Instanz: | Bundesverwaltungsgericht |
Abteilung: | Abteilung I |
Dossiernummer: | A-2480/2017 |
Datum: | 11.03.2019 |
Leitsatz/Stichwort: | Redevance sur le trafic des poids lourds |
Schlagwörter : | Véhicule; Consid; Redevance; Fiscal; Fiscale; Décision; Assujetti; assujetti; Assujettie; Période; L’assujetti; Courant; Recourant; été; L’assujettie; Véhicules; Recourante; Autorité; Solidaire; Effet; autorité; Fédéral; être; Responsable; Solidairement; Inférieure; Circulation; Détenteur |
Rechtsnorm: | Art. 11 OR ; Art. 15 OR ; Art. 22 OR ; Art. 23 OR ; Art. 24 OR ; Art. 25 OR ; Art. 36 OR ; Art. 36a OR ; |
Referenz BGE: | - |
Kommentar zugewiesen: | Spühler, Basler Kommentar zur ZPO, Art. 321 ZPO ; Art. 311 ZPO, 2017 |
Weitere Kommentare: | - |
B u n d e s v e r w a l t u n g s g e r i c h t
T r i b u n a l a d m i n i s t r a t i f f é d é r a l
T r i b u n a l e a m m i n i s t r a t i v o f e d e r a l e T r i b u n a l a d m i n i s t r a t i v f e d e r a l
Cour I
A-2480/2017
Composition Raphaël Gani (président du collège), Daniel Riedo, Jürg Steiger, juges, Alice Fadda, greffière.
Parties A. ,
recourante,
contre
3003 Bern, autorité inférieure.
Objet RPLP; responsabilité solidaire.
La société A. SA, sise à [ ] fut inscrite au Registre du commerce le 3 juillet 2008. Son administrateur unique est B. domicilié [ ]. Elle a pour but, entre autres, le consulting, la planification, le financement, la gestion de projet et la réalisation d'installations de toutes sortes ; la recherche et le placement de sportifs de haut niveau en Suisse et à l'étranger ; la gestion et le management des intérêts de sportifs de haut niveau en Suisse et à l'étranger ; l'acquisition et la vente de droits d'images dans le domaine du sport ; l'organisation et le développement d'événements sportifs.
La société C. SA (en liquidation) (ci-après : l’assujettie), [ ], fut inscrite au registre du commerce le 7 juin 2005. Son administrateur unique est également B. domicilié à [ ]. Elle a pour but, entre autres, le transport, l'affrètement, la logistique, le stockage et la manutention de toutes marchandises ; l'achat, la vente et la location de tous biens mobiliers ; la gestion de tous biens mobilier ou immobilier et les prestations de services y relatives. Par décision du Tribunal [régional] du 15 mai 2017, la société a été déclarée en faillite avec effet à partir du 15 mai 2017, à 11h30.
Le 18 mars 2015, A.
SA acquit dans la faillite de la société
D. Sà rl, société suisse active dans le transport de marchandises, un lot de matériel comprenant, entre autres, des camions et des remorques. Le 26 mars 2015, A. SA demanda au Service des automobiles [nom complet] du canton [ ] (ci-après : Service cantonal des automobiles), l’apposition de la remarque « changement de détenteur interdit » (code 178) dans le permis de circulation des véhicules (tracteurs et semiremorques) immatriculés au nom de l’assujettie (Annexes 5a à 5f à la réponse). Le 2 juin 2015, A. SA et l’assujettie conclurent un contrat en vertu duquel la première cédait la jouissance et l’usage d’un lot comprenant notamment des camions, remorques et semi-remorques en contrepartie d’une redevance de la seconde. Dit contrat portait sur la période allant du 1er mars 2015 au 28 février 2017 (Annexe 4 au recours).
Selon ses dires, A. SA mit un terme au contrat de location et procéda, le 8 novembre 2016, à la vente de l’ensemble du matériel loué à une personne dont le nom n’a pas été dévoilé devant la Cour de céans (Annexe 5 au recours ; bref extrait du contrat de vente).
Les 25 et 30 novembre 2016 ainsi que le 3 janvier 2017, la Direction générale des douanes (ci-après : « DGD » ou « autorité inférieure ») établit les décisions de taxation relatives à la redevance sur le trafic des poids lourds (ci-après : « RPLP » ou « redevance ») pour les périodes fiscales d’août à octobre 2016 pour les véhicules immatriculés au nom de l’assujettie (Annexes 6 à 8 au recours). Après échéance du délai de paiement de la RPLP, des rappels de paiement furent envoyés à l’assujettie (Annexes 2a à 2d à la réponse).
Les factures restant toujours impayées, la DGD demanda, par plis des 23 janvier et 27 février 2017, au Service cantonal des automobiles de retirer les permis de circulation ainsi que les plaques de contrôle des véhicules immatriculés au nom de l’assujettie (Annexes 3a à 3c à la réponse). Les 15 février et 4 avril 2017, l’autorité inférieure introduisit une procédure de poursuite à l’encontre de l’assujettie (Annexes 4a et 4b à la réponse).
Par courrier du 21 février 2017, l’autorité inférieure informa A. SA qu’elle la considérait être propriétaire des véhicules immatriculées au nom de l’assujettie et par conséquent solidairement responsable du paiement de la redevance ainsi que des intérêts et émoluments éventuels (Annexes 5a à 5f et 6 à la réponse). La présomption de la DGD se basait sur des formulaires transmis par le Service cantonal des automobiles à l’autorité inférieure. Ces formulaires, établis à la demande de A. SA, avec l’accord de l’assujettie, requéraient l’inscription de l’interdiction du changement de détenteur du véhicule (chiffre 178) dans les permis de circulation des véhicules immatriculés au nom de l’assujettie (cf. consid. B ci-avant). Un délai au 6 mars 2017 fut accordé à A. SA afin qu’elle puisse faire parvenir ses remarques par écrit à la DGD. Ce courrier resta sans suite.
Par décision du 14 mars 2017, l’autorité inférieure rendit à l’encontre de A. SA, une décision de responsabilité solidaire concernant les véhicules immatriculés au nom de l’assujettie et relative aux périodes fiscales d’août à octobre 2016 (Annexe 1 au recours). Cette décision prévoit en substance que A. SA est solidairement responsable du paiement de la redevance due par l’assujettie, pour les véhicules dont elle est propriétaire. La redevance RPLP et l’intérêt de retard dus pour la période fiscale allant d’août à octobre 2016 s’élevaient à Fr. 89'645.15 au jour de la décision.
Par recours du 21 avril 2017, A. SA (ci-après : la recourante) sollicite principalement, sous suite de frais et dépens, l'annulation de la décision du 14 mars 2017 et la constation par la Cour de céans qu’elle n’est pas solidairement responsable du paiement de la RPLP due par l’assujettie pour les périodes fiscales faisant l’objet de la décision entreprise. Elle conclut subsidiairement à l’annulation de la décision dont est recours ici et au renvoi de la cause à l’autorité inférieure pour nouvelle décision. Cette dernière devant constater que la recourante n’est pas solidairement responsable du paiement de la RPLP due par l’assujettie pour les périodes fiscales faisant l’objet de la décision entreprise. L'autorité inférieure a conclu au rejet du recours par réponse du 26 juin 2017.
Pour autant que besoin, les autres faits et les arguments des parties seront repris dans les considérants qui suivent.
Sous réserve des exceptions - non réalisées en l’espèce - prévues à l'art. 32 de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF, RS 173.32), celui-ci, en vertu de l'art. 31 de cette loi, connaît des recours contre les décisions au sens de l'art. 5 de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative (PA, RS 172.021) prises par les autorités mentionnées à l'art. 33 LTAF. En particulier, les décisions rendues par la DGD en matière de RPLP qui ne sont pas des décisions de taxation rendues en première instance peuvent être attaquées directement devant le Tribunal administratif fédéral (art. 33 let. d LTAF en relation avec art. 23 al. 4 de la loi fédérale du 19 décembre 1997 concernant une redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations [LRPL, RS 641.81] ; cf. également arrêt du TAF A-6446/2016 du 23 mai 2018 consid. 1.1 et la jurisprudence citée). La procédure est régie par la PA, pour autant que la LTAF n'en dispose pas autrement (cf. art. 37 LTAF).
Selon l'art. 48 al. 1 PA, a qualité pour former recours celui qui a pris part à la procédure devant l'autorité inférieure ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a), est spécialement atteint par la décision attaquée (let. b) et a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (let. c) (ATF 141 II 50 consid. 2.1, 137 II 30 consid. 2.2.3 ; ATAF 2007/20
consid. 2.4, arrêts du TAF A-7117/2015 du 21 juin 2016 consid. 3.2,
A-5411/2012 du 5 mai 2015 consid. 1.3.1, A-648/2014 du 16 janvier 2015
consid. 1.3.1 s.).
En l’occurrence, les décisions de taxation de première instance ont été rendues à l’encontre de l’assujettie et non de la recourante, qui n’en est donc pas la destinataire. Cela étant, elle a bien pris part à la procédure devant l’autorité inférieure, puisque, sur la base des données transmises par le Service cantonal des automobiles, l’autorité inférieure la considère comme la propriétaire de l’intégralité des véhicules immatriculés au nom l’assujettie (tracteurs et semi-remorques). Ainsi, et en cette qualité, la recourante est considérée comme solidairement responsable du paiement de la redevance ainsi que des intérêts et émoluments éventuels en raison du fait que le détenteur du véhicule a été mis en demeure sans effet (cf. art. 36 al. 1bis de l'ordonnance du 6 mars 2000 concernant une redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations [Ordonnance relative à une redevance sur le trafic des poids lourds, ORPL, RS 641.811]). En conséquence, la DGD lui a adressé une décision de responsabilité solidaire le 14 mars 2017 contre laquelle il est fait recours ici.
Dès lors, la recourante, en tant que destinataire de la décision attaquée, a qualité pour recourir (art. 48 al. 1 PA). Présenté dans le délai (art. 50 al. 1 PA) et les formes (art. 52 al. 1 PA) prescrits par la loi, le recours est recevable quant à la forme. Il convient donc d'entrer en matière sur ses mérites.
L'autorité compétente sur le fond a qualité pour constater par une décision, d'office ou sur demande, l'existence, l'inexistence ou l'étendue de droits ou d'obligations fondés sur le droit public (art. 25 al. 1 PA; art. 5 al. 1 let. b PA). Elle donne suite à une demande en constatation si le requérant prouve qu'il a un intérêt digne de protection (art. 25 al. 2 PA).
Une décision en constatation vise à clarifier de manière obligatoire l'étendue de droits et obligations (ATF 129 III 503 consid. 3.5). Ainsi, l'administré, une fois la décision constatatoire rendue, doit pouvoir se comporter en étant assuré des conséquences juridiques de ses actes (THIERRY TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, n° 819 p. 282; PIERRE MOOR/ETIENNE POLTIER, Droit administratif, vol. II : Les actes administratifs et leur contrôle, 3ème éd., 2011, p. 186). La décision doit être claire et complète de sorte qu'il soit hautement vraisemblable que la situation juridique constatée ne se modifie plus. En effet, la constatation n'a un intérêt que si elle offre les mêmes garanties qu'une décision formatrice ou condamnatoire (arrêt du TAF A-6547/2017 du 12 décembre 2018 consid. 5.2, B-6017/2012 du 13 juin 2013 consid. 4.1.1). Une autorité compétente sur le fond est habilitée à rendre une décision constatatoire sans qu'une disposition légale ne le prévoie expressément. En principe, l'autorité compétente pour statuer en constatation est celle qui le serait pour rendre une
décision formatrice ou condamnatoire (arrêt du TAF B-6755/2013 du 11 août 2014 consid. 3.1.1).
Selon un principe général de procédure, les conclusions en constatation de droit ne sont recevables que lorsque des conclusions condamnatoires ou formatrices sont exclues. Sauf situations particulières, les conclusions constatatoires ont donc un caractère subsidiaire (cf. ATF 141 II 113 consid. 1.7 p. 123 et les références citées). En l’occurrence, dans la mesure où la recourante conclut, parallèlement à l’annulation de la décision entreprise, à ce qu'il soit constaté "qu’elle n’est pas solidairement responsable du paiement de la RPLP d’un montant total de CHF 89'214.90 ", elle formule une conclusion "préparatoire" puisque celle-ci porte sur une question qui doit être tranchée en vue d'examiner les conclusions condamnatoires. Une telle conclusion constatatoire, contrairement aux autres, est irrecevable (cf. arrêt 2C_32/2016 du 24 novembre 2016 consid. 2.1).
Le recourant peut invoquer la violation du droit fédéral, y compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation, la constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents ou l'inopportunité (art. 49 PA ; cf. ULRICH HÄFELIN/GEORG MÜLLER/FELIX UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 7e éd., 2016, n. marg. 1146 ss ; ANDRÉ MOSER/MICHAEL BEUSCH/LORENZ
KNEUBÜHLER, Prozessieren vor dem Bundesverwaltungsgericht, 2e éd.,
2013, n. marg. 2.149). Le tribunal de céans applique le droit d'office, sans être lié par les motifs invoqués (art. 62 al. 4 PA), ni par l'argumentation juridique développée dans la décision attaquée (cf. PIERRE MOOR/ETIENNE POLTIER, Droit administratif, vol. II, 3e éd., 2011, ch. 2.2.6.5).
Les procédures fiscales sont régies par la maxime inquisitoire, ce qui signifie que le Tribunal définit les faits d'office et librement. Les art. 12 ss PA ne sont toutefois pas applicables (art. 2 al. 1 PA), « dans la mesure où la procédure administrative normale n'est pas appropriée aux affaires fiscales et où le droit fiscal a instauré une procédure dérogatoire, mieux adaptée aux besoins » (Message du Conseil fédéral à l'appui d'un projet de loi sur la procédure administrative du 24 septembre 1965, in : FF 1965 II 1383 ss et 1397). Cela dit, il convient de rappeler que l'application de la PA, c'est- à -dire des principes constitutionnels qui y ont trouvé leur expression, est largement la règle en procédure de recours devant le Tribunal administratif fédéral (cf. notamment arrêts du Tribunal administratif fédéral A-5519/2012 du 31 mars 2014 consid. 1.3.3 et ref. cit.). Ainsi, la non-application des art. 12 ss PA ne signifie pas l'exclusion des mesures d'instruction qui y sont énumérées (concernant l'interprétation historique de l'art. 2 al. 1 PA, voir arrêts du Tribunal administratif fédéral A-1560/2007 du 20 octobre 2009
consid. 3.1 et A-1337/2007 du 21 septembre 2009 consid. 3.2; cf. également arrêts du Tribunal administratif fédéral A-5884/2012 du 27 mai 2013 consid. 3.2.1 et A-6977/2009 précité consid. 2.2; cf. consid. 2.1 ci-après).
La maxime inquisitoire doit en outre être relativisée par son corollaire, à savoir le devoir des parties de collaborer à l'établissement des faits, en vertu duquel celles-ci doivent notamment indiquer les moyens de preuve disponibles et motiver leur requête (art. 52 PA). En conséquence, l'autorité saisie se limite en principe aux griefs soulevés et n'examine les questions de droit non invoquées que dans la mesure où les arguments des parties ou le dossier l'y incitent (cf. ATF 135 I 91 consid. 2.1 ; ATAF 2014/24 consid. 2.2 ; arrêts du TAF A-5433/2015 du 27 mars 2017 consid. 1.3.2 et A-5183/2015 du 27 octobre 2015 consid. 1.2.2 ; ALFRED KÖLZ/ISABELLE
HÄNER/MARTIN BERTSCHI, Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des Bundes, 2013, ch. 1135 s.).
Selon l'art. 1 LRPL, la redevance doit assurer la couverture à long terme des coûts d'infrastructure et des coûts occasionnés à la collectivité par ce trafic, dans la mesure où celui-ci ne compense pas ces coûts par d'autres prestations ou redevances (al. 1) ; la redevance doit par ailleurs contribuer à améliorer les conditions-cadre du chemin de fer sur le marché des transports et à acheminer davantage de marchandises par le rail (al. 2). La redevance a pour objet l'utilisation de la voie publique par les poids lourds et les remorques en Suisse et à l'étranger pour le transport de marchandises et de voyageurs (cf. art. 2 et 3 LRPL). Conformément à l'art. 6 al. 1 et 3 LRPL, la redevance est calculée sur la base du poids total autorisé du véhicule et du kilométrage mais elle peut en outre être perçue en fonction des émissions produites ou de la consommation (cf. ATAF 2013/26 consid. 2.1 et arrêts du TAF A-6851/2015 du 1er novembre 2016 consid. 2.1, A-4961/2013 du 30 janvier 2014 consid. 3.1).
S’agissant des véhicules suisses, l'assujetti est le détenteur du véhicule. En revanche, en ce qui concerne les véhicules étrangers, le conducteur est également assujetti (cf. art. 5 al. 1 LRPL). Conformément à l’art. 5 al. 2 LRPL, le Conseil fédéral peut déclarer d'autres personnes solidairement responsables. Ce dernier a fait usage de cette compétence aux articles 36 et suivants l’ORPL. En effet, l’art. 36 al. 1bis ORPL prévoit que :
« Outre le détenteur, sont solidairement responsables de la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations et des intérêts et émoluments éventuels, sous réserve des art. 36a et 36b:
le propriétaire, le loueur ou le donneur de leasing d'un véhicule tracteur, lorsque le détenteur du véhicule est insolvable ou qu'il a été mis en demeure sans effet : compte tenu du poids total du véhicule tracteur pour les kilomètres parcourus avec ce dernier ;
le propriétaire, le loueur ou le donneur de leasing d'une remorque, lorsque le détenteur du véhicule est insolvable ou qu'il a été mis en demeure sans effet : compte tenu du poids total de la remorque pour les kilomètres parcourus avec cette dernière.».
D’après la jurisprudence du Tribunal fédéral, cette extension de responsabilité, réglementée au niveau de l'ordonnance, a été jugée conforme à la loi et la constitution, en particulier au principe de la légalité (voir arrêt du TF 2C_641/2007 du 25 avril 2008 consid. 3.3 ; ATAF 2013/26 consid. 2,2 ; arrêts du TAF A-6851/2015 du 1er novembre 2016 consid. 2.2.1, A-4961/2013 du 30 janvier 2014 consid. 3.2).
Afin de limiter le risque de responsabilité solidaire, les art. 36a et 36b de cette même ordonnance mettent à disposition de la personne solidairement responsable au sens de l'art. 36 al. 1bis ORPL une procédure en deux étapes.
« Art. 36a Demande à l'AFD
La personne solidairement responsable au sens de l'art. 36, al. 1bis, qui désire remettre un véhicule tracteur ou une remorque (véhicule) à un tiers pour utilisation peut, dans le cadre de la conclusion du contrat, demander à l'AFD si le tiers (partie contractante), ou le détenteur du véhicule s'il ne s'agit pas de la même personne, est insolvable ou a été mis en demeure sans effet.
La demande doit comporter :
l'identité et l'adresse de la partie contractante ainsi que, le cas échéant, du détenteur ;
les indications relatives au véhicule ; et
une déclaration écrite de la partie contractante et, le cas échéant, du détenteur autorisant l'AFD à donner les renseignements demandés.
Si la partie contractante ou, le cas échéant, le détenteur est insolvable ou a été mis en demeure sans effet, l'AFD, dans sa réponse, attire l'attention du requérant sur le fait que celui-ci, du fait de la conclusion du contrat et pour le véhicule concerné, devient solidairement responsable du paiement des redevances dues à partir de ce moment ainsi que des intérêts et émoluments éventuels.
Si l'AFD constate, après la mise en circulation du véhicule visé à l'art. 36a, al. 2, let. b, que le détenteur est insolvable ou a été mis en demeure sans effet et qu'elle envisage d'actionner la personne solidairement responsable au sens
de l'art. 36, al. 1bis, elle informe cette personne par écrit que celle-ci est solidairement responsable du paiement des redevances futures ainsi que des intérêts et émoluments éventuels concernant ce véhicule :
si elle ne résilie pas le contrat dans un délai de 60 jours ; ou
si toutes les redevances dues pour ce véhicule ainsi que les intérêts et émoluments éventuels ne sont pas payés intégralement dans les 60 jours ».
S’agissant de véhicules suisses, l'obligation fiscale naît le jour de l'admission du véhicule à la circulation. Celle-ci s'éteint le jour où les plaques d'immatriculation sont restituées ou le permis de circulation annulé. En revanche, l'obligation fiscale relative aux véhicules étrangers naît lors de leur entrée sur le territoire suisse et s'éteint au plus tard lors de leur sortie. La créance fiscale devient exigible au plus tard au moment de la sortie de Suisse (cf. art 12 LRPL). Ainsi et en d’autres termes, l'obligation fiscale dure aussi longtemps que les véhicules suisses sont admis à la circulation et parcourent des routes soumises à la redevance. Le véhicule étranger est assujetti tant qu'il emprunte des routes ouvertes au trafic public soumises à la redevance (Message du Conseil fédéral du 11 septembre 1996 relatif à une loi fédérale concernant la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations, FF 1996 V 505, spéc. 532).
Concernant la période fiscale, l’art. 13 LRPL prévoit que la redevance est perçue au moins une fois par année. Cet article est complété par l’art. 24 ORPL qui précise que :
La période fiscale est le mois civil.
Si un véhicule est mis en circulation dans le courant du mois, la période fiscale se termine à la fin du mois.
Lors du retrait du véhicule de la circulation, la période fiscale se termine le jour de l'annulation du permis de circulation.
L'assujetti est tenu de collaborer à l'établissement du kilométrage. (art. 11 LRPL, art. 21 ORPL). La personne assujettie à la redevance doit fournir à l'AFD les indications nécessaires au calcul de la redevance dans les vingt jours suivant l'expiration de la période fiscale (art. 22 al. 1 ORPL). La période fiscale est le mois civil (art. 24 al. 1 ORPL) et la redevance est perçue au moins une fois par année (art. 13 LRPL). La redevance est déterminée sur la base de la déclaration électronique ou écrite remise par la personne assujettie à la redevance (art. 23 al. 1 ORPL) (cf. arrêts du TAF A-3274/2017 du 14 février 2018 consid. 3.6 et A-2644/2015 du 8 janvier
2018 consid. 3.8).
Concernant le recouvrement de la redevance, l’art. 25 ORPL prévoit que :
L'AFD envoie une décision de taxation sur papier ou par voie électronique à la personne assujettie à la redevance.
La redevance devient exigible 60 jours après la fin de la période fiscale.
Le montant de redevance fixé doit être payé dans un délai de 30 jours à compter de l'établissement de la décision de taxation. Si ce délai n'est pas observé, le montant impayé est passible d'intérêts.
Le DFF fixe les taux d'intérêt.
Il détermine en outre :
les cas dans lesquels aucun intérêt moratoire n'est perçu ;
le montant maximum en-deçà duquel les intérêts moratoires et rémunératoires minimes ne sont ni perçus ni dus.
Ainsi, en raison système de perception de la redevance prévu par l’ORPL, il existe un décalage entre la prestation kilométrique établie (périodes fiscales) et l’envoi des factures pour lesdites périodes fiscales.
En l’espèce, il s’agit de déterminer si c’est à bon droit que l’autorité inférieure a considéré que la recourante était solidairement responsable du paiement de la RPLP due par l’assujettie pour les périodes fiscales allant d’août à octobre 2016. A cet égard, la recourante estime que dans la mesure où elle n’était plus propriétaire des véhicules au moment de de l’envoi des décisions de taxation à l’assujettie, respectivement de la mise en demeure de cette dernière, elle ne saurait être tenue solidairement responsable du paiement de la redevance (cf. consid. B et C ci-avant).
Certes, le dossier révèle que la recourante aurait, en date du 8 novembre 2016, conclu un contrat portant, entre-autres, sur la vente de véhicules tracteurs, de remorques et de semi-remorques avec un tiers (acheteur) dont l’identité a été caviardée. L’extrait du contrat fourni par la recourante permet également de constater que par cet acte, l’acheteur aurait conclu avec une personne dont le nom ou raison sociale a également été caviardé un contrat de cession de clientèle aux termes duquel, cette personne cèderait à l’acheteur sa clientèle et lui transfèrerait ses collaborateurs. Le contrat de cession de clientèle aurait pris effet au 1er janvier 2017. Certes encore, l’intégralité des décisions de taxation relatives à la RPLP dont il est question ici ainsi que, les mises en demeure relatives à l’absence de paiement de dite RPLP ont toutes été adressées à l’assujettie postérieurement au 8 novembre 2016. A cet égard, il convient d’observer ce qui suit.
Premièrement, sur la base de l’extrait, extrêmement sommaire, du contrat produit par la recourante, il est impossible de déterminer l’identité des parties au contrat de cession de clientèle. Ensuite, bien qu’il apparaisse que
le contrat de cession de clientèle ait pris effet au 1er janvier 2017, il est impossible de déterminer la date à laquelle le contrat de vente des véhicules a pris effet. Toutefois, le Tribunal de céans estime qu’au vu des considérations qui suivront et du fait que les périodes fiscales litigieuses sont antérieures à cette date, il n'y a pas lieu d’investiguer plus avant la question de savoir si, au 8 novembre 2016, la recourante était encore propriétaire des véhicules lourds dont il est question ici. Cette question peut ainsi souffrir de demeurer ouverte.
Sont en effet ici litigieuses les factures RPLP reprises sur la décision querellée concernant la prestation kilométrique établie par les véhicules immatriculés au nom de l’assujettie durant les périodes fiscales allant du 1er août au 31 octobre 2016. A cet égard, il convient d’observer ce qui suit.
Premièrement, la Cour rappelle ici que la période fiscale est le mois civil et que, lors du retrait du véhicule de la circulation, la période fiscale se termine le jour de l’annulation du permis de circulation (cf. art. 24 ORPL et consid. 2.4 et 2.5 ci-avant). Ensuite, aux termes de l’art. 25 al. 2 ORPL, la redevance devient exigible 60 jours après la fin de la période fiscale (cf. art. 25 al. 2 ORPL et consid. 2.7 ci-avant). Ainsi, c’est à juste titre que l’autorité inférieure rappelle dans son mémoire de réponse du 26 juin 2017, qu’il existe, en raison du système de perception prévu par l’ORPL, un décalage temporel entre la période fiscale et l’envoi des décisions de taxation (et donc des factures d’impôt) relatives à dite période fiscale. Il ne saurait en effet en être autrement, étant donné que la redevance est déterminée au moyen d’un dispositif de mesure électronique (cf. art. 15 al. 1 ORPL) et qu’il appartient à la personne assujettie à la redevance de fournir à l’AFD les indications nécessaires au calcul de la redevance dans les 20 jours qui suivent l’expiration de la période fiscale (cf. art. 22 al. 1 ORPL et consid. 2.6 ci-avant).
Le Tribunal rappellera encore qu’en vertu de l’art. 5 LRPL, l’assujetti est, en principe, le détenteur du véhicule. Cela dit, l’art. 36 al. 1bis prévoit que lorsque le détenteur du véhicule est insolvable ou qu'il a été mis en demeure sans effet, le propriétaire, le loueur ou le donneur de leasing d'un véhicule tracteur et/ou d'une remorque est, sous réserve des art. 36a et 36b ORPL, solidairement responsable de la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations et des intérêts et émoluments éventuels, compte tenu du poids total du véhicule tracteur et/ou de la remorque pour les kilomètres parcourus avec ce dernier, respectivement par cette dernière (cf. consid. 2.2 ci-avant). S’agissant de la réserve relative aux articles 36a
et b ORPL (cf. consid. 2.3 ci-avant), il ressort du dossier qu’aucune demande n’a été faite en ce sens à la DGD lors de la conclusion du contrat de location entre l’assujettie et la recourante.
En l’occurrence, il ressort clairement du dossier que l’autorité inférieure a établi, entre le 25 novembre 2016 et le 3 janvier 2017, les factures RPLP relatives aux périodes fiscales allant du 1er août au 31 octobre 2016 pour les véhicules immatriculés au nom de l’assujettie. Après échéance desdites factures, un rappel de paiement a été adressé à cette dernière. Les factures étant restées impayées, la DGD demanda au Service cantonal des automobiles de retirer les permis de circulation et les plaques de contrôle des véhicules dont il est question ici. Elle introduisit en parallèle une procédure de poursuite contre l’assujettie. Force est donc ici de constater que, dans la présente cause, le détenteur des véhicules a bel et bien été mis en demeure sans effet.
L’argument de la recourante selon lequel la solidarité du propriétaire du véhicule n’apparaîtrait qu’au moment où le détenteur du véhicule, débiteur principal de la redevance, devient insolvable ne trouve par ailleurs aucun ancrage dans le texte légal. La qualité de débiteur solidaire naît en effet en même que celle du débiteur principal (cf. supra consid. 2.2) et ne saurait donc varier en fonction de la solvabilité de celui-ci. Au final, il ne saurait donc être admis, comme l’estime la recourante, que l’art. 36 al. 1bis ORPL concerne uniquement les personnes étant propriétaires, loueurs ou donneurs de leasing d’un véhicule tracteur ou d’une remorque « au moment où le détenteur » dudit véhicule ou de dite remorque apparaît être insolvable ou est mis en demeure sans effet.
Le dossier révèle également que durant les périodes fiscales faisant l’objet de la présente procédure, la recourante était propriétaire des véhicules immatriculés au nom de l’assujettie. Il sera rappelé ici que, s’agissant de véhicules suisses, l'obligation fiscale naît le jour de l'admission du véhicule à la circulation et que celle-ci s'éteint le jour où les plaques d'immatriculation sont restituées ou le permis de circulation annulé (cf. consid. 2.4 ci-avant). Or, selon les données transmises par le Service cantonal des automobiles, les véhicules immatriculés au nom de l’assujettie ont été mis hors circulation entre le 2 et le 9 janvier 2017 (cf. Annexe 13 à la réponse).
Contrairement à ce que la recourante semble penser, ce n’est pas tant la date de facturation de la RPLP que la période fiscale durant laquelle une personne était propriétaire, loueur ou donneur de leasing d'un véhicule
tracteur et/ou d'une remorque qui est déterminant ici. La recourante confond en effet la naissance de la créance fiscale et son exigibilité. La créance d'impôt naît sitôt que les faits générateurs prévus par la loi sont réalisés. La créance fiscale prend naissance ex lege, sans aucune autre intervention extérieure. La taxation n'a aucun effet constitutif, elle n'est pas une condition de l'existence de la créance d'impôt (ATF 107 Ib 376 consid. 3 p. 378 et les références citées). L'existence et le contenu de la créance fiscale sont fixés par la loi, raison pour laquelle dite créance est en principe irrévocable : dès l'instant où une créance fiscale est née, elle ne peut être réduite à néant par une opération destinée à effacer les faits générateurs lui ayant donné naissance (arrêt du TF 2C_692/2013 du 24 mars 2014 consid. 4.2 in Archives 82 740 et les références citées). Par conséquent, la fin de l’assujettissement à la RPLP, soit (cf. supra consid. 2.4.) le jour où les plaques d'immatriculation sont restituées ou le permis de circulation annulé, ne saurait éteindre des créances fiscales nées antérieurement, quand bien même elles n’auraient pas encore été constatées par une décision administrative.
Il s’ensuit donc que c’est à juste titre que l’autorité inférieure considère, dans la décision querellée, que la recourante doit être tenue solidairement responsable du paiement de la redevance facturée pour la prestation kilométrique effectuée durant la période où elle était propriétaire et loueur des véhicules immatriculés au nom de l’assujettie.
Les considérants qui précèdent conduisent le Tribunal administratif fédéral à rejeter le recours, dans la mesure de sa recevabilité. Vu l'issue de la cause, les frais de procédure, par Fr. 3’300.--, sont mis à la charge de la recourante, en application de l’art. 63 al. 1 PA et des art. 1 ss du Règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral (FITAF, RS 173.320.2). L’autorité de recours impute, dans le dispositif, l’avance de frais déjà versée par la recourante, d’un montant équivalent. Une indemnité à titre de dépens n’est allouée ni au recourant (art. 64 al. 1 PA a contrario, respectivement art. 7 al. 1 FITAF a contrario), ni à l’autorité inférieure (art. 7 al. 3 FITAF).
Le recours est rejeté, pour autant que recevable.
Les frais de procédure, d'un montant de Fr. 3’300.--, sont mis à la charge de la recourante. Ce montant est compensé par l'avance de frais déjà versée
Il n'est pas alloué de dépens.
Le présent arrêt est adressé :
à la recourante (Acte judiciaire)
à l'autorité inférieure (n° de [ ] ; Acte judiciaire )
Le président du collège : La greffière :
Raphaël Gani Alice Fadda
La présente décision peut être attaquée devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par la voie du recours en matière de droit public, dans les trente jours qui suivent la notification (art. 82 ss, 90 ss et 100 LTF). Le mémoire doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signé. La décision attaquée et les moyens de preuve doivent être joints au mémoire, pour autant qu'ils soient en mains de la partie recourante (art. 42 LTF).
Expédition :
Bitte beachten Sie, dass keinen Anspruch auf Aktualität/Richtigkeit/Formatierung und/oder Vollständigkeit besteht und somit jegliche Gewährleistung entfällt. Die Original-Entscheide können Sie unter dem jeweiligen Gericht bestellen oder entnehmen.
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