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Urteil Kantonsgericht (VD)

Zusammenfassung des Urteils Entscheid/2017/30: Kantonsgericht

Die Chambre des avocats hat eine Disziplinaruntersuchung gegen den Rechtsanwaltsanwärter D.________ durchgeführt, der seinem ehemaligen Ausbilder unbestätigte Vorwürfe gemacht hat. Trotz der Unterzeichnung einer Vereinbarung mit seinem ehemaligen Ausbilder hat D.________ weiterhin Anschuldigungen erhoben, ohne Beweise vorzulegen. Die Chambre des avocats hat entschieden, dass D.________ ein Verwarnung erhält und die Kosten des Verfahrens in Höhe von 1'200 CHF zu tragen hat. Die Entscheidung kann innerhalb von 30 Tagen angefochten werden.

Urteilsdetails des Kantongerichts Entscheid/2017/30

Kanton:VD
Fallnummer:Entscheid/2017/30
Instanz:Kantonsgericht
Abteilung:Chambre des avocats
Kantonsgericht Entscheid Entscheid/2017/30 vom 09.01.2017 (VD)
Datum:09.01.2017
Rechtskraft:-
Leitsatz/Stichwort:-
Schlagwörter : Chambre; Avocat; ître; Henny; énale; Bâtonnière; étaient; éposé; Enquête; Avoir; également; Encontre; Audition; éterminer; énoncé; Avait; ègles; étermination; édéral; Autorité; -même; écision
Rechtsnorm:Art. 1 VVG;Art. 11 SchKG;Art. 12 VVG;Art. 12 ArG;Art. 24 VwVG;Art. 54 SchKG;Art. 55 SchKG;Art. 65 VwVG;
Referenz BGE:-
Kommentar:

Entscheid des Kantongerichts Entscheid/2017/30



TRIBUNAL CANTONAL



CHAMBRE DES AVOCATS

___

Décision du 9 janvier 2017

___

Composition : Mme COURBAT, présidente

Mes Journot, Henny et Jornod, membres, ainsi que Me Wellauer, membre suppléant

Greffière : Mme Robyr

*****

La Chambre des avocats prend séance au Palais de justice de l'Hermitage, à Lausanne, pour statuer dans le cadre de l'enquête disciplinaire dirigée contre l’avocat stagiaire D.__, à [...].

Délibérant à huis clos, la Chambre des avocats retient ce qui suit :


En fait :

1. D.__, né en [...], a travaillé au sein de la police vaudoise puis, durant plus de cinq ans, à la Police judiciaire fédérale à Berne, à la lutte contre le blanchiment d’argent et le crime organisé. Il a ensuite été engagé par le Département de la formation et de la culture, où il a dispensé des cours de droit et d’économie auprès d’élèves en maturité fédérale professionnelle et à l’école d’ingénieurs.

Me D.__ a été engagé en qualité d’avocat stagiaire par Me S.__ dès le 1er septembre 2015. Il a été inscrit au Registre cantonal des avocats stagiaires dès cette date et jusqu’au 30 avril 2016. Il est à nouveau inscrit à ce registre depuis le 2 août 2016, en qualité de stagiaire de Me M.__.

2. A la suite de difficultés rencontrées avec son maître de stage S.__, D.__ s’est adressé à Me Y.__, membre du Conseil de l’Ordre des avocats et interlocuteur privilégié des stagiaires, et lui a fait part d’un certain nombre de problèmes. Celui-ci lui a conseillé d’en parler à la Bâtonnière de l’Ordre des avocats vaudois, ce que Me D.__ a fait.

Le 1er avril 2016, Me S.__ a informé Me D.__ avoir reçu un courrier de l’Ordre des avocats et résilier avec effet immédiat pour justes motifs son contrat de travail, « les accusations portées à [son] encontre étant totalement diffamatoires et calomnieuses ».

Par courrier du 3 avril 2016, envoyé en copie à Mme la Bâtonnière et à Me Y.__, Me D.__ a informé son maître de stage qu’il s’opposait à son courrier du 1er avril. Il a contesté toute diffamation et calomnie dans l’ensemble de ses accusations, « certains faits [lui] ayant été directement rapportés par [lui] et d’autres constatés personnellement ». Il a requis le versement des salaires dus jusqu’à la fin de son contrat de travail, soit jusqu’au 1er septembre 2017, d’une indemnité de 500 fr. pour ses frais de déplacements non encore réglés et d’une indemnité de 7'000 fr., faisant valoir que c’était « sans aucune considération [qu’il n’avait] eu de cesse de porter odieusement atteinte à [son] intégrité en violation flagrante de l’article 328 CO ».

Le 5 avril 2016, Me D.__ a adressé à la Bâtonnière de l’Ordre des avocats vaudois un courrier faisant référence à son licenciement avec effet immédiat le 1er avril précédent et à la volonté de Me S.__ de déposer plainte pénale à son encontre. Me D.__ a invoqué un mode de pression pour l’empêcher de témoigner à son encontre et fait valoir que le ton des messages de Me S.__ lui laissait penser qu’il n’entendait pas entrer en matière sur les sommes qui lui étaient dues et qu’il mettrait tout en œuvre pour compliquer sa réinsertion dans le milieu du Barreau. Il a dès lors interpellé Mme la Bâtonnière pour savoir comment réagir face à ce comportement et s’il devait prévoir d’être défendu par un confrère.

3. Par courrier du 13 avril 2016, Mme la Bâtonnière Antonella Cereghetti Zwahlen a informé la Chambre des avocats que le Conseil de l’ordre souhaitait porter à sa connaissance le litige divisant Mes S.__ et D.__. Elle a exposé que Me D.__ reprochait à son maître de stage d’avoir violé les règles éthiques, déontologiques et légales de la profession d’avocat, soit en particulier d’avoir aidé un client à dissimuler un montant important sur son compte de consignation dans le cadre d’une procédure en divorce, d’avoir pour habitude de faire signer les procédures en imitant sa signature, d’avoir demandé à l’un de ses mandants d’établir de fausses pièces et des pièces antidatées afin de les produire en procédure, d’avoir demandé de manière insistante à sa stagiaire de faire un faux témoignage dans le cadre de la dénonciation déposée par une présidente de tribunal auprès de l’Ordre des avocats vaudois, d’avoir effectué des transactions financières en liquide douteuses depuis son Etude et d’avoir fait preuve de comportements inadéquats avec ses stagiaires. Me Cereghetti Zwahlen a précisé que Me [...] contestait vigoureusement les accusations portées à son encontre, « ajoutant que Maître D.__ rencontrerait des problèmes psychiques, qui le conduisent à inventer de toute pièce les faits dénoncés ».

Le 27 avril 2016, Me S.__ a déposé auprès du Ministère public une plainte pénale contre Me D.__ pour diffamation et calomnie.

Me D.__ a alors déposé une plainte pénale contre Me S.__ pour contrainte et dénonciation calomnieuse. Il a également adressé au tribunal des prud’hommes une demande en paiement des salaires et indemnités encore dus.

4. Le 17 mai 2016, la Présidente de la Chambre des avocats a ouvert une enquête disciplinaire à l'encontre de Me D.__ à la suite de la plainte pénale déposée par Me S.__ et confié l'instruction préliminaire de l'art. 55 al. 3 LPAv (loi sur la profession d’avocat du 9 juin 2015 ; RSV 177.11) à Me Jean-Michel Henny.

Me Henny a entendu Me D.__ le 14 juin 2016 et Me S.__ le 15 juin suivant.

5. Par courriel du 16 juin 2016, Me D.__ a envoyé à Me M.__ une postulation spontanée en vue de trouver une place pour terminer son stage. Il a expliqué avoir commencé son stage auprès de Me S.__, tout en précisant que « des aléas administratifs avec l’OAV » avaient rendu la poursuite de cette formation chez Me S.__ impossible.

6. Les 6 et 7 juillet 2016, D.__ et S.__ ont signé une convention afin de régler à l’amiable le litige les opposant, dont la teneur est la suivante :

«I.

D.__ admet expressément avoir donné à tort, crédit à des propos émis par des tiers qui sont pas ou n’ont jamais été collaborateurs de l’Etude, et dont on peut affirmer qu’ils n’ont aucun fondement.

II.

S.__ versera à D.__ le montant de CHF 3'000.00 pour solde de tout compte et toute prétention, dans les 10 jours, suivant la signature de la présente convention.

III.

Au bénéfice de ce qui précède, D.__ retire purement et simplement sa requête de conciliation adressée au Tribunal de prud’hommes de l’arrondissement de Lausanne à l’encontre de S.__.

IV.

S.__ retire purement et simplement sa plainte pénale du 27 avril 2016 déposée à l’encontre de D.__.

V.

D.__ retire purement et simplement sa plainte pénale du 7 juin 2016 déposée à l’encontre de S.__

VI.

Par gain de paix, S.__ accepte de prendre en charge les éventuels frais de justice de l’affaire pénale pendante devant le Ministère public central, division des affaires spéciales.

VII.

Dès signature de la présente convention, S.__ informera la Chambre des avocats que le litige est désormais réglé à l’entière satisfaction des parties et invitera cette autorité à renoncer à prendre toute sanction à l’encontre de D.__. »

Par courrier du 7 juillet 2016, D.__ a transmis à Me Henny une copie de cette convention. Il a en outre indiqué ce qui suit :

« Lors d’un entretien avec mon ancien maître de stage en son Etude, le 20 juin écoulé, celui-ci m’a expliqué quelle réalité des faits, il fallait comprendre les éléments parvenus à ma connaissance (sic). A l’appui de ses explications, il m’a notamment indiqué que l’ensemble des collaborateurs, dont il était fait mention dans cette affaire, avaient attesté ne jamais avoir effectué d’actes contraires à l’éthique ou à la loi et n’avaient jamais vu ou connu des comportements répréhensibles de la part de Me S.__.

Ainsi, je pars du principe que la version de Me S.__ est le reflet de la vérité et que la vision que j’ai eue de ces événements a été induite par un manque de bonne communication avec lui et le fruit d’une réputation construite, contre lui, par des personnes mal intentionnées. (…) »

Me D.__ a été réinscrit au Registre cantonal des avocats stagiaires le 2 août 2016.

Me Henny a déposé un rapport le 2 septembre 2016. Il a exposé que les accusations portées par Me D.__ à l’encontre de Me S.__, même si elles avaient été formellement retirées, étaient d’une gravité certaine et de nature à porter préjudice à celui qui en était victime. Un tel comportement semblant tomber sous le coup de l’art. 12 al. 1 LLCA, il a suggéré que Me D.__ soit entendu par la Chambre des avocats.

Ce rapport a été transmis le même jour à Me D.__ pour détermination. Celui-ci ne s’est pas déterminé par écrit dans le délai imparti au 8 septembre suivant.

Me D.__ a été entendu par la Chambre des avocats le 12 septembre 2016. Il a déclaré ce qui suit :

« J’ai eu une engueulade avec Me S.__ au sujet d’un recours au Tribunal fédéral. Mon stage ne se passait pas dans de bonnes conditions. J’en ai parlé à Me Y.__ qui m’a dit d’aller voir avant toutes choses Mme la Bâtonnière. Lors de cet entretien, j’ai expliqué les raisons de ma mésentente avec mon maître de stage et mes doutes quant à son comportement. Ces éléments sont repris dans le courrier qu’elle vous a adressé. Elle m’a averti à la fin de cette séance qu’elle entendait porter l’affaire plus loin, mais je ne m’attendais pas à ces conséquences.

S’agissant de la convention que j’ai signée en juillet 2016 avec Me S.__, je lui avais soumis un premier projet qu’il a écarté. Il m’a alors soumis un autre projet, que j’ai signé le 6 juillet 2016. Toutefois, je ne suis pas en accord avec le chiffre I de cette convention. Je l’ai néanmoins signée car j’étais dans une situation financière difficile et je voulais que cette affaire se termine, aussi sur le plan pénal. J’avais en effet senti que l’enquête pénale n’allait pas dans mon sens. »

Il a en outre spontanément produit deux documents sur lesquels sont imprimés des messages qu’il aurait échangés les 19 février et 14 mars 2016 sur la messagerie WhatsApp avec [...], secrétaire en l’étude de Me S.__.

Après qu’un nouveau délai lui fut imparti pour se déterminer, Me D.__ a déposé des déterminations le 21 septembre 2016, concluant à ce qu’aucune sanction ne soit prononcée à son égard. Il a contesté avoir dénoncé Me S.__ à l’ordre des avocats : il a invoqué avoir expliqué à Mme la Bâtonnière les griefs qu’il avait contre son maître de stage, des faits plus sensibles ayant ensuite été abordés au terme de la discussion. Il a évoqué le récit « d’une suite de comportements maladroits de la part d’un avocat inscrit au Barreau » et précisé qu’il ne saurait être interprété autre chose « qu’un signalement de certaines pratiques surprenantes ». Il a contesté avoir eu l’intention de malmener la réputation de Me S.__, précisant qu’il « s’agissait uniquement de dépeindre une ambiance de travail où des irrégularités auraient pu [le] mettre en danger si elles avaient été pénalement ou éthiquement reconnues comme contraires à la profession d’avocat. Auquel cas, il [lui] aurait été reproché de ne pas avoir pris les précautions nécessaires afin d’éviter toute implication de [sa] part, même par omission.» Me D.__ a fait valoir que l’enquête de Me Henny était parcellaire et qu’il était « difficilement concevable que des attestations, provenant de personnes ayant toutes un intérêt indiscutable à nier la connaissance de certaines pratiques (stagiaire, secrétaire, associé), aient une valeur probante ». Il s’est fondé sur la liste de messages électroniques produite durant l’enquête et a fait valoir que l’audition de « ces personnes » aurait permis d’entendre des explications libératoires à son égard. Me D.__ a critiqué le fait qu’il n’y ait eu aucune mesure d’investigation propre à confirmer ou infirmer les soupçons portés contre Me S.__ et soutenu qu’il ne lui était « pas loisible de déterminer si les faits relayés étaient graves ou non », la gravité dépendant de savoir s’ils étaient avérés ou non.

Requis de se déterminer sur l’audition par la Chambre des avocats de son nouveau maître de stage, Me M.__, Me D.__ a déclaré, par courrier du 3 novembre 2016, ne pas s’y opposer. Il a confirmé l’avoir informée de son litige avec Me S.__ lors de son engagement et l’avoir également tenue au courant de la procédure disciplinaire dont il était question.

Me M.__ a été entendue le 17 novembre 2016. Ses propos sont notamment les suivants :

« (…)

Me D.__ m’a d’emblée dit qu’il était en rupture de stage et qu’il avait un litige avec son ancien maître de stage. Je lui ai posé des questions à ce propos. Ce qu’il m’a dit m’a semblé cohérent. Il également déclaré que le litige était en passe d’être réglé avec Me S.__.

Plus précisément, il m’a envoyé un mail le 16 juin 2016 pour expliquer qu’il cherchait à poursuivre son stage. Il y parlait de problèmes administratifs avec l’OAV qui ne lui permettaient pas de poursuivre son stage chez Me S.__. Il est venu pour travailler quelques jours le 24 juin 2016, pour que je puisse voir comment il fonctionnait. Je l’ai ensuite engagé au 1er juillet 2016. Au début de son stage, il m’a dit devoir s’absenter un après-midi pour régler son litige avec Me S.__. Ensuite, il m’a dit avoir signé une convention qui y mettait fin.

Le stage se passe bien. (…)

Je n’ai pas eu de contact avec Me S.__ pour savoir ce qui s’est passé. Au début de son stage, Me D.__ m’a dit que les choses étaient réglées et qu’il avait signé une convention. Je ne voulais donc pas mettre de l’huile sur le feu. Me D.__ m’a dit qu’il n’aimait pas la manière de procéder de Me S.__, que des choses l’avaient heurté et il m’a donné des exemples qui lui déplaisaient. Je me suis dit que si c’était vrai, c’était grave. C’était toutefois le problème de Me S.__.

Quand je lui ai demandé, en septembre, lorsqu’il a reçu sa convocation à la Chambre des avocats, s’il savait pourquoi et s’il était convoqué à titre personnel, il m’a dit qu’il l’ignorait. Je lui ai demandé s’il savait qu’il y avait une enquête disciplinaire ouverte contre lui, il m’a dit non. J’ai été étonnée d’apprendre l’existence de cette procédure disciplinaire.

Cet après-midi, il m’a remis un exemplaire de la convention qu’il a signée. Il m’a dit que Me S.__ l’a rédigée et qu’il l’a signée par gain de paix, pour mettre un terme définitif à leur litige.

Je suis étonnée et interpellée lorsque vous m’informez que l’enquête disciplinaire a été ouverte en mai 2016 et que le membre instructeur l’a entendu le 14 juin 2016, dès lors qu’il ne m’en avait pas parlé.

(…) »

Le 30 novembre 2016, Me Henny a déposé un rapport complémentaire.

Ce rapport a été communiqué à Me D.__, par le biais de son conseil, nouvellement constitué, le 1er décembre 2016.

Me D.__ a déposé des déterminations le 12 décembre 2016, par le biais de son conseil. Il a requis des mesures d’instruction complémentaires, soit l’audition de Me Y.__ et de Mme la Bâtonnière, la production des procès-verbaux d’audition de Me D.__ et de Me S.__ par Me Henny, la production du dossier d’enquête contre Me S.__ et une nouvelle audition par la Chambre des avocats, assisté de son conseil. Il a pour le surplus conclu à ce qu’aucune sanction ne soit prise à son égard. Il a produit à l’appui de son écriture le courriel qu’il a adressé à Me M.__ le 16 juin 2016.

En droit :

1. La LLCA fixe les principes applicables à l'exercice de la profession d'avocat en Suisse (art. 1 LLCA [loi fédérale sur la libre circulation des avocats du 23 juin 2000 ; RS 935.61]) et, en particulier, les règles professionnelles auxquelles l'avocat est soumis (art. 12 LLCA). L’avocat stagiaire doit respecter les obligations professionnelles prévues par la loi, comme il s’y engage avant d’être inscrit au registre cantonal des avocats stagiaires (art. 24 LPAv). L’avocat stagiaire qui, soit intentionnellement soit par négligence, commet une infraction à la LPAv ou à ses dispositions d’applications, viole ses devoirs professionnels ou la promesse qu’il a solennisée, est passible d’une peine disciplinaire (art. 54 al. 1 LPAv).

Dans le canton de Vaud, la Chambre des avocats est l’autorité cantonale chargée de la surveillance des avocats (art. 11 al. 1 LPAv). Elle est également l’autorité disciplinaire des avocats stagiaires (art. 11 al. 3 LPAv).

2. Me D.__ requiert la mise en œuvre de plusieurs mesures d’instruction complémentaires.

Il sollicite en premier lieu l’audition de Me Y.__ et de Mme la Bâtonnière « pour qu’ils confirment la manière dont les faits se sont déroulés ». Une telle audition n’est toutefois pas nécessaire dès lors qu’il n’est nullement contesté que Me D.__ s’est adressé à Me Y.__, puis sur conseil de celui-ci à Mme la Bâtonnière, et qu’il n’a pas personnellement dénoncé Me S.__ à la Chambre des avocats.

Me D.__ requiert ensuite la production des procès-verbaux d’audition de Me S.__ et de lui-même par Me Henny, membre instructeur. Me Henny n’a toutefois pas tenu de procès-verbal de ces auditions, comme Me D.__ a pu s’en rendre compte lors de sa propre audition. Il a uniquement pris quelques notes manuscrites qui ne sauraient en aucun cas tenir lieu de procès-verbal. Me D.__ ne s’est d’ailleurs pas opposé à cette manière de faire et n’a pas requis que ses propos soient verbalisés formellement. Pour le surplus, il convient de relever que le rapport de Me Henny du 30 novembre 2016 se fonde sur des documents figurant au dossier et sur les déclarations de Me D.__ et de Me M.__ protocolées aux procès-verbaux des séances de la Chambre des avocats des 12 septembre et 17 novembre 2016.

La production du dossier d’enquête contre Me S.__ est également requise. Me D.__ n’a toutefois aucun droit à consulter ce dossier. Le dénonciateur ne peut, s'agissant d'une procédure disciplinaire, être considéré comme une partie et la décision disciplinaire ne peut, pour ce motif, lui être communiquée (CREC 14 avril 2008, n° 66/II). Me D.__, qui n’est au demeurant même pas dénonciateur comme il l’invoque lui-même, n’a donc aucun droit à accéder à la décision – ni a fortiori au dossier – concernant Me S.__. Il ne peut pour le surplus faire valoir aucun intérêt digne de protection à la production de ce dossier dès lors qu’aucun élément retenu à l’encontre de Me D.__ ne ressort de pièces qui ne lui auraient pas été communiquées et qui ressortiraient de ce dossier. Partant, cette requête doit également être rejetée.

On notera que le conseil de Me D.__ fait valoir que le courrier que son client a adressé à Me Henny le 7 juillet 2016 ne se trouve pas dans le dossier qui lui a été adressé le 1er décembre 2016, pas plus que les échanges de SMS qu’il a produit lors de son audition le 12 septembre 2016. On ne saurait toutefois faire grief à la Chambre des avocats de ne pas les lui avoir renvoyés en copie, s’agissant de pièces dont son client doit être en possession puisqu’il les a lui-même transmis au membre instructeur et à la Chambre des avocats.

Enfin, Me D.__ demande à être entendu une nouvelle fois en présence de son conseil. Me [...] a été dûment entendu par la Chambre des avocats. Le fait qu’il attende la fin de la procédure pour consulter un avocat ne lui donne pas un droit à être entendu une nouvelle fois assisté de ce conseil. Il a en outre pu se déterminer par écrit après l’audition de Me M.__ et le dépôt par Me Henny de son rapport du 30 novembre 2016. Son droit d’être entendu a ainsi été respecté. En effet, l'art. 29 al. 2 Cst. ne confère pas aux parties le droit d'être entendu oralement par l'autorité (TF 5A_107/2016 du 9 août 2016, consid. 2.2 ; TF 8C_239/2010 du 9 mai 2011 ; ATF 134 I 540 consid. 5.3).

Au vu de ce qui précède, la Chambre des avocats décide de ne pas donner suite aux mesures d’instruction requises par le dénoncé.

3.

3.1 La clause générale de l'art. 12 let. a LLCA dispose que l'avocat est tenu d'exercer sa profession avec soin et diligence. Il doit observer certaines règles non seulement dans ses rapports avec ses clients, mais aussi à l’égard des autorités, de ses confrères et du public en général (ATF 130 II 270 consid. 3.2; TF 2C_652/2014 du 24 décembre 2014 consid. 3.2 ; TF 2C_177/2007 du 19 octobre 2007). Selon la jurisprudence, l’avocat est tenu, de manière toute générale, d’assurer et de maintenir la dignité de la profession, en s’abstenant notamment de tout ce qui pourrait porter atteinte à la considération et à la confiance dont il doit jouir pour remplir sa mission (TF 2A.151/2003 du 31 juillet 2003; ATF 108 Ia 316 consid. 2b/bb, JdT 1984 I 183 ; ATF 106 Ia 100 consid. 6b, JdT 1982 I 579; Valticos, Commentaire Romand de la LLCA, n. 6 ad art. 12 LLCA, p. 94). L'art. 12 let. a LLCA sanctionne les comportements de l'avocat qui remettent en cause la bonne administration de la justice ainsi que la confiance en sa personne et en la profession d'avocat en général (Bohnet/Martenet, Droit de la profession d'avocat, Berne 2009, n. 1165 p. 502).

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, l'avocat dispose d'une grande liberté pour critiquer l'administration de la justice – que ce soit en s'en prenant à un magistrat ou à un confrère (arrêt 2P.212/2000 du 5 janvier 2001, RDAT 2001 II no 10 p. 44 consid. 3b) – tant qu'il le fait dans le cadre de la procédure, dans un mémoire ou à l'occasion de débats oraux (ATF 130 II 270 consid. 3.2 ; TF 2C_1180/2013 du 24 octobre 2014 consid. 4.1.1). Dans ce cas, l'avocat n'agit contrairement à ses devoirs professionnels et, partant, de façon inadmissible, que s'il formule des critiques en étant conscient de la fausseté de ses affirmations ou dans une forme attentatoire à l'honneur, au lieu de se limiter à des allégations de fait et à des appréciations. Les déclarations faites en dehors de toute procédure sont quant à elles soumises à des exigences plus strictes (TF 2C_782/2015 du 19 janvier 2016 consid. 5.2 ; TF 2A.191/2003 du 22 janvier 2004 consid. 7.3). Le Tribunal fédéral a notamment considéré qu’avait violé son devoir de diligence l’avocate qui avait reproché à des confrères de violer leurs devoirs professionnels dans une lettre ouverte adressée à la commission du barreau, à divers magistrats et à des particuliers impliqués dans plusieurs procédures ayant donné lieu au comportement répréhensible de ces avocats selon l’auteur du courrier (TF 2A.191/2003 précité, consid. 7.4).

3.2 En l’espèce, il n’est nullement contesté que Me D.__ n’a pas dénoncé personnellement son ancien maître de stage auprès de la Chambre des avocats. C’est à Me Y.__ qu’il a communiqué les comportements lui paraissant contraires à la loi et aux règles professionnelles puis, sur conseil de celui-ci, à Mme la Bâtonnière.

Les 6 et 7 juillet 2016, Me D.__ et Me S.__ ont signé une convention réglant tous les éléments litigieux (plaintes pénales, procédure devant le tribunal des prud’hommes, prétentions en paiement, frais). Selon le chiffre I de cette convention, Me D.__ a admis « expressément avoir donné à tort, crédit à des propos émis par des tiers qui sont pas ou n’ont jamais été collaborateurs de l’Etude, et dont on peut affirmer qu’ils n’ont aucun fondement ». Il a ensuite écrit à Me Henny pour lui communiquer la convention précitée. Il a précisé qu’il partait du principe « que la version de Me S.__ [était] le reflet de la vérité et que la vision [qu’il avait] eu de ces événements [avait] été induite par un manque de bonne communication avec lui et le fruit d’une réputation construite, contre lui, par des personnes mal intentionnées ».

Me D.__ a ainsi tenu contre son ancien maître de stage des propos qui, à défaut d’être prouvés, pouvaient être diffamants. Ce conflit entre un stagiaire et son maître de stage a toutefois été résolu par la signature d’une convention et, à ce stade, la Chambre des avocats aurait pu renoncer à prononcer une sanction contre Me D.__. Son comportement durant la procédure disciplinaire a toutefois démontré qu’il n’avait pas compris qu’il ne pouvait pas porter sans preuve de telles accusations sans violer ses obligations professionnelles.

Lors de son audition par la Chambre de céans le 2 septembre 2016, Me D.__ a expliqué qu’il avait signé la convention par gain de paix. Il a déclaré qu’il n’était pas d’accord avec le chiffre I de la convention, réitérant ainsi les accusations portées contre Me S.__. Dans ses déterminations du 21 septembre 2016, il a en outre reproché à la Chambre des avocats qu’il n’y ait eu aucune mesure d’investigation propre à confirmer ou infirmer les soupçons portés contre Me S.__, il a critiqué la valeur probante des attestations provenant de personnes « ayant toutes un intérêt indiscutable à nier la connaissance de certaines pratiques » et il a fait valoir qu’il ne lui était « pas loisible de déterminer si les faits relayés étaient graves ou non », la gravité dépendant de savoir s’ils étaient avérés ou non. Il ressort également de l’audition de Me M.__ qu’il lui a donné des exemples de faits qu’il reprochait à Me S.__.

Ainsi, non seulement Me D.__ a formulé contre son ancien maître de stage dans le cadre d’un litige privé des critiques dépassant déjà le cadre de ce qui est admissible, mais il a ensuite porté ces griefs à la connaissance de son nouveau maître de stage, puis il a réitéré ses critiques auprès des membres de la Chambre des avocats alors qu’il avait signé une convention et un courrier déclarant qu’elles étaient infondées. Il a même été jusqu’à reprocher à la Chambre de céans de ne pas avoir instruit sur les faits reprochés à Me S.__.

Le fait d’avoir signé une convention avec son maître de stage par gain de paix n’autorisait pas Me D.__ à renouveler ses critiques, d’autant qu’il n’a jamais fourni aucune preuve des comportements qu’il lui reprochait. A cet égard, les échanges de messages avec la secrétaire de l’étude ne permettent pas de déterminer précisément de quoi il s’agit : le premier échange parle d’un versement d’argent dont on ignore absolument tout (provenance, montant, destination) et le deuxième échange contient une plaisanterie de la secrétaire sur le fait qu’elle pourrait signer « [...]». Ces documents n’ont absolument aucune force probante. Par ailleurs, Me D.__ a déclaré qu’il ne pouvait pas savoir si les faits dont il accusait Me S.__ étaient graves puisque cela dépendait de savoir si ces faits étaient avérés. Me D.__ admet ainsi lui-même avoir propagé des faits pour lesquels il n’avait aucune preuve, ce qui apparaît particulièrement grave de la part d’un avocat-stagiaire qui doit connaître la nécessité de pouvoir prouver ce qu’on allègue à charge de quelqu’un, qui plus est un confrère, lorsque des propos, qui à défaut d’être prouvés pourraient être diffamants, sont tenus.

Au reste, Me D.__ reproche à la Chambre des avocats de ne pas avoir instruit sur ses griefs tout en contestant la force probante d’attestations qui proviendraient de personnes ayant toutes un « intérêt indiscutable à nier la connaissance de certaines pratiques », soit les associés, stagiaires et secrétaires de Me S.__. Me D.__ n’indique cependant pas quelles autres mesures d’instruction auraient été propres à étayer ses dires. Il ne paraît d’ailleurs pas le savoir lui-même puisqu’il déclare que la gravité des faits allégués dépendait de savoir s’ils étaient avérés ou non. Sur ce point, on peut relever que Me D.__ aurait eu tout loisir de faire la preuve de la vérité de ses accusations dans le cadre de l’enquête pénale déposée contre Me S.__. Or, il a lui-même renoncé à ce que la lumière soit faite sur ses allégations en retirant sa plainte pénale.

Le fait d’accuser un maître de stage – ou un confrère – de comportements contraires à la loi et aux obligations professionnelles sans aucune preuve auprès d’un confrère et d’une autorité en dépit de l’accord intervenu constitue, de la part d’un avocat stagiaire qui aspire à devenir avocat, une violation crasse de l’obligation de soin et diligence prévue à l’art. 12 let. a LLCA.

On peut au demeurant relever qu’il est particulièrement inquiétant de lire sous la plume de son conseil que Me D.__ n’avait pas retiré ses accusations au chiffre I de la convention signée avec Me S.__. Cela est contredit non seulement par le texte clair de la convention mais également par la lettre que Me D.__ a écrite à Me Henny le 7 juillet 2016. Quant à la distinction entre « accusations » et « signalement » (déterminations p. 6), elle ne change rien au fait que Me D.__ imputait à Me S.__ des actes contraires à la loi et aux règles professionnelles.

4.

4.1 A teneur de l’art. 54 al. 2 LPAv, les peines disciplinaires qui peuvent être prononcées contre l’avocat stagiaire qui a violé ses devoirs professionnels sont l’avertissement, une amende de 5'000 fr. au plus, l'interdiction temporaire d’effectuer un stage dans le Canton de Vaud pour une durée maximale de deux ans ou l’interdiction définitive d’effectuer un stage dans le Canton de Vaud.

Le droit disciplinaire a principalement pour but de maintenir l’ordre dans la profession, d’en assurer le fonctionnement correct, d’en sauvegarder le bon renom et la confiance des citoyens envers cette profession, ainsi que de protéger le public contre ceux de ses représentants qui pourraient manquer des qualités nécessaires. Les mesures disciplinaires ne visent pas, au premier plan, à punir le destinataire, mais à l’amener à adopter à l’avenir un comportement conforme aux exigences de la profession et à rétablir le fonctionnement correct de celle-ci (TF 2C_448/2014 du 5 novembre 2014, c. 4.2).

Le droit disciplinaire est soumis au principe de proportionnalité (ATF 108 Ia 230, JT 1984 I 21 ; Bohnet/Martenet, op. cit., n. 2178 p. 888 et les références citées; Montani/Barde, La jurisprudence du Tribunal administratif relative au droit disciplinaire, in RDAF 1996 p. 345, spéc. p. 347, pp. 363 ss ; Grisel, Traité de droit administratif, vol. I, p. 354 ; Muller, Le principe de la proportionnalité, in RDS 1978 II 197, spéc. p. 229) et à celui de l’opportunité (Montani/Barde, ibid.). La mesure prononcée doit tenir compte, de manière appropriée, de la nature et de la gravité de la violation des règles professionnelles. Elle doit se limiter à ce qui est nécessaire pour garantir la protection des justiciables et empêcher les atteintes au bon fonctionnement de l'administration de la justice. Il y a lieu de déterminer le but que la sanction disciplinaire doit atteindre dans le cas particulier et de choisir la mesure qui est apte, nécessaire et proportionnée à cette fin (Bohnet/Martenet, op. cit., nn. 2183-2184 p. 890).

L'autorité de surveillance doit tenir compte du comportement passé de l'avocat en cause, mais également du comportement de l'avocat dans la procédure (Bohnet/Martenet, op. cit., n. 2187 p. 891). Ainsi, la violation du devoir de diligence a été jugée d’autant plus grave que l’avocat a confirmé sa position dans ses observations à l’autorité de surveillance et semblé ne pas se rendre compte du caractère incorrect de ses déclarations (Commissione di disciplina TI 28 avril 2008/354, In Bolletino 36/2008 71, cité in Bohnet/Martenet, op. cit., p. 891, note infrapaginale n° 403).

4.2 En l'espèce, Me D.__ a failli à son devoir de diligence dans ses rapports avec son maître de stage, ainsi qu’avec l’autorité disciplinaire. Son comportement a porté atteinte à la considération et à la confiance dont doit pouvoir jouir un avocat dans l'exercice de sa profession.

Il revêt une certaine gravité, dans la mesure où Me D.__ ne paraît toujours pas avoir reconnu et compris ce que son comportement avait de contraire à ses obligations professionnelles. En effet, alors qu’une enquête disciplinaire avait été ouverte contre lui à raison des propos qu’il avait tenus au sujet de son ancien maître de stage, qu’il avait reçu un rapport du membre instructeur qui citait expressément l’art. 12 al. 1 LLCA, il a renouvelé lors de son audition par la Chambre des avocats et dans ses déterminations du 21 septembre 2016 les griefs qu’il avait contre Me S.__, toujours sans aucune preuve de leur véracité.

Un autre fait aggravant qui interpelle la Chambre de céans réside dans l’âge et l’expérience professionnelle du dénoncé. Me D.__ n’est pas un novice qui vient de terminer ses études. Par son âge et son passé de policier, il devait savoir qu’on ne peut accuser une personne d’infractions pénales sans détenir aucune preuve de ses allégations. Même sous le coup d’une enquête disciplinaire, il a persisté dans son attitude accusatrice. La Chambre des avocats est dès lors inquiète de constater que l’expérience et l’âge de Me D.__ ne l’ont pas empêché d’agir de la sorte.

A sa décharge, il sera toutefois tenu compte du fait que Me D.__ n’a pas dénoncé personnellement Me S.__ à la Chambre des avocats et que ses griefs ont été invoqués initialement dans le cadre de son stage, auprès du référent des stagiaires, Me Y.__, puis de Mme la Bâtonnière. On retiendra également que Me D.__ n’est pas un avocat breveté mais un stagiaire encore en formation.

Ainsi, au regard de l'ensemble des circonstances, mais non sans hésitation, la Chambre des avocats décide de ne prononcer à l’encontre de Me D.__ qu’un avertissement pour sanctionner son comportement.

5. Les frais de la cause, comprenant un émolument ainsi que les frais d'enquête, par 742 fr., sont arrêtés à 1’200 francs. Ils sont mis à la charge de D.__ (art. 59 al. 1er LPAv).

Par ces motifs,

la Chambre des avocats,

statuant à huis clos :

I. Prononce contre l'avocat stagiaire D.__ la peine disciplinaire de l'avertissement.

II. Dit que les frais d’enquête et de décision, par 1’200 fr. (mille deux cents francs), sont mis à la charge de D.__.

La présidente : La greffière :

Du

La décision qui précède, lue et approuvée à huis clos, est notifiée à :

Me Colette Lasserre Rouiller (pour D.__).

Toute décision de la Chambre des avocats peut faire l'objet d'un recours au Tribunal cantonal dans les trente jours dès sa communication ou sa notification. Le recours est exercé conformément à la loi sur la procédure administrative (art. 65 LPAv).

La greffière :

Quelle: https://www.findinfo-tc.vd.ch/justice/findinfo-pub/internet/SimpleSearch.action

Bitte beachten Sie, dass keinen Anspruch auf Aktualität/Richtigkeit/Formatierung und/oder Vollständigkeit besteht und somit jegliche Gewährleistung entfällt. Die Original-Entscheide können Sie unter dem jeweiligen Gericht bestellen oder entnehmen.

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