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Bundesverwaltungsgericht Urteil C-1287/2011

Urteilsdetails des Bundesverwaltungsgerichts C-1287/2011

Instanz:Bundesverwaltungsgericht
Abteilung:Abteilung III
Dossiernummer:C-1287/2011
Datum:21.07.2011
Leitsatz/Stichwort:Annulation de la naturalisation facilitée
Schlagwörter : Tribunal; édéral; été; écision; épouse; ;autorité; époux; éclaration; Quot;; édure; écembre; ;intéressé; ément; évrier; ésomption; Suisse; être; était; érieur; étranger; égal; érieure; élément; écité; égale; édérale; ;arrêt; émoire; ;union; ;annulation
Rechtsnorm:-
Referenz BGE:-
Kommentar:
-

Entscheid des Bundesverwaltungsgerichts

B u n d e s v e r w a l t u n g s g e r i c h t

T r i b u n a l a d m i n i s t r a t i f f é d é r a l

T r i b u n a l e a m m i n i s t r a t i v o f e d e r a l e T r i b u n a l a d m i n i s t r a t i v f e d e r a l

Cour III C­1287/2011

A r r ê t d u 2 1 j u i l l e t 2 0 1 1

Composition Blaise Vuille (président du collège),

Elena Avenati­Carpani, Marianne Teuscher, juges, Fabien Cugni, greffier.

Parties A. ,

représenté par Me Guérin de Werra, avocat, recourant,

contre

Office fédéral des migrations (ODM),

Quellenweg 6, 3003 Berne, autorité inférieure.

Objet Annulation de la naturalisation facilitée.

Faits :

A.

A. , ressortissant égyptien né le 6 juillet 1971, a contracté mariage le 16 décembre 2000, à Vernayaz (VS), avec B. , citoyenne suisse née le 28 mars 1965 aucun enfant n'est issu de cette union. Après avoir vécu à l'étranger, les époux se sont établis en Suisse en date du 1er avril 2005. L'intéressé a été formellement mis au bénéfice d'une autorisation de séjour annuelle dans le canton du Valais le 18 avril 2005, valable jusqu'au 31 mars 2007, aux fins de pouvoir vivre auprès de sa conjointe.

B.

Le 28 mars 2007, A. a introduit une demande de naturalisation facilitée basée sur son mariage. Dans le cadre de l'instruction de cette demande, le requérant et son épouse ont contresigné, le 13 septembre 2007, une déclaration écrite aux termes de laquelle ils confirmaient vivre en communauté conjugale effective et stable, à la même adresse, et n'avoir aucune intention de se séparer ou de divorcer. L'attention des époux a en outre été attirée sur le fait que la naturalisation facilitée ne pouvait être octroyée lorsque, avant ou pendant la procédure de naturalisation, l'un des conjoints demandait le divorce ou la séparation ou que la communauté conjugale effective n'existait plus. Si cet état de fait était dissimulé, la naturalisation facilitée pouvait ultérieurement être annulée, conformément au droit en vigueur.

C.

Par décision du 6 février 2008, entrée en force le 9 mars 2008, l'ODM a accordé la naturalisation facilitée à A. , en vertu de l'art. 28 de la loi fédérale sur l'acquisition et la perte de la nationalité suisse du 29 septembre 1952 (LN, RS 141.0), lui conférant par là­même les droits de cité cantonal et communal de son épouse.

D.

Le 9 avril 2009, B. a déposé auprès du Tribunal civil de Sion une requête visant à interdire à son mari de s'approcher du domicile conjugal et de prendre contact avec elle. Elle a motivé sa requête par les violences verbales et menaces de plus en plus pressantes dont elle était l'objet de la part de son époux. Le même jour, le juge dudit tribunal a donné suite à cette requête, à titre de mesures préprovisionnelles urgentes.

Dans un courrier adressé à son épouse le 21 avril 2009, A. a

exprimé ses regrets au sujet de son comportement et lui a promis de ne plus l'importuner.

Dans le cadre de mesures protectrices de l'union conjugale, le juge du Tribunal civil de Sion a, par décision du 15 mai 2009, autorisé les époux à vivre séparés pour une durée indéterminée.

E.

Le 8 septembre 2009, l'ODM a annoncé à A. qu'il envisageait d'examiner s'il y avait lieu d'ouvrir, conformément à l'art. 41 LN, une procédure visant à l'annulation de la naturalisation facilitée octroyée le 6 février 2008, compte tenu du fait qu'il vivait séparé de son épouse depuis le 1er janvier 2009. L'intéressé a été invité à prendre position à ce sujet dans le cadre du droit d'être entendu.

Dans ses observations datées du 22 septembre 2009, A. a

exposé, entre autres, que cette séparation était la conséquence "de problèmes strictement personnels" avec son épouse, en assurant qu'il n'avait aucunement été dans son intention de commettre une quelconque fraude en matière de naturalisation.

F.

Par jugement du 4 mars 2010, devenu définitif le 20 avril 2010, le Tribunal civil de Sion a prononcé la dissolution par le divorce du mariage contracté par les époux le 16 décembre 2000.

G.

Le 22 décembre 2010, l'ODM a invité A.

à se déterminer sur

divers éléments ressortant du dossier de la procédure civile (dégradation de l'union conjugale depuis son arrivée en Suisse en 2005, intégration professionnelle difficile, comportement répréhensible envers son épouse ayant contraint la justice à prendre des meures d'interdiction à son endroit). L'office fédéral a également porté à la connaissance du prénommé que le dossier de la cause comprenait des pièces relevant de l'art. 27 al. 1 de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 (PA, RS 172.021), pièces desquelles il ressortait que le couple avait déjà connu de sérieuses difficultés avant le prononcé de la naturalisation facilitée.

Invité à se déterminer au sujet de ce courrier, A. s'est borné à transmettre à l'ODM, par pli daté du 6 janvier 2011, une copie de sa correspondance du 22 septembre 2009, ainsi qu'une copie de sa carte

d'agent de sécurité privée délivrée par les autorités valaisannes compétentes.

H.

Le 20 janvier 2011, l'autorité compétente du canton du Valais a donné son assentiment à l'annulation de la nationalité suisse conférée à A. le 6 février 2008.

I.

Par décision du 25 janvier 2011, l'ODM a prononcé ladite annulation, en retenant en substance que le couple que formait le prénommé avec B. avait connu de graves difficultés dès son retour en Suisse au mois d'avril 2005, soit près de trois ans avant le prononcé de la naturalisation facilitée, que l'intéressé n'avait à aucun moment contesté les allégations de son ex­épouse s'agissant du début et des causes de leurs problèmes conjugaux et qu'il n'avait jamais invoqué un fait extraordinaire postérieur à sa naturalisation qui aurait pu expliquer une rapide déliquescence de l'union conjugale. Par ailleurs, l'office fédéral s'est référé aux pièces communiquées au sens de l'art. 27 al. 1 PA. En outre, l'ODM a constaté que l'intéressé n'avait apporté aucun élément permettant de renverser la présomption de faits, fondée sur l'enchaînement des événements, que la naturalisation avait été obtenue frauduleusement. Il a donc estimé que l'octroi de la naturalisation facilitée s'était fait sur la base de déclarations mensongères et d'une dissimulation de faits essentiels, de sorte que les conditions requises par l'art. 41 LN étaient remplies.

J.

Par acte du 22 février 2011, A. a recouru contre cette décision devant le Tribunal administratif fédéral (ci­après: le Tribunal), en concluant implicitement à son annulation. Reconnaissant que sa vie de couple avait été affectée depuis son retour en Suisse en raison des difficultés rencontrées tant sur le plan professionnel que dans la vie quotidienne, le recourant a cependant fait valoir que "le temps de notre union allait bien au­delà du délai minimal imparti". En outre, il a affirmé que l'obtention de la nationalité suisse ne lui avait pas facilité les démarches pour trouver un emploi, ce qui avait entraîné "des tiraillements" au sein du couple et "des mouvements d'humeur, voire de colère" de sa part. Par ailleurs, il a soutenu que l'absence d'une descendance commune avait constitué un autre facteur de discorde entre les époux. De plus, le recourant a souligné que son intégration en Suisse était réussie, puisqu'il avait toujours respecté les us et coutumes, qu'il

n'avait commis aucun délit majeur et qu'il avait occupé plusieurs emplois à temps partiel. Il a ajouté qu'il disposait en ce moment d'un emploi régulier en tant qu'agent de sécurité auprès du Département valaisan de la Sécurité, des Affaires sociales et de l'Intégration, de sorte que son autonomie financière était assurée. Enfin, il a fait valoir qu'il ne pouvait en aucun cas retourner dans son pays d'origine, l'Egypte, vu la situation désastreuse qui y prévalait en ce moment. Cela étant, le recourant a vigoureusement réfuté l'affirmation contenue dans la décision querellée selon laquelle il avait introduit sa demande de naturalisation sur la base de déclarations mensongères. A l'appui de ses dires, il a produit un courrier que son ex­épouse avait adressé à l'ODM le 1er février 2011.

Le 6 avril 2011, A. a complété ses écritures par l'entremise de son conseil. Il a assuré pour l'essentiel qu'il s'était marié par amour dans l'espoir de fonder une union durable et non pas dans le but d'acquérir la nationalité suisse.

K.

Appelé à se prononcer sur le recours, l'ODM en a proposé le rejet par préavis du 26 avril 2011. Cette prise de position a été communiquée au recourant pour droit de réplique, par ordonnance du Tribunal du 4 mai 2011, à laquelle le recourant n'a donné aucune suite.

L.

Les divers autres arguments invoqués de part et d'autre dans le cadre de la procédure de recours seront examinés, si nécessaire, dans les considérants en droit ci­après.

Droit :

1.

1.1.

Sous réserve des exceptions prévues à l'art. 32 de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF, RS 173.32), le Tribunal, en vertu de l'art. 31 LTAF, connaît des recours contre les décisions au sens de l'art. 5 PA prises par les autorités mentionnées à l'art. 33 LTAF.

    1. En particulier, les recours contre les décisions de l'ODM en matière d'annulation de la naturalisation facilitée peuvent être déférées au Tribunal de céans qui statue comme autorité précédant le Tribunal

      fédéral (cf. art. 1 al. 2 LTAF en relation avec l'art. 83 let. b a contrario de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral [LTF, RS 173.110]).

    2. A moins que la LTAF n'en dispose autrement, la procédure devant le Tribunal est régie par la PA (cf. art. 37 LTAF).

    3. A._______ a qualité pour recourir (cf. art. 48 al. 1 PA). Son recours, présenté dans la forme et les délais prescrits par la loi, est recevable (cf. art. 50 et art. 52 PA).

2.

    1. Le recourant peut invoquer devant le Tribunal la violation du droit fédéral, y compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation, la constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents ainsi que l'inopportunité de la décision entreprise, sauf lorsqu'une autorité cantonale a statué comme autorité de recours (cf. art. 49 PA). Il en découle que le Tribunal n'a pas seulement à déterminer si la décision de l'administration respecte les règles de droit, mais également si elle constitue une solution adéquate eu égard aux faits (cf. ANDRÉ MOSER/MICHAEL BEUSCH/LORENZ KNEUBÜHLER, Prozessieren vor dem Bundesverwaltungsgericht, Helbing Lichtenhahn Verlag, Bâle 2008, ch. 2.149 ss).

    2. Selon la maxime d'office régissant la présente procédure (cf. art.

      62 al. 4 PA en relation avec l'art. 12 de la même loi), le Tribunal applique le droit d'office. Tenu de rechercher les règles de droit applicables, il peut s'écarter aussi bien des arguments des parties que des considérants juridiques de la décision querellée. Il en résulte que le Tribunal, pour autant qu'il reste dans le cadre de l'objet du litige, peut maintenir une décision en la fondant sur d'autres éléments de fait que ceux retenus par l'autorité inférieure (cf. sur ces questions, notamment PIERRE MOOR, Droit administratif, Berne 2002, vol. II, p. 264s., ch. 2.2.6.5 ATF 130 III 707 consid. 3.1 arrêt du Tribunal

      administratif fédéral C­6735/2007 du 20 août 2008 consid. 1.5).

    3. Dans son arrêt, l'autorité de recours prend en considération l'état de fait et de droit régnant au moment où elle statue (cf. ATAF 2007/41 consid. 2 et l'arrêt du Tribunal administratif fédéral A­2682/2007 du 7 octobre 2010 consid. 1.2 et 1.3).

3.

    1. En vertu de l'art. 28 al. 1 LN, le conjoint étranger d'un ressortissant suisse qui vit ou a vécu à l'étranger peut former une demande de naturalisation facilitée s'il vit depuis six ans en communauté conjugale avec le ressortissant suisse (let. a) et s'il a des liens étroits avec la Suisse (let. b).

    2. La notion de communauté conjugale dont il est question dans la loi sur la nationalité, en particulier à l'art. 27 al. 1 let. c et l'art. 28 al. 1 let. a LN, présuppose non seulement l'existence formelle d'un mariage ­ à savoir d'une union conjugale au sens de l'art. 159 al. 1 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC, RS 210) ­, mais implique, de surcroît, une communauté de fait entre les époux, respectivement une communauté de vie effective, fondée sur la volonté réciproque des époux de maintenir cette union (cf. ATF 135 II 161 consid. 2 et la jurisprudence citée).

      Une communauté conjugale au sens de l'art. 27 al. 1 let. c et de l'art. 28 al. 1 let. a LN suppose donc l'existence, au moment de la décision de naturalisation facilitée, d'une volonté matrimoniale intacte et orientée vers l'avenir (« ein auf die Zukunft gerichteter Ehewille »), autrement dit la ferme intention des époux de poursuivre la communauté conjugale au­delà de la décision de naturalisation facilitée. Il y a lieu de mettre en doute l'existence d'une telle volonté lorsque le mariage est dissous peu après l'obtention de la naturalisation facilitée par le conjoint étranger et que celui­ci se remarie ensuite dans un laps de temps rapproché. Dans ces circonstances, il y a lieu de présumer que la communauté conjugale n'était plus étroite et effective durant la procédure de naturalisation facilitée, la volonté réciproque des époux de poursuivre leur vie commune n'existant plus alors (cf. ATF 135 II précité, ibidem).

    3. La communauté conjugale telle que définie ci­dessus doit non seulement exister au moment du dépôt de la demande, mais doit subsister pendant toute la procédure jusqu'au prononcé de la décision sur la requête de naturalisation facilitée (cf. ATF 135 II précité consid. 2 et la jurisprudence citée l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_193/2010 du

  1. novembre 2010 consid. 2.2). Il sied de relever que le législateur

    fédéral, lorsqu'il a créé l'institution de la naturalisation facilitée en faveur du conjoint étranger d'un ressortissant suisse, avait en vue la conception du mariage telle que définie par les dispositions du Code civil sur le droit du mariage, à savoir une union contractée par amour en vue de la constitution d'une communauté de vie étroite (de toit, de table et de lit) au sein de laquelle les conjoints sont prêts à s'assurer mutuellement fidélité et assistance, et qui est envisagée comme durable, à savoir comme une communauté de destin (cf. art. 159 al. 2 et al. 3 CC ATF 124 III 52 consid. 2a/aa, 118 II 235 consid. 3b), voire dans la perspective de la création d'une famille (cf. art. 159 al. 2 CC in fine).

    Malgré l'évolution des mœurs et des mentalités, seule cette conception du mariage, communément admise et jugée digne de protection par le législateur fédéral, est susceptible de justifier ­ aux conditions prévues à l'art. 27 et l'art. 28 LN ­ l'octroi de la naturalisation facilitée au conjoint étranger d'un ressortissant helvétique. En facilitant la naturalisation du conjoint étranger d'un ressortissant suisse, le législateur fédéral entendait favoriser l'unité de la nationalité dans la perspective d'une vie commune se prolongeant au­delà de la décision de naturalisation (cf. ATF 135 II précité, ibidem). L'institution de la naturalisation facilitée repose en effet sur l'idée que le conjoint étranger d'un citoyen helvétique (à la condition naturellement qu'il forme avec ce dernier une communauté conjugale solide telle que définie ci­dessus) s'accoutumera plus rapidement au mode de vie et aux usages suisses qu'un étranger n'ayant pas un conjoint suisse, qui demeure, lui, soumis aux dispositions régissant la naturalisation ordinaire (cf. Message du Conseil fédéral relatif à la modification de la loi sur la nationalité du 26 août 1987, Feuille fédérale [FF] 1987 III 300ss, ad art. 26 et 27 du projet voir aussi les ATF 130 II 482 consid. 2 et 128 II 97 consid. 3a).

    4.

    1. Avec l'assentiment de l'autorité du canton d'origine, l'ODM peut, dans le délai prévu par la loi, annuler la naturalisation ou la réintégration obtenue par des déclarations mensongères ou par la dissimulation de faits essentiels et qui n'aurait pas été accordée si ces faits avaient été connus (art. 41 LN cf. également Message du Conseil fédéral relatif à un projet de loi sur l'acquisition et la perte de la nationalité suisse du 9 août 1951 [FF 1951 II 700/701, ad art. 39 du projet]).

      L'annulation de la naturalisation présuppose donc que celle­ci ait été obtenue frauduleusement, c'est­à­dire par un comportement déloyal et trompeur. A cet égard, il n'est pas nécessaire qu'il y ait eu fraude au sens du droit pénal. Il faut néanmoins que l'intéressé ait consciemment donné de fausses indications à l'autorité, respectivement qu'il ait laissé faussement croire à l'autorité qu'il se trouvait dans la situation prévue par l'art. 28 al. 1 let. a LN, violant ainsi le devoir d'information auquel il est appelé à se conformer en vertu de cette disposition (cf. ATF 135 II précité, ibidem voir également l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_387/2010 du 6 décembre 2010 consid. 2.1.1 et la jurisprudence citée). Lorsque le requérant déclare former une union stable avec son conjoint, alors qu'il envisage de divorcer ultérieurement, une fois obtenue la naturalisation facilitée, il n'a pas la volonté de maintenir une telle communauté de vie. Sa déclaration doit donc être qualifiée de mensongère. Peu importe, à cet égard, que son mariage se soit déroulé de manière harmonieuse (cf. l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_387/2010 précité, ibidem, et la jurisprudence citée).

    2. La nature potestative de l'art. 41 al. 1 LN confère une certaine latitude à l'autorité. Dans l'exercice de cette liberté, celle­ci doit s'abstenir de tout abus commet un abus de son pouvoir d'appréciation l'autorité qui se fonde sur des critères inappropriés, ne tient pas compte de circonstances pertinentes ou rend une décision arbitraire, contraire au but de la loi ou au principe de la proportionnalité (cf. notamment ATF 129 III 400 consid. 3.1, 116 V 307 consid. 2 et la jurisprudence citée).

      1. La procédure administrative fédérale est régie par le principe de la libre appréciation des preuves (art. 40 de la loi fédérale du 4 décembre 1947 de procédure civile fédérale [PCF, RS 273] applicable par renvoi de l'art. 19 PA). Par renvoi de l'art. 37 LTAF, ce principe prévaut également devant le Tribunal. L'appréciation des preuves est libre dans ce sens qu'elle n'obéit pas à des règles de preuve légales prescrivant à quelles conditions l'autorité devrait admettre que la preuve a abouti et quelle valeur probante elle devrait reconnaître aux différents moyens de preuve les uns par rapport aux autres. Lorsque la décision intervient ­ comme en l'espèce ­ au détriment de l'administré, l'administration supporte le fardeau de la preuve. Si elle envisage d'annuler la naturalisation facilitée, elle doit rechercher si le conjoint naturalisé a menti lorsqu'il a déclaré former une union stable avec son époux suisse comme il s'agit­là d'un fait psychique en relation avec des faits relevant de la sphère intime, qui sont souvent inconnus de

        l'administration et difficiles à prouver, il apparaît légitime que l'autorité s'appuie sur une présomption. Partant, si l'enchaînement rapide des événements fonde la présomption de fait que la naturalisation a été obtenue frauduleusement, il incombe alors à l'administré, en raison non seulement de son devoir de collaborer à l'établissement des faits (art. 13 al. 1 PA), mais encore de son propre intérêt, de renverser cette présomption (cf. ATF 135 II précité consid. 3).

      2. S'agissant d'une présomption de fait, qui ressortit à l'appréciation des preuves et ne modifie pas le fardeau de la preuve, l'administré n'a pas besoin, pour la renverser, de rapporter la preuve contraire du fait présumé, à savoir faire acquérir à l'autorité la certitude qu'il n'a pas menti il suffit qu'il parvienne à faire admettre l'existence d'une possibilité raisonnable qu'il n'ait pas menti en déclarant former une communauté stable avec son conjoint. Il peut le faire en rendant vraisemblable, soit la survenance d'un événement extraordinaire, susceptible d'expliquer une détérioration rapide du lien conjugal, soit l'absence de conscience de la gravité de ses problèmes de couple et, ainsi, l'existence d'une véritable volonté de maintenir une union stable avec son conjoint lorsqu'il a signé la déclaration (cf. ATF 135 II précité, ibidem, et les arrêts cités).

5.

A titre préliminaire, le Tribunal constate que les conditions formelles de l'annulation de la naturalisation facilitée prévues par l'art. 41 LN sont réalisées dans le cas particulier. En effet, la naturalisation facilitée

accordée le 6 février 2008 à A.

a été annulée par l'autorité

inférieure en date du 25 janvier 2011, soit avant l'échéance du délai péremptoire prévu par la disposition légale précitée, avec l'assentiment de l'autorité compétente du canton d'origine (Valais).

6.

Il reste dès lors à examiner si les circonstances d'espèce répondent aux conditions matérielles de l'annulation de la naturalisation facilitée résultant du texte de la loi, de la volonté du législateur et de la jurisprudence développée en la matière.

    1. Dans le cas particulier, l'autorité inférieure a retenu dans la décision querellée (cf. p. 4) que l'enchaînement des évènements fondait la présomption de fait qu'A. avait obtenu la naturalisation facilitée sur la base de déclarations mensongères, voire d'une dissimulation de faits essentiels, et que le prénommé n'avait apporté aucun élément

      permettant de renverser cette présomption ou même de la mettre simplement en doute.

      L'examen des faits pertinents de la cause, ainsi que leur déroulement chronologique relativement rapide depuis le dépôt de la demande de naturalisation facilitée, amènent le Tribunal à une conclusion identique.

    2. Ainsi, il ressort du dossier qu'A. a contracté mariage le 16 décembre 2000 avec une citoyenne suisse, qui travaillait en qualité de déléguée du Comité international de la Croix­Rouge (CICR), que les époux ont effectué ensuite divers séjours à l'étranger, avant de s'établir dans le canton du Valais le 1er avril 2005. Le 28 mars 2007, l'intéressé a introduit auprès de l'autorité compétente une requête visant à l'obtention de la naturalisation facilitée. Le 13 septembre 2007, il a cosigné avec son épouse la déclaration relative à la stabilité de leur union. Le 6 février 2008, il a été mis au bénéfice de la naturalisation facilitée. En décembre

      2008, A.

      a quitté le domicile conjugal, sur injonction de son

      épouse, en raison de la dégradation de la situation du couple depuis son arrivée en Suisse en avril 2005. Le 9 avril 2009, le juge civil a été amené à ordonner, sur requête de B. , des mesures préprovisionnelles urgentes visant à interdire à l'intéressé de s'approcher du domicile de son épouse et de prendre contact avec cette dernière. Le 15 mai 2009, par mesures protectrices de l'union conjugale, les époux ont été autorisés à vivre séparés pour une durée indéterminée. Le mariage des intéressés a été finalement dissous par le divorce prononcé le 4 mars 2010.

    3. Le Tribunal estime que ces éléments sont de nature à fonder la présomption de fait selon laquelle la communauté conjugale du recourant avec son épouse n'était pas stable, ni au moment de la signature de la déclaration commune, ni au moment de l'octroi de la naturalisation facilitée. En particulier, le laps de temps entre cette déclaration (13 septembre 2007), l'octroi de la naturalisation facilitée (6 février 2008) et la séparation effective des époux (décembre 2008), soit quinze mois environ, tend à confirmer que le couple n'envisageait déjà plus une vie future partagée lors de la signature de la déclaration concernant la communauté conjugale.

    4. Le recourant ne remet d'ailleurs pas formellement en doute ladite présomption, mais soutient qu'il s'est marié par amour dans l'espoir de fonder une union durable et non pas dans le but de lui permettre d'obtenir la nationalité suisse. Conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral, il s'agit donc uniquement de déterminer si l'intéressé est parvenu

      à renverser cette présomption en rendant vraisemblable soit la survenance d'un événement extraordinaire susceptible d'expliquer une dégradation aussi rapide du lien conjugal, soit l'absence de conscience de la gravité des problèmes au moment de la signature de la déclaration commune (cf. ATF 135 II 161 consid. 3 cf. également l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_474/2009 du 21 décembre 2009 consid. 2.2.2).

    5. Aux fins d'étayer son affirmation sur la réalité de la communauté conjugale, le recourant s'est référé à une lettre que son ex­épouse a

      adressée à l'ODM le 1er février 2011. Dans cet écrit, B. a

      déclaré, entre autres, qu'il n'y avait pas eu de volonté de fraude de sa part ou de celle de son ex­mari, en exposant qu'au moment de la demande de naturalisation, les époux étaient mariés depuis bien plus longtemps que le délai légal minimal. De plus, elle a indique que les époux avaient espéré que la naturalisation allait permettre de mettre un terme à la précarité professionnelle de l'intéressé. De son côté, le recourant a réfuté avec vigueur avoir introduit sa demande de naturalisation sur la base de mensonges (cf. mémoire de recours, p. 1). Par ailleurs, il a observé que la lettre de son ex­épouse du 1er février 2011 était censée démontrer que les difficultés rencontrées par le couple depuis son retour en Suisse en avril 2005 n'étaient pas plus importantes que "les tensions habituelles" que peut connaître un couple, mixte de surcroît (cf. complément au recours du 6 avril 2011, p. 2).

    6. En préambule, le Tribunal constate que les déclarations des parties en présence relèvent de la sphère intime et sont donc particulièrement difficiles à élucider par les autorités. Néanmoins, force est de constater que le recourant n'a pas apporté d'élément déterminant et tangible de nature à renverser la présomption de fait que la naturalisation avait été obtenue frauduleusement. Si l'on peut certes concevoir que les époux aient pu connaître durant leur union de "bons moments" et qu'ils aient pu "s'aimer" (cf. courrier du 1er février 2011, p. 2), il n'apparaît en revanche point crédible que le recourant ait pu avoir la conviction que sa communauté matrimoniale était stable, effective et tournée vers l'avenir au moment de la déclaration écrite du 13 septembre 2007. En effet, plusieurs indices ressortant des pièces du dossier laissent à penser que la stabilité de l'union conjugale n'existait pas au moment de la signature de ladite déclaration. Ainsi, le Tribunal observe d'abord que la situation du couple s'est dégradée depuis son retour en Suisse en avril 2005, ce que le recourant a reconnu par ailleurs: "Je reconnais qu'en arrivant en Suisse, et devant les difficultés rencontrées, que ce soit dans ma recherche d'un emploi régulier ou dans la vie quotidienne, notre vie de

      couple s'en est ressentie" (cf. mémoire de recours, p. 1). Ainsi, cette dégradation des relations s'est traduite par le fait que l'intéressé a eu de la peine à s'intégrer professionnellement dans ce pays et que, surtout, son comportement a contraint la justice civile à prendre à son égard des mesures urgentes tendant à mettre fins aux menaces et au harcèlement exercés à l'encontre de son épouse et de sa belle­mère (cf. ch. 5 et 6 de la requête déposée le 9 avril 2009 par son épouse au sens de l'art. 28b CC et les mesures préprovisionnelles ordonnées le même jour par le juge civil). De plus, il appert des pièces du dossier de la procédure civile que l'intéressé a quitté le domicile conjugal durant plusieurs jours en décembre 2007 déjà (cf. p.­v. de la séance du 15 mai 2009 devant le Tribunal de Sion, p. 3), soit un à deux mois avant sa naturalisation. Le Tribunal note ensuite que l'intéressé, invité par l'ODM à déposer ses éventuelles déterminations au sujet des éléments ressortant du dossier civil et des pièces relevant de l'art. 27 al. 1 PA (cf. courrier du 22 décembre 2010), s'est simplement contenté de transmettre le 6 janvier 2011 une copie de son courrier du 22 septembre 2009, sans avancer le moindre motif concret, postérieur à sa naturalisation facilitée, qui aurait pu expliquer la dissolution de l'union conjugale sur laquelle il avait fondé sa requête de naturalisation facilitée. Dans ce contexte, l'allégation selon laquelle l'absence d'une descendance commune constituait un autre facteur de discorde au sein du couple (cf. mémoire de recours, p. 2) ne saurait être retenue, étant donné que ni le recourant ni son ex­épouse n'ont fait état d'un tel motif devant l'autorité de première instance.

    7. En conclusion, le Tribunal de céans est d'avis qu'il y a lieu de s'en tenir à la présomption de fait, basée essentiellement sur les événements relatés ci­dessus, que la naturalisation facilitée a été obtenue de façon frauduleuse. Partant, si tant est que l'intéressé et son épouse aient voulu fonder une communauté conjugale effective, au sens de l'art. 28 LN, l'autorité inférieure pouvait considérer, à bon droit, que cette volonté n'existait plus lors de la signature de la déclaration commune ou, a fortiori, au moment de l'octroi de la nationalité suisse. Or, celle­ci n'aurait pas été accordée au recourant si les autorités avaient eu connaissance de ces éléments.

7.

Il importe par surcroît de souligner que le fait qu'A. se sente bien intégré en Suisse, qu'il y ait respecté les us et coutumes tout au long de son séjour et qu'il n'y ait jamais commis de délit majeur (cf. mémoire de recours, p. 2), est sans pertinence pour déterminer s'il y a eu obtention frauduleuse de la naturalisation facilitée au sens de l'art. 41 LN, soit un

comportement déloyal et trompeur (cf. l'arrêt du Tribunal fédéral 5A.6/2003 du 24 juillet 2003 consid. 3.2). Il en va d'ailleurs de même de l'argument tiré de la situation professionnelle actuelle du recourant (cf. mémoire de recours, p. 2), quand bien même il occupe désormais un poste d'agent de sécurité supposé requérir la nationalité suisse (cf. courrier de B. du 1er février 2011, p. 2).

8.

Il ressort de ce qui précède que, par sa décision du 25 janvier 2011, l'ODM n'a ni violé le droit fédéral ni constaté des faits pertinents de manière inexacte ou incomplète en outre, cette décision n'est pas inopportune (cf. art. 49 PA).

En conséquence, le recours doit être rejeté.

Vu l'issue de la cause, il y a lieu de mettre les frais de procédure à la charge du recourant (cf. art. 63 al. 1 PA en relation avec les art. 1 à 3 du règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral [FITAF, RS 173.320.2]).

(dispositif page suivante)

Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :

1.

Le recours est rejeté.

2.

Les frais de procédure, d'un montant de 1000 francs, sont mis à la charge du recourant. Ils sont compensés par l'avance versée le 14 mars 2011.

3.

Le présent arrêt est adressé :

  • au recourant (Acte judiciaire)

  • à l'autorité inférieure, dossier ODM en retour

  • au Service de la population et des migrations du canton du Valais (en copie), pour information et dossier cantonal en retour.

Le président du collège : Le greffier :

Blaise Vuille Fabien Cugni

Indication des voies de droit :

Le présent arrêt peut être attaqué devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par la voie du recours en matière de droit public, dans les trente jours qui suivent la notification (art. 82 ss, 90 ss et 100 de la loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral [LTF, RS 173.110]). Le mémoire doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signé. L'arrêt attaqué et les moyens de preuve doivent être joints au mémoire, pour autant qu'ils soient en mains de la partie recourante (art. 42 LTF).

Expédition :

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