Zusammenfassung des Urteils Entscheid/2024/269: Kantonsgericht
Zusammenfassung: X.________ hat gegen eine Entscheidung des Ministeriums Einspruch erhoben, die sein Verlangen, Protokolle aus dem Verfahren zu entfernen, abgelehnt hat. Er argumentiert, dass er als Zeuge und nicht als Informationsgeber hätte gehört werden sollen und dass ihm dadurch sein Recht auf Verteidigung verwehrt wurde. Das Gericht entschied jedoch, dass die Protokolle nicht entfernt werden müssen, da X.________ nicht direkt in die Straftat verwickelt war. Der Einspruch wurde abgelehnt, da X.________ kein rechtlich geschütztes Interesse an der Entfernung der Protokolle hatte.
Kanton: | VD |
Fallnummer: | Entscheid/2024/269 |
Instanz: | Kantonsgericht |
Abteilung: |
Datum: | 26.03.2024 |
Rechtskraft: |
Leitsatz/Stichwort: | |
Schlagwörter : | ’au; écembre; ’il; édure; évenu; énal; était; énale; éclaration; éclarations; Ministère; Audition; ’audition; ès-verbal; émoin; érêt; évrier; ’est; ès-verbaux; écision; Action; édé; ’affaire; ’était; époser |
Rechtsnorm: | Art. 100 BGG;Art. 111 StPo;Art. 135 StPo;Art. 136 StPo;Art. 138 StPo;Art. 141 StPo;Art. 162 StPo;Art. 178 StPo;Art. 180 StPo;Art. 181 StPo;Art. 382 StPo;Art. 385 StPo;Art. 393 StPo;Art. 396 StPo;Art. 428 StPo; |
Referenz BGE: | - |
Kommentar: |
TRIBUNAL CANTONAL | 236 PE22.023458-TAN |
CHAMBRE DES RECOURS PENALE
______________________
Arrêt du 26 mars 2024
__________
Composition : M. Krieger, président
M. Maillard et Mme Elkaim, juges
Greffière : Mme Vuagniaux
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Art. 141 al. 2 et 5, 162, 178 let. d et 382 al. 1 CPP
Statuant sur le recours interjeté le 19 février 2024 par X.____ contre l’ordonnance rendue le 7 février 2024 par le Ministère public de l’arrondissement de l’Est vaudois dans la cause no PE22.023458-TAN, la Chambre des recours pénale considère :
En fait :
A. a) Le 18 décembre 2022, au [...], vers 18h00, une altercation a éclaté entre B.____, ressortissant du [...], né le [...] 1967, et C.____, ressortissant du [...], né le [...] 1994, laquelle a entraîné le décès de ce dernier. Le père de B.____ et le grand-père paternel de C.____ sont frères. Un différend entre les deux familles serait à l’origine de la dispute. Une enquête a été ouverte par le Ministère public de l’arrondissement de l’Est vaudois (ci-après : Ministère public) sous la référence PE22.023458-TAN.
Prévenu de meurtre et d’infraction à la LEI (loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 ; RS 142.20), B.____ est placé en détention provisoire depuis le 18 décembre 2022.
X.____, frère de C.____, a été entendu par la police le 19 décembre 2022 en qualité de témoin, en présence d’un interprète.
Le 20 janvier 2023, X.____ s’est constitué partie plaignante au pénal et demandeur au civil.
b) Il est apparu au cours de l’enquête que X.____ pourrait s’être rendu coupable de faux témoignage lors de son audition du 19 décembre 2022, de sorte qu’une procédure préliminaire a été ouverte contre lui par le Ministère public le 12 avril 2023 sous la référence PE23.006988-TAN.
c) Le 15 mars 2023, X.____ a été entendu par la police, en présence d’un interprète et avec l’assistance d’un avocat, comme personne appelée à donner des renseignements (ci-après : PADR) dans l’affaire PE22.023458-TAN et comme prévenu dans l’affaire PE23.006899-TAN.
d) Le 5 juillet 2023, X.____ a demandé que les procès-verbaux de ses auditions des 19 décembre 2022 et 15 mars 2023 soient retranchés du dossier. Concernant le procès-verbal du 19 décembre 2022, il faisait valoir que c’était en qualité de PADR qu’il aurait dû être entendu, dès lors qu’« en cas de doute, par exemple si l’on ne peut pas totalement exclure qu’une personne ait participé à l’infraction, la personne doit être entendue comme PADR (ATF 144 IV 97) ». Par conséquent, il considérait avoir été privé de ses droits fondamentaux, tels le droit de refuser de déposer pour la défense de ses propres intérêts et le droit à être assisté d’un avocat. Concernant le procès-verbal du 15 mars 2023, il invoquait avoir été simplement informé, au début de l’audition, qu’il était prévenu pour avoir fait de fausses déclarations lors sa déposition du 19 décembre 2022, soit sans savoir précisément les fausses déclarations qui lui étaient reprochées, de sorte qu’il n’avait pas pu préparer sa défense.
Le 10 août 2023, la Procureure a répondu que les deux procédures étaient inévitablement imbriquées l’une dans l’autre et qu’une audition avec un double statut avait pour but d’éviter, pour tous les protagonistes, de devoir répéter des auditions qui pourraient apporter des éléments dans les deux volets. Concernant le procès-verbal du 19 décembre 2022, aucun élément ne justifiait d’entendre X.____ en tant que PADR, de sorte que cette pièce devait être maintenue au dossier. Concernant le procès-verbal du 15 mars 2023, l’indication faite au début de l’audition selon laquelle il était reproché à X.____ d’avoir fait de fausses déclarations lors de son audition du 19 décembre 2022 était suffisante, de sorte qu’il n’y avait pas lieu de retrancher cette pièce du dossier.
Par requête du 21 août 2023, renouvelée les 16 novembre 2023 et 9 janvier 2024, X.____ a sollicité une décision formelle de refus de retranchement des procès-verbaux des 19 décembre 2022 et 15 mars 2023.
B. Par ordonnance du 7 février 2024, le Ministère public a rejeté la requête de X.____ tendant au retranchement du procès-verbal d’audition du 19 décembre 2022 (I), a dit que celui-ci était exploitable (II) et que les frais suivaient le sort de la cause (III).
La Procureure a retenu qu’aucun élément au dossier ne justifiait d’auditionner X.____ en qualité de PADR quelques heures après le décès de son frère et qu’aucune hypothèse de l’art. 178 CPP (Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 ; RS 312.0) n’était envisageable à ce moment-là, ce qui expliquait la raison pour laquelle X.____ avait été entendu le 19 décembre 2022 en qualité de témoin au sens de l’art. 162 CPP et non comme PADR. Concernant l’audition du 15 mars 2023, la Procureure a relevé que X.____, assisté de son avocat, avait été informé au début de celle-ci qu’il lui était reproché d’avoir fait de fausses déclarations lors de son audition du 19 décembre 2022, ce qui était suffisant puisqu’il ne pouvait être attendu de l’autorité qu’elle énumère au début de l’audition tous les propos faussement tenus. La magistrate a en outre retenu que X.____ était représenté par Me Frank Tièche depuis le 20 janvier 2023, que le dossier PE22.023458-TAN avait été remis en consultation à ce dernier le 27 janvier 2023, que X.____ était assisté de son conseil lors de son audition du 15 mars 2023 et que ce n’était que quatre mois plus tard, soit lors de son audition du 3 juillet 2023, puis par courrier du 5 juillet 2023, que X.____ avait émis pour la première fois une réserve quant à son double statut de PADR et de prévenu, respectivement sollicité le retranchement des procès-verbaux du dossier. Par conséquent, la Procureure estimait que l’intéressé s’était accommodé de la manière dont avait été dirigée la cause et qu’aucune règle de procédure n’avait été violée.
C. Par acte du 19 février 2024, X.____ a recouru contre cette ordonnance, en concluant, sous suite de frais et dépens, principalement à sa réforme en ce sens que sa requête tendant au retranchement des procès-verbaux des 19 décembre 2022 et 15 mars 2023 soit admise, que ceux-ci soient déclarés inexploitables et retranchés du dossier et que les frais soient laissés à la charge de l’Etat. Subsidiairement, il a conclu à l’annulation de l’ordonnance et au renvoi du dossier au Ministère public afin qu’il rende une nouvelle décision dans le sens des considérants à venir. En outre, il a demandé à être mis au bénéfice de l’assistance judiciaire gratuite pour la procédure de recours, Me Frank Tièche, déjà consulté, étant désigné en tant que conseil juridique gratuit.
Le 11 mars 2024, le Ministère public a conclu au rejet du recours.
En droit :
1.
1.1 Aux termes de l’art. 393 al. 1 let. a CPP, le recours est recevable contre les décisions et actes de procédure du ministère public. Une ordonnance du ministère public refusant de retrancher des pièces du dossier est ainsi susceptible de recours selon les art. 393 ss CPP (Stephenson/Thiriet, Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, Jugendstrafprozessordnung, 3e éd., Bâle 2023, n. 10 ad art. 393 CPP ; CREP 6 décembre 2023/982 ; CREP 30 mai 2023/436 ; CREP 4 avril 2022/238). Ce recours s’exerce par écrit, dans un délai de dix jours (art. 396 al. 1 CPP), dès la notification de la décision attaquée (art. 384 let. b CPP), auprès de l’autorité de recours qui, dans le canton de Vaud, est la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal (art. 13 LVCPP [loi vaudoise d’introduction du Code de procédure pénale suisse du 19 mai 2009 ; BLV 312.01] ; 80 LOJV [loi vaudoise d’organisation judiciaire du 12 décembre 1979 ; BLV 173.01]).
1.2 Selon l’art. 382 al. 1 CPP, seul a la qualité pour recourir celui qui a un intérêt juridiquement protégé à l’annulation ou à la modification de la décision. Il existe un intérêt juridiquement protégé lorsque le recourant est touché directement et immédiatement dans ses droits propres, ce qui n’est pas le cas s’il est touché par un simple effet réflexe ; dans le cadre des voies de droit instituées par le CPP, un intérêt de fait ne suffit pas à conférer la qualité pour recourir. De jurisprudence constante, cet intérêt doit être actuel et pratique ; de cette manière, les tribunaux sont assurés de trancher uniquement des questions concrètes et non de prendre des décisions sur des questions purement théoriques, ce qui répond à un souci d’économie de procédure (ATF 144 IV 81 consid. 2.1.1 ; ATF 140 IV 74 consid. 1.3.1 ; ATF 137 I 296 consid. 4.2 ; ATF 136 I 274 consid. 1.3, JdT 2010 IV 153 ; ATF 131 I 153 consid. 1.2). Ainsi, l'existence d'un intérêt de pur fait ou la simple perspective d'un intérêt juridique futur ne suffit pas. Une partie qui n’est pas concrètement lésée par la décision ne possède donc pas la qualité pour recourir et son recours est irrecevable (ATF 144 IV 81 consid. 2.3.1 ; TF 7B_170/2023 du 15 novembre 2023 consid. 2.2 ; TF 7B_12/2021 du 11 septembre 2023 consid. 2.2.3 ; TF 6B_112/2022 du 10 novembre 2022 consid. 1.2).
1.3 En l’espèce, le recourant a été entendu comme témoin – qualité qu’il conteste – au cours de l’audience du 19 décembre 2022 dans l’affaire PE22.023458-TAN relative au meurtre de son frère ; puis, une enquête séparée, enregistrée sous référence PE23.006988-TAN, a été ouverte contre lui le 12 avril 2023 pour avoir fait de fausses déclarations lors de l’audience du 19 décembre 2022. Il dispose donc d’un intérêt juridiquement protégé à ce que le procès-verbal du 19 décembre 2022 soit retranché du dossier PE22.023458-TAN, puisque s’il était fait droit à sa demande de retranchement de ce procès-verbal du dossier, cela conduirait au classement de la procédure PE23.006988-TAN dirigée contre lui. Par conséquent, le recourant a la qualité pour recourir contre l’ordonnance du 7 février 2024.
Pour le surplus, interjeté en temps utile devant l’autorité compétente et dans les formes prescrites (art. 385 al. 1 CPP), le recours est recevable.
2.
2.1 Le recourant soutient qu’il aurait dû être entendu comme PADR lors de son audition du 19 décembre 2022, dès lors qu’au cours de son audition du jour précédent, le prévenu B.____ avait évoqué une problématique tendue et clanique entre les deux branches familiales, dans laquelle il était ou pouvait être impliqué, de sorte qu’il existait déjà un doute sur sa participation aux faits à élucider ou à une infraction connexe. Le recourant se plaint aussi du fait qu’en lui conférant faussement la qualité de témoin en lieu et place de celle de PADR, le Ministère public l’a privé de son droit de refuser de déposer pour préserver la défense de ses propres intérêts et de son droit d’être assisté d’un avocat. Partant, il considère que les procès-verbaux des 19 décembre 2022 et 15 mars 2023 doivent retranchés du dossier PE22.023458-TAN, car inexploitables, et détruits.
2.2
2.2.1 Selon l’art. 178 let. d CPP, est entendu en qualité de personne appelée à donner des renseignements, quiconque, sans être soi-même prévenu, pourrait s’avérer être soit l’auteur des faits à élucider ou d’une infraction connexe, soit un participant à ces actes.
Selon l’art. 178 let. d CPP, doivent être entendues à titre de renseignements les personnes qui « pourraient s’avérer » être l’auteur ou un participant des faits à élucider (comme coauteur, complice ou instigateur), mais sans toutefois être prévenues. Or, selon le CPP, est déjà considérée comme prévenue toute personne qui est « soupçonnée » d’avoir commis une infraction (art. 111 al. 1 CPP). Le cas de figure prévu par l’art. 178 let. d CPP est donc très étroit : pour y correspondre, la personne entendue doit être suspectée – elle pourrait entrer en ligne de compte comme participant ou auteur de l’infraction –, mais pas suffisamment pour comparaître en qualité de prévenu. Pratiquement, le soupçon ne doit pas encore être concrétisé par des actes de l’autorité pénale affectant la situation de la personne interrogée, et celle-ci ne doit pas être le sujet des actes de procédure entrepris. Dans les cas douteux, les autorités de poursuite pénale préféreront entendre la personne en qualité de PADR plutôt que comme prévenu, afin de ne pas ouvrir inutilement une procédure (Perrier Depeursinge, Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2e éd., Bâle 2019, n. 18 ad art. 178 CPP).
Les personnes appelées à donner des renseignements au sens de l'art. 178 let. b à g CPP, ne sont pas tenues de déposer ; au surplus, les dispositions concernant l'audition de prévenus leur sont applicables par analogie (art. 180 al. 1 CPP). Au début de l'audition, les autorités pénales attirent l'attention des personnes appelées à donner des renseignements sur leur obligation de déposer ou sur leur droit de refuser de déposer ou de témoigner (art. 181 al. 1 CPP). Pour les personnes appelées à donner des renseignements qui ont l'obligation de déposer ou qui s'y déclarent prêtes, les autorités pénales attirent leur attention sur les conséquences pénales possibles d'une accusation calomnieuse, de déclarations visant à induire la justice en erreur ou d'une entrave à l'action pénale (art. 181 al. 2 CPP).
En principe, seule la personne qui a été interrogée en la mauvaise qualité et qui ne s'est pas vu notifier ses droits et obligations est habilitée à s'en plaindre (TF 6B_952/2019 du 11 décembre 2019 consid. 2.3 s'agissant de l'art. 178 CPP). Il est toutefois vrai que, dans le processus d'appréciation du moyen de preuve, il est important que le juge prenne en considération le fait que les déclarations de la personne interrogée ont été faites moyennant l'obligation de dire la vérité et la menace des sanctions en cas de faux témoignage. Pour être admis à se plaindre qu'une personne a été entendue en la mauvaise qualité, le prévenu doit démontrer en quoi il en découle un préjudice pour lui-même (TF 6B_284/2022 du 16 novembre 2022 consid. 3.1.4).
2.2.2 En vertu de l’art. 162 CPP, on entend par témoin toute personne qui n’a pas participé à l’infraction, qui est susceptible de faire des déclarations utiles à l’élucidation des faits et qui n’est pas entendue en qualité de personne appelée à donner des renseignements.
Tout prévenu a le droit de ne pas voir utiliser contre lui les déclarations qu’il a faites et qui s’avèrent nuisibles pour sa défense, en réponse à des questions de l’autorité, dans l’ignorance de son droit de se taire et de ne pas s’auto-incriminer. Sous l’empire de l’ancien droit, le Tribunal fédéral en avait déduit qu’il avait, en principe du moins, un droit constitutionnel de faire retrancher du dossier les procès-verbaux des auditions au cours desquelles il avait fait de telles déclarations, ou d’obtenir par un moyen équivalent que le juge du fond n’en tienne pas compte dans l’appréciation des preuves. Pour le Tribunal fédéral, de telles déclarations ne constituent en principe pas une preuve recevable dans le procès dirigé contre leur auteur, même si elles n’ont pas été faites sous la contrainte et qu’elles n’apparaissent pas dénuées de force probante. Le droit constitutionnel du prévenu à ne pas voir utiliser contre lui des déclarations qu’il a faites dans l’ignorance de son droit de se taire produit également des effets lorsque l’intéressé a initialement été entendu comme témoin et après avoir été exhorté à répondre conformément à la vérité. Une déposition de cette sorte est en principe inutilisable contre son auteur et doit être retranchée du dossier, à moins qu'il soit établi que celui-ci savait pertinemment, d'une part, qu'il n'avait pas l'obligation de répondre aux questions susceptibles de l'exposer à des poursuites pénales et, d'autre part, qu'il n'encourait pas de poursuites pour faux témoignage si, pour tenter d'échapper à la prévention, il répondait de manière mensongère. Dans l'hypothèse où le témoin, devenu prévenu, confirme ses premières déclarations après avoir été dûment informé de son droit de garder le silence et de ne pas s'auto-incriminer, ses déclarations peuvent être utilisées contre lui, puisqu'il les a validées en pleine connaissance de cause. Dans tous les cas, si les faits retenus ne sont pas établis seulement par les déclarations du prévenu mais aussi, de manière suffisante, par d'autres moyens de preuve, indépendants des déclarations du prévenu, un jugement de condamnation peut être prononcé (TF 6B_188/2010 du 4 octobre 2010 consid. 2.2 ; Moreillon/Parein-Reymond, Petit commentaire, Code de procédure pénale, 2e éd., Bâle 2016, n. 10 ad art. 162 CPP ; CREP 28 avril 2020/321).
2.2.3 Aux termes de l’art. 141 CPP, les preuves qui ont été administrées d’une manière illicite ou en violation de règles de validité par les autorités pénales ne sont pas exploitables, à moins que leur exploitation soit indispensable pour élucider des infractions graves (al. 2). Les pièces relatives aux moyens de preuves non exploitables doivent être retirées du dossier pénal et conservées à part jusqu’à la clôture définitive de la procédure, puis détruites (al. 5).
2.3 En l’espèce, la victime C.____ a été trouvée gisante au sol le 18 décembre 2022 vers 18h00 au [...], mortellement blessée par arme blanche. L’auteur présumé du meurtre, B.____, a été interpellé à son domicile au [...], vers 19h30.
[...], qui serait arrivé par hasard sur les lieux alors que la victime était en train d’être réanimée, a été entendu comme PADR dès 19h35 (PV aud. 1). [...], patron du prévenu et qui se serait rendu au domicile de celui-ci après qu’il lui avait téléphoné, a été entendu comme PADR dès 20h00 (PV aud. 2). [...], qui serait sorti de chez lui pour aller au travail et qui serait la première personne à avoir découvert la victime, a été entendu comme PADR dès 20h10 (PV aud. 3). [...], qui se serait rendu en voiture à [...] avec C.____ et à qui ce dernier aurait demandé de patienter à un autre endroit, si bien qu’il n’aurait pas vu l’altercation, a été entendu comme PADR dès 20h45 (PV aud. 4). Il ne ressort d’aucune de ces auditions que le recourant aurait pu être impliqué dans le meurtre de son frère ou qu’il aurait pu commettre ou participer à une infraction connexe, même après la découverte du corps. Du reste, le recourant ne plaide pas que cela serait le cas.
Ensuite, B.____ a été entendu, toujours le 18 décembre 2022, en tant que prévenu dès 23h40 (PV aud. 5). Le recourant a été entendu le lendemain comme témoin dès 12h45 en présence d’un interprète (PV aud. 7) ; il ne s’était alors pas encore constitué partie plaignante, ce qui lui aurait attribué d’office le statut de PADR selon l’art. 178 let. a CPP. Le procès-verbal no 6 concerne l’audition d’arrestation de B.____ qui s’est déroulée le 19 décembre 2022 dès 17h36, soit après l’audition du recourant du même jour, de sorte que cette pièce n’est pas déterminante. Contrairement à ce que soutient le recourant, l’audition de B.____ du 18 décembre 2022 ne justifiait pas son audition en tant que PADR. En effet, le fait que B.____ ait évoqué qu’il existait une forte tension ou une rivalité entre les deux branches familiales ne signifie pas que le recourant serait impliqué d’une manière ou d’une autre dans l’homicide de son frère. Il en va de même de la déclaration de B.____ selon laquelle le recourant l’aurait frappé avec une planche le 23 août 2022 à Lausanne et lui aurait dit : « Tu verras toi-même ce que je vais te faire » (PV aud. 5, R. 7, p. 6, 2e par.). Surtout, B.____ n’a pas prétendu que le recourant était présent sur les lieux de l’homicide (PV aud. 5, R. 5, p. 4). Par conséquent, à la fin de l’audition de B.____ du 18 décembre 2022, il n’existait aucun soupçon d’une quelconque participation du recourant au meurtre de son frère ou sur le fait qu’il aurait pu commettre ou participer à une infraction connexe. Enfin, il y a lieu de constater que la police et le Ministère public n’ont procédé à aucun acte d’enquête affectant la situation du recourant entre l’audition de B.____ du 18 décembre 2022 et sa propre audition du lendemain : le Ministère public a en effet ordonné plusieurs mandats documentaires, de perquisition, d’investigation et de surveillance téléphonique (cf. procès-verbal, pp. 3-4), mais ceux-ci ne concernaient pas le recourant.
Compte tenu de ces éléments, c’est à bon droit que le Ministère public a entendu le recourant comme témoin lors de son audition du 19 décembre 2022, de sorte que le retranchement de ce procès-verbal du dossier PE22.023458-TAN ne se justifie pas.
3. Le recourant invoque ensuite un déni de justice formel dans le sens où le Ministère public ne se serait pas prononcé sur sa requête de retranchement du procès-verbal du 15 mars 2023, ainsi que sur la violation des principes du droit à un procès équitable et du droit de préparer sa défense dans la mesure où ce n’est qu’au début de l’audition du 15 mars 2023 qu’il a appris qu’il était entendu à la fois comme PADR dans l’affaire PE22.023458-TAN et comme prévenu dans l’affaire PE23.006988-TAN. Le recourant conteste également le principe de la bonne foi évoqué par le Ministère public dans le sens où il aurait émis tardivement des réserves quant au fait d’avoir été entendu avec ce double statut le 15 mars 2023.
Ces griefs sont ici irrecevables. En effet, ils concernent la procédure PE23.006988-TAN ouverte contre le recourant pour faux témoignage, celui-ci ne contestant pas sa qualité de PADR dans l’affaire PE22.023458-TAN au cours de l’audition du 15 mars 2023. Par ailleurs, dans le cadre de la procédure PE23.006988-TAN, la Procureure a rendu, le 5 février 2024, une ordonnance par laquelle elle a rejeté la demande du recourant tendant au retranchement des procès-verbaux des 19 décembre 2022 et 15 mars 2023 et contre laquelle X.____ a recouru le 19 février 2024.
4. En définitive, le recours de X.____ doit être rejeté dans la mesure où il est recevable et l'ordonnance entreprise confirmée.
Les frais de la procédure de recours sont fixés à 1'210 fr. (art. 20 al. 1 TFIP [tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010 ; BLV 312.03.1]).
Selon l’art. 136 al. 3 CPP, en vigueur depuis le 1er janvier 2024, lors de la procédure de recours, l’assistance judiciaire gratuite en faveur de la partie plaignante doit faire l’objet d’une nouvelle demande. Dès lors que le recours n’était pas d’emblée manifestement mal fondé, il y a lieu d’admettre la requête d’assistance judiciaire gratuite de X.____. Me Frank Tièche, déjà consulté, sera désigné en qualité de conseil juridique gratuit pour la procédure de recours. Au vu du travail accompli par cet avocat, il sera retenu 4 h d'activité au tarif horaire de 180 fr. (art. 2 al. 1 let. a et 3 al. 2 RAJ [règlement sur l'assistance judiciaire en matière civile du 7 décembre 2010 ; BLV 211.02.3] par renvoi de l'art. 26b TFIP), soit 720 francs. S'y ajoutent 2 % pour les débours (art. 3bis al. 1 RAJ par renvoi de l'art. 26b TFIP), soit 14 fr. 40, et 8,1 % de TVA sur le tout, soit 59 fr. 48, de sorte que l'indemnité d'office s'élève au total à 794 fr. en chiffres ronds, étant précisé que deux recours dont la rédaction est peu ou prou la même ont été déposés dans les deux dossiers susmentionnés.
Les frais judiciaires et les frais imputables à l’assistance judiciaire gratuite seront mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 428 al. 1 CPP).
Le recourant sera tenu de rembourser à l’Etat l’indemnité allouée à son conseil juridique gratuit dès que sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 CPP par renvoi de l’art. 138 al. 1 CPP).
Par ces motifs,
la Chambre des recours pénale
prononce :
I. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
II. L’ordonnance du 7 février 2024 est confirmée.
III. Me Frank Tièche est désigné en qualité de conseil juridique gratuit de X.____ pour la procédure de recours et son indemnité est fixée à 794 fr. (sept cent nonante-quatre francs).
IV. Les frais d’arrêt, par 1'210 fr. (mille deux cent dix francs), ainsi que l’indemnité due au conseil juridique gratuit, par 794 fr. (sept cent nonante-quatre francs), sont mis à la charge de X.____.
V. X.____ est tenu de rembourser à l’Etat l’indemnité allouée à son conseil juridique gratuit dès que sa situation financière le permettra.
VI. L’arrêt est exécutoire.
Le président : La greffière :
Du
Le présent arrêt, dont la rédaction a été approuvée à huis clos, est notifié, par l'envoi d'une copie complète, à :
- Me Frank Tièche, avocat (pour X.____),
- Ministère public central,
et communiqué à :
- Mme la Procureure du Ministère public de l’arrondissement de l’Est vaudois,
par l’envoi de photocopies.
Le présent arrêt peut faire l'objet d'un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral au sens des art. 78 ss LTF (loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 ; RS 173.110). Ce recours doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète (art. 100 al. 1 LTF).
La greffière :
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