Zusammenfassung des Urteils Entscheid/2019/848: Kantonsgericht
Die Chambre des avocats hat in einer Sitzung am 20. August 2019 am Gerichtspalast von Hermitage in Lausanne über eine disziplinarische Untersuchung gegen den Anwalt E.________ aus Genf entschieden. Es wurde festgestellt, dass E.________ gegen die Vertraulichkeit der Mediation verstossen hat, indem er der Präsidentin des Gerichts einen Brief gesandt hat, in dem er Details aus der Mediation offenlegte. Obwohl er keine böswillige Absicht hatte, wurde dies als Verletzung der Berufspflichten angesehen. Trotzdem wurde entschieden, keine disziplinarischen Massnahmen gegen ihn zu ergreifen, aufgrund seiner bisherigen Unbescholtenheit und der spezifischen Umstände des Falls. Die Kosten des Verfahrens wurden ihm jedoch auferlegt. Die Entscheidung kann innerhalb von 30 Tagen angefochten werden.
Kanton: | VD |
Fallnummer: | Entscheid/2019/848 |
Instanz: | Kantonsgericht |
Abteilung: | Chambre des avocats |
Datum: | 20.08.2019 |
Rechtskraft: | - |
Leitsatz/Stichwort: | - |
Schlagwörter : | édiation; ésidente; Président; Présidente; Avocat; Chambre; épouse; édiatrice; Autorité; ègles; écision; écembre; étaient; éjà; éance; Attitude; Elles; Année; époux; éfenderesse; éroulement; Avait; Espèce |
Rechtsnorm: | Art. 1 VVG;Art. 11 SchKG;Art. 12 VVG;Art. 14 VVG;Art. 16 ArG;Art. 17 VVG;Art. 216 ZPO;Art. 59 SchKG;Art. 65 VwVG;Art. 80 SchKG; |
Referenz BGE: | - |
Kommentar: | - |
| TRIBUNAL CANTONAL | 19/2019 |
CHAMBRE DES AVOCATS
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Décision du 20 août 2019
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Composition : Mme COURBAT, présidente
Mes Roux, Henny, Amy et Chambour, membres
Greffier : M. Hersch
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La Chambre des avocats prend séance au Palais de justice de l'Hermitage, à Lausanne, pour statuer dans le cadre de l’enquête disciplinaire dirigée contre l’avocat E.__, à Genève.
Délibérant à huis clos, la Chambre des avocats retient ce qui suit :
En fait :
1. E.__ a obtenu le brevet d’avocat genevois en 1984. Il pratique le barreau dans ce canton depuis la même année.
2. Depuis le début de l’année 2018, Me E.__ est le conseil de l’époux demandeur dans une procédure en divorce pendante devant le Tribunal civil de l’arrondissement de La Côte. Il s’agit d’un divorce hautement litigieux, dans le cadre duquel Me E.__ est le troisième conseil de l’époux. L’épouse défenderesse est défendue par Me R.__, lequel a succédé à Me [...] au début de l’année 2019.
A la fin de l’année 2018, alors que l’épouse défenderesse était encore représentée par Me [...], les parties sont convenues d’entamer un processus de médiation auprès de Me [...], médiatrice à Lausanne. La procédure de divorce a alors été suspendue par la Présidente du Tribunal civil de l’arrondissement de La Côte (ci-après : la Présidente).
3. Le 26 mars 2019, Me E.__ a adressé à la Présidente un courrier contenant les passages suivants :
« (…) je me dois de vous informer que lundi 18 mars écoulé, les 2 parties se sont retrouvées une nouvelle fois ensemble chez la médiatrice et l’épouse a alors indiqué qu’elle voulait que des nouvelles factures, hors de toute production dans la procédure de divorce pendante, soient payées par mon client. La médiatrice est intervenue pour indiquer que ce n’était pas le lieu, ni le moment pour discuter de ces nouvelles factures, mais de trouver, pour éviter de très importants frais supplémentaires et de procédures qui ne se terminent plus, une solution amiable.
Toutefois, après 1h30, l’épouse a décidé unilatéralement de partir malgré le fait que Me [...] ait tout mis en œuvre pour la convaincre de rester et trouver un arrangement. L’épouse a indiqué alors qu’elle ne voulait plus de la médiation et j’interviens dès lors auprès de votre Tribunal pour que la procédure soit reprise immédiatement à votre plus prochaine convenance sur ces derniers errements dès lors que je pense que l’épouse use tous les moyens dilatoires possibles pour retarder un divorce.
(…)
Aujourd’hui, je me dois d’insister sur le fait que l’épouse plaide au bénéfice de l’assistance juridique et qu’elle multiplie les actes de procédure, ce qu’elle n’a pas manqué également de faire chez la médiatrice en produisant de nouvelles factures et en indiquant qu’elle se soumettrait à la médiation qu’à la condition que l’époux les paye, ce qui malheureusement n’est pas possible. (…) »
Ignorant que l’épouse défenderesse avait changé de mandataire, Me E.__ a adressé copie de ce courrier à Me [...].
Le 29 mars 2019, Me R.__, estimant que la teneur du courrier adressé par son confrère à la Présidente violait la confidentialité de la médiation garantie à l’art. 216 CPC, a dénoncé le comportement de Me E.__ à la Chambre des avocats. Le même jour, il a requis de la Présidente que le courrier de Me E.__ du 26 mars 2019 soit retranché du dossier de la procédure de divorce.
4. Le 10 avril 2019, la Présidente de la Chambre des avocats a ouvert une enquête disciplinaire contre Me E.__ pour violation éventuelle de l’art. 12 let. a LLCA. Me Vanessa Chambour a été désignée membre enquêteuse. L’autorité de surveillance genevoise en a été informée, conformément à l’art. 16 al. 1 LLCA.
Le 23 avril 2019, la Présidente a informé les parties à la procédure de divorce qu’il ne serait tenu aucun compte des indications relatives au déroulement de la médiation et à l’attitude des parties dans le cadre de celle-ci telles que contenues dans le courrier de Me E.__ du 26 mars 2019, qu’elle n’entendait pour le surplus pas retrancher du dossier.
5. Me E.__ a été entendu par la membre enquêteuse le 28 mai 2019. Il a déclaré qu’en décembre 2018, les conseils des deux parties étaient d’accord avec la mise en œuvre d’une médiation. Les deux clients s’étaient rendus seuls chez la médiatrice, sans que leurs conseils ne les accompagnent. Me E.__ a exposé ignorer la teneur de l’art. 216 CPC. Il ne s’était pas posé la question de la confidentialité de la médiation. Les détails de la procédure de médiation lui avaient été rapportés par son client. Il les avait relayés à la Présidente afin que la procédure de divorce soit reprise. La médiation avait échoué parce que l’épouse avait produit des factures en indiquant qu’aussi longtemps que ces factures n’étaient pas payées, elle ne voulait pas trouver un arrangement. Me E.__ a précisé que s’il avait reçu d’autres éléments de son client, il ne les aurait pas communiqués à la Présidente. Selon lui, le courrier du 26 mars 2019 n’aurait aucune portée juridique. Il ne voyait pas en quoi la confidentialité de la médiation aurait été violée puisqu’il n’avait parlé que de factures et que la partie adverse avait déjà produit de nombreuses factures en procédure avant la médiation, de sorte que la Présidente était de toute façon au courant de ces faits. Il était regrettable que Me R.__ n’ai jamais pris contact avec lui avant de le dénoncer, Me E.__ ignorant à ce moment qu’il était constitué. Il regrettait la tournure que son courrier ait pu être interprété comme une violation de la confidentialité de la médiation, lui-même n’ayant eu aucune intention malveillante.
6. La membre enquêteuse a rendu son rapport le 13 juin 2019. Celui-ci a été transmis le 21 juin 2019 à Me E.__.
Le 27 juin 2019, l’autorité genevoise de surveillance a informé la Chambre des avocats que Me E.__ n’avait pas d’antécédents disciplinaires.
Me E.__ a été entendu par la Chambre de céans le 20 août 2019. Il a souligné qu’il avait eu de très bons rapports avec les anciens conseils de la partie adverse. Lorsque les parties avaient décidé d’entamer une médiation, il avait été convenu de ne pas parler de factures. Me E.__ a déclaré qu’il ignorait ce qui s’était dit lors de la médiation. Son client lui avait rapporté que sa femme voulait qu’il paie des factures. C’est dans ce contexte qu’il avait écrit le courrier du 26 mars 2019 à la Présidente. Il avait adressé copie de son courrier à la partie adverse et pour toute réponse, il s’était vu dénoncer à l’autorité de surveillance. Le seul élément divulgué à la Présidente dans son courrier du 26 mars 2019 était que la partie adverse souhaitait que son mandant paie des factures.
Conformément à l’art. 16 al. 2 LLCA, le projet de la présente décision a été communiqué le 28 octobre 2019 à l’autorité de surveillance genevoise afin qu’elle dépose d’éventuelles observations. Le 5 novembre 2019, celle-ci a indiqué n’avoir pas d’observations à formuler.
En droit :
1.
1.1 La procédure de surveillance des avocats relève de la LLCA (loi fédérale sur la libre circulation des avocats du 23 juin 2000 ; RS 935.61) et de la LPAv (loi sur la profession d’avocat du 9 juin 2015 ; BLV 177.11). La LLCA fixe les principes applicables à l'exercice de la profession d'avocat en Suisse (art. 1 LLCA) et, en particulier, les règles professionnelles auxquelles l'avocat est soumis (art. 12 LLCA). Chaque canton désigne une autorité chargée de la surveillance des avocats qui pratiquent la représentation en justice sur son territoire (art. 14 LLCA). Dans le canton de Vaud, c'est la Chambre des avocats qui est l'autorité compétente (art. 11 al. 1 LPAv). Elle se saisit d'office, sur plainte ou sur dénonciation, de toute question concernant l'activité professionnelle d'un avocat (art. 11 al. 2 LPAv). Sur le plan territorial, c’est l’activité exercée par l’avocat, et non le lieu de son inscription au registre, qui fonde la compétence de l’autorité de surveillance (Bauer/Bauer, Commentaire romand LLCA, 2009, n. 10 ad art. 14 LLCA).
1.2 En l’espèce, la présente enquête disciplinaire vise un avocat inscrit au registre cantonal genevois. Le comportement reproché à Me E.__ s’étant produit dans le cadre d’une procédure ouverte devant la justice vaudoise, la Chambre des avocats est compétente.
2.
2.1 Se pose la question de savoir si en adressant le courrier du 26 mars 2019 à la Présidente, Me E.__ a violé l’art. 12 let. a LLCA.
A cet égard, Me E.__ expose que les parties avaient convenu d’entamer une médiation lors de laquelle elles ne discuteraient pas de factures. Son client lui avait rapporté que son épouse avait malgré tout parlé de factures durant la médiation. C’est dans ce contexte que le courrier du 26 mars 2019 avait été rédigé. Aux yeux de Me E.__, ce courrier n'aurait aucune portée juridique. Le seul élément qu’il aurait divulgué est que la partie adverse souhaitait que son mandant paie des factures. Or, la partie adverse avait déjà produit de nombreuses factures en procédure avant la médiation, de sorte que la Présidente était de toute façon au courant de ces faits. Pour le surplus, Me E.__ indique qu’il ne connaissait pas la teneur de l’art. 216 CPC et qu’il ne s’était jamais posé la question de la confidentialité de la médiation. Me E.__ critique enfin l’attitude de son confrère, qui n’a pas pris contact avec lui avant de le dénoncer, Me E.__ ayant appris par la dénonciation que Me R.__ avait été constitué par la partie adverse.
2.2 L'art. 12 LLCA énonce les règles professionnelles auxquelles l'avocat est soumis. Celui-ci doit notamment exercer sa profession avec soin et diligence (art. 12 let. a LLCA). Cette disposition constitue une clause générale (ATF 130 II 270 consid. 3.2 ; TF 2C_1060/2016 du 13 juin 2017 consid. 4.1), qui permet d'exiger de l'avocat qu'il se comporte correctement dans l'exercice de sa profession (FF 1999 5331, 5368; TF 2C_280/2017 du 4 décembre 2017 consid. 4.1.1 ; TF 2C_1060/2016 du 13 juin 2017 consid. 4.1). Elle ne se limite pas aux rapports professionnels de l'avocat avec ses clients, mais comprend aussi les relations avec les confrères et les autorités (TF 2C_907/2017 du 13 mars 2018 consid. 3.1 ; TF 2C_119/2016 du 26 septembre 2016 consid. 7.1 ; TF 2C_555/2014 du 9 janvier 2015 consid. 5.1). L'art. 12 let. a LLCA suppose l'existence d'un manquement significatif aux devoirs de la profession (ATF 144 II 473 consid. 4.3 ; TF 2C_1060/2016 du 13 juin 2017 consid. 4.1 ; TF 2C_452/2011 du 25 août 2011 consid. 5.1).
Les règles professionnelles énumérées à l'art. 12 LLCA ont été édictées afin de réglementer, dans l'intérêt public, l'exercice de la profession d'avocat. Elles se distinguent des règles déontologiques, qui sont adoptées par les organisations professionnelles (ATF 136 III 296 consid. 2.1 p. 300). La LLCA définit de manière exhaustive les règles professionnelles auxquelles les avocats sont soumis. Les règles déontologiques conservent toutefois une portée juridique en permettant de préciser ou d'interpréter les règles professionnelles, mais uniquement dans la mesure où elles expriment une opinion largement répandue au plan national (ATF 140 III 6 consid. 3.1 ; ATF 136 III 296 consid. 2.1). Dans le but d'unifier les règles déontologiques sur tout le territoire de la Confédération, la Fédération Suisse des Avocats a édicté le Code suisse de déontologie (ATF 144 II 473 consid. 4.4). Selon l'art. 6 CSD, l'avocat ne porte pas à la connaissance du tribunal des propositions transactionnelles, sauf accord exprès de la partie adverse. Après avoir posé que le caractère confidentiel d'une communication adressée à un confrère doit être clairement exprimé, l'art. 26 CSD répète qu'il ne peut être fait état en procédure « de documents ou du contenu de propositions transactionnelles ou de discussions confidentielles ». Ces dispositions servent à préciser la portée de l'art. 12 let. a LLCA, qui prescrit à l'avocat d'exercer sa profession avec soin et diligence. Selon la jurisprudence, le non-respect d'une clause de confidentialité et l'utilisation en procédure du contenu de pourparlers transactionnels constituent une violation de l'obligation résultant de l'art. 12 let. a LLCA (ATF 140 III 6 consid. 3.1 ; TF 6B_47/2017 du 13 décembre 2017 consid. 1.7, non publié in ATF 143 IV 495 ; TF 2C_280/2017 du 4 décembre 2017 consid. 4.1.1). Le Tribunal fédéral a relevé que l'interdiction pour l'avocat de se prévaloir en justice de discussions transactionnelles confidentielles est fondée sur l'intérêt public à favoriser le règlement amiable des litiges, les parties devant pouvoir s'exprimer librement lors de la recherche d'une solution extrajudiciaire (ATF 144 II 473 consid. 4.5 ; ATF 140 III 6 consid. 3.1 ; TF 2C_280/2017 du 4 décembre 2017 consid. 4.1.1 ; TF 2A.658/2004 du 3 mai 2005 consid. 3.3). Dès lors, la confidentialité doit être interprétée dans un sens absolu et appliquée strictement (TF 4A_294/2013 du 11 décembre 2013 consid. 3a ; Courbat, Profession d’avocat, principes et jurisprudence de la Chambre des avocats du canton de Vaud, JdT 2018 III 180, pp. 193 s.).
Aux termes de l’art. 216 CPC, la médiation est confidentielle et indépendante de l’autorité de conciliation et du tribunal (al. 1). Les déclarations des parties ne peuvent être prises en compte dans la procédure judiciaire (al. 2). La confidentialité est l’un des principes fondamentaux du processus de médiation. Celle-ci n’a en effet de chances d’aboutir que s’il existe une franchise absolue entre les parties, que celles-ci se sentent libres dans les discussions et ne craignent aucune forme de publicité de leur conflit. La confidentialité porte sur les faits que le médiateur et les parties partagent à l’occasion de la médiation (Bohnet, Commentaire romand CPC, 2e éd., 2019, nn. 3 et 4 ad art. 216 CPC). Du principe de la confidentialité de la médiation découle une interdiction de son instrumentalisation en procédure. La confidentialité couvre uniquement les déclarations des parties, ainsi que les documents mentionnés confidentiels, que l’autre partie ignorait avant la médiation et que ne sont pas déjà connus officiellement ou notoirement. Ainsi, la protection couvre toutes les informations qui sont en relation avec la médiation. Il s’agit non seulement des déclarations orales ou écrites des parties, mais aussi des documents établis dans le cadre de la médiation, tels que les procès-verbaux. La confidentialité protège les parties quant aux concessions qu’elles étaient prêtes à faire, à l’attitude qu’elles ont adoptée et aux éventuelles propositions d’arrangement discutées lors de la médiation (Bohnet, op. cit., nn. 8 et 10 ad art. 216 CPC).
2.3 En l’espèce, Me E.__ a relaté dans son courrier à la Présidente du 26 mars 2019 que durant une séance de médiation, la partie adverse avait exigé que de nouvelles factures soient payées par son client, hors de toute production dans la procédure de divorce pendante. La médiatrice avait dû intervenir pour indiquer que ce n’était pas le lieu, ni le moment pour discuter de ces nouvelles factures. Après 1h30, la partie adverse avait unilatéralement quitté la séance, malgré les efforts de la médiatrice, et avait mis fin à la médiation. La partie adverse, qui avait multiplié les actes de procédures chez la médiatrice, usait de tous les moyens dilatoires possibles pour retarder le divorce.
Ce faisant Me E.__ a informé la Présidente du déroulement de la médiation, de propos qui y ont été tenus, soit l’exigence par la partie adverse du paiement de nouvelles factures, et de l’attitude adoptée par la partie adverse. En agissant de la sorte, il a violé la confidentialité nécessaire au bon déroulement du processus de médiation et a instrumentalisé celle-ci en procédure. Me E.__ ne saurait avancer que la Présidente était déjà au courant des factures évoquées dans le cadre de la médiation, puisqu’il a lui-même indiqué dans le courrier du 26 mars 2019 que la partie adverse voulait que de nouvelles factures soient payées par son mandant « hors de toute production dans la procédure de divorce pendante ». De plus, dans son courrier du 26 mars 2019, Me E.__ a relayé à la Présidente le comportement de la partie adverse durant la séance de médiation, en en donnant une image peu flatteuse, notamment en écrivant que la partie adverse avait adopté une attitude procédurière et dilatoire et en indiquant que la médiatrice avait dû intervenir pour rappeler à la partie adverse que ce n’était pas le lieu de parler de factures et qu’après 1h30, la partie adverse avait unilatéralement décidé de quitter la séance et de mettre un terme à la médiation malgré les efforts de la médiatrice. Ce faisant, il s’est servi de faits survenus durant la médiation pour tenter de donner à la magistrate une impression peu favorable de la partie adverse. C’est d’ailleurs ainsi que la Présidente a interprété son courrier puisqu’ensuite de la requête de retranchement de celui-ci de Me R.__ du 29 mars 2019, elle a indiqué aux parties le 23 avril 2019 que les indications relatives au déroulement de la médiation et à l’attitude des parties contenues dans le courrier litigieux ne seraient pas prises en compte dans le cadre de la procédure.
Pour requérir la reprise de la procédure, Me E.__ n’avait pas besoin de divulguer le contenu de la médiation. Il pouvait se contenter d’informer la Présidente que la médiation avait échoué. Le principe de la confidentialité des discussions transactionnelles doit être interprété strictement, compte tenu de l'intérêt public à favoriser le règlement amiable des litiges. Dès lors, il sied de constater que Me E.__, en adressant à la Présidente le courrier du 26 mars 2019, a violé l’art. 216 CPC et, par voie de conséquence, l’art. 12 let. a LLCA.
3.
3.1 L'art. 17 LLCA permet de prononcer, en cas de violation de la loi, l'avertissement, le blâme, une amende de 20'000 fr. au plus, l'interdiction de pratiquer pour une durée maximale de deux ans ou l'interdiction définitive de pratiquer. Les mesures disciplinaires ne visent ainsi pas, au premier plan, à punir le destinataire, mais à l’amener à adopter à l’avenir un comportement conforme aux exigences de la profession (TF 2C_448/2014 du 5 novembre 2014 consid. 4.2).
Le droit disciplinaire est soumis au principe de proportionnalité (ATF 108 Ia 230, JdT 1984 I 21 ; Bohnet/Martenet, Droit de la profession d’avocat, 2009, n. 2178 p 888 et les références citées) et à celui de l’opportunité. La mesure prononcée doit tenir compte, de manière appropriée, de la nature et de la gravité de la violation des règles professionnelles. Elle doit se limiter à ce qui est nécessaire pour garantir la protection des justiciables et empêcher les atteintes au bon fonctionnement de l'administration de la justice (Bohnet/Martenet, op. cit., nn. 2183-2184 p. 890). L’autorité de surveillance doit tenir compte du comportement passé de l’avocat en cause (TF 2A.560/2004 du 1er février 2005 consid. 6).
L'autorité de surveillance dispose d'une certaine marge d'appréciation (Bauer/Bauer, Commentaire romand LLCA, op. cit., n. 65 ad art. 17 LLCA). En particulier, conformément au principe de l'opportunité, celle-ci peut renoncer à prononcer une sanction disciplinaire, même si elle constate une violation de l'art. 12 let. a LLCA. Ce procédé doit toutefois être réservé à des cas exceptionnels, car l'avertissement est déjà une sanction très faible. Il n'en demeure pas moins que la décision de l'autorité de surveillance doit toujours respecter les principes de l'égalité de traitement, de la proportionnalité et de l'interdiction de l'arbitraire (TF 2C_988/2017 du 19 septembre 2018 consid. 6.1 et les auteurs cités, non publié in ATF 144 II 473).
3.2 En l’espèce, Me E.__ n’a pas d’antécédents en matière disciplinaire. De plus, les faits en question sont intervenus dans un contexte particulier, soit une procédure de divorce très conflictuelle où les parties avaient convenu à la fin de l’année 2018 d’entreprendre une médiation. Les parties s’étaient mises d’accord de ne pas parler de factures lors de la médiation. Au cours de la médiation, l’épouse défenderesse a malgré tout exigé le paiement par son époux de nouvelles factures. Me E.__, estimant que le cadre défini par les parties n’avait pas été respecté, a alors envoyé à la Présidente le courrier litigieux du 26 mars 2019 afin que la procédure de divorce soit reprise. A ce moment, la partie adverse avait changé de conseil, ce que Me E.__ ignorait, comme l’atteste le fait que le courrier du 26 mars 2019 a été transmis en copie à l’ancien mandataire de la partie adverse. A réception de ce courrier, le nouveau conseil de la partie adverse, Me R.__, a immédiatement dénoncé le comportement de son confrère à la Chambre des avocats, sans même annoncer son mandat à son confrère ni prendre contact avec celui-ci, ce qui est discutable.
Me E.__ a expliqué qu’il ne connaissait pas la teneur de l’art. 216 CPC et qu’il n’était donc pas conscient de violer la confidentialité de la médiation. Cette négligence est coupable car en tant qu’avocat pratiquant le barreau depuis près de 40 ans, Me E.__ est censé connaître ce principe fondamental. On peut toutefois retenir en sa faveur que la violation commise n’était pas intentionnelle. De plus, Me E.__ n’a relaté à la Présidente que des faits généraux, sans préciser le contenu des factures en question ni produire de pièces. En outre, les faits divulgués, soit que la partie adverse avait à nouveau exigé le paiement de factures, étaient d’une incidence toute relative sur l’issue de la procédure de divorce car des factures avaient déjà été produites en procédure et qu’elles pouvaient l’être par la suite. Le 23 avril 2019, la Présidente a précisé qu’elle ne tiendrait pas compte des circonstances relatées dans le courrier du 26 mars 2019, de sorte que dans les faits, le courrier litigieux n’a eu aucune conséquence sur la procédure de divorce. Enfin, au cours de la procédure disciplinaire, Me E.__ a déclaré regretter que son courrier ait été interprété comme une violation de la confidentialité de la médiation, lui-même n’ayant eu aucune intention malveillante.
En définitive, la confidentialité des pourparlers transactionnels devant être appliquée strictement, il doit être constaté que Me E.__ a violé l’art. 12 let. a LLCA. Toutefois, compte tenu des circonstances particulières du cas d’espèce ainsi décrites, il convient, en application des principes d’opportunité et de proportionnalité, de renoncer à prononcer une sanction disciplinaire à l’encontre de Me E.__.
4. Les frais de la cause, comprenant un émolument par 570 fr. ainsi que les frais d’enquête par 430 fr., seront arrêtés à 1'000 fr. et mis à la charge de
Me E.__, qui a provoqué l’enquête par son comportement (art. 59 al. 1 LPAv).
Par ces motifs,
la Chambre des avocats,
statuant à huis clos :
I. Constate que l’avocat E.__ a violé l’art. 12 let. a LLCA.
II. Renonce à prononcer une sanction disciplinaire à l’encontre de l’avocat E.__.
III. Dit que les frais de la cause, par 1'000 fr. (mille francs), sont mis à la charge de l'avocat E.__.
IV. Dit que la décision est immédiatement exécutoire et retire l'effet suspensif à un éventuel recours en application de l'art. 80 al. 2 LPA-VD.
La présidente : Le greffier :
Du
La décision qui précède, lue et approuvée à huis clos, est notifiée à :
Me E.__.
La présente décision peut faire l'objet d'un recours au Tribunal cantonal dans un délai de trente jours dès sa notification. Le recours est exercé conformément à la loi sur la procédure administrative (art. 65 LPAv).
Cette décision est également communiquée à :
Monsieur le Président de la Commission du barreau de la République et canton de Genève.
Le greffier :
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