Instanz: | Bundesverwaltungsgericht |
Abteilung: | Abteilung II |
Dossiernummer: | B-5317/2014 |
Datum: | 14.07.2016 |
Leitsatz/Stichwort: | Surveillance de la révision |
Schlagwörter : | Rsquo;; Rsquo;a; évision; épendance; Rsquo;un; été; Rsquo;indépendance; Rsquo;au; Rsquo;il; Rsquo;une; être; ément; ègle; érieur; ègles; ;autorité; Rsquo;autorité; éviseur; écis; érieure; éputation; éprochable; Rsquo;organe; écision; Rsquo;administration; Rsquo;en; Rsquo;art; étés; Rsquo;ASR; établi |
Rechtsnorm: | Art. 728 or;Art. 932a OR ; |
Referenz BGE: | - |
Kommentar: | -, Kommentar zum Bundesgesetz über das Verwaltungsverfahren [VwVG], Art. 49 VwVG, 2008 |
Cour II
B-5317/2014
Composition Jean-Luc Baechler (président du collège), Ronald Flury et Francesco Brentani, juges, Fabienne Masson, greffière.
Parties X. ,
représenté par Maître François Bellanger, avocat, recourant,
contre
Objet Retrait de l’agrément en qualité d’expert-réviseur.
Par décision du 19 novembre 2007, l’Autorité fédérale de surveillance en matière de révision (ASR) a accordé à X. (ci-après : le recourant) un agrément en qualité d’expert-réviseur.
Par courrier du 11 février 2013, l’Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) a informé l’ASR que le prénommé était ou avait été membre du conseil d’administration de neuf sociétés (A. SA, en liquidation, B. SA, C. SA, D. , E. SA, en liquidation, F. SA, en liquidation, G. SA, H. SA et I. SA) alors qu’il était membre unique du
conseil d’administration de J.
SA, organe de révision de ces
sociétés. Elle a souligné qu’il existait dès lors un soupçon de violation des règles sur l’indépendance.
En date du 20 février 2013, l’ASR a demandé à X. fournir des renseignements et documents sur cette question.
de lui
Le recourant y a donné suite le 11 mars 2013, précisant en substance que tous les mandats d’administrateur n’avaient été exercés qu’à titre fiduciaire. Il a ajouté que les mandats de comptabilité ou de révision étaient exécutés dans le respect effectif du principe d’indépendance. Il a encore déclaré que, depuis le 27 juin 2012, il n’existait plus aucun dossier pour lequel l’indépendance formelle de la fiduciaire dans son rôle de réviseur posait problème.
Cette question a donné lieu à divers échanges entre l’ASR et le recourant, au cours desquels celui-ci a notamment exposé qu’il ne possédait plus de documents pour les exercices antérieurs à 2002, les archives au-delà de dix ans étant régulièrement détruites.
Par courriel du 22 novembre 2013, l’ASR a indiqué au recourant qu’il était établi que celui-ci avait exercé simultanément des fonctions décisionnelles au sein de diverses sociétés et de leur organe de révision respectif, ayant ce faisant violé les règles sur l’indépendance. Elle en a déduit que la condition de la réputation irréprochable n’était plus satisfaite, cette violation devant conduire au retrait de l’agrément. Elle a invité le recourant à exercer son droit d’être entendu.
Le recourant s’est déterminé le 10 janvier 2014. S’il a reconnu que, d’un point de vue formel, J. SA était en apparence dépendante des sociétés mentionnées lorsqu’elle a révisé leurs comptes, il a cependant estimé que les manquements reprochés étaient purement formels et ne permettaient en eux-mêmes pas de considérer qu’il avait violé les règles d’éthique professionnelle. Il s’est en outre prévalu du principe de la proportionnalité, jugeant que l’ASR devait tenir compte du fait que l’état conforme au droit avait été rétabli spontanément bien avant le début de la procédure. Il en a déduit qu’il n’existait aucun motif de lui retirer son agrément.
Par décision du 15 août 2014, l’autorité inférieure a révoqué la décision du 19 novembre 2007 octroyant au recourant un agrément en qualité d’expertréviseur et prononcé le retrait de cet agrément pour une durée de deux ans ainsi que la radiation de son inscription au registre des réviseurs. Elle a exposé que, selon les inscriptions au registre du commerce, le recourant
siégeait au conseil d’administration de J.
SA depuis le 27 juin
1997, ayant en outre été son administrateur unique du 12 janvier 2000 au 5 mai 2014 ; qu’il s’était annoncé auprès d’elle en qualité de membre de la direction et collaborateur de révision de cette société ; qu’il avait été simultanément membre du conseil d’administration d’au moins huit sociétés :
A.
SA, en liquidation (radiée depuis le 25 février 2009) : le
recourant a été inscrit en qualité de membre du conseil d’administration du 10 juin 1994 au 13 mars 2007 ; J. SA a été inscrite en qualité d’organe de révision du 4 juillet 1997 jusqu’à la radiation le 25 février 2009 ; la période litigieuse s’est étendue du 4 juillet 1997 au 13 mars 2007 ; les
rapports de révision établis par les collaborateurs de J. SA ont été
remis à l’ASR pour les années 2002 à 2005 ;
B. SA : le recourant a été inscrit en qualité de membre du conseil d’administration du 19 février 1993 au 18 septembre 2009 ; J. SA a été inscrite en qualité d’organe de révision du 1er juillet 1997 au 18 septembre 2009 ; la période litigieuse s’est étendue du 1er juillet 1997 au 18 septembre 2009 ; les rapports de révision établis par les collaborateurs de J. SA ont été remis à l’ASR pour les années 2002 à 2008 ;
C. SA (aujourd’hui en liquidation) : le recourant est inscrit en qualité de membre du conseil d’administration depuis le 17 décembre 1994 ; J. SA a été inscrite en qualité d’organe de révision du 11 août 1997 au 11 juin 2012 ; la période litigieuse s’est étendue du 11 août 1997 au 11 juin 2012 ; les rapports de révision établis par les collaborateurs de J. SA ont été remis à l’ASR pour les années 2003 à 2010 ;
D. (radiée depuis le 21 juin 2007) : le recourant a été inscrit en qualité de membre du conseil d’administration du 17 janvier 1996 jusqu’à la
radiation le 21 juin 2007 ; J. SA a été inscrite en qualité d’organe de révision du 13 octobre 1997 au jour de la radiation ; la période litigieuse s’est étendue du 13 octobre 1997 au 21 juin 2007 ; les rapports de révision établis par les collaborateurs de J. SA ont été remis à l’ASR pour les années 2002 à 2005 ;
F.
SA, en liquidation : le recourant a été inscrit en qualité de
membre du conseil d’administration du 27 mars 1997 au 21 juin 2012 ; J. SA était inscrite en qualité d’organe de révision depuis le 9 juillet 1997 ; la période litigieuse s’est étendue du 9 juillet 1997 au 21 juin 2012 ; les rapports de révision établis par les collaborateurs de J._ SA ont
été remis à l’ASR pour les années 2002 à 2011 ;
G.
SA (opting out selon la déclaration du 16 mars 2012) : le
recourant était inscrit en qualité de membre du conseil d’administration
depuis le 16 décembre 1996 ; J.
SA a été inscrite en qualité
d’organe de révision du 15 juillet 1997 au 21 mars 2012 ; la période litigieuse s’est étendue du 15 juillet 1997 au 21 mars 2012 ; les rapports de révision établis par les collaborateurs de J._ SA ont été remis à l’ASR pour les années 2002 à 2010 ;
H.
SA (opting out selon la déclaration du 26 juin 2012) : le
recourant était inscrit en qualité de membre du conseil d’administration en tout cas depuis le 4 juin 1996 ; J. SA a été inscrite en qualité d’organe de révision du 8 août 1997 au 27 juin 2012 ; la période litigieuse s’est étendue du 8 août 1997 au 27 juin 2012 ; les rapports de révision
établis par les collaborateurs de J. SA ont été remis à l’ASR pour les années 2002 à 2010 ;
- I._
SA (opting out selon la déclaration du 17 octobre 2008) : le
recourant était inscrit en qualité de membre du conseil d’administration en tout cas depuis le 25 janvier 1994 ; J. SA a été inscrite en qualité d’organe de révision du 22 septembre 1997 au 29 octobre 2008 ; la période litigieuse s’est étendue du 22 septembre 1997 au 29 octobre 2008 ; les rapports de révision établis par les collaborateurs de J. SA ont été remis à l’ASR pour les années 2002 à 2007.
L’ASR a considéré que de telles situations s’avéraient manifestement incompatibles avec le devoir d’indépendance de l’organe de révision, soulignant que ce devoir devait aussi être satisfait par le recourant personnellement en sa qualité de membre du conseil d’administration. Elle en a déduit que le recourant avait violé les règles d’indépendance, à tout le moins en apparence. Selon elle, le fait que le recourant n’ait pas pris part à la révision n’y changeait rien. L’autorité inférieure a estimé que les violations constatées, répétées et se prolongeant durant plusieurs années aussi bien sous l’ancien que le nouveau droit s’avéraient graves. Aussi, elle a nié au recourant la garantie d’une activité de révision irréprochable. Retenant qu’en qualifiant les violations constatées de purement formelles, il ne semblait pas saisir toute la portée des règles d’indépendance en apparence ni la gravité desdites violations, elle a jugé que le risque existait que d’autres violations soient commises ; aussi, le pronostic se révélait à
ses yeux défavorable même si les situations constatées étaient désormais régularisées. Enfin, elle a expliqué qu’un retrait pour une durée de deux ans respectait le principe de la proportionnalité.
Par écritures du 17 septembre 2014, mises à la poste le même jour, le recourant a formé recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif fédéral. Sous suite de dépens, il conclut principalement à son annulation ; subsidiairement, il requiert son annulation et le renvoi de la cause à l’autorité inférieure afin qu’elle complète l’instruction, notamment en sollicitant des renseignements supplémentaires voire en procédant à l’audition de diverses personnes. À l’appui de ses conclusions, le recourant souligne ne pas être intervenu dans la révision des comptes des sociétés en cause. Il ajoute qu’au-delà d’un lien purement formel entre elles et
J.
SA, il n’existe aucun élément du dossier qui permettrait de
considérer que les personnes chargées de la révision aient, dans les faits, manqué d’indépendance. Il expose que toutes les situations visées résultaient de pratiques courantes à l’époque où elles ont été introduites et ont toutes été mises en conformité au nouveau droit depuis le 27 juin 2012 au plus tard ; à ses yeux, si l’on considère que sa réputation a été ternie par les faits retenus, elle aurait largement recouvré à ce jour son caractère irréprochable. En outre, le recourant reproche à l’autorité inférieure d’avoir pris en compte des faits vieux de plus de dix ans contrairement à la jurisprudence du Tribunal fédéral. Par ailleurs, il se plaint d’une violation d’établir les faits et de son droit d’être entendu sur les irrégularités reprochées, relevant que l’autorité inférieure aurait laissé entendre que les manquements commis pourraient avoir été d’une autre nature que la seule violation des règles sur l’indépendance. Il considère qu’en affirmant qu’il n’aurait pas compris la portée des règles sur l’indépendance en apparence, l’autorité inférieure aurait mal établi les faits. Le recourant allègue en outre une violation de l’art. 17 de la loi sur la surveillance de la révision, estimant que sa réputation est aujourd’hui irréprochable, que le pronostic futur est favorable et que la décision querellée revêt un caractère répressif. Enfin, il se plaint d’une violation du principe de la proportionnalité.
Invitée à se déterminer sur le recours, l’autorité inférieure conclut à son rejet au terme de ses remarques responsives du 21 novembre 2014. Elle explique que les manquements de plus de dix ans n’ont pas été pris en compte mais uniquement mentionnés, estimant que ceux remontant jusqu’en 2004 s’avèrent suffisamment graves et ont été commis sur une période suffisamment longue pour justifier le retrait de l’agrément en tant
que tel ainsi que sa durée. Elle note qu’il importe peu de savoir s’il s’agit de manquements en apparence ou dans les faits dès lors qu’ils tombent tous dans la catégorie des incompatibilités mentionnées dans le CO. Elle déclare que l’existence d’une indépendance en apparence est tout aussi importante que celle dans les faits puisqu’un lecteur du rapport de révision ne pourra jamais se fier aux conclusions dudit rapport lorsque l’indépendance du réviseur se trouve, au moins en apparence, remise en cause. Elle en déduit que le recourant n’a toujours pas suffisamment pris conscience que les manquements sont graves. Elle souligne encore que ceux-ci ont été régularisés sur plusieurs années, la dernière régularisation résultant d’un opting out ; elle affirme qu’ils ont cessé indépendamment d’une réflexion et d’une analyse sur la notion et la portée des règles d’indépendance. Elle y voit un risque de commission d’autres irrégularités la conduisant à nier au recourant la garantie d’une activité de révision irréprochable. Enfin, elle maintient qu’un retrait d’une durée de deux ans respecte le principe de proportionnalité.
Dans ses observations du 5 janvier 2015, le recourant conteste ne pas avoir suffisamment pris conscience des règles sur l’indépendance. Il souligne que la régularisation des situations litigieuses ne dépendait pas seulement de sa volonté mais surtout des décisions des animateurs des sociétés concernées ; aussi, il était tributaire des décisions des actionnaires. Il relève en outre que les mandats litigieux représentent une faible portion de l’activité déployée par J. SA et par lui-même. Le recourant note par ailleurs que toutes les sociétés litigieuses étaient soumises à un contrôle restreint voire en situation d’opting out, reprochant à l’autorité inférieure de ne pas en avoir tenu compte. Il déclare qu’apprécier la nécessité d’un retrait de l’agrément sur la base de faits antérieurs au 1er septembre 2007 n’ayant trait qu’aux seules règles sur l’indépendance en apparence contredit la sécurité et la prévisibilité du droit. Il considère enfin que la décision se révèle punitive et disproportionnée.
Les arguments avancés de part et d’autre au cours de la présente procédure seront repris plus loin dans la mesure où cela se révèle nécessaire.
Le Tribunal administratif fédéral examine d’office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (cf. ATAF 2007/6 consid. 1).
À teneur des art. 31 et 33 let. e LTAF en relation avec l’art. 28 al. 2 de la loi sur la surveillance de la révision du 16 décembre 2005 (LSR, RS 221.302), le Tribunal administratif fédéral est compétent pour juger des recours contre les décisions rendues par l’ASR. L’acte attaqué constitue une décision au sens de l’art. 5 al. 1 let. c PA. Le Tribunal de céans peut donc connaître de la présente affaire.
Le recourant, qui a pris part à la procédure devant l’autorité inférieure, est spécialement atteint par la décision et a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification. La qualité pour recourir doit dès lors lui être reconnue (art. 48 al. 1 let. a à c PA).
Les dispositions relatives à la représentation, au délai de recours, à la forme et au contenu du mémoire de recours (art. 11, 50 et 52 al. 1 PA) ainsi que les autres conditions de recevabilité (art. 44 ss et 63 al. 4 PA) sont en outre respectées.
Le recours est ainsi recevable.
La LSR règle l’agrément et la surveillance des personnes qui fournissent des prestations en matière de révision ; elle vise à garantir une exécution régulière et la qualité des prestations en matière de révision (art. 1 al. 1 et 2 LSR). La surveillance incombe à l’ASR (art. 28 al. 1 LSR).
À teneur de l’art. 3 al. 1 LSR, les personnes physiques et les entreprises de révision qui fournissent des prestations en matière de révision doivent être agréées. L’ASR statue notamment, sur demande, sur l’agrément des experts-réviseurs (art. 15 al. 1 let. a LSR). Elle tient un registre des personnes physiques et des entreprises de révision agréées. Le registre est public et peut être consulté sur Internet (art. 15 al. 2 LSR).
En ce qui concerne les conditions d’agrément, l’art. 4 al. 1 LSR prescrit qu’une personne physique est agréée en qualité d’expert-réviseur lorsqu’elle satisfait aux exigences en matière de formation et de pratique professionnelles et qu’elle jouit d’une réputation irréprochable. Les
personnes physiques sont agréées pour une durée indéterminée (art. 3 al. 2 LSR).
En vertu de l’art. 17 al. 1 LSR dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2014 (RO 2007 3971) et applicable à la présente procédure (cf. arrêt du TAF B-6791/2015 du 27 avril 2016 consid. 3), lorsqu’un réviseur ou un expert-réviseur ne remplit plus les conditions d’agrément visées aux art. 4 à 6 LSR, l’autorité de surveillance peut le lui retirer pour une durée déterminée ou indéterminée. Lorsque la personne concernée est en mesure de régulariser sa situation, l’autorité de surveillance lui adresse préalablement une commination de retrait. Conformément à l’art. 17 al. 1, 3e phrase, LSR entré en vigueur le 1er janvier 2015 (RO 2014 4073), elle lui adresse un avertissement écrit si le retrait de l'agrément est disproportionné. Le point de savoir si cette disposition trouve à s’appliquer in casu à titre de lex mitior peut demeurer indécis dès lors que les conditions de l’avertissement écrit ne sont de toute façon pas remplies (cf. infra consid. 7.2.2 ; arrêt du TAF B-437/2014 du 18 septembre 2015 consid. 5.3.3).
À l’appui de ses conclusions, le recourant se plaint tout d’abord d’une constatation inexacte des faits pertinents.
3.1 En vertu de l’art. 12 PA, l’autorité constate les faits d’office et procède s’il y a lieu à l’administration de preuves. Conformément à l’art. 49 let. b PA, le recourant peut invoquer la constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents. La constatation des faits effectuée par l’autorité compétente se révèle inexacte lorsque l’autorité a omis d’administrer la preuve d’un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l’administration d’un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces par exemple (cf. BENOÎT BOVAY, Procédure administrative, 2e éd. 2015, p. 566). Sont déterminants au sens de la disposition précitée les faits décisifs pour l’issue du litige (cf. BENJAMIN SCHINDLER, in : Kommentar zum Bundesgesetz über das Verwaltungsverfahren [VwVG], 2008, art. 49 n° 29).
Reconnaissant des manquements aux règles sur l’indépendance en apparence et admettant qu’ils peuvent suffire à eux-seuls à nier le caractère irréprochable de la réputation et justifier un retrait d’agrément, le recourant estime toutefois que leur gravité doit être prise en compte. À cet
égard, il déclare qu’il doit être considéré comme prouvé que les manquements pouvant lui être reprochés relèvent des règles sur l’indépendance en apparence uniquement, à l’exclusion de tout autre manquement de quelque nature que ce soit. Il reproche à l’autorité inférieure de laisser entendre que les manquements commis pourraient avoir été d’une autre nature que la seule violation des règles sur l’indépendance en apparence ; ce faisant, elle aurait violé soit son obligation d’établir les faits soit son droit d’être entendu. Le recourant demande au Tribunal de céans de ne considérer que les manquements relevant des règles sur l’indépendance en apparence, requérant le renvoi de la cause à l’autorité inférieure dans le cas contraire. Indépendamment du point - non pertinent sous l’angle de l’établissement des faits - de savoir si les manquements aux règles d’indépendance en apparence s’avèrent moins graves que celles touchant l’indépendance dans les faits (cf. infra consid. 6.3.1), force est de constater que rien, à la lecture du dossier, ne permet de retenir que le recourant se serait rendu fautif d’une violation des dispositions relatives à l’indépendance dans les faits ou d’autres manquements. Cela étant, l’autorité inférieure, qui n’a pas répondu à ces critiques dans sa réponse, n’a de toute façon pas retenu une telle violation dans la décision entreprise. En déclarant que le recourant avait violé les règles d’indépendance, « à tout le moins en apparence », elle a seulement laissé ouvert le point de savoir si d’autres manquements auraient également pu être commis, ce que le dossier ne permet forcément jamais d’exclure avec certitude ; elle a d’ailleurs souligné n’avoir pas connaissance d’autres violations des dispositions légales et réglementaires. On ne saurait donc déduire de la formulation employée que l’autorité inférieure sous-entendait par-là la commission de tels manquements qui auraient influencé son appréciation d’une manière défavorable au recourant. Compte tenu de ces éléments, il appert que les violations à la base du retrait de l’agrément ne touchent qu’à l’indépendance en apparence ainsi que cela ressort d’ailleurs de la décision entreprise.
En outre, contrairement aux déclarations de l’autorité inférieure, le recourant affirme avoir parfaitement conscience de la portée des règles sur l’indépendance, ce qui aurait été établi. Il soutient que rien ne permet de considérer qu’il l’aurait minimisée d’une quelconque manière, la mention de « liens purement formels » confirmant que les manquements relevaient de ces règles. Il en tire la conclusion que l’autorité inférieure aurait mal établi les faits, ce qui justifierait l’annulation de la décision ; il invite le Tribunal administratif fédéral à considérer comme établi qu’il avait parfaitement conscience de la portée des règles sur l’indépendance en
apparence et n’a jamais contesté y avoir manqué. Il appert que le recourant a certes effectivement admis l’existence de violations des exigences relatives à l’indépendance en apparence ; cela ne signifie toutefois pas encore qu’il en aurait admis la gravité et donc qu’il en saisirait véritablement la portée (cf. infra consid. 6.7 s.). De surcroît, il est déjà permis de relever que le fait d’avoir conscience des règles d’indépendance ne se présente pas comme un élément favorable lorsque lesdites règles ont néanmoins été violées. Quoi qu’il en soit, les déclarations du recourant sur ce point ne suffisent évidemment pas dès lors que la question de savoir s’il en a ou non véritablement conscience relève en réalité de l’appréciation des faits plus que de leur établissement.
S’agissant d’apprécier la réputation irréprochable dans le cadre de l’examen en vue de l’agrément, l’art. 4 al. 1 de l’ordonnance sur la surveillance de la révision du 22 août 2007 (OSRev, RS 221.302.3) dispose que, pour être agréé, le requérant doit jouir d’une réputation irréprochable et aucune autre circonstance personnelle ne doit indiquer qu’il n’offre pas toutes les garanties d’une activité de révision irréprochable. Ces notions juridiques indéterminées doivent être interprétées au regard des tâches spécifiques de l’organe de révision et à la lumière des dispositions similaires figurant dans la législation sur la surveillance des marchés financiers ; différents éléments doivent ainsi être pris en compte comme l’intégrité, la droiture, la diligence s’agissant des composantes professionnelles de la réputation ainsi que la considération, l’estime et la confiance pour ce qui est des qualités générales (cf. ATAF 2011/43 consid. 5.1 ss). L’activité de révision irréprochable nécessite des compétences professionnelles et un comportement correct dans les affaires. Sous cette dernière dénomination, il faut comprendre en premier lieu le respect de l’ordre juridique, non seulement du droit de la révision, mais également du droit civil et pénal, de même que l’observation du principe de la bonne foi (cf. arrêt du TF 2C_834/2010 du 11 mars 2011 consid. 3.2 ; URS BERTSCHINGER, in : Basler Kommentar - Revisionsrecht, 2011 [ci-après : BSK-Revisionsrecht], art. 4 LSR n° 44).
De jurisprudence constante, les impératifs en matière d’indépendance figurent parmi les normes essentielles de la profession de réviseur dont le respect s’avère manifestement déterminant afin de remplir l’exigence d’une réputation irréprochable (cf. arrêt du TAF B-853/2011 du 27 juillet 2012 consid. 4.2 et les réf. cit.). L’indépendance de l’organe de révision des sociétés anonymes est régie par les art. 728 (révision ordinaire) et 729 (révision restreinte) CO qui imposent à l’organe de révision d’être indépendant et de former son appréciation en toute objectivité, précisant que son indépendance ne doit être restreinte ni dans les faits ni en apparence. Selon la jurisprudence, les exigences en matière d’indépendance de l’organe de révision sont en principe les mêmes s’agissant de révision ordinaire et de révision restreinte (cf. arrêt du TF 2C_125/2015 du 1er juin 2015 consid. 4.2 et 2C_927/2011 du 8 mai 2012 consid. 3.2.2 et 3.5.1 ; arrêts du TAF B-6791/2015 consid. 9 et B-7872/2015 du 21 avril 2016 consid. 3.5.7 ; cf. infra consid. 6.2). En ce qui concerne en particulier l’indépendance en apparence, partant de la prémisse que l’impartialité et l’intégrité effectives du réviseur se révèlent des réalités purement subjectives et difficilement vérifiables par les tiers, la législation tend à éviter toute situation pouvant éveiller - du point de vue d’un observateur moyen se fondant sur son expérience générale de la vie - l’impression d’un rapport de dépendance ; si le fait que l’indépendance d’un réviseur soit insuffisante en apparence ne permet pas, à lui seul, de conclure à un manque d’impartialité contraire à l’éthique professionnelle, il n’en reste pas moins que cette apparence doit conduire à exclure le réviseur en question du processus de révision de la société concernée (cf. arrêt B-853/2011 consid. 4.2.2 et les réf. cit.). Lorsqu’il se trouve dans une telle situation, le réviseur se doit de renoncer lui-même au mandat y afférent (cf. ATF 123 V 161 consid. 3 b/dd ; WATTER/RAMPINI, BSK-Revisionsrecht, art. 728 CO n° 67). Concrétisant ce principe, l’art. 728 al. 2 CO contient une liste non exhaustive de situations incompatibles avec l’indépendance de l’organe de révision qui ont valeur de référence pour la révision restreinte également dès lors que les motifs d’incompatibilité énumérés sont tout aussi importants pour l’organe de révision effectuant un contrôle restreint s’il ne veut pas donner l’impression d’une dépendance de fait (cf. arrêt B-853/2011 consid. 4.2.3 s. et les réf. cit.) : en font partie notamment l’appartenance au conseil d’administration, l’exercice d’autres fonctions décisionnelles au sein de la société révisée ou l’existence de rapports de travail avec elle (art. 728 al. 2 ch. 1 CO) ; selon l’art. 728 al. 3 CO, si l’organe de révision est une société de personnes ou une personne morale, ces dispositions s’appliquent également aux membres de l’organe supérieur de direction ou d’administration et aux autres personnes qui exercent des fonctions
décisionnelles. EXPERTsuisse (jusqu’au 31 mars 2015 : La Chambre fiduciaire) a ancré ces principes dans ses Directives sur l’indépendance qui lient tous les membres exerçant un mandat de révision (cf. partie I § F al. 1
p. 14 des Directives sur l’indépendance 2007, disponibles sur le site d’EXPERTsuisse, <http://www.expertsuisse.ch/fr-ch/rglement s>, consulté le 06.06.2016 ; cf. arrêt B-853/2011 consid. 4.2.6 et les réf. cit.).
Dans l’examen de la réputation et de la garantie d’une activité de révision irréprochables, l’ASR dispose d’un large pouvoir d’appréciation qu’elle est néanmoins tenue d’exercer dans le respect du principe de la proportionnalité ; en d’autres termes, l’exclusion d’une réputation irréprochable présuppose toujours une certaine gravité des actes reprochés (cf. arrêts du TF 2C_709/2012 du 20 juin 2013 consid. 4.4 et 2C_834/2010 consid. 6.2). La réputation irréprochable constitue la règle ; les éléments favorables sous l’angle de la réputation - comme par exemple la capacité à reconnaître le caractère illicite du comportement, la réparation du dommage, le rétablissement d’un état conforme au droit ou le caractère unique de la faute commise - doivent certes être pris en considération lorsque l’autorité inférieure en a connaissance. Cela étant, ils n’influencent pas automatiquement positivement l’évaluation de la réputation ; ils doivent en principe être appréciés de manière neutre, cette situation s’apparentant à l’absence d’antécédents en matière pénale (cf. arrêts du TAF B-6791/2015 consid. 6.4, B-6251/2012 du 8 septembre 2014 consid. 3.1.3 et B-1355/2011 du 5 octobre 2011 consid. 4.1.4 et les réf. cit.).
Il convient en premier lieu de constater que le recourant ne conteste à juste titre pas s’être rendu fautif de manquements aux règles d’indépendance en apparence. En effet, ainsi que l’a relevé l’autorité inférieure, il apparaît, à la lecture des inscriptions figurant au registre du commerce, que le recourant siégeait au conseil d’administration de J. SA depuis le 27 juin 1997 dont il était en outre, selon son annonce à l’ASR, membre de la direction et collaborateur de révision. Le registre du commerce témoigne par ailleurs qu’il a fonctionné en qualité d’administrateur d’au moins huit
sociétés si l’on ne tient pas compte de E.
SA pour laquelle il
n’existe plus de documents (A. SA, en liquidation, du 10 juin 1994
au 13 mars 2007 ; B.
SA, du 19 février 1993 au 18 septembre
2009 ; C. SA depuis le 10 octobre 1996 ; D. du 17 janvier 1996 jusqu’à la radiation de la société le 21 juin 2007 ; F. SA, en liquidation, du 27 mars 1997 au 21 juin 2012 ; G. SA depuis le 16 décembre 1996 ; H. SA depuis le 4 juin 1996 ; I. SA depuis le 25 janvier 1994) dans lesquelles J. SA a agi en qualité
d’organe de révision (pour A. SA, en liquidation, du 4 juillet 2007 au 13 mars 2007 ; pour B. SA, du 1er juillet 1997 au 18 septembre
2009 ; pour C.
SA du 11 août 1997 au 11 juin 2012 ; pour
D. du 13 octobre 1997 au 21 juin 2007 ; pour F. SA, en
liquidation, du 9 juillet 1997 au 21 juin 2012 ; pour G.
SA du
15 juillet 1997 au 21 mars 2012 ; H. SA 8 août 1997 au 27 juin
20012 ; pour I. SA du 22 septembre 1997 au 29 octobre 2008). Ces faits sont manifestement de nature à donner à un observateur moyen se fondant sur son expérience générale de la vie l’impression d’un rapport de dépendance.
Il sied ensuite d’examiner si le comportement fautif du recourant s’avère suffisamment grave pour remettre en question la garantie d’une activité de révision irréprochable. En cela, le Tribunal de céans se doit de respecter le pouvoir d’appréciation dont l’ASR bénéficie lorsqu’elle soupèse les conséquences des manquements d’un réviseur sur sa réputation ou sur la garantie d’une activité de révision irréprochable qu’il doit offrir (cf. supra consid. 4.3).
Le recourant reproche à l’autorité inférieure d’avoir pris en compte des faits vieux de plus de dix ans, contrairement à la jurisprudence du Tribunal fédéral, invitant le Tribunal de céans à écarter tous les éléments de fait antérieurs au 15 août 2004. De son côté, l’autorité inférieure déclare n’avoir jamais pris en considération des manquements remontant à 2002 dans son appréciation. Elle reconnaît que les manquements de plus de dix ans ne peuvent pas être pris en compte dans l’appréciation de la réputation irréprochable, expliquant toutefois avoir uniquement exposé, par souci d’exhaustivité, les périodes posant problème en termes d’indépendance. Elle a précisé que les manquements susceptibles d’être pris en considération, soit à partir de 2004, s’avèrent suffisamment graves et ont été commis sur une période suffisamment longue pour justifier le retrait ainsi que sa durée.
Le principe de la proportionnalité (cf. supra consid. 4.3) garantit notamment qu’un comportement fautif ne peut être reproché éternellement. Même si l’art. 17 LSR ne contient aucune indication relative à la prescription, il n’en demeure pas moins que l’écoulement du temps depuis la commission des actes incriminés joue un rôle s’agissant d’apprécier si ces actes influencent toujours la réputation de manière défavorable. En effet, les violations des obligations constatées remontant à un certain temps portent évidemment une atteinte moins importante à la
réputation que des manquements récents. Sur cette base, le Tribunal fédéral a considéré que des manquements aux dispositions du droit de la révision n’ayant pas fait l’objet d’une condamnation pénale et qui remontent à bien plus de dix ans (« weit mehr als zehn Jahre ») ne peuvent en principe plus être opposés au réviseur ou expert-réviseur concerné, en tout cas lorsque celui-ci a depuis lors exercé son activité professionnelle de manière non critiquable (cf. arrêts du TF 2C_591/2010 du 15 mars 2011 consid. 4 et 2C_834/2010 consid. 6.2.4).
En l’espèce, il ressort de la décision entreprise que l’autorité inférieure a relevé l’existence de situations problématiques sous l’angle de l’indépendance à partir de juillet 1997 et de rapports de révision depuis 2002. Si elle déclare dans sa réponse ne pas avoir retenu les rapports antérieurs à 2004 dans son appréciation, elle ne le précise cependant pas dans sa décision. De ce fait et puisque son obligation d’établir les faits d’office ne porte que sur ceux s’avérant décisifs pour l’issue du litige (cf. supra consid. 3.1), le recourant pouvait logiquement imaginer que tous les faits exposés dans la décision ont été pris en compte. Quoi qu’il en soit, la jurisprudence précitée du Tribunal fédéral (arrêts 2C_591/2010 et 2C_834/2010) n’exclut pas de manière absolue la prise en compte de tout manquement remontant à plus de dix ans ; elle recommande uniquement d’écarter ceux n’ayant pas fait l’objet d’une condamnation pénale et se révélant bien plus anciens que dix ans, en tout cas lorsque l’intéressé a depuis lors exercé son activité professionnelle sans faire l’objet d’aucune critique. In casu, on ne saurait manifestement considérer que le recourant aurait exercé son activité de manière irréprochable au cours des dernières années ; au contraire, il apparaît que les situations problématiques, qui ont pris naissance plus de dix ans avant l’ouverture de la procédure de l’autorité inférieure, ont toutes sans exception perduré de nombreuses années et, pour certaines, jusqu’en 2012 (A. SA, en liquidation : du 4 juillet 1997 au 13 mars 2007 ; B. SA : du 1er juillet 1997 au 18 septembre 2009 ; C. SA : du 11 août 1997 au 11 juin 2012 ;
D. : du 13 octobre 1997 au 21 juin 2007 ; F.
SA, en
liquidation : du 9 juillet 1997 au 21 juin 2012 ; G. SA : du 15 juillet 1997 au 21 mars 2012 [opting out] ; H. SA : du 8 août 1997 au
27 juin 2012 [opting out] ; I.
SA : du 22 septembre 1997 au
29 octobre 2008 [opting out]). Aussi, en application de la jurisprudence précitée de la Haute Cour, les violations des règles sur l’indépendance antérieures à 2004 peuvent en réalité également être prises en considération dans l’examen de la réputation du recourant. Cela étant, il faut bien reconnaître qu’en l’occurrence, ce point s’avère finalement sans réelle portée dans l’appréciation dès lors que les manquements récents
pèsent sensiblement plus lourd que les violations les plus anciennes ; aussi, il convient, sous cet angle, d’accorder une importance particulière non pas à la naissance des mandats litigieux - soit la participation du recourant aux conseils d’administration de l’organe de révision et des sociétés révisées - plus de dix ans avant l’ouverture de la procédure mais bien au fait que ces mandats ont tous, sans exception, perduré durant de nombreuses années pour prendre fin entre 2007 et 2012 (cf. infra consid. 6.8 pour l’appréciation).
Sur le vu de ce qui précède, force est de constater que les violations des règles sur l’indépendance en apparence antérieures à 2004, soit dix ans avant l’ouverture de la procédure par l’autorité inférieure, peuvent être prises en considération dans l’appréciation du caractère irréprochable de la réputation du recourant mais que leur influence s’avère en réalité sensiblement relativisée.
Le recourant estime que l’autorité inférieure a fait une application excessive de l’art. 728 CO, considérant que toutes les sociétés litigieuses étaient soumises au contrôle restreint voire en situation d’opting out. Il déclare que l’art. 729 CO s’avérait donc applicable. Il explique en substance que, selon la volonté du législateur, même si les critères énoncés à l’art. 728 CO doivent être pris en considération dans le cadre du contrôle restreint, il y a lieu d’apprécier de manière différenciée les règles sur l’indépendance selon que l’on est en présence d’un contrôle ordinaire ou d’un contrôle restreint. Comme exposé précédemment (cf. supra consid. 4.2), les exigences en matière d’indépendance de l’organe de révision, en principe, s’équivalent s’agissant de révision ordinaire et de révision restreinte ; cela reste valable même si le législateur a renoncé à établir, pour la révision restreinte, un catalogue de situations non compatibles avec l’indépendance de l’organe de révision identique à celui non exhaustif de l’art. 728 al. 2 CO concrétisant les détails de l’indépendance requise (cf. arrêts du TAF B-7872/2015 consid. 3.5.7, B-2632/2014 du 15 décembre 2015 consid. 3.2.1 s. et B-4868/2014 du 8 octobre 2015 consid. 5.5). Ainsi, les situations énumérées à l’art. 728 al. 2 CO ont valeur de référence pour la révision restreinte également. Les motifs d’incompatibilité énumérés s’avèrent en effet tout aussi importants pour l’organe de révision effectuant un contrôle restreint s’il ne veut pas donner l’impression d’une dépendance de fait (cf. Message du 23 juin 2004 concernant la modification du code des obligations [obligation de révision dans le droit des sociétés] et la loi fédérale sur l’agrément et la surveillance des réviseurs, FF 2004 3745, 3801 ; arrêt 2C_927/2011 consid. 3.5.1 ; arrêt B-7872/2015 consid. 3.5.7). La jurisprudence l’a notamment reconnu
s’agissant d’une relation étroite entre la personne qui dirige la révision et l’un des membres du conseil d’administration ou un actionnaire important (cf. arrêt 2C_927/2011 consid. 3.5.1 ; arrêt B-4868/2014 consid. 5.5.2 s.) ainsi que pour la double fonction dans le conseil d’administration de la société révisée et dans son organe de révision (cf. arrêt B-2632/2014 consid. 3.2.2) ou encore en lien avec une participation directe ou indirecte du réviseur procédant à la révision restreinte dans la société révisée (cf. arrêt 2C_927/2011 consid. 3.5). Il convient en outre de souligner qu’EXPERTsuisse considère également que les motifs d’incompatibilité de l’art. 728 al. 2 CO sont valables aussi bien pour la révision ordinaire que la révision restreinte, le communiquant de la sorte à ses membres (cf. http://expertsuisse.ch/dynasite.cfm?dsmid=506722&cmdbot = cnews_news_news_viewdet&id=2282&skipfurl=1, visité le 06.06.2016 ; cf. également arrêt B-7872/2015 consid. 3.5.7). Les exigences en matière d’indépendance sont toutefois certes nettement moins sévères sur un point essentiel : pour répondre à la nécessité qu’ont les petites et moyennes entreprises de s’adresser à un seul prestataire, l’al. 2 prévoit explicitement que la collaboration à la tenue de la comptabilité ainsi que la fourniture d’autres prestations à la société soumise à un contrôle restreint est autorisée ; si le risque existe de devoir contrôler son propre travail, un contrôle sûr doit être garanti par la mise en place de mesures appropriées sur le plan de l’organisation et du personnel (cf. FF 2004 3745, 3801). Pour le reste, les exigences en matière d’indépendance ne s’avèrent pas moins sévères pour la révision restreinte. Compte tenu de ces considérations, on ne saurait reprocher à l’autorité inférieure d’avoir apprécié la situation du recourant à la lumière du catalogue de situations prévu à l’art. 728 al. 2 CO.
En outre, le recourant insiste sur le fait qu’il n’est pas intervenu dans la révision des comptes des huit sociétés concernées.
À teneur de l’art. 728 al. 3 CO mentionné plus haut (cf. supra consid. 4.2), si l’organe de révision est une société de personnes ou une personne morale, les dispositions relatives à l’indépendance s’appliquent également aux membres de l’organe supérieur de direction ou d’administration et aux autres personnes qui exercent des fonctions décisionnelles. Cette disposition vise en particulier les membres de la direction (cf. FF 2004 3745, 3795). Selon les règles professionnelles usuelles, les exigences d’indépendance doivent être étendues à toutes les personnes qui peuvent influencer directement ou indirectement les prestations de révision ; il s’agit notamment du supérieur direct du réviseur responsable ainsi que des membres de la direction et du conseil
d’administration de l’organe de révision (cf. PETER/CAVADINI/DUNANT, in : Commentaire romand, Code des obligations II, 2008, art. 728 n° 49). L’art. 22 des directives sur l’indépendance 2007 d’EXPERTsuisse dispose que l’affiliation au sein du conseil d’administration auprès d’un client soumis à audit ou d’une société proche est incompatible avec le principe de l’indépendance et n’est par conséquent pas admise ; cela vaut pour tous les collaborateurs de l’entreprise de révision ainsi que pour le cercle familial direct des membres de l’équipe de réviseurs et les personnes qui peuvent exercer une influence sur la prestation d’audit. Il découle de ce qui précède que les exigences relatives à l’indépendance ne se limitent pas aux personnes ayant exécuté les travaux de révision mais s’étendent à toutes les personnes disposant de la capacité de les influencer.
Contrairement au droit actuel qui souligne expressément l’importance de l’indépendance en apparence tout en dressant un catalogue détaillé et concret de situations incompatibles avec cette dernière, l’ancien droit n’envisageait pas explicitement une telle exigence ; cette notion se trouvait néanmoins déjà reconnue comme composante de celle d’indépendance (cf. arrêt du TAF B-739/2011 du 6 septembre 2012 consid. 3.2.4 ; ATF 131 III 38 consid. 4.2.1 et les réf. cit. ; Message concernant la révision du droit des sociétés anonymes du 23 février 1983, FF 1983 II 757, 867 ; WATTER/ RAMPINI, BSK-Revisionsrecht, art. 728 n° 12). L’ancien art. 727c CO (dans la teneur du 4 octobre 1991 [RO 1992 733, 773] en vigueur du 1er juillet
1992 au 31 décembre 2007 [RO 2007 4791, 4838]) prescrivait que les réviseurs devaient être indépendants du conseil d’administration et d’un éventuel actionnaire disposant de la majorité des voix ; en particulier, ils ne pouvaient être au service de la société soumise à révision ni exécuter pour elle des travaux incompatibles avec leur mandat de vérification. La dépendance pouvait naître d’une participation, de rapports hiérarchiques ou d’autres liens, ainsi que des rapports économiques résultant du fait que le conseil d’administration de la société révisée et celui de son organe de révision étaient identiques (cf. ATF 123 III 31 consid. 2). En outre, l’art. 272d aCO, en sa teneur du 4 octobre 1991 (RO 1992 733, 785) en
vigueur du 1er juillet 1992 au 31 décembre 2007 (RO 2007 4791, 4838),
prévoyait également que, lorsque l’organe de révision était une société commerciale ou coopérative, aussi éligible à l’organe de révision (al. 1), l’exigence d’indépendance valait aussi bien pour elle-même que pour toutes les personnes qui procédaient à la vérification (al. 3). Les personnes visées par cette disposition - et devant donc respecter les règles sur l’indépendance - se présentaient déjà non seulement comme celles participant de manière directe à la révision des comptes mais également comme celles pouvant, en raison de leur position hiérarchique, influencer
les personnes participant à la révision (cf. ROLF WATTER, in : Basler Kommentar zum Obligationenrecht II, 2002, art. 727c n° 9). Les directives sur l’indépendance de 2001 de la Chambre fiduciaire (publiées in : BF 2005
Réglementation et autoréglementation des banques, bourses, négociants, fonds de placement, assurance et marchés financiers en Suisse, 58C-3) retenaient à cet égard que le réviseur n’accepterait jamais d’assumer une fonction de direction ou de participation au processus de décision auprès d’un client soumis à l’audit ; il s’y trouvait de plus précisé que l’exercice d’une fonction de direction ou de participation au processus de décision (p. ex. membre du comité d’administration ou du conseil de fondation ou dans un comité d’audit, exercice d’une fonction opérationnelle, etc.) auprès d’un client soumis à l’audit ou de sociétés proches déterminantes (non clientes) était incompatible avec le principe de l’indépendance et par conséquent ne s’avérait pas admis. Cela valait - audelà de la définition de réviseur - pour tous les collaborateurs de la société de révision ainsi que pour le cercle familial direct de l’équipe de réviseurs et des personnes susceptibles d’exercer une influence sur la prestation de révision.
Il découle de ce qui précède que, aussi bien sous les dispositions entrées en vigueur le 1er janvier 2008 que celles les ayant précédées, l’indépendance en apparence doit être garantie par toutes les personnes susceptibles d’influencer les travaux de révision et non uniquement par celles y participant de manière directe.
En l’espèce, il ressort des inscriptions au registre du commerce que, d’une part, le recourant siège au conseil d’administration de J. SA depuis le 27 juin 1997, ayant en outre été administrateur unique du 12 janvier 2000 au 5 mai 2014 ; il s’est également annoncé à l’autorité inférieure en qualité de membre de la direction et collaborateur de révision de cette société. D’autre part, il a été membre du conseil d’administration de huit sociétés dans lesquelles J. SA a agi en qualité d’organe de révision (cf. supra consid. 5). S’il n’a pas exécuté lui-même les travaux de révision, il se trouvait néanmoins manifestement, en raison de sa position au sein de J. SA, en mesure d’exercer une influence dans le processus de révision. Le fait qu’il ait ou non participé activement aux révisions des sociétés dans lesquelles il siégeait également au conseil d’administration ne s’avère dans ce contexte pas pertinent. En sa qualité de membre du conseil d’administration tant de l’organe de révision que des sociétés révisées, le recourant devait respecter les règles sur l’indépendance en apparence malgré l’absence de toute participation
active aux travaux de révision, et ce aussi bien à la lumière des dispositions applicables depuis 2008 qu’auparavant.
Sur le vu de ce qui précède, on ne saurait critiquer l’autorité inférieure pour avoir constaté une violation des dispositions sur l’indépendance par le recourant nonobstant l’absence de toute participation active aux travaux de révision.
Le recourant allègue encore qu’il exerçait ses mandats d’administrateur à titre fiduciaire et n’avait jamais été intéressé aux résultats des sociétés. À cet égard, il y a lieu de rappeler que, d’une part, l’indépendance en apparence est considérée de manière objective du point de vue d’un observateur moyen se fondant sur son expérience générale de la vie, seule cette perspective permettant de garantir la crédibilité du contrôle des comptes aux yeux des tiers (cf. supra consid. 4.2) ; d’autre part, la loi ne prévoit pas d’exceptions autorisant l’exercice simultané de fonctions décisionnelles dans la société révisée et son organe de révision à condition d’adopter une structure particulière ou d’en informer les personnes concernées. La possibilité d’exclure le risque de dépendance par des mesures organisationnelles et personnelles n’existe que dans le cas de figure spécifique décrit à l’art. 729 al. 2 CO (cf. arrêt B-853/2011 consid. 4.3.2 ; FF 2004 3745, 3793 et 3801). En outre, l’absence d’un agissement par appât du gain ne constitue pas un élément décisif (cf. ATAF 2008/49 consid. 4.3.1). Pour ces motifs, le fait que le recourant n’agît qu’à titre fiduciaire sans être intéressé aux résultats des sociétés s’avère impropre à écarter l’impression de dépendance découlant de sa position au sein des sociétés révisées.
Se plaignant d’une violation de l’art. 17 LSR, le recourant souligne qu’avant l’entrée en vigueur de la LSR et de l’OSRev, il n’existait aucune procédure d’agrément pour les réviseurs et les experts-réviseurs ; seule était applicable l’ordonnance du 15 juin 1992 sur les qualifications professionnelles des réviseurs particulièrement qualifiés (RO 1992 1210) qui ne prévoyait aucunement qu’un expert ou un expert-réviseur dût respecter le principe d’indépendance ni jouir d’une réputation irréprochable. À ses yeux, si l’exigence d’indépendance de l’organe de révision existait avant l’introduction de la LSR, sa violation ne conduisait nullement, jusqu’au 1er septembre 2007, à interdire à un réviseur ou un expert-réviseur d’exercer sur le marché de la révision. Il en déduit que les manquements aux règles d’indépendance ayant pris naissance avant le 1er septembre 2007 - date de l’entrée en vigueur de la loi et de l’ordonnance - ne devraient pas être pris en considération sous l’angle de
la nécessité d’un retrait de l’agrément selon le droit actuel ; de même, des situations régularisées avant l’entrée en vigueur du nouveau droit ne devraient pas être prises en compte dans l’examen de la réputation d’un expert-réviseur. Or, il appert d’emblée que la jurisprudence du Tribunal fédéral et du Tribunal administratif fédéral comprend de nombreuses affaires dans lesquelles des manquements antérieurs à l’entrée en vigueur de la LSR ont été pris en considération (cf. notamment arrêt du TAF B-7348/2009 du 3 juin 2010 confirmé par l’arrêt 2C_591/2010 ; arrêt 2C_834/2010 ; arrêts du TAF B-2765/2013 du 20 mars 2014, B-5065/2011 du 3 mai 2012, B-1355/2011 et B-6373/2010 du 20 avril 2011). Rien ne justifie de s’écarter de cette jurisprudence parfaitement conforme à la volonté du législateur. En effet, le fait que les violations constatées des règles sur l’indépendance ne pouvaient manifestement pas, avant l’entrée en vigueur de la LSR, conduire au retrait d’un agrément qui n’existait pas ne fait pas obstacle à leur prise en considération dans le cadre de la présente procédure. D’une part, la réputation irréprochable présuppose d’une manière toute générale des compétences professionnelles et un comportement correct dans les affaires, soit le respect du droit de la révision, du droit civil et pénal, ainsi que du principe de la bonne foi (cf. supra consid. 4.1). D’autre part, l’examen du respect de la réputation irréprochable ainsi que la garantie d’une activité de révision irréprochable poursuit un but préventif (« garantie ») et non répressif la tâche de l’autorité consistant uniquement à évaluer les risques futurs (cf. ATAF 2010/39 consid. 4.1.4) ; l’ASR se doit ainsi de rechercher si, en raison d’événements et de faits passés, les exigences précitées se trouvent toujours remplies ; ensuite, elle déterminera le pronostic susceptible d’être posé à ce sujet pour l’avenir (cf. ATF 129 II 438 consid. 3.3.1). La pertinence de ces critères ne se révèle ainsi pas liée aux conséquences que les manquements pouvaient avoir sur l’activité professionnelle du réviseur ou de l’expert-réviseur concerné. Dans le but d’évaluer les risques que des violations similaires soient encore commises à l’avenir, c’est de toute évidence la commission d’actes répréhensibles qui s’avère pertinente, non pas le point de savoir s’ils pouvaient déjà conduire à une interdiction d’exercer. En l’espèce, ainsi que cela a été exposé précédemment (cf. supra consid. 6.1), la situation de dépendance en apparence mise en place par le recourant se présente, tant à la lumière de l’art. 727d aCO qu’en vertu de l’art. 728 CO comme une violation des règles sur l’indépendance de l’organe de révision. Il convient de tenir compte de ce seul fait dans le cadre de l’appréciation de la réputation et de la garantie d’une activité irréprochable du recourant, indépendamment des conséquences qu’il pouvait avoir. Pour le même motif, le fait que certains mandats aient pris fin avant l’entrée en vigueur des nouvelles
dispositions ne s’avère pas pertinent dans ce contexte (sur l’effet de l’écoulement du temps, cf. infra consid. 6.7).
En outre, le recourant souligne que le fait qu’il ait spontanément rétabli une situation conforme au droit bien avant le début de la procédure confirme qu’il a parfaitement conscience de la portée des règles sur l’indépendance en apparence. Il observe que plus aucun manquement ne peut lui être reproché depuis la régularisation de la dernière situation litigieuse en juin 2012. Il remarque que deux ans supplémentaires amèneraient à quatre années le temps nécessaire au rétablissement de sa réputation irréprochable, ce qu’il qualifie d’excessif. Il déclare ne pas voir en quoi le pronostic futur pourrait être défavorable. Par ailleurs, il reproche le caractère répressif de la mesure prononcée. Le recourant allègue encore que la régularisation des situations litigieuses ne dépendait pas seulement de sa volonté.
Pour ce qui est du rétablissement d’un état conforme au droit, il sied de rappeler que son influence favorable ne s’avère pas systématique (cf. supra consid. 4.3). L’élément déterminant consiste à savoir si les conditions d’agrément sont à nouveau remplies pour l’avenir. Selon la jurisprudence, après qu’un réviseur ou un expert-réviseur a renoncé à un mandat contraire aux dispositions sur l’indépendance, on ne saurait le nier au motif que l’indépendance de l’organe de révision ainsi que les intérêts qu’ils protègent seraient menacés (cf. arrêt 2C_125/2015 consid. 5.3.1). En l’espèce, l’ensemble des mandats litigieux ont pris fin entre le 13 mars 2007 et le 27 juin 2012, soit avant l’ouverture de la procédure par l’ASR le 20 février 2013. Cela étant, il n’apparaît pas que le recourant aurait luimême agi en ce sens puisqu’il déclare qu’il était tributaire de la décision des actionnaires ; il ne se prévaut en outre pas d’une quelconque volonté de mettre un terme à une situation qu’il savait contraire aux règles sur l’indépendance. Or, s’il appartient effectivement en premier lieu au conseil d’administration d’une société de mettre un terme à une violation des règles sur l’indépendance (cf. WATTER/RAMPINI, BSK-OR II, art. 728a n° 69 ; PETER/CAVADINI/DUNANT, op. cit., art. 728 n° 3 ; ancien droit : ATF 123 V 161, 166 consid. 3.b.dd), l’organe de révision ne saurait évidemment se contenter d’attendre que celui-ci prenne les mesures adéquates. Au contraire, il a en tout temps le devoir de renoncer à son mandat dès lors qu’il n’est plus ou n’apparaît plus comme étant indépendant. Cette obligation existe donc même en cours de mandat (cf. WATTER/RAMPINI, BSK-OR II, 2012, art. 728 n° 67 ; PETER/CAVADINI/
DUNANT, op. cit., art. 728 n° 4 ; ancien droit : ATF 123 V 161 consid. 3.b.dd). Aussi, le recourant ne saurait se prévaloir du retard pris
par les sociétés révisées pour prendre les mesures adéquates. En raison de l’importance fondamentale de l’indépendance de l’organe de révision, il lui incombait de prendre sans tarder les mesures nécessaires à sa garantie, fût-ce de démissionner. De surcroît, il disposait, en sa qualité d’administrateur des sociétés révisées, de la faculté de requérir la radiation correspondante au registre du commerce (art. 932a CO). Or, rien n’indique que le recourant aurait tenté d’entreprendre quoi que ce soit ; il apparaît au contraire qu’il s’est contenté d’attendre que ces mesures soient prises par d’autres. Sur la base de ce constat, il faut bien reconnaître, avec l’autorité inférieure et n’en déplaise au recourant, que celui-ci n’a effectivement pas saisi toute la portée des règles sur l’indépendance. Compte tenu de ces éléments, les circonstances du rétablissement d’un état conforme au droit ne peuvent en conséquence être appréciées de manière particulièrement favorable au recourant.
Le recourant critique le fait que l’autorité inférieure n’ait pas tenu compte de l’écoulement du temps depuis les dernières situations litigieuses. Il est vrai qu’il ne ressort pas expressément de la décision attaquée que l’ASR aurait formellement pris en compte l’écoulement du temps comme élément favorable au recourant. Cela étant, l’ASR y a indiqué qu’elle n’avait pas connaissance d’autres violations des dispositions légales ou réglementaires, ni d’actes de défaut de biens ou jugement à l’encontre du recourant et que les violations constatées avaient toutes été régularisées, notant que ces éléments étaient évidemment pris en compte favorablement dans l’appréciation de la réputation du recourant ; aussi, elle a tenu explicitement compte d’éléments en faveur du recourant. En ce qui concerne précisément l’écoulement du temps, elle a par ailleurs souligné le fait que les violations incriminées, qu’elle a qualifiées de graves, avaient perduré jusqu’à récemment ; en effet, les dernières situations litigieuses ont été régularisées à la fin du mois de juin 2012, soit seulement environ huit mois avant l’ouverture de son enquête. De plus, elle a relevé que la fin des manquements n’apparaissait manifestement pas être le fruit d’une réflexion sur la question de l’indépendance, le recourant qualifiant d’ailleurs toujours les violations de manquements purement formels. Il s’ensuit que l’autorité inférieure a pris en considération l’écoulement du temps sans toutefois lui accorder un poids déterminant dans l’appréciation. Cela ne saurait être critiqué compte tenu des circonstances dans lesquelles s’inscrit la présente procédure. En effet, le temps écoulé s’avère tout d’abord relativement modeste au regard de la durée des manquements. En outre, la nature des arguments apportés par le recourant tant dans le cadre de la procédure auprès de l’autorité inférieure que devant le Tribunal de céans témoigne qu’il n’a à ce jour
toujours pas saisi la portée des règles sur l’indépendance ; aussi, on ne peut pas considérer que le temps écoulé aurait été véritablement mis à profit de sorte que le risque de nouvelles violations dans le futur s’en verrait réduit de manière significative. Par voie de conséquence, s’il constitue indubitablement un élément à décharge, force est cependant de constater avec l’autorité inférieure qu’il n’influence guère l’appréciation de la réputation du recourant.
Compte tenu de ce qui précède, il convient de retenir, s’agissant d’apprécier la gravité du comportement du recourant, qu’il a, pendant de nombreuses années et jusqu’en juin 2012, contrevenu aux règles sur l’indépendance dans le cadre de huit mandats de révision : il y a en effet exercé simultanément la fonction d’administrateur au sein de J. SA, organe de révision, et des sociétés révisées. En outre, il n’a entrepris activement aucune démarche en vue de faire cesser les manquements alors qu’il en disposait de la faculté. De plus, les arguments énoncés par le recourant dans le cadre de la présente procédure témoignent du fait qu’il méconnaît toujours les règles d’indépendance (en particulier en apparence), les exigences qui en découlent et leur importance dans le cadre de la révision ; dans ce contexte, le fait qu’il n’ait pas participé activement aux travaux de révision et qu’il n’agît qu’à titre fiduciaire sans être intéressé aux résultats des sociétés ne s’avère en effet pas pertinent dès lors que l’indépendance en apparence doit également être garantie. D’ailleurs, le rétablissement d’un état conforme au droit n’est, ainsi que l’a relevé à juste titre l’autorité inférieure, manifestement pas le fruit d’une réflexion sur les règles de l’indépendance puisque le recourant a attendu que les sociétés révisées prennent elles-mêmes les mesures qui s’imposaient alors qu’il lui incombait d’agir. De plus, l’écoulement du temps doit être relativisé, d’une part, en raison de sa modeste durée et, d’autre part, parce que les arguments énoncés par le recourant dans le cadre de la procédure témoignent du fait qu’il méconnaît toujours les règles d’indépendance et les exigences qui en découlent. Sur le vu de l’ensemble de ces considérations, il y a lieu de retenir, avec l’autorité inférieure, que cette faute porte gravement atteinte à sa réputation. En conclusion, force est donc de constater que le recourant n’a pas pris au sérieux les exigences légales et réglementaires en matière d’indépendance alors qu’il lui incombait de veiller à leur respect et de prendre les mesures nécessaires dans le cas contraire ; compte tenu de la gravité de la faute ainsi que son comportement durant la présente procédure - consistant à nier ladite gravité - il ne peut être attesté, en l’état actuel, qu’il bénéficie d’une réputation irréprochable et offre la garantie d’une activité de révision
irréprochable. Le retrait de l’agrément prononcé par l’ASR est ainsi justifié. Partant, on ne saurait considérer qu’il revête un caractère répressif.
Il convient encore de déterminer si le retrait pour une durée de deux ans s’avère conforme au principe de la proportionnalité. À cet égard, le recourant avance que ce principe commanderait de ne pas lui retirer son agrément ; il estime que - eu égard à l’écoulement du temps - sa réputation a largement eu le temps de recouvrer son caractère irréprochable et que le but visé par l’art. 17 LSR est déjà atteint. Il déclare que la violation de la proportionnalité ressort sans équivoque de la comparaison du présent cas avec celui ayant fait l’objet de l’arrêt B-853/2011 du 27 juillet 2012 dont il tire que le retrait de son agrément n’est à ce jour pas nécessaire.
La jurisprudence a admis que le retrait de l’agrément des réviseurs ne disposant pas d’une réputation irréprochable et n’offrant pas la garantie d’une activité de révision irréprochable contribuait à accroître la confiance des parties prenantes et des personnes intéressées dans la qualité et la crédibilité des comptes et de la révision (cf. arrêt du TF 2C_505/2010 du 7 avril 2011 consid. 4.3 ; arrêts du TAF B-2807/2008 du 19 août 2008
consid. 5.2.4 et B-2440/2008 du 16 juillet 2008 consid. 6.3). Aussi, contrairement à l’avis du recourant, la mesure en cause s’avère indubitablement propre à atteindre cet objectif et ne saurait être réduite à une décision purement répressive.
L’art. 17 al. 1, 2e phrase, LSR qui se présente comme concrétisation spécifique du principe de la proportionnalité, prescrit que, lorsque la personne concernée est en mesure de régulariser sa situation, l'autorité de surveillance lui adresse préalablement une commination de retrait. À contrario, l’absence de menace n’est admissible que lorsque la situation
ne peut pas être régularisée (cf. arrêt 2C_125/2015 consid. 5.3 ; voir aussi supra consid. 6.6). Dans cet arrêt, le Tribunal fédéral a considéré que la commination s’imposait en raison des circonstances particulières de l’espèce ; il a notamment souligné que l’expert-réviseur concerné n’avait violé les règles sur l’indépendance que dans le cadre d’un seul mandat, que ni l’ASR ni le Tribunal administratif fédéral n’avaient invoqué que le recourant avaient violé les dispositions sur l’indépendance dans le cadre d’autres mandats ou qu’il exécutait d’autres mandats dans une constellation similaire de telle sorte que le risque existait que les règles sur l’indépendance y soient également violées. En l’espèce, le recourant a violé les règles sur l’indépendance en apparence dans le cadre de huit mandats durant une période s’étendant sur environ quinze ans. De plus, il n’a pas lui-même mis un terme aux mandats litigieux alors qu’il était en mesure de le faire, se déclarant - à tort - tributaire des décisions des actionnaires. Il a en outre largement insisté sur son absence d’implication concrète dans les rapports de révision ou dans les activités des sociétés révisées, méconnaissant la portée des règles sur l’indépendance en apparence. Aussi, il est valablement permis de craindre de nouvelles violations des règles sur l’indépendance de sorte que les conditions devant être remplies en vue d’une commination de retrait précisées dans la jurisprudence du Tribunal fédéral ne se révèlent in casu pas remplies contrairement à ladite affaire.
En outre, dès lors que les manquements commis par le recourant ont été légitimement qualifiés de graves (cf. supra consid. 6.8), un avertissement écrit, possible depuis le 1er janvier 2015 selon l’art. 17 al. 1 LSR, s’avérerait de toute façon exclu, même si cette disposition était applicable in casu (cf. arrêt B-4868/2014 consid. 6.2.5). En outre, la fixation de la durée du retrait pour des violations moyennement graves d’un ou deux ans relève de l’appréciation de l’autorité inférieure (cf. arrêt B-4868/2014 consid. 6.2.5). L’évaluation de l’autorité inférieure sur ce point n’apparaît pas critiquable. En particulier, il est établi que le recourant ne saisit pas pleinement la portée des règles de l’indépendance et la gravité des actes qui lui sont reprochés, ce qui doit être apprécié comme un risque non négligeable que de tels actes se reproduisent. Aussi, une mesure moins sévère n’entre pas en considération. De plus, les conséquences administratives d'un défaut de réputation irréprochable et celles
pénales - d'un comportement délictueux recouvrent deux questions distinctes, cela même si un tel comportement peut engendrer des répercussions sur la réputation (cf. arrêt 2C_927/2011 consid. 3.2.2) ; en conséquence, le recourant ne saurait se voir infliger une amende sur la base de l’art. 39 al. 1 let. a LSR comme il le suggère. S’agissant de la
comparaison effectuée par le recourant avec l’affaire B-853/2011, il convient de rappeler que la réputation irréprochable et la garantie d’une activité de révision irréprochable ne peuvent être examinées qu’en fonction d’un cas d’espèce de sorte que, sans pour autant délier l’ASR de son devoir de veiller en particulier au respect du principe de la proportionnalité ainsi que d’exercer son pouvoir d’appréciation de manière cohérente et conforme au droit, des comparaisons de ce type ne sont que peu significatives (cf. arrêt B-6251/2012 consid. 4.2 et les réf. cit.). À cet égard, en ce qui concerne l’arrêt B-853/2011, il apparaît que la nature des manquements s’avère comparable à celle de la présente affaire puisque le recourant avait exercé pendant plusieurs années la fonction d’administrateur ou gérant de sociétés d’audit alors que ces sociétés agissaient comme organes de révision de diverses entreprises dont le recourant était l’administrateur ou le directeur ; cela étant, les périodes litigieuses avaient généralement duré entre un et trois ans à l’exception d’une situation ayant perduré six ans. Dans la présente affaire, les périodes litigieuses se sont étendues entre près de dix ans et quinze ans. Pour ce seul motif, on ne saurait, comme le demande le recourant, considérer que la gravité des manquements qui lui sont reprochés s’avère moindre de sorte à justifier de renoncer au retrait de son agrément. Les différences entre les deux affaires légitiment au contraire le retrait de son agrément pour une durée supérieure à celle d’une année confirmée dans l’arrêt B-853/2011.
S’agissant de la proportionnalité au sens étroit, il convient de mettre en balance l’intérêt du recourant à poursuivre son activité au cours des deux prochaines années et l’intérêt public à une exécution des travaux de révision conforme aux exigences légales. Or, d’une part, le recourant reste habilité à fournir des prestations autres que celles réservées par la loi aux experts-réviseurs et aux réviseurs (art. 2 let. a LSR ; cf. arrêt du TAF B-1723/2011 du 24 octobre 2012 consid. 5.3.4 confirmé dans l’arrêt du TF 2C_1182/2012 du 29 mai 2013 consid. 4.4) ; d’autre part, la fiabilité de la révision revêt un intérêt public majeur (cf. arrêts 2C_505/2010 consid. 4.3 et 2C_834/2010 consid. 6.2.3). Dans ces circonstances, si le retrait de l’agrément en qualité d’expert-réviseur influe certes sur les activités professionnelles du recourant, l’importance de l’atteinte ne l’emporte toutefois pas sur l’intérêt public poursuivi par la LSR. Le recourant ne le prétend d’ailleurs pas, se contentant de mentionner le caractère excessif du retrait.
Compte tenu de ces éléments, force est de constater que la mesure prononcée par l'ASR en vertu de l'art. 17 al. 1 LSR ne contrevient pas au principe de la proportionnalité.
Sur le vu de l’ensemble de ce qui précède, c’est à bon droit que l’autorité inférieure a considéré que le recourant ne satisfaisait pas à l’exigence d’une réputation irréprochable et lui a retiré l’agrément en qualité d’expert-réviseur pour une durée de deux ans. La décision entreprise ne viole pas le droit fédéral et ne traduit pas un excès ou un abus du pouvoir d’appréciation. Elle ne relève pas non plus d’une constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents et n’est pas inopportune (art. 49 PA). Dès lors, mal fondé, le recours doit être rejeté.
Les frais de procédure comprenant l’émolument judiciaire et les débours sont mis à la charge de la partie qui succombe (art. 63 al. 1 PA et art. 1 al. 1 du règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral [FITAF, RS 173.320.2]). L’émolument judiciaire est calculé en fonction de la valeur litigieuse, de l’ampleur et de la difficulté de la cause, de la façon de procéder des parties et de leur situation financière (art. 2 al. 1 1ère phrase FITAF).
En l’espèce, le recourant a succombé dans l’ensemble de ses conclusions. En conséquence, les frais de procédure, lesquels s’élèvent à 2’000 francs, doivent être intégralement mis à sa charge. Ils seront compensés par l’avance de frais de 2’000 francs versée par le recourant dès l’entrée en force du présent arrêt.
Vu l’issue de la procédure, le recourant n’a pas droit à des dépens (art. 64 PA).
Le recours est rejeté.
Les frais de procédure, d’un montant de 2’000 francs, sont mis à la charge du recourant. Ce montant sera compensé par l’avance de frais déjà versée de 2’000 francs dès l’entrée en force du présent arrêt.
Il n’est pas alloué de dépens.
Le présent arrêt est adressé :
au recourant (acte judiciaire) ;
à l’autorité inférieure (n° de réf. 102’337 ; acte judiciaire) ;
au Département fédéral de justice et police (acte judiciaire).
Le président du collège : La greffière :
Jean-Luc Baechler Fabienne Masson
La présente décision peut être attaquée devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par la voie du recours en matière de droit public, dans les trente jours qui suivent la notification (art. 82 ss, 90 ss et 100 LTF). Le mémoire doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signé. La décision attaquée et les moyens de preuve doivent être joints au mémoire, pour autant qu’ils soient en mains du recourant (art. 42 LTF).
Expédition : 19 juillet 2016
Bitte beachten Sie, dass keinen Anspruch auf Aktualität/Richtigkeit/Formatierung und/oder Vollständigkeit besteht und somit jegliche Gewährleistung entfällt. Die Original-Entscheide können Sie unter dem jeweiligen Gericht bestellen oder entnehmen.
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