’une part, ils requièrent le récolement de quatre témoins : [...] et [...], entendus par le premier juge et [...], Senior Counsel du Legal Service et Regulatory Affaires de R.___ SA et [...], associé-gérant président de M.__ Sàrl, actuellement en liquidation. Cependant, les appelants ne démontrent pas ce qui les aurait empêchés, tout en faisant preuve de la diligence requise, de compléter les témoignages et de procéder à l’audition de témoins supplémentaires en première instance. D’autre part, ils requièrent la production de pièces en mains de l’entreprise M.__ Sàrl, en liquidation. Ces pièces auraient pour but d’établir le lien contractuel entre cette société et les maîtres d’œuvre que seraient les intimés par l’intermédiaire de R.___ SA. Or, cet élément peut être acquis sur la base du dossier, tel que constitué par le premier juge, sans qu’une instruction complémentaire par la Cour de céans ne soit nécessaire (cf. infra c. 3 et 5.3.1). Partant, une nouvelle administration des preuves ne paraît pas justifiée, de sorte qu’il n’y a pas lieu d’organiser des débats. Au surplus, faute de demande commune de la part des parties, la Cour de céans délibère à huis clos, conformément à l’art. 35 al. 2 CDPJ (Code de droit privé judiciaire vaudois du 12 janvier 2010, RSV 211.02).
3. Les appelants estiment que l’essentiel des faits nécessaires pour trancher le présent litige ont été correctement exposés dans le jugement attaqué, si ce n’est que certains faits ont été constatés de manière inexacte ou mal appréciés par le premier juge. Ce dernier aurait notamment écarté, à tort, les témoignages d’ [...] et [...] en ce qui concerne le plan établi le 4 juin 2008. Le premier juge aurait dès lors réfuté, à tort, la légitimation passive des intimés à l’action en responsabilité intentée à leur encontre.
Les appelants contestent que le tracé vert indiqué sur le plan de situation établi le 4 juin 2008 par R.___ SA corresponde au « tracé prévu de la fouille destinée à permettre le raccordement au réseau de l’ancienne parcelle n° [...]». D’une part, ils se réfèrent au courriel de P.__ envoyé le 8 mai 2009 à R.___ SA et d’autres intervenants. Or, si ce courriel évoque un « projet de fouille », celui-ci ne concerne que les introductions des services « respectifs » et ne mentionne nullement la canalisation intitulée « Z4 » de la parcelle n° [...]. D’autre part, ils se réfèrent aux témoignages d’ [...] et [...]. Or, ces témoignages sont contradictoires : selon le premier, il ne s’agirait pas du plan de principe contenant le tracé de la fouille, alors qu’il a semblé au second que « l’entrepreneur qui a fait les travaux a dû se voir communiquer par notre service le plan du 4 juin 2008, soit par courrier soit par M. [...], cela sans toutefois les annotations manuscrites qui figurent sur ledit document ». Les déclarations du second sont corroborées par les explications du Senior Counsel de R.___ SA, dans son courrier du 15 août 2011 adressé au premier juge lors de la production des pièces 56 et 151 sur lesquelles se fondent les appelants. Celui-là a indiqué qu’il s’agissait d’une copie de la commande des travaux faite à M.__ Sàrl le 18 juin 2008, laquelle comprenait le plan de situation. Selon ses précisions, seule la note manuscrite en vert ne figurait pas sur le plan fourni à l’époque à M.__ Sàrl. Ainsi, sur ce plan figurait le tracé jaune de la canalisation intitulée « Z4 » qui devait être démolie et le nouveau tracé en vert, accompagnés de mentions chiffrées (6.00/63.50/syn100/syn55). Ce plan contenait aussi la mention « Les tracés non cotés des conduites de raccordement aux bâtiments sont indiqués de façon approximative. Il faut déterminer la profondeur sur la base des sondages ». Les pièces confirment ces explications : le n° « [...] » de désignation du plan établi le 4 juin 2008 est expressément repris dans la « Commande de travaux » signée le 18 juin 2008 sous la rubrique « N° du NVM », le « NVM » désignant lui-même le déplacement de la canalisation « Z4 » sur la parcelle n° [...] et, ce n° NVM « [...] » étant également repris dans la facture établie le 18 novembre 2008 par M.__ Sàrl à l’attention de R.___ SA, au sujet des travaux nécessaires au déplacement de la canalisation « Z4 » sur la parcelle n° [...]. En outre, s’il ressort de la lettre du 7 juillet 2008 que les plans transmis sont purement indicatifs et qu’il appartient à la direction des travaux de décider du passage exact des conduites, il ressort de la commande de travaux du 18 juin 2008 que le responsable mentionné à la « Direction des travaux [...] » est [...], employé de R.___ SA. Partant, le premier juge a correctement apprécié le tracé « vert » indiqué sur le plan établi le 4 juin 2008, lorsqu’il a retenu que ce tracé correspondait au « tracé prévu de la fouille destinée à permettre le raccordement au réseau de l’ancienne parcelle n° [...]».
Pour ce qui concerne la lettre adressée le 23 juin 2008 par R.___ SA aux appelants concernant les ouvertures sur le chemin privé situé entre la parcelle n° [...] et la parcelle n° [...] indiquées par deux cercles bleus sur le plan établi le 4 juin 2008, son contenu se réfère expressément à ces ouvertures et ne contredit pas le fait que la fouille pour le déplacement de la canalisation « Z4 » ait été effectuée le 18 juin 2008. Cette fouille relative à la canalisation « Z4 » a été effectuée sur la parcelle n° [...], alors que l’autorisation requise dans le courrier du 23 juin 2008 concerne une fouille sur la propriété des appelants, soit la parcelle n° [...]. Selon les explications du Senior Counsel de R.___ SA : « M.__ Sàrl devait exécuter pour R.___ SA 2 ouvertures partielles indiquées par un cercle bleu sur le plan de situation ». Il apparaît logique que ces ouvertures devaient être creusées postérieurement à la fouille litigieuse, soit à partir du 26 juin 2008 comme indiqué dans le courrier.
Quant au plan de situation du 28 novembre 2011, peu importe que le premier juge n’ait pas indiqué qu’il avait été établi par les intimés, puisqu’il n’a pas retenu les faits ni fondé sa motivation sur la base de ce document.
Comme le relèvent les appelants, il n’est pas contesté que la canalisation intitulée « Z4 » ait été déplacée « en vue de la construction de 3 immeubles » d’habitation et d’un garage souterrain, tel que cela ressort du « Project-Journal » comportant également le n°de référence NVM [...]. Celui-ci indique en date du 3 juin 2008 : « RDV sur place avec architecte + entreprise M.__ Sàrl, pose d’un syn 100 (…) cc 60/80 pour contournement futur bâtiments, gc 100% à charge de R.___ SA délai de suite. Fouille dès le 09.06.08 + mise service 23.06.08 (coupure) transmettre plan par email à M.__ Sàrl et architecte », étant précisé que l’abréviation «gc » signifie « génie civil ».
Enfin, concernant la mention apposée le 6 juin 2008 dans le « Project-Journal » selon laquelle le « plan de situation avec canalisations déplacées » ne serait qu’un « projet », elle ne saurait être retenue. [...], responsable de la Direction de chantier [...] et de la Direction des travaux [...] selon la commande du 4 juin 2008 a déclaré que cette mention était de « quelqu’un d’autre » sans nommer quiconque. En outre, cette mention ne figure pas sur les trois exemplaires du « Project-Journal », contrairement aux mentions inscrites en dates des 27 mars et 3 juin 2008.
Au vu de ce qui précède, la Cour de céans peut s’en tenir aux faits retenus par le premier juge et tels que complétés.
4. Le premier juge a admis à raison la légitimation active des appelants. Au vu des plans de géomètre produits par les intimés, la qualité de copropriétaire de ces derniers pour 1/3 est à tout le moins établie. Cela suffit pour admettre leur qualité pour agir, peu important que la preuve de leur pleine propriété ne soit pas apportée (cf. art. 8 CC).
5.
5.1 Les appelants estiment que les intimés seraient responsables de tous les travaux de fouille effectués sur leur parcelle n° [...], travaux qui auraient endommagé leurs plantations. Il s’agirait des travaux de fouille nécessaires au déplacement de la canalisation « Z4 » accomplis en juin 2008 et des travaux nécessaires à l’aménagement du chemin piétonnier accomplis en octobre 2009. Au contraire, les intimés réfutent leur légitimation passive : R.___ SA est responsable de l’éventuel dommage causé par les travaux de fouille effectués pour le déplacement de la canalisation « Z4 », l’entreprise M.__ Sàrl ayant agi comme auxiliaire de cette société.
La responsabilité des intimés a été invoquée en application des art. 41 ss CO (Code des obligations du 30 mars 1911, RS 220) pour atteinte à la propriété des appelants, de sorte que leur légitimation passive doit être examinée en vertu de ces dispositions. Il s’impose tout d’abord d’examiner cette question sous l’angle de la qualité de propriétaire par unité d’étage de chaque intimé, puis sous l’angle de l’action en responsabilité dirigée à leur encontre. A cet égard, cette question sera appréciée d’une part, en distinguant selon que les travaux à l’origine d’un éventuel dommage ont été effectués en juin 2008 ou en octobre 2009 et, d’autre part, en distinguant les prétentions en responsabilité invoquées.
5.2 En l’espèce, les intimés étaient propriétaires par unités d’étages de tous les lots de la parcelle n° [...]. Toutefois, depuis la réalisation des travaux litigieux, certains de ces lots ont été aliénés à des tiers. Quand bien même les intimés ont évoqué la vente de ces parts de propriété par étage en cours d’instruction sans en apporter la preuve, ces faits ne sauraient être ignorés par les parties ni par le juge, même en seconde instance. Le transfert de lots d’une propriété par étages concerne des indications figurant au registre foncier qu’il se justifie de considérer comme des faits notoires qui ne sont pas assujettis à l’administration de preuves (CACI 18 juin 2013/314, JT 2014 III 13, c. 2c). Or, une action en interdiction ou en cessation de trouble est une action indivisible, qui doit être dirigée contre tous les copropriétaires consorts nécessaires (Bohnet, Actions civiles, Commentaire Pratique, 2014, § 44 nn. 27 et 31 ; Steinauer, Droits réels, T. II, n. 1905d), de sorte qu’elle ne saurait aboutir contre une partie seulement des copropriétaires actuels. Pour ce motif, les conclusions I et II de la demande du 30 avril 2010 doivent être rejetées, tel qu’a statué le premier juge.
En revanche, les anciens copropriétaires demeurent responsables des atteintes au droit de propriété des voisins commises lorsqu’ils étaient seuls copropriétaires (cf. Bohnet, op. cit., n. 27 ; aussi ATF 100 II 307, JT 1976 I 240). Concernant les travaux effectués sur les parties communes en copropriété, soit le terrain lui-même, leur responsabilité suit le régime de la solidarité (cf. Bohnet, op. cit., nn. 30 s. ; Steinauer, op. cit., T. II, n. 1905d ; aussi ATF 117 II 50 c. 5b).
5.3 Concernant la légitimation passive des intimés à l’action en responsabilité intentée à leur encontre en raison des atteintes provoquées par les travaux de fouille effectués en juin 2008 et en octobre 2009, il s’impose d’examiner si la distinction, proposée par l’expert et reprise par le premier juge, se justifie légalement. Le premier juge a dissocié les travaux liés à deux fouilles distinctes et successives : la première fouille effectuée en juin 2008 pour laquelle M.__ Sàrl aurait été mandatée par R.___ SA et dont le dommage en résultant ne saurait être imputé aux intimés, faute de légimitation passive, puis la seconde fouille effectuée en octobre 2009 pour l’aménagement du chemin piétonnier, dont il ne serait pas établi qu’il y ait un lien de causalité adéquat avec le dommage.
5.3.1 Il n’est pas contesté que la première fouille réalisée en juin 2008 pour la pose des conduites de R.___ SA est consécutive à la construction sur la parcelle des intimés des trois bâtiments réalisés depuis lors.
L’art. 742 al. 3 anc. CC – alors en vigueur et applicable en 2008, ayant été abrogé par le chiffre I 1 de la LF du 11 décembre 2009 en vigueur depuis le 1er janvier 2012, RO 2011 4673 – prévoyait l’application des règles concernant les rapports de voisinage au déplacement de conduites. Selon cette disposition, l’art. 693 CC était applicable à toutes les requêtes de déplacement d’une servitude de conduite à la demande du propriétaire grevé, que cette servitude ait été librement consentie ou qu’elle ait eu son origine dans l’application des règles sur les servitudes de lignes de conduites nécessaires (Steinauer, op. cit. , T. II, n. 1858d ; ATF 97 II 371, JT 1973 I 56 ). En vertu de l’art. 693 al. 1 et 2 CC, les travaux de déplacement, même dans l’intérêt du propriétaire grevé, sont de la responsabilité et aux frais du titulaire de la servitude (ATF 97 II 371, JT 1973 I 56). Cette règle n’exclut toutefois pas une convention, entre le propriétaire grevé et le titulaire de la servitude, prévoyant le contraire.
En l’occurrence, les intimés, en leur qualité de propriétaires grevés, avaient un intérêt à obtenir le déplacement de l’assiette de la servitude de R.___ SA, en vue de la construction des trois immeubles. A ce propos, aucune preuve n’est apportée quant à l’existence d’une convention entre les intimés et R.___ SA, titulaire de la servitude, relative à l’établissement du tracé ; ni d’éventuelles instructions données par les intimés à ce sujet ne ressortent du dossier. Au contraire, il ressort des pièces que les travaux de fouille nécessaires au déplacement de la canalisation « Z4 » sur la parcelle n° [...] ont été l’objet d’une relation contractuelle existant entre R.___ SA et M.__ Sàrl (cf. supra c. 3). Partant, le déplacement de la canalisation a été réglé sur tous les points au regard de l’art. 693 CC, soit aux frais et sous la responsabilité de R.___ SA. D’ailleurs, même si l’on suivait l’argumentation développée par les appelants au sujet du plan établi le 4 juin 2008 prétendûment « indicatif » soumis par R.___ SA aux intimés, il n’en résulterait pas pour autant que cette procédure suivie en vertu de l’art. 742 al. 3 anc. CC eût entraîné pour les intimés la qualité d’auxiliaire de R.___ SA pour l’acte illicite commis, soit la fouille effectuée en juin 2008 de manière beaucoup trop proche du centre du tilleul. Par conséquent, il ne peut être établi que les intimés aient conduit ou surveillé les travaux de fouille réalisés le 18 juin 2008 pour le déplacement de la servitude de R.___ SA.
5.3.2 Pour ce qui concerne la seconde fouille, il n’est pas contesté que les travaux effectués en octobre 2009 l’ont été par l’entreprise [...] Sàrl, en qualité d’auxiliaire des intimés, dans le cadre de la construction des trois immeubles. Leur légitimation passive est dès lors admise.
5.4
5.4.1 Pour admettre une éventuelle responsabilité civile des intimés selon les art. 41 ss CO, les conditions suivantes doivent être réalisées cumulativement : un acte illicite, une faute de l’auteur, un dommage et un rapport de causalité (naturelle et adéquate) entre l’acte fautif et le dommage (ATF 132 III 122 c. 4.1 et réf. ; Werro, La responsabilité civile, 2e éd. Berne 2011, nn. 252-256 p. 77).
Selon la théorie générale de la différence, le dommage se définit comme la diminution du patrimoine (réduction de l’actif, augmentation du passif ou gain manqué) d’une personne qui se produit sans la volonté de celle-ci. Par exception, on retient parfois un dommage matériel sans égard à une diminution du patrimoine, notamment lorsque des arbres sont endommagés. Le Tribunal fédéral reconnaît en effet la pertinence des normes USSP – en l’occurrence retenues par l’expertise –, cela même en dérogation cas échéant à la théorie susmentionnée (ATF 129 III 331, JT 2003 I 629 c. 2.2 ; Werro, op. cit., n. 88 p. 35).
Pour dire s’il y a causalité naturelle, le juge doit apprécier les preuves apportées et s’interroger, de manière purement factuelle, sur l’enchaînement des événements et le caractère indispensable, pour provoquer le résultat, du comportement invoqué à l’appui de la demande. Le comportement critiqué constitue une condition sine qua non du résultat. Il appartient donc au juge d’apprécier les diverses preuves et de constater l’existence – ou l’inexistence – du rapport de causalité naturelle (ATF 128 III 174 c. 2b in fine ; ATF 128 III 180 c. 2d).
Le rapport de causalité est adéquat lorsque l’acte incriminé était propre, d’après le cours ordinaire des choses et l’expérience générale de la vie, à entraîner un résultat du genre de celui qui s’est produit (ATF 123 III 110 c. 3a). Pour savoir si un fait est la cause adéquate d’un préjudice, le juge procède à un pronostic rétrospectif objectif : se plaçant au terme de la chaîne des causes, il lui appartient de remonter du dommage dont la réparation est demandée au chef de responsabilité invoqué et de déterminer si, dans le cours normal des choses et selon l’expérience générale de la vie humaine, une telle conséquence demeure dans le champ raisonnable des possibilités objectivement prévisibles (ATF 129 II 312 c. 3.3 ; TF 4A_45/ 2009 du 25 mars 2009 c. 3.2).
5.4.2 Les prétentions en responsabilité doivent être dissociées selon les plantations litigieuses.
5.4.2.1 Pour ce qui concerne le noyer, il ressort de l’expertise du 7 juillet 2011 qu’il était en fort mauvais état, quasiment mort sur pied et qu’il ne devrait pas être pris en considération dans l’estimation financière du dommage. Le noyer apparaît ainsi avoir été « mort sur pied » pour des causes antérieures aux travaux réalisés en juin 2008 ou en octobre 2009. Dès lors, aucun prétention en responsabilité civile ne saurait être exercée de ce fait.
5.4.2.2 Concernant la haie vive implantée en limite de propriété et composée de houx, de lauriers-palmes et de buis, y compris de troènes et autres arbustes indigènes, elle n’est pas conforme aux dispositions du Code rural et foncier (CRF du 7 décembre 1987, RSV 211.41). La haie étant d’une hauteur moyenne de 2.5 à 3 mètres, celle-ci ne serait licite que si les pieds de la haie étaient établis à 85-117 cm de la limite (art. 38 CRF). Selon l’expert, la suppression des racines et la diminution des branches engendrées par les travaux ont provoqué un éclaircissement général de la haie, mais celle-ci reprendra son allure passée avec les futures tailles. L’expert considère que la taille régulière d’une haie relève de son entretien courant et ne peut pas être mise en relation de causalité avec les travaux réalisés en juin 2008 ou octobre 2009. La taille et l’entretien courants de la haie font partie des charges du propriétaire, de sorte que les appelants ne peuvent avoir subi de préjudice. Dans la mesure où les travaux ont équivalu à une taille d’entretien, notamment par la réduction de la hauteur excessive de la haie et qu’un dommage ne peut pas être établi, une prétention en responsabilité de ce fait ne saurait être exercée.
5.4.2.3 A propos du tilleul, cet arbre est protégé par le droit communal (plan de classement communal des arbres d’ [...] approuvé par décision du Conseil d’Etat du 7 novembre 1973), à défaut par l’application supplétive de l’art. 98 LPNMS (loi sur la protection de la nature, des monuments et des sites du 10 décembre 1969, RSV 450.11 ; RDAF 2006, p. 204). Il n’importe dès lors pas que le tilleul soit planté de façon à respecter les distances et hauteurs de la loi, les actions civiles des art. 50 et 57 ss CRF étant paralysées (cf. art. 60 CRF, aucune hypothèse de l’art. 61 CRF n’ayant été en l’occurrence établie).
Selon l’expert, le tilleul était en bon état général, avec des racines malmenées qui pouvaient provoquer rapidement un revirement de la situation; il a souligné que des symptômes pouvaient se manifester rapidement sur un arbre à la suite d'une destruction importante de racines, mais pouvaient aussi survenir plusieurs années après une compaction, une surélévation ou un enlèvement de la couverture superficielle du sol. Dès lors, il a préconisé de surveiller le tilleul, avec une inspection tous les trois ans en période de végétation pour prévenir toute dégradation et avec une taille d'entretien et une légère réduction de la couronne souhaitable tous les cinq ans. L'expert a rappelé que, selon les normes USSP 2006, 40% de blessure aux racines équivalait à un dommage total (100%) et une espérance de vie réduite à zéro. Toutefois, en dépit de la théorie, après deux années de végétation, le tilleul était en bon état de santé visuel si bien qu'il serait regrettable de l'abattre sur la foi des tabelles et non pas de son état réel.
Selon lui, les travaux près de la haie n’avaient pas respecté les règles de l’art pour la conservation des végétaux et la fouille effectuée en juin 2008 était beaucoup trop proche du centre du tilleul ; elle demeurait une porte d’entrée pour les agents pathogènes qui pouvait engendrer des dégâts à n’importe quel moment. La mise en place du chemin piétonnier en octobre 2009 avait détruit les racines superficielles du tilleul et de la haie orientées au Nord-Ouest et ne respectait pas les règles de protection des végétaux à proximité des chantiers. L'imperméabilisation du chemin piétonnier ajouterait une contrainte supplémentaire au bon développement des végétaux, mais l'ensemble végétal avait de grandes chances de survivre à ce nouvel aménagement, que l'expert déconseillait d'entreprendre.
5.4.3 Alors que la fouille effectuée en octobre 2009 a été dommageable pour le tilleul et qu’elle est imputable aux intimés – contrairement à celle de juin 2008 (supra c. 5.3), le premier juge a néanmoins écarté l’existence d’un préjudice en considérant qu’un dommage de 40% n’avait pas été établi pour cette seule seconde fouille.
Force est de constater que l’expertise judiciaire ne permet pas de déterminer le dommage causé par cette seule seconde fouille. Reste à déterminer s’il doit être apprécié selon l’art. 42 al. 2 CO, en vertu duquel, lorsque le montant exact du dommage ne peut être établi, le juge le détermine équitablement en considération du cours ordinaire des choses et des mesures prises par la partie lésée. Cette disposition, si elle instaure une preuve facilitée en faveur du lésé (ATF 122 III 219 c. 3a), ne le dispense pas de fournir au juge, dans la mesure où on peut l’attendre de lui, tous les éléments de fait constituant des indices du dommage et permettant ou facilitant son estimation (ATF 131 III 360 c. 5.1). Les circonstances alléguées par le lésé doivent faire apparaître un dommage comme pratiquement certain, une simple possibilité ne suffisant pas. L’exception de l’art. 42 al. 2 CO à la règle du fardeau de la preuve doit être appliquée de manière restrictive (Werro, op. cit., n. 1017 p. 289).
En l’espèce, les appelants n’ont à aucun moment fait porter l’expertise sur le point de savoir quelle part du dommage pouvait être attribuée aux atteintes provoquées par la première fouille ou à celles de la seconde fouille, alors que l’on pouvait l’exiger d’eux. En outre, aucun élément du dossier ne permettrait d’affirmer qu’il n’aurait pas été possible techniquement de déterminer la part des deux facteurs. Ce n’est que si l’expert avait confirmé que la part des deux facteurs ne pouvait être établie que l’on aurait pu entrer en matière sur l’application de l’art. 42 al. 2 CO. Les appelants ont au contraire plaidé qu’il y avait déjà un dommage total à la suite de la première atteinte et ont produit à ce sujet une expertise. Selon l’expertise établie le 20 juin 2008 par [...] à leur requête – soit après la première fouille et avant la seconde fouille – on devait relever une disparition de 30-35% du système racinaire et la présence d’un dommage total. Ainsi, un dommage supplémentaire résultant de la seconde atteinte apparaît tout au plus possible. C’est un second motif justifiant de ne pas appliquer l’art. 42 al. 2 CO.
6. Au vu de ce qui précède, l’appel doit être rejeté et le jugement attaqué confirmé.
Les frais de deuxième instance, arrêtés à 900 fr. (art. 62 al. 1 TFJC [tarif des frais judiciaires civils du 28 septembre 2010, RSV 270.11.5], seront mis à la charge des appelants qui succombent, solidairement entre eux (art. 106 al. 1 et 3 CPC).
Etant donné l’issue de l’appel, les appelants verseront aux intimés la somme de 2'500 fr. à titre de dépens (art. 106 al. 1 CPC ; art. 37 al. 2 CDPJ [Code de droit privé judiciaire du 12 janvier 2010, RSV 211.02] ; art. 12 TDC [tarif des dépens en matière civile du 23 novembre 2010, RSV 270.11.6])
Par ces motifs,
la Cour d’appel civile du Tribunal cantonal,
statuant à huis clos,
prononce :
I. L’appel est rejeté.
II. Le jugement est confirmé.
III. Les frais judiciaires de deuxième instance, arrêtés à 900 fr. (neuf cents francs) sont mis à la charge des appelants, solidairement entre eux.
IV. Les appelants N.__ D et F.__ D, solidairement entre eux, doivent verser aux intimés Y.__, P.__ et T.__, solidairement entre eux, la somme de 2'500 fr. (deux mille cinq cents francs) à titre de dépens de deuxième instance.
V. L’arrêt motivé est exécutoire.
Le président : La greffière :
Du 1er juillet 2014
Le dispositif de l'arrêt qui précède est communiqué par écrit aux intéressés.
La greffière :
Du
L'arrêt qui précède, dont la rédaction a été approuvée à huis clos, est notifié en expédition complète, par l'envoi de photocopies, à :
Me Jean-Claude Perroud, av. (pour les appelants),
Me Nicolas Saviaux, av. (pour les intimés).
La Cour d’appel civile considère que la valeur litigieuse est de 30’000 francs.
Le présent arrêt peut faire l'objet d'un recours en matière civile devant le Tribunal fédéral au sens des art. 72 ss LTF (loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral – RS 173.110), cas échéant d'un recours constitutionnel subsidiaire au sens des art. 113 ss LTF. Dans les affaires pécuniaires, le recours en matière civile n'est recevable que si la valeur litigieuse s'élève au moins à 15'000 fr. en matière de droit du travail et de droit du bail à loyer, à 30'000 fr. dans les autres cas, à moins que la contestation ne soulève une question juridique de principe (art. 74 LTF). Ces recours doivent être déposés devant le Tribunal fédéral dans les trente jours qui suivent la présente notification (art. 100 al. 1 LTF).
Cet arrêt est communiqué, par l'envoi de photocopies, à :
M. le Président du Tribunal civil de l’arrondissement de La Côte.
La greffière :
Bitte beachten Sie, dass keinen Anspruch auf Aktualität/Richtigkeit/Formatierung und/oder Vollständigkeit besteht und somit jegliche Gewährleistung entfällt. Die Original-Entscheide können Sie unter dem jeweiligen Gericht bestellen oder entnehmen.
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